𝟷 - 𝙵𝚕𝚊𝚐𝚛𝚊𝚗𝚝 𝚍𝚎́𝚕𝚒𝚝

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 𝐑𝐨𝐬𝐞

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 𝐑𝐨𝐬𝐞.

Le chauffeur claque coffre de son taxi et détale aussitôt, avant même que je n'aie coupé la voix d'Eminem dans mes AirPods. Entourée de mes deux grosses valises sur lesquelles joliment ornées d'une quinzaine d'autocollants géométriques, carte routière de mes récentes destinations, je ressens les regards curieux se poser sur ma petite personne. Je commence à avoir l'habitude d'être le grain de sable dans les rouages des paysages où je débarque. Ce soir ne fait pas exception.

Le coin n'a rien d'une carte postale qu'on a envie d'envoyer à sa famille – si tant est qu'on en est encore une. Malgré les réverbères déjà en marche, les enseignes lumineuses des bars se livrant une concurrence sévère et l'animation qui bat son plein avant même 18 h 00, la zone n'est pas lieu touristique recommandée par le guide Michelin.

En revanche, les hommes et les femmes dont je suis actuellement le sujet de conversation seraient tout à fait à leur place dans un magazine de bikers. Ou de Hard Rock. Le cuir semble être l'habit de mise ici, et les tatouages, la preuve indélébile de ralliement à leurs groupes. Mais voilà, je ne porte ni peau de vache ni dessins aiguillonnés dans mon derme.

Je suis l'intruse, et pas besoin de jouer à « Où est Charlie ? » pour me repérer.

Quant à ma pilosité, tout va bien aussi, merci. C'est que certains hommes ont des barbes plus longues que mes cheveux et une forêt vierge s'évadant des cols de leurs t-shirts. L'espace d'une seconde, j'essaie d'imaginer Tarzan avec une barbe similaire à celle d'une des montagnes qui, sa pinte en main, se lèche le coin de la bouche en me reluquant sans vergogne. Son rictus carnassier me file la chair de poule, et toujours rien à voir avec l'effet que me fait le grand Lion qui a peur des petits félins.

Je me souviens des Dark Evils que j'ai pu voir dans leur plus belle tenue d'Adam à Shá River. Si Luka, par exemple, cultive la toison poivre et sel de son visage, lui et ses frères n'ont rien de gros grizzlys à la fourrure anarchique qui pousse de partout et n'importe comment. Pas comme... ce type.

Bon sang, j'ai vu des Saint-Bernard moins velus !

Un long frémissement s'empare de mes muscles, signal que je dois bouger. Tout en prenant mon courage à deux mains – sans oublier mes valises, qui transportent tout ce que j'ai pu y rentrer –, je souffle un bon coup et tente de repérer le bar où je dois rejoindre mon moyen de transport vers Canyon Lake.

J'ai encore fui ma capitale avec une rapidité déconcertante. Heureusement qu'Iris était là pour me soutenir ; et payer mon billet avant même d'avoir reçu mon virement. Je m'en veux un peux, je sais que Roméo ne va pas la lâcher, mais je l'entends déjà lui hurler « va te faire cuire le cul espèce de connard menteur et manipulateur ! ». Ma copine a une version bien à elle du « politiquement correct », et c'est pire depuis qu'elle a tourné la page Gauthier. Mais je l'aime ainsi, et je me rends compte avec regret que je n'ai pas assez profité de sa présence dans ma vie.

SAUVAGESWhere stories live. Discover now