Mon seul regret

Chapitre 1 - L'inconnue

Amalrik a dû déménager pour la quatrième fois depuis son entrée en sixième, changeant de collège en cours d'année. Cette fois-ci il entame le deuxième trimestre de sa deuxième cinquième dans le collège de la cité des chardons, renommé triple C par les collégiens. Il y a un mélange intéressant de toutes les cultures et de toutes les classes sociales d'après ses premières observations. Amalrik est un jeune homme introverti qui a du mal à s'intégrer, qui se prend rapidement l'étiquette du mec chelou en pleine face sans même avoir ouvert la bouche.

C'est la rentrée de Janvier, tout le monde devrait parler de ce qu'il a eu à Noël, de qui a fini sous la table au nouvel an mais non, tout le monde ne parle que de Léonor et de son père qui vient de mourir. Amalrik repère vite de qui il s'agit, c'est la petite brune qui gueule en arrivant dans la cour :

— Je vous préviens, le premier qui me parle de mon père, je lui en décolle une. Il est mort, il n'y a rien d'autre à dire.

— Bonjour à toi aussi Léonor, lui répond une jeune fille qui ne semble pas étonnée par l'attitude de cette dernière.

— Bonjour, désolé Clara mais j'ai entendu Simon et Jonathan parler de mon père, ça m'a fait vriller. J'ai vraiment besoin de penser à autre chose alors j'apprécierais que tout le monde se mêle de son cul pour changer, lui rétorque Léonor en lui faisant la bise.

— Ils sont inquiets pour toi, ce sont tes amis je te rappelle, lui dit Clara gentiment.

— JE VAIS BIEN, gueule Léonor en mettant ses mains de chaque côté de sa bouche pour que le son de sa voix fasse bien le tour de la cour. Voilà, plus personne ne s'inquiète maintenant !

La sonnerie retentie, Amalrik se met dans la file de la classe qu'on lui a assigné lors de son inscription, la même que Léonor. D'ordinaire il ne se préoccupe pas trop de gens, encore moins ceux de son âge mais cette Léonor l'intrigue. Durant cette première journée, Amalrik s'est retrouvé à côté d'elle dans quatre cours sur sept, elle lui sourit plusieurs fois mais ne lui a pour ainsi dire pas parler. Léonor semble être populaire, amie avec tout le monde même si elle a un groupe d'amis en particulier avec qui elle passe presque toutes les pauses. Ce qui est plus bizarre en revanche c'est que certains parlent d'elle comme d'une fille facile et décomplexée, l'appelant même « la pipeuse » alors qu'ils semblent l'apprécier en tant qu'amie à en juger par leur attitude avec elle.

Amalrik a observé Léonor toute la semaine, a tendu l'oreille quand il entendait parler d'elle et ses premières conclusions semblent bonnes, Léonor est à la fois la fille la plus populaire du collège, appréciée par tous et la trainée de la cité. Drôle de mélange pour cette fille aux allures de jeune fille bien élevée, du moment qu'elle ne gueule pas comme un bonhomme en utilisant un vocabulaire de charretier.

Une nouvelle semaine démarre, mathématiques pour commencer. Amalrik est très mauvais dans cette matière mais Léonor cartonne, comme dans toutes les matières d'après ses observations d'ailleurs. Heureusement pour lui c'est un cours durant lequel il est à côté d'elle, sauf qu'il n'ose pas lui dire plus que « salut ». Le cours commence, Amalrik ne note rien, fixant le tableau à s'en faire sortir les yeux des orbites.

— Tu ne comprends rien, c'est ça ? lui demande Léonor.