Chapitre 10 : Morts Avant l'Aube

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Les flocons virevoltaient dans les airs, avant datterrir légèrement sur les tuiles rouges des toits.

Il neigeait à Port-Réal, cette fois-ci, pour de bon.

Un vent glacial soufflait sur toute la ville, lair froid sengouffrant absolument partout.

Le ciel était gris, sombre, identique à lhumeur de Cersei.

Depuis sa fausse couche, survenue quelques jours auparavant, elle avait refusé dadresser la parole à qui que ce soit, même à ses femmes de chambre.

Elle ne mangeait plus, elle ne dormait plus.

Son visage pâle était désormais marqué par de profondes cernes violettes, son teint était blafard et ses yeux ternes comme des émeraudes privées de leur brillance.

Elle passait ses journées à regarder par la fenêtre le vaste monde qui sétendait en dessous delle, sans pour autant parvenir à le voir, les yeux perdus dans le vide, ne pensant à rien, rien, ce quelle aurait aimé être à cet instant, rien.

Parfois, sa main venant se poser naturellement sur son ventre, comme si son petit lionceau y était encore, comme si son cerveau navait pas enregistré que ses entrailles sétaient transformées en tombeau, cest mort, là-dedans, cest mort.

Et cétait peut-être là lironie la plus cruelle de toute cette malheureuse histoire.

Cersei navait presque pas minci, depuis la perte de son bébé.

Elle avait certes perdu un peu de poids, mais le renflement à peine visible quand Jaime lavait quittée, et qui navait cessé de croître par la suite, lui, navait pas disparu, comme si les dieux avaient jugé bon que même son corps se démène à lui faire penser quelle était toujours enceinte, en guise de punition pour la longue liste de soi-disant péchés quelle traînait derrière elle, comme un prisonnier traînerait ses chaînes.

Ce jour-là nétait pas différent des autres.

Elle était, comme à son habitude, à la fenêtre de ses appartements, seule, avec son dæmon, couché devant la cheminée un peu plus loin, qui avait, lui aussi, en même temps que son humaine, perdu de sa superbe. Son poil navait plus son éclat doré dantan, il paraissait moins fier, moins majestueux, moins imposant quil ne lavait été auparavant.

Elle songea quelle devrait le dire à Jaime.

Elle se mordit la lèvre. Comment allait-elle bien pouvoir le lui annoncer ?

Il avait été tellement enthousiaste, à lidée davoir un fils ou une fille qui pourrait enfin porter son nom, leur nom, quil pourrait tenir dans ses bras et voir grandir, et pas seulement observer de loin, comme il avait dû se contenter de le faire quand Robert était encore de ce monde.

Elle se demanda sil lui en voudrait. Elle espérait que non, elle sen voulait déjà bien assez pour deux.

Elle naurait pas pu empêcher cela darriver, bien sûr, et pourtant, elle sen tenait pour responsable, sans pour autant vraiment savoir pourquoi.

Cersei ne sattendait pas à entendre la porte de ses quartiers souvrir à la volée, ayant précisé quelle ne voulait voir personne, à moins quil ne sagisse dune affaire de la plus haute importance, et sursauta quand ce fut le cas.

Quoiquil en soit, personne naurait eu soit la témérité, soit linsolence, de débarquer dans les appartements de la reine, sans lui en avoir demandé lautorisation et sans craindre de risquer sa colère.

Enfin, presque personne.

Avant même de le voir, elle savait de qui il sagissait, et pourtant, quels ne furent pas sa surprise et son dégoût quand elle aperçut du coin de lil, ne sétant même pas donné la peine de tourner la tête pour le regarder, Euron Greyjoy, qui entrait en se pavanant, comme sil était déjà le maître des lieux, son large sourire arrogant étalé sur son visage parfaitement déplaisant, et son dæmon vautour tout aussi désagréable perchée sur son épaule.

La Dernière GuerreWhere stories live. Discover now