Stiles avança. Il était prêt à essayer de descendre ces foutus escaliers sans aide. Marcher, c'était une chose, mais descendre des escaliers était une tout autre histoire. En général, il n'osait pas s'en approcher sans le fantôme de Derek, mais aujourd'hui... Il fallait bien qu'il finisse par avancer, non ? Il ne pouvait pas laisser sa santé mentale dépendre de... D'une chose. Identifier Derek comme une hallucination de sa part commençait à sonner faux et le caractériser par un éventuel côté réel le terrifiait. Ses doigts démesurément resserrés sur la rambarde blanchirent à outrance. Il était prêt à essayer, oui, mais il avait peur. Ses jambes ne le tenaient pas toujours et il était possible qu'elles lui fassent défaut au moment où il avait le plus besoin d'elles. L'hyperactif regarda en bas. Cela lui paraissait si loin et si près à la fois ! Si l'étage n'était objectivement pas très haut, il avait tout de même le vertige tant l'exercice lui paraissait aussi indispensable que difficile. C'était sans doute surmontable, mais il aurait bien du mal. Paralysé par la peur de ne pas arriver à descendre ces escaliers correctement, l'adolescent resta planté là, les doigts serrés autour de la rambarde, à regarder le sol.

- Allez, t'es pas débile, tu peux y arriver, souffla-t-il pour s'encourager.

Il était le seul à pouvoir réellement s'aider, alors pourquoi pas le faire dès à présent ? Il était son propre allié, à condition de coopérer et de faire attention à son état, sa forme, son bien-être. Pour l'instant, il était surtout toxique envers lui-même. Un poison. Il fit un pas, se rapprocha du bord de la première marche. Il vit un loup accourir en couinant, puis commencer à monter les marches. Stiles plissa les yeux. De quelle couleur était le pelage d'Isaac, déjà ? Ou peut-être était-ce Liam... Il ne s'en souvenait plus et soupira de dépit. Il allait réellement falloir qu'il « révise » l'apparence de ses amis... Qu'il se remette à la page, qu'il reprenne toute son activité au manoir et qu'il arrête de glander comme un flemmard. En premier lieu, il devait déjà s'occuper de descendre ces escaliers sans se casser la figure. Commencer par là serait déjà pas mal.

Mais il restait figé. Ses jambes tremblaient déjà. Pas beaucoup, mais assez pour lui faire comprendre que s'il était stable pour l'instant, cela risquait de ne pas durer, surtout s'il essayait de descendre ces fichues marches.

Stiles hoqueta alors qu'un bras s'enroulait autour de lui, qu'une main se posait à plat au niveau de son ventre et l'éloignait de son défi composé de marches.

- M-mais non, mais... Ne put-il que balbutier.

C'est à ce moment précis que son dos rencontra la chaleur du torse de Derek, dont le souffle arrivait de manière involontaire à son oreille.

- Espèce d'idiot, dit-il simplement.

Stiles s'insurgea, mais le loup n'en eut cure et ne le laissa pas se dégager de cette semi-étreinte, qu'il ne serrait qu'à peine. L'hyperactif n'avait juste pas assez de forces pour se dégager. Et puis dans le fond, en avait-il réellement envie ? Il faisait chaud, contre ce corps, et cette main posée sur son ventre semblait lui faire mille et une promesses. Une proximité rassurante, un rêve, un fantasme vivant, un plaisir.

- Tu me fais chier... Râla-t-il faiblement.

Parce que ces mots n'étaient qu'à moitié pensés. Il n'aimait pas cette manière qu'avait cette sorte de Derek de l'obliger à se reposer et à prendre le temps de manger, mais... Merde, c'était rassurant d'avoir quelqu'un à qui parler, même s'il était de moins en moins certain du caractère hallucinatoire de la chose. Ce qui était encore plus agréable, c'était le contact. Il ne savait pas trop pourquoi ni comment, mais Derek le collait sans arrêt contre lui et que cela soit réel ou pas, il le sentait dans tous les cas. Si ça continuait, Stiles allait finir par être capable de sculpter les muscles du loup avec une précision stupéfiante. Sa mémoire était excellente – lorsqu'il était en forme.

- Tu es conscient que je sais quand tu mens ? Entendit-il.

Stiles ferma les yeux. Il n'eut pas envie de répondre. En tout cas, s'il s'agissait réellement de son imagination qui lui jouait des tours, la représentation qu'il faisait de Derek était fort fidèle, si l'on exceptait son comportement tendant vers une proximité surprenante. C'était ce paradoxe-là qui le faisait réellement tiquer. Derek était atrocement réel mais son attitude était complètement improbable, ce qui favorisait l'expression d'un fantasme de son cru sous la forme d'une hallucination. Stiles rouvrit doucement les yeux et soupira.

- Si tu veux descendre, tu dois prendre ton temps. On va y aller doucement, à ton rythme.

Pourquoi la voix de Derek lui paraissait-elle si douce ? Pourquoi il désira se l'imaginer, le matin, au réveil, après un moment intime ? Parce qu'il était taré et qu'il avait toujours eu un faible pour ce loup mal luné. Non, c'était bien plus que ça : il s'en était amouraché.

- Je voulais y arriver seul, soupira-t-il, abattu.

- T'en es pas encore capable.

La franchise à la Derek Hale, cette vérité dans sa forme la plus pure. Qu'importe ce que l'on voulait entendre, il restait honnête. Stiles soupira. Il en était conscient. Oui, il savait qu'il en était incapable, dans le fond. Pas parce qu'il était nul, simplement parce que son corps n'avait pas encore assez récupéré. Le jeune homme s'était littéralement épuisé à la tâche, négligé au point de s'évanouir à plusieurs reprises. Oui, à bien y réfléchir, il avait déconné. C'était uniquement de sa faute s'il se retrouvait dans cette situation. Mais il y avait pire : dans un sens, il s'était habitué à se traiter de cette manière, d'autant plus que cet oubli de soi avait débuté par un effacement de la part des autres, cette indifférence à sa personne qui avait manqué de le faire partir.

- Mais je peux t'aider. Tu peux le descendre cet escalier, avec moi.

Un frisson parcourut l'intégralité de l'adolescent, comme si cette dernière phrase comportait un double-sens. Mais ce n'était pas le cas, n'est-ce pas ?

Sur ces paroles prononcées avec une certaine profondeur, Derek fit glisser l'une de ses mains jusqu'à celle de Stiles, qu'il serra doucement. Presque instinctivement, il entrelaça leurs doigts, sous les yeux effarés de l'hyperactif. Vraiment, il allait falloir qu'il se mette d'accord avec lui-même sur ce qu'était Derek. Hallucination ou non, il le perturbait grandement et faisait battre son cœur différemment. Il baissa à nouveau les yeux vers leurs mains, et hocha doucement, presque timidement la tête.

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