Premier Chapitre

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- Nous ne lui donnons plus qu'un an minimum voire sept ans maximum, déclara le docteur assis à son bureau en face des parents de Sakura. Je suis désolé.

La femme éclata en sanglots contre l'épaule de son époux. Ce dernier gardait son sang-froid malgré les tremblements de ses mains. Il passa un bras autour de l'épaule de son épouse.

- Et... vous êtes bien sûr que cette maladie est complètement inconnue ?

Le médecin acquiesça les mains liées sur la table avec le plus grand des sérieux.

- Mais alors docteur, comment pouvez-vous être sûr que sa vie soit aussi écourtée si vous ignorez sa pathologie ?

La mère leva le visage intriguée en saisissant l'incompréhension et le raisonnement de son mari.

- Monsieur Sato, cela fera bientôt quarante mois que nous la surveillons. Malgré tous les meilleurs soins que nous lui avons procuré, il n'y a eu aucune amélioration. Son état n'a pas cessé de s'aggraver. Elle est de plus en plus faible. La seule chose qui semble la rendre un peu plus forte est une alimentation saine et, je vous le conseille fortement si vous souhaitez la conserver, déménagez à la campagne. Le contact avec la nature devrait l'apaiser et rendre la vie plus douce pour elle mais également pour vous.

- Ah ! Mais docteur ! Il n'y a pas d'aussi bon Centres Hospitalier... se préoccupa la femme déjà secouée par le diagnostic final.

- Je vous l'ai dit. Nos soins n'ont aucun effet sur elle. Alors que vous restiez où partiez, cela ne changera rien à sa situation, croyez-moi.








***

Sous le ciel couvert, une voiture déjà bien âgée traversait rapidement et maladroitement les chemins de terre. Comparée à sa vitesse, celle du facteur était semblable à celle d'un escargot. Le véhicule arriva au bout du sommet où se trouvait l'entrée d'un petit village montagneux.

L'homme au volant fit un dérapage puis appuya sans prudence sur le frein. Il sortit avec un grand sourire de la voiture puis se dirigea vers le commerce d'un fleuriste. Il entra dans le bâtiment joliment décoré par des pots de fleurs déposés ici et des bouquets disposés là. Il s'enfonça dans le magasin en saluant brièvement le marchand puis fait irruption dans une modeste serre.

Une jeune fille de la vingtaine y était installée, assise sur un muret. Elle composait un ikebana de ses mains délicates et tremblantes. Son teint pâle était terne. Additionné à ces sombres et imposantes cernes, son visage dévoilait en grande partie son état de santé globale.

Cette dernière sursauta en étant interpellée par l'homme bruyant.

- Oh non ! Je t'ai fait peur, Sakura ?

La jeune demoiselle soupira doucement la main sur le cœur pour l'apaiser. Puis elle adressa à son interlocuteur un léger sourire en acquiesçant doucement.

- Mince ! Excuse-moi ! s'inquiéta -t-il en s'accroupissant devant elle une lettre entre les mains. Je... euh, je voulais te donner cette lettre. Elle est de tes parents, ma grande.

Sakura se pencha pour saisir de ses deux mains l'enveloppe blanche qu'on lui tendait. Elle la fixa longuement dans le silence avant de se décider à l'ouvrir. Il y découvrit quelques mots d'attention de ses parents. Ils prétendaient s'inquiéter pour elle mais ne pourraient, une fois encore, venir la rendre visite car trop occupés par leur travail et ses petits frères.

Son regard neutre laissa place à de la frustration puis de la tristesse. Cela était injuste pour elle d'être contrainte à subir l'exil et l'indifférence de sa famille. Elle n'allait certes pas bien mais rien n'excusait leur manque de responsabilité et d'amour envers elle.

Le cœur serré, elle déchira la lettre en deux sous le regard navré de son grand hôte puis l'enfonça dans la grande poche de sa salopette.

- Hum. Je ne voulais pas te la donner mais je pensais que ce serait mal de te faire ça. Je suis...

La jeune patiente se leva en saisissant sa composition.

- Yamamoto-san, je vous remercie pour votre gentillesse. Vous êtes vraiment bon envers moi alors que ma famille...

Elle serra les lèvres en digérant ses dernières paroles à l'intérieur d'elle-même.

Je ne suis vraiment plus rien. C'est malheureux.

Yamamoto-san se leva puis s'empara de l'ikebana dans ses mains. Il vint ensuite ébouriffer les long cheveux sombres et emmêlés de son invitée amicalement.

- Mais dis-moi, tu apprends vraiment rapidement. Cet ikebana est vraiment très beau.

- ... M-merci... beau-coup.

Elle s'inclina puis s'excusa pour quitter la serre lentement.

***

"- Sakura, votre état n'est toujours pas stabilisé. Nous n'avons plus rien sous la main pour vous épargner. Sachez qu'il ne vous reste plus beaucoup d'années."

La jeune malade marchait en traînant des pieds, les pensées submergées par les souvenirs, en suivant le cours d'eau. Sa dernière discussion avec le docteur résonnait dans son esprit comme une douloureuse piqûre de rappel.

"- Que souhaitez-vous faire durant votre courte vie ?"

Elle se souvint de l'écouter et de le regarder sans rien dire ni penser. À ce moment-là, tout comme récemment, elle avait de plus en plus de mal à réfléchir.

"- Sakura. Je sais qu'il est difficile pour vous d'utiliser vos capacités cérébrales mais, il est important que vous continuez de vivre.

- ... Campagne... avait-elle finalement réussi à dire avec un sourire fragile."



Sakura s'arrêta en fixant ses pieds. Quelques larmes dégoulinaient de son visage pour s'écraser au sol. Elle s'effondra dans l'herbe le cœur déchiré par les sentiments malhonnêtes de ses parents. Elle essaya à plusieurs son visage vainement puis s'approcha du bord. Son reflet apparut plus esseulé que jamais, il reflétait son âme en détresse.

Elle se penchait un peu plus vers l'eau, le souffle saccadé par ses pleurs.

La Voie De Sakura Where stories live. Discover now