Renaissance

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« Une part de moi est morte ce jour-là ; mais une autre, habitée d'une force nouvelle, a aussi commencé à vivre. »

        ~ Daniel Fenton

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L'écho de mes pas semble atrocement bruyant alors que je m'avance dans le portail, les yeux écarquillés dans la pénombre. Les parois circulaires de l'improbable invention, recouvertes de fils et de câbles alambiqués d'une ahurissante façon, ne sont que faiblement éclairées par l'étrange luminosité du laboratoire.

Je me demande s'il n'aurait pas été préférable d'allumer les puissants projecteurs suspendus au plafond du sous-sol. De cette façon, j'aurais eu une meilleure vue de l'intérieur du portail. D'un autre côté, cela n'aurait pas manqué d'attirer l'attention de mes parents dans le cas hypothétique où ils rentreraient à la maison plus tôt que prévu.

Alors que j'avance avec précaution dans le sombre tunnel, je suis de plus en plus inquiet. C'est stupide, je n'ai pourtant aucune raison d'être si inquiet ; le portail ne fonctionne pas de toute façon. J'étais même présent lorsque mes parents ont tenté de l'activer. Ils étaient si enthousiastes à l'idée d'enfin mettre en marche leur plus important projet : celui qui devait les faire « entrer dans l'histoire » comme l'a si bien dit mon père.

Je ne m'étais jamais vraiment intéressé à leur travail avant cette grande expérimentation et je ne croyais pas à l'existence des fantômes non plus. Mes parents avaient toutefois fortement insisté pour que nous soyons présents lors de l'activation, ma sœur Jazz et moi. Je me rappelle avoir trouvé très amusante l'expression ennuyée qu'a revêtu Jazz alors que mon père l'entrainait pratiquement de force dans le sous-sol/laboratoire. D'aussi longtemps que je me souvienne, ma sœur a toujours considéré leurs expérimentations sur le paranormal comme une inutile perte de temps. Considérant qu'aucune de leurs inventions n'a fonctionné jusqu'à présent, on ne peut pas vraiment l'en blâmer. Surtout qu'elle n'est pas la seule à penser une telle chose.

Malgré tout, au moment où mon père connecta les deux câbles, Jazz et moi étions crispés d'anticipation à l'image de nos deux scientifiques de parents. Une part de moi voulait vraiment que cette fois soit la bonne et que l'une des inventions liées au surnaturel fonctionne enfin. Sans vouloir me l'avouer, j'étais curieux de savoir ce à quoi un monde de fantômes pouvait bien ressembler.

Quelle ne fut pas la déception de mes parents (et aussi un peu la mienne) quand, après une unique étincelle électrique, tout s'arrêta. Jazz leva les yeux au ciel, blasée et l'air de dire « je vous l'avais bien dit » avant de quitter, laissant mes parents fixer d'un air béat ce qui n'était finalement qu'un étrange trou dans le mur.

Ils furent très silencieux ce soir-là et dans les jours qui suivirent. Tout le bruit qu'ils avaient fait avant l'échec de leur expérimentation ne retomba pourtant pas de la même façon. C'est ainsi que mes deux meilleurs amis, Sam et Tucker, en vinrent à me convaincre de leur laisser jeter un œil à ce - Oh tellement impressionnant ! - portail vers une autre dimension.

Je descendis l'escalier menant au sous-sol d'un air irrité, énervé à l'idée d'être surpris dans le laboratoire par mes parents ce qui ne manquerait pas de me valoir le Speech : un autre de ses longs sermons dont ils ont le secret. Le fait que mes amis y assisteraient aussi me remontait cependant un peu le moral étant donné que ce serait de leur faute. Mais quoi qu'il en soit, un sermon de plus ou moins trois heures, dépendamment de qui entre mon père et ma mère le donne, dans le genre « C'est dangereux ; tu risques d'être électrocuté ; tu pourrais mourir ; etcetera, etcetera... » n'avait vraiment rien d'attrayant.

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