𝟽 - 𝙻'𝚊𝚞𝚝𝚛𝚎 𝚑𝚘𝚖𝚖𝚎

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𝐑𝐨𝐬𝐞.

Quand je pense qu'il y a un mois, je croyais naïvement que les choses ne pouvaient pas aller plus mal, j'ai envie de me mettre des baffes et de rire hystériquement de la grandeur de ma candeur.

Tout compte fait, je suis naïve ! Bravo, mon Roméo !

Il y a à peine plus d'un mois, tout le Clan fêtait le Pow-Wow Shà. Il manquait des bikers à l'appel et certains ne reviendraient plus, certes, mais l'esprit de solidarité et la croyance populaire ici, leur foi en les Dark Evil Lions pour tout solutionner comme depuis plusieurs générations, les unissaient dans la certitude de jours meilleurs pour la communauté. Ils n'avaient pas tout à fait tort puisque les absents sont rentrés au bercail et les Red ont capitulé.

Ou pas, enquête en cours. Mais rien ne dure.

Pour ma part, mes draps sentaient encore l'odeur de leur meneur vénéré et ma peau portait les marques de son passage sur moi. En moi. Au rythme des tambours qui remerciaient les esprits à l'extérieur, nos corps s'étaient liés et nos transpirations mêlées pour tirer un trait sur trois semaines de conflits et de cris. Nous enterrions la hache de guerre de la meilleure des façons, et plusieurs fois. C'est terminé. Les cendres de la maison du pauvre Ed ont recouvert notre pacte. L'ont brûlé.

J'avais peur qu'Ashton ne soit plus qu'un fantôme dont je chassais le passé pour démêler un douloureux présent hurlant à chaque seconde l'absence de mes parents, la sienne, ce que nous étions, avant. Je me disais que peu importe d'où venaient Grace Fox et Lerooy Sawyer, Kansas, Nebraska, Jupiter ou ailleurs, qui qu'ils aient été dans leur « autre vie », celle qu'ils avaient quittée pour tout recommencer en France, je savais qui ils étaient et donc qui moi, je suis. Je me fous de la génétique. En m'adoptant, ils sont devenus mes parents, pour toujours. Ils m'ont élevée à leur image, avec leurs valeurs. J'avais tort, je veux retrouver leurs pas.

Continuer ma chasse.

La tête encore remplie des soupirs de Titàn et de son visage post-orgasmique, je découvrais qu'Ashton rentrait. Que la vie ne l'avait pas déserté lui aussi un matin froid de janvier, pendant que je regardais deux cercueils rejoindre leur dernière demeure. Et je repartais, pour lui, pleine de questions avec la hâte et l'appréhension des réponses qu'il allait me donner. Je repartais alors que j'avais au fond de moi un petit pincement de dire adieu à ce coin paumé mais baigné d'emmerdes sanglantes qui m'avait finalement accueillie et souri.

Un mois c'est si peu dans une vie, mais quand on sait comme moi qu'il suffit d'une seconde pour tout perdre, c'est une éternité.

Un mois, c'est la perception accrue d'une solitude qui ronge autant, si ce n'est plus, que la gangrène. La compréhension que j'ai été prise pour la dernière des connes par ceux avec qui j'ai grandi, deux des hommes de ma vie. Ceux qui me restaient. Ceux qui m'ont laissé courir le monde à la recherche de réponses que je pense, ils avaient. Roméo m'a menti, peut-être est-ce même lui qui a rédigé ce SMS pour m'appâter et me faire revenir à Paris. Puis, il a brossé ma patience dans le sens du poil, incité à reprendre une activité professionnelle et à postuler dans d'autres cabinets vétérinaires. Pour que je reprenne ma vie laissée en suspens, comme si je n'avais pris qu'une simple pause. Pour que je ne sois plus tentée d'être une nomade en quête de réponses mais une bonne petite sédentaire sous la coupe de sa volonté. Leur volonté.

Ma naïveté n'a donc pas de limite. N'avait. Aujourd'hui, je choisis de ne croire que moi, mes yeux. J'ai enterré ma propre bêtise dans ce désert et tout comme mes parents reposent à jamais sous terre, elle y restera pour des siècles et des siècles.

J'ai remis les compteurs à zéro en rentrant dans un avion, voire en claquant fortement la porte de mon appartement.

Les mensonges de Roméo sont au placard, tout comme notre dialogue de sourds, et les belles paroles de Titàn pour passer entre mes cuisses, aussi. Je ne doute pas qu'en ce qui le concerne, il a depuis trouvé comment « purger » ses besoins. Il n'a qu'à passer la porte d'un bar à Spring City ou même celle du Black Diamond Bar pour cueillir une pouffe qui lui donnera satisfaction. Je ne me demande même plus pourquoi il a traversé l'océan pour son anniversaire. Monsieur le Cactus voulait se prouver qu'il pouvait avoir n'importe quelle nana pour jouer avec son beau tuyau et moi, comme la cruche que je suis, que j'étais, j'ai foncé tête baissée.

SAUVAGES | En pause jusqu'au 6 octobre 2024Où les histoires vivent. Découvrez maintenant