Chapitre 7 • Cad, simplement Cad

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Laérra

Une forêt verdoyante se dessine. Je peux sentir l'odeur boisée qui s'échappe des branchages, entendre le gazouillis des oiseaux heureux, distinguer les couleurs explosives des champignons, des fleurs, des fruits. Une brise fraîche fouette mon visage et balaie ma frange. Au loin, un troupeau de biches s'élance à travers les hautes herbes. Elles ondulent en rythme, apportant un parfum que j'adore. Où suis-je ? Les larges feuilles des chênes au-dessus de mon crâne forment des arabesques à mes pieds. Des parterres de fleurs bordent le sentier, des insectes se baladent d'un côté à l'autre. Pressant le pas lorsqu'un animal plus gros s'amène.  Je voudrais m'avancer vers un pommier dont les fruits ont l'air succulents, mais mes jambes restent ancrées dans le sol. Quand j'abaisse le regard, la beauté du paysage s'effrite comme une feuille morte, j'aperçois les racines des arbres s'étirer et s'enrouler autour de mes chevilles.

    Le ciel bleu se couvre, d'imposants nuages noirs cachent les rayons du soleil. Les branches s'affaissent tant qu'elles frôlent la terre. Les êtres vivants ont disparu, partis se terrer dans une cachette.

    Mon cœur bat plus fort alors que j'ai soudainement chaud. Je tente de m'en dégager, lève les genoux en vain. Je crie, mais le son résonne en écho. La plante grimpe à vive allure, m'enserre les membres, me broie jusqu'à l'os. Je me débats, tente d'arracher ce que je peux, mes mains ensanglantées. Quand la souche atteint mon ventre, je me tords de douleur, un hurlement franchit ma gorge à m'en briser les cordes vocales.

Mes yeux s'ouvrent si douloureusement que j'ai cru qu'ils allaient s'échapper de leurs orbites. Ma poitrine se soulève frénétiquement, je happe l'air la bouche grande ouverte. Le front couvert de sueur, je bats des paupières, découvrant le paysage que j'ai fini par connaître au fil des heures. Je suis toujours dans cette maudite forêt. Doemort est devenu ma maison depuis trop longtemps. Le temps paraît s'étirer dans cet endroit lugubre. Contrairement à mon rêve, il n'y a aucune fragrance d'herbe fraîche qui chatouille mes narines. Simplement celui de la boue, elle colle mes semelles et empeste mes vêtements. Les événements s'acheminent dans mon esprit, il s'est passé trop et trop peu de choses depuis mon réveil. Un picotement tiraille ma main, je me rappelle vaguement de ce qui s'est produit avant de m'endormir lorsqu'une touffe de poils noire apparaît devant mon visage. J'ai un mouvement de recul, ma tête bute contre le sol aussi dur que la roche. 

— Sale bête ! pesté-je en tentant de me redresser en position assise.

Une main ferme me plaque au sol, broyant mon épaule par la même occasion. Mon regard s'arrime à celui du Voleur. Il m'a retrouvée, j'ignore quand j'ai perdu connaissance, mais j'ai souvenir d'avoir peu marché.

— Tout doux, la Chasseuse.

Je tâte mes cuisses d'une main à la recherche d'un poignard. Quand je réalise qu'il maintient celle à la paume lésée. Est-ce qu'il essaye d'en finir avec moi de cette manière ? En m'arrachant le bras ? Puis ce sera une jambe ?

J'ai connu un criminel qui prenait plaisir à découper ses victimes. Un frisson d'horreur me traverse l'échine quand je repense à son arrestation. J'avais dormi auprès d'Alzim pendant des nuits. J'aimerais l'avoir à mes côtés et sentir son odeur poivrée, à la place de celle particulièrement boisée de l'homme en face de moi.

— Quand je t'aurai amené au Consul, commencé-je le souffle court.

L'Écureuil Noir ricane, il relâche la pression sur mon épaule et vient appliquer une crème sur ma paume. Il est, contrairement à ce que j'avais imaginé, délicat. Ça me brûle et quand j'essaye de fermer le poing, il m'en empêche. Le Voleur pourrait me broyer les doigts en forçant un peu plus. La douleur s'élance jusqu'au coude et je ne retiens pas mon gémissement plaintif. Je tente de me dégager de sa prise, mais il a de la poigne.

L'Orbe du CerfWhere stories live. Discover now