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⚠️ La partie qui va suivre quitte le côté "historique" de l'histoire et rendre dans la partie fanfiction, le non réel. Ceux qui ne veulent pas se faire spoiler la série, ne lisez pas. Pour les autres, vous pouvez comprendre sans connaitre. Mais je préviens qu'on perd le côté historique et réaliste.


Un jour, un ancien est venu à l'hôpital. Il ressemblait à un guide qui nous accompagne sur le chemin après la vie. Quelqu'un qui nous prend la main pour rendre ce départ plus facile. Il essayait d'apaiser les mourants, de leur offrir une dernière minute calme. De discuter avec les abandonnés. De voir un sourire sur ces enfants si abattus.

C'est là que j'ai connu l'art de méditer. De s'échapper de son corps pour abandonner sa souffrance. Pour contrôler ma douleur physique et morale. Un voyage en transe loin de ce monde hostile que je voulais fuir.

Plus les jours passaient, et plus j'acquerrais de l'expérience. Il me suffisait de fermer les yeux pour m'échapper de cette triste réalité. Un endroit où tout était blanc, lumineux, calme et doux. Bien plus doux que cette lumière dans le ciel qui me hantait. Un monde irréaliste, dont j'étais le seul à connaître l'existence.

La nuit était tombée, recouvrant son voile si profond qui m'effrayait et me rappelait tant de souvenirs.

Il suffit de fermer les yeux. Pour ne plus jamais les rouvrir sur le même lieu. Puis d'attendre que le souffle chaud et doux vienne vous transporter. Vous emporter comme un navire au large. Un fantôme criant dans le néant désespoir. Comme les violons s'acharnant sur les cordes, ce cher violon qui jouait toujours sa symphonie dans ma tête depuis l'explosion.

J'ai senti mon âme partir, s'échapper de son enveloppe, aspirée par une force comme dans un courant d'air. Une feuille s'envolant vers ce brouillard bleu, un peu comme du coton. Flou, presque indistinguable. Tout semblait trembler sans pour autant bouger. Le contact du matelas d'hôpital avait disparu. Je savais qu'il s'était passé quelque chose sans même soulever les paupières.

Que j'avais voyagé sans quitter mon lit.

A travers les mondes. Un pouvoir interdimensionnel. Par la force de mon esprit. Grâce à cette médiation qui m'avait tant soulagé. Parce que quand on souffre, on développe la dernière chose qui nous reste.

Une sensation de flotter. Dans l'eau, dans l'air, dans l'espace. Dans le temps. Léger et en même temps si lourd. Sans rien pour s'accrocher. Et disparaître. Comme la dernière note s'achève en laissant place au silence.

Pour découvrir une porte vers un autre monde. Que vous seul pouvez ouvrir. Et enfin, lentement, appuyer sur la poignée. Laisser la douce lumière qu'elle émane se répandre sur votre visage après avoir quitté l'obscurité. Et découvrir un nouvel endroit. Comme si vous veniez de naître. Que vous redécouvriez la vie, des années après.

Et je me suis retrouvé là. Dans cet autre monde. Identique et pourtant si différent.

Ce monde parallèle au mien. Où un seul événement ne s'était pas passé comme prévu. Un seul détail, si mince, si petit, qui avait changé le cours du temps pour toujours.

Un détail où ma famille était encore vivante. Où nous n'avions pas perdu la guerre. Où il n'y avait jamais eu de morts dans ma ville, jamais eu de bombe. Où les oiseaux chantaient encore sous le soleil de Nagasaki.

Mais où malgré tout, c'était nous, les méchants de l'histoire. Car c'était la seule manière d'être heureux. Il faut peut-être finalement être quelqu'un de mauvais pour y entrer. Et que certaines bonnes personnes, trop pour ce monde, peuvent le quitter.

Alors je suis resté là. Dans ce monde qui n'était pas le mien. Une nouvelle réalité. Où je n'avais pas grandi, où je ne connaissais pas son histoire. Mais où tout me semblait plus heureux pour moi.

J'ai toujours gardé ces cicatrices sur mon bras. Ces brûlures, qui ne partiront jamais. Une marque, un souvenir de ma visite à la mort. Un rappel incessant, que tout est fragile et peut basculer en un seul instant sans vous en rendre compte.

Prenez soin de la vie, parce qu'elle ne s'en chargera pas pour vous. Et profitez des secondes, car dans un autre monde peut-être, elles ne sont plus les mêmes.

La sauterelle pèse lourd. Le temps aussi.





 Le temps aussi

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KotomichiWhere stories live. Discover now