Le local

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Parfois je me demande ce qu'il m'a pris de suivre mon amie en fac de médecine. De toute évidence, j'aurais mieux fait d'aller en fac de lettres. Mais non. Moi, Laly, je suis bel et bien inscrite en médecine. Il doit bien avoir une raison à cela. L'amitié ? La folie ? Aucune idée. Mais cette raison doit bien expliquer pourquoi je me trouve actuellement avec ma meilleure amie à courir comme une dératée dans les couloirs vides du sous-sol de la fac, courant comme si ma vie en dépendait. Car, en réalité, ma vie en dépend vraiment. Nous sommes le mardi 12 septembre et ma vie risque de prendre fin si je n'arrive pas à sortir de ce sous-sol. Mais pour comprendre comment j'en suis arrivée là, il nous faut remonter quelques jours en arrière. . .

Jeudi 8 septembre. Je sors de l'amphithéâtre dans lequel je viens d'avoir cours, épuisée. Pas à cause du cours, ne vous méprenez pas. Mais à cause de la chose qui me parle et me sautille autour depuis près de cinq heures, j'ai nommé : Elena. Elena est ma meilleure amie depuis aussi longtemps que je puisse me souvenir. Etant d'un an mon aînée, je l'ai rejointe à la fac car je n'avais aucune idée de ce que je voulais faire plus tard. Et je n'en ai toujours pas d'ailleurs, mais passons.

« Et le beau gosse de la promo de l'année dernière ? Il est pas mal lui, hein ? Hein ? » enchaîne Elena, toujours aussi débordante d'énergie.

Je réponds sans grande conviction « Euh. . . Oui, tout à fait. »

« Et le grand blond qu'on a croisé il y a quelques jours, t'en penses quoi ? Il est beau gosse hein ? Oh non, soupire-t-elle, je crois avoir laissé mon dictionnaire d'anatomie au casier. On va aller le chercher.

- Non ! Je vais y aller moi, comme ça j'apprends à me repérer dans le bâtiment. Et puis toi tu n'as qu'à nous préparer quelque chose à manger en attendant que je revienne, okay ? »

Je tente, l'espoir d'avoir la paix quelques instants.

« Très bien, ne te perds pas ! Je ne voudrais pas avoir ta mort sur la conscience dés notre quatrième jour de cours ! »

Je soupire avec amusement puis pars en direction de l'étage inferieur. Pour aller à son casier je crois qu'il faut aller à gauche, puis à droite, descendre le petit étage, aller à gauche. . . à moins qu'il ne faille aller à gauche avant de tourner ? Oh c'est pas vrai ... Je stoppe net.

Me voilà à présent face à un long couloir vide non éclairé. Je pense que je suis descendue trop bas. Je dois me trouver dans l'aile abandonnée dont Elena m'avait brièvement parlé. Je me tourne vers les escaliers dans l'optique de les gravir mais le nombre de marches inestimable me procure une paresse incommensurable. Je reporte mon regard sur le long couloir qui me fait face et me dis que, finalement, il n'est pas si terrible que ça. Ma flemme prenant le dessus sur ma peur, je m'engage dans le corridor tout en tentant de me convaincre qu'il finira bien par me ramener à la civilisation.

Avec tous ces films d'horreur ainsi que la légende urbaine que l'on raconte sur la fac comme quoi elle aurait été battit sur d'anciennes catacombes et que des rituels sataniques s'y tenaient, je ne peux m'empêcher de me faire tout un tas de scénarios dans la tête.

Je m'imagine tellement de choses que je finis par pousser un hurlement strident lorsqu'un léger claquement se fait entendre derrière moi.

Je me retourne brusquement, mais rien. Pourtant, le bruit persiste. Un petit claquement irrégulier, semblable au clapotis d'une mer métallisée. Apeurée mais intriguée, je tente de localiser la source du bruit. Au bout de quelques minutes à tourner en rond et à revenir sur mes pas, je finis par la débusquer. Là, juste derrière ce grand casier. Je me tords le cou pour la voir et l'aperçoit enfin, à moitié dissimulée. Une petite bouche de ventilation dont les parois tremblotent... Attendez une seconde. Une grille de ventilation ? Ici ? Cachée derrière un casier ? Mais pour quoi faire ? Cette partie du bâtiment est hors d'usage, plus personne n'y a mis les pieds depuis des lustres. Ma curiosité l'emportant sur ma peur, je me mets à genoux et approche mon visage au plus prés du sol, pour voir sous le casier. J'aperçois un chambranle. Bingo. Une porte. Une porte ? Mais c'est quoi leur délire dans cette fac ? Je soupire et me relève. Pourquoi cacher la porte d'une pièce, qui plus est une pièce ventilée. Si on ventile une pièce, c'est soit pour faire circuler l'air afin d'empêcher une odeur de s'installer, soit pour renouveler l'air d'un organisme vivant. Ou, dans le pire des cas, les deux.

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