Chapitre 30 : Sÿervik

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— Tu veux que je te montre pourquoi je t'ai vraiment sorti de prison...?

— J'ai..., Ayden aurait voulu être fou de joie et partir immédiatement, mais il ne put s'empêcher de pousser un rire nerveux en baissant les yeux vers le bras ensanglanté du jeune homme. J'ai même pas encore pu soigner tes blessures, Räe.

— T'as vraiment aucun sens du dramatisme. C'est qu'une égratignure.

— Comment as-tu survécu aussi longtemps avec une telle mentalité...

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— Hé... que fait-on dehors?, demanda Ayden une énième fois, essoufflé par la marche incessante.

— Tu vas voir, t'inquiète pas. On est presque arrivé.

Räe avait le sourire aux lèvres, mais Ayden ne comprenait toujours pas ce qu'il pouvait espérer de cette longue promenade en forêt, aussi agréable fût-elle, si bien qu'il avait fini par se perdre dans ses pensées pour faire passer le temps. Est-ce que Räe a toujours été aussi grand? Il fait quoi... un mètre quatre-vingt-dix? Plus? J'ai l'impression d'être un enfant à côté de lui... c'est pas un Nordique pour rien...

Sa réflexion fut interrompue quand le jeune homme s'arrêta et qu'il manqua de lui foncer dedans. Il sortit quelque chose de son capuchon, une sorte de tout petit instrument de métal qu'Ayden ne reconnaissait pas, et le porta à sa bouche. L'objet produisit alors un son clair et fort, semblable au cri irréel d'un animal inconnu de tous, suivi d'un long silence, durant lequel Räe regarda autour de lui, comme s'il attendait quelque chose.

Après quelques secondes sans rien apercevoir, Ayden s'apprêta à poser une nouvelle question, avant que le craquement tonitruant et incessant des branchages dans les fourrés ne fassent fuir les oiseaux en nuées noires de piaillements affolés. Quelque chose de grand se terrait, il en était sûr, mais les bruits de pas dans les buissons semblaient si légers qu'ils auraient pu appartenir à un lynx. Le bruissement régulier des feuilles laissait deviner un être rampant, alors que les ombres projetées faisaient croire à l'apparition d'un ours. Ayden ne savait plus quoi penser et préféra se reculer derrière Räe, qui n'avait pas cillé depuis le début du vacarme. Au contraire, il souriait. Un gargouillis guttural émana de la forêt, et Ayden se figea, pétrifié dans la réalisation. Il savait ce qui se cachait derrière les fourrés. La végétation s'écarta pour laisser place à l'énorme masse d'une bête immense et, tel un réflexe inoubliable, il détourna les yeux.

Le dragon, du plus profond noir de jais qu'Ayden avait jamais vu, atterrit lourdement de son saut et se mit à renâcler bruyamment quand son regard d'or incandescent rencontra celui hésitant d'Ayden. Il était paralysé par la terreur, comme perdu dans ses souvenirs cauchemardesques de Feu-de-Sang, où il n'avait rien pu faire et avait attendu, impuissant. Heureusement, l'étincelle dans les yeux du reptile sembla s'adoucir quand la main de Räe se leva devant son museau et vint le frôler du bout de ses doigts. Le blond se retourna lentement vers Ayden, comme pour ne pas troubler la bête nerveuse, et sourit.

— Salue.

— Quoi?

— Pour montrer que tu viens en ami.

Ayden obtempéra : il posa une main fébrile sur son cœur battant et se pencha en avant, doucement de peur d'énerver la créature à la respiration frénétique et à l'oeil perçant. Ses mèches sombres tombèrent devant ses yeux, mais il n'eut pas le courage de secouer la tête pour les dégager. Il retint sa respiration quand le dragon noir, d'un mouvement lent et précis, déploya son immense aile droite pour la déposer au sol, ses pattes avant s'affaissant en un salut solennel. Son museau toucha le sol et sa gorge, fendue de quatre fentes respiratoires tout comme Orthal, fut momentanément exposée derrière ses crêtes frémissantes. Une voix, profonde et grave, se fit alors entendre.

Le Vœu du Dragon (LES ÉVEILLÉS - I)Where stories live. Discover now