[EN PAUSE] Douce Violence

Chapitre 19 : Zack

   — Ne te fous pas de moi.

   J'étais grillée.

   Avant même que j'eus le temps de faire le moindre geste, Zack s'avança vers moi de toute sa puissance, et d'un geste sec, il sortit le poignard qu'il gardait à sa ceinture. D'une main forte, il me repoussa en arrière et brandit son arme vers moi.

   Je me retrouvai le dos plaquée contre le mur. Mon champ de vision n'était désormais plus que constitué du visage de Zack, tout près du mien. Ma main avait eu le temps de se loger sur l'étui de mon revolver, mais pas de le sortir. La lame qui appuyait contre ma gorge me décourageait néanmoins de poursuivre mon geste.

   Malgré mon désavantage évident, je gardais la tête haute, les yeux rivés sur les siens.

   — Alors c'est toi qui veut tuer Dario ? demandai-je, le souffle court. C'est toi, le traître ?

   — Tu n'es pas en position de poser des questions.

   Aucune réponse orale de sa part n'était de toute façon nécessaire. Sa lame acérée et ses pupilles sombres avaient répondu en cœur : oui.

   — Il faut que tu arrêtes de le défendre, Ellie.

   — Et pourquoi ça ?

   — Parce que je n'ai jamais eu l'intention de te tuer toi, et je préfère éviter que tu me pousses à le faire.

   — C'est ça, et c'est pour ça que tu as envoyé quelqu'un d'autre faire le travail à ta place.

   Il inclina légèrement la tête. À ma grande surprise, je décelai une pointe de confusion dans son regard, comme s'il ne comprenait pas où je voulais en venir. Comme si, curieusement, il n'était pas au courant.

   — Il n'a jamais été question de te faire du mal, dit-il finalement.

   — Je ne te crois pas.

   Il hésita un instant, visiblement rongé par le doute. Son souffle se calma, sans que ses traits s'adoucissent pour autant, et après un moment qui sembla durer une éternité, il retira son poignard et se recula.

   — Ça te suffit, comme preuve ?

   Le rythme de mon cœur reprit progressivement une cadence normale. Il rangea son poignard dans son étui en cuir, ce que je ne manquai pas de remarquer.

   — Non.

   À l'instant même où j'en eus l'occasion, je brandis mon revolver et le pointai sur lui. Il se contenta de soupier, et leva les mains en signe de résignation. Il ne paraissait pas particulièrement effrayé, plutôt ennuyé, bien que la goutte de sueur qui perlait sur sa tempe me laissait penser que son esprit devait être bien plus en panique qu'il ne le laissait paraître.

   — Baisse-ça, Ellie. Tu n'as quand même pas l'intention de m'abattre ?

   — Tu n'es pas en position de poser des questions.

   Il leva les yeux au ciel.

   — Ne fais pas ça, dit-il. Tu ne t'en prends pas à la bonne personne.

   — C'est moi qui donne les ordres. Tu vas gentiment me suivre à l'étage et t'expliquer auprès de Dario.

   — Ou alors, je t'explique en détail la raison de mon geste dans une discussion mature et cordiale. Mais pour ça, il faut que tu baisses ton flingue avant que quelqu'un ne nous voit.

   — C'est ça, pour que tu me mettes aussitôt à terre.

   — Ellie. Dario n'est pas celui que tu crois.

   Je plissai des yeux. C'était étrange, mais son visage n'avait jamais eu l'air aussi sérieux. Presque... sincère. C'était probablement stupide mais une partie de moi avait envie de l'écouter.

   — Qu'est-ce que tu veux dire ? osai-je finalement par lui demander.

   Il détourna le regard, les mains toujours levés. Un léger soupir s'extirpa de sa bouche.

   — Tu n'es pas prête à entendre ça.

   — Mais parle, bordel ! m'emportai-je en resserrant ma poigne sur mon arme.

   Ma rage résonna avant de laisser place à un bref silence. Pendant cet instant, je n'entendais plus que les battements frénétiques de mon cœur qui tambourinaient jusqu'au sommet de mon crâne. Zack sembla peser le pour et le contre pendant quelques secondes alors que je sentais mon estomac se nouer, comme si je pressentais déjà l'atrocité qu'il allait me dire.

   Lorsqu'il prit enfin la parole, ses mots vinrent s'entrechoquer sur toutes mes convictions.

   — Je crois que Dario a fait tuer sa femme, comme il a causé la mort de chacune de ses compagnes.