Chapitre 10 : Seule contre tous

Începe de la început
                                    

Un frisson d'horreur me parcourut. Tout dire ? Maintenant ? Mais je devais bien m'y résoudre : ma fuite avait été la meilleure preuve de culpabilité qu'il ait pu espérer. Je pris une profonde inspiration pour me donner du courage autant que pour dissiper mon trouble, avant de me lancer. Il avait raison. Tout cela avait assez duré. Je racontai alors tout depuis le début : les souvenirs, la peur, le rêve. Le professeur ne tarda pas à m'interrompre :

-Pourquoi n'as-tu rien dit, Kelly ? Pourquoi avoir caché tout cela ? La Bête est ton ennemie...

Je baissai les yeux.

-Parce que quelque part, même si elle me fait mal, même si elle est un peu horrible, je l'aime bien.

Il garda le silence et je continuai. J'avouai au passage avoir encore en ma possession des livres interdits. Puis j'abordai le carnage des chasseurs, et ce fut trop : j'éclatai en sanglots. Le professeur Brant me prit dans ses bras, attendri.

-Qui est la Bête ? demanda-t-il enfin quand je finis par me calmer. Qui est Thia, Kelly ?

Je me figeai. Toute occupée à mon récit, je n'avais pas une fois fait référence au statut animal de la louve. Sûrement parce que ça me paraissait tellement évident...

-Tu ne penses pas qu'il est temps de nous le dire ? ajouta-t-il doucement.

Lentement, je me dégageai. La Bête se tenait tranquille. Parler ou ne rien dire ? Mais pourquoi mentir, au juste ? J'avais fait assez de mal comme ça. Je relevai les yeux pour fixer mon protecteur.

-Vous la connaissez, je soufflai, vous avez déjà entendu parler d'elle, de son vivant. Thia est une louve, professeur, une louve des plaines solitaire. Sa famille a été tuée par des braconniers, alors elle est partie de sa meute... Elle avait promis de se venger, de se venger des hommes pour ce qu'ils lui ont fait, pour tous ces morts... parce qu'elle n'avait pas eu de mère, parce qu'elle a grandi traquée, à fuir, toujours...

Je regardai mon interlocuteur, mes yeux de glace durs, la mâchoire serrée. Ça me faisait mal de devoir le dire, mais le mensonge avait trop duré.

-Thia a tué un nombre incalculable d'humains, et vous vous en souvenez, tous et toutes. Qui ne se rappelle pas du carnage de la Taïga de l'Est de la Baie Hudson ? Qui ne se rappelle pas de la Bête, la seule et unique responsable de la fin des Loups ?

Le professeur Brant ouvrit la bouche, stupéfait, mais la referma finalement et me fit signe de continuer.

-Thia m'a tellement terrifiée, cette nuit-là, que je m'étais jurée de ne plus jamais la laisser sortir. Hélas, la présence de Philippe ne m'a pas laissé tellement le choix... Je savais que la Bête voudrait me punir pour ce que je lui avais fait, pour l'avoir empêchée de t'égorger. J'ai eu la mauvaise idée de l'insulter, et elle a manqué me tuer. Pourtant, c'est elle qui m'a sauvée et m'a poussée loin de la lumière, qui m'a m'enjoint à retrouver mon corps. Après cela... Elle n'a plus fait parler d'elle. Ce n'est que tout à l'heure que... Elle a essayé de prendre possession de mon enveloppe corporelle, mais je l'ai bloquée... Et puis, j'ai reçu une décharge électrique et j'ai perdu connaissance.

Mon protecteur me jeta un drôle de regard.

-Je l'ai mordu au cou par réflexe, je ne voulais pas tuer Philippe, j'ajoutai en sentant le rouge me monter aux joues.

Le professeur balaya du revers de la main mes excuses.

-Kelly, je t'ai demandé d'être honnête. Pourquoi mens-tu ? Il y a beaucoup de témoins sur ce qui s'est passé tout à l'heure. Moi-même, j'y étais !

Complètement perdue, je le regardai. De quoi parlait-il ?

-Tu n'étais pas là quand Philippe m'a plaquée au sol, je me révoltai. Tu n'étais pas là quand je l'ai mordu, pas plus que lorsque j'ai perdu connaissance ! Il faut arrêter de me prendre pour une idiote, je sais quand même ce que j'ai fait !

La dernière louve des plainesUnde poveștirile trăiesc. Descoperă acum