𝚌𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 𝚍𝚒𝚡-𝚜𝚎𝚙𝚝

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Bonne lecture !

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Un immense tableau se déplaça seul, de gauche à droite, dans un couloir désert. Une ombre encapuchonnée s'extirpa d'un étroit trou qui avait été fait dans la roche. C'était un passage carré, découpé très proprement, et dont les pierres se rejoignaient si naturellement qu'on aurait pu le croire d'origine.

L'ombre épousseta ses vêtements en lin blanc, et prit une grande inspiration avant de se mettre à marcher sur la pointe de ses pieds, emmitonnés dans des chaussons de chambre. Elle marcha très silencieusement jusqu'au prochain couloir. Le jour n'avait pas encore commencé à se lever, et les bougies arrivaient bientôt à leur fin : la lumière tamisée qui régnait dans le palais lui permit d'arriver non loin de la pièce qui lui avait été attribuée, sa chambre. En entrant dans le dernier couloir, Oikawa fit de son mieux pour ne pas sursauter en tombant nez à nez avec une jeune domestique.

Elle, par contre, sauta presque jusqu'au plafond.

— Qui... qui va là ? murmura-t-elle à l'obscurité avant d'ajouter :... oh.

Il ne l'avait jamais vu, mais la jeune femme sembla le reconnaître en plissant un peu les yeux. Une mine fatiguée, des cheveux coiffés en un chignon bas, et une bouche qui se tordit légèrement. La servante se reprit juste à temps, mais Oikawa vit qu'elle était jeune.

Jeune, nouvelle, un peu perdue. Son cœur battit un peu rapidement dans sa poitrine, et il retint un soupir de soulagement. Elle chuchota :

— Que faites-vous là ?

Le prince se laissa quelques secondes avant de répondre. Heureusement pour lui qu'il était toujours deux fois plus prévoyant que ce que le bon sent pouvait attendre. En partant, il avait enfilé une cape dans le passage secret qu'il avait utilisé pour sortir du palais. À son retour, il avait savamment repassé ses habits de nuit, ainsi que le peignoir en soie qu'il enfilait toujours le matin.

Aux yeux de cette fille, il paraissait sortir du lit.

Avec un sourire un peu désolé, Oikawa battit des cils et leva sa main droite pour la poser sur la joue de la jeune femme. La réaction ne se fit pas attendre : elle rougit furieusement et se figea tout entier.

— Vous...., couina-t-elle presque dans un souffle.

— J'ai les mains froides, vous ne trouvez pas ?

Il fit une moue désolée, et appuya la caresse un peu plus longtemps. Écartant quelques cheveux qui s'étaient défaits pour les passer derrière son oreille, il fit attention à garder une expression naturelle. Il devait paraître jeune, désolé, un peu intimidé.

Quelques secondes pour créer un lien, c'était trop peu : pour attiser la pitié, en revanche, c'était tout à fait faisable.

— Elles sont... glacées, même.

Oikawa hocha la tête en se mordant la lèvre.

— Je suis désolé, dit-il. Je ne voulais pas vous effrayer. Je suis sorti sans trop y croire, mais je suis content de vous voir.

Elle rougit à nouveau, et cette fois il put reprendre sa main en ayant l'air faussement gêné. Il referma son peignoir un peu plus sur son torse et détourna le regard.

— Il fait affreusement froid dans ma chambre. Cette nuit a été rude, non ? J'ai un peu bu, hier soir, et j'ai demandé à ce qu'on me laisse... personne n'a donc pu raviser le feu dans ma cheminée.

Il la dépassait largement : une petite bonne femme à peine majeure qui devait se sentir honorée de travailler dans un tel lieu. Elle devait avoir entendu toute sorte de choses, dans son dortoir et dans les cuisines. Sur lui, sûrement. Il devait se montrer convaincant.

Ad Vitam Aeternam | UshiOiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant