𝟷𝟶 - 𝙶𝚛𝚘𝚐𝚗𝚎𝚖𝚎𝚗𝚝𝚜 𝚎𝚝 𝚙𝚛𝚎́𝚓𝚞𝚐𝚎́𝚜.

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Titàn.

— Oui. Oui moi aussi. À plus.

     Je raccroche, me masse la nuque et roule des épaules pour me désankyloser, les yeux dans le vague, les fesses bien calées sur le sofa en cuir sombre et les pieds sur la table basse en verre. La patronne me buterait si elle me voyait.

     Isolé dans le bureau de Tayla pour prendre mon appel, j'en sors avec le poids d'une fatigue assommante qui s'est abattue sur moi sans crier gare. J'ai encore reçu plusieurs textos durant la communication, pourtant je repousse autant que possible le moment où je vais devoir mettre le nez dedans, me doutant de ce que je vais y trouver. Mais c'est sans compter sur Kourtney qui me lorgne comme si elle n'avait pas bouffé depuis des jours. Et la connaissant, ça doit plutôt se compter en heures. Elle a dû avoir son quatre-heures avec l'un de mes gars aujourd'hui. Cette fille est insatiable, et elle ne comprend pas qu'à mes yeux, ni sa dextérité au pieu, ni sa capacité à encaisser deux fois mes assauts quand je veux bien d'elle, ne font son charme. Ni même sa bouche aux lèvres aussi gonflées que mes pneus, qui elle aussi, a un talent assumé. Malheureusement, c'est un peu le seul.

     Si je n'ai pas le projet de me faire passer la corde au cou, ce n'est pas pour autant que je n'ai pas de goûts en matière de femmes. Des critères, du moins. Je respecte les types qui finissent par tomber amoureux d'une fille qui a été une brebis avant de devenir leur régulière -il paraît que les sentiments n'envoient pas de faire-part pour prévenir qu'ils arrivent- mais moi, imaginer que la mienne se serait potentiellement fait ramoner par autant de queues différentes qu'il y a de deux-roues immatriculés dans le comté, c'est simplement rédhibitoire.

     Et puis pourquoi je pense à ça moi ? Pas de femme. Pas de gosse. Les autres se chargent déjà très bien d'assurer une descendance à la ville, de filer du taf à l'école, et de pérenniser le taux de natalité du pays.

     Moi, je suis né pour diriger le clan. Pas pour mettre au monde de futurs orphelins. Ma vie, c'est la protection de Canyon Lake. Mon nom s'éteindra avec moi, pas cette communauté. D'autres prendront la relève. En plus, Jude a bien une gueule à faire dix mômes. Deacon deux ou trois. Je leur laisse l'amour, je garde les flingues et le reste.

— La 3 est libre, s'agrippe Kourtney à mon T-shirt en collant sa poitrine à moi, et j'ai tout ce qu'il faut.

    Elle me montre des capotes qui dépassent de son débardeur rose bonbon, rangés dans son soutien-gorge.

 — Il n'est pas encore une heure, à ce que je sache. Tu vas finir par te faire virer...

— Pas si tu demandes à Tayla de me garder, susurre-t-elle à mon oreille, sa main descendant dangereusement vers une destination qu'elle n'atteindra pas ce soir.

     Non. Définitivement, elle me rebute. Pas moyen.

     Je retiens son poignet droit sans contenir mon geste brusque, mais elle ne s'en plaint pas; ou n'ose pas le faire. Mais elle sait y faire, et, s'y attendant sûrement, c'est sa main gauche qui se saisit de mon paquet sans sommation. Je soupire bruyamment pour lui donner une piste sur ce qui va suivre, ou surtout ne pas suivre, la laisse me palper trente secondes en se frottant à moi d'une manière tout sauf aguicheuse, afin de lui montrer que le seul effet qu'elle me fait s'apparente à de l'agacement. Offusquée autant qu'interdite en comprenant que ma béquille ne veut pas de son cul, elle relève vivement la tête et interrompt son pelotage.

     Je croise son regard chocolat qui traduit parfaitement son étonnement et sa déception. Je n'ai même pas besoin de l'éconduire plus. Elle tente de me repousser, mais je ne bouge pas d'un millimètre, et me mets à rire de son comportement puéril de petite fille qui n'a pas eu ce qu'elle voulait. En l'occurrence, mon gros bonbon.

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