Chapitre 35

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Dans l'entrée, elle poussa un grand tableau de Klimt pour faire apparaître l'armoire électrique. Il lui fallut se mettre sur la pointe des pieds pour couper l'interrupteur de la chambre d'amis, puis elle se tourna vers moi avec un petit sourire.

- Aimez-vous les voitures ?

- Les jolies, oui.

Elle hocha la tête d'un air satisfait.

- Alors, suivez-moi.

- Vous êtes sûre qu'il ne serait pas plus pratique de prendre le pick-up ?

- Pratique, sûrement. Mais je me suis dit que nous pourrions passer la nuit dans le quartier. Vous êtes blafard, affamé comme moi, et si vos amis sont en sécurité je pense qu'ils peuvent attendre demain matin. En plus...

Elle marqua une petite pause avant d'achever sa phrase.

- J'ai toujours convoité la maison de Kathlyn. On y a une vue magnifique sur la baie et surtout, l'architecture me plaît beaucoup plus.

- Convoité ? Sinon, j'imagine que vous pouviez aussi faire raser celle-ci et y reconstruire quelque chose de plus contemporain.

- Sauf qu'elle appartient à la famille d'Edward depuis trois générations.

- Ah oui. C'est con.

Elle poussa une porte à l'arrière de la cuisine et s'effaça pour me laisser découvrir son garage.

Et je ne pus y retenir un sifflement admiratif.

- Mince, alors !

- Elles vous plaisent ? La noire est à Ed, bien évidemment, c'est un veau recouvert de cuir du sol aux pédales.

Le veau était une imposante Bentley qui valait pas loin d'un demi million de dollars. Mais la seconde...

Sa ligne basse, toute en courbe et finesse, venait encadrer une calandre ovale que je connaissais par coeur. Ce monstre de puissance devenu presque légendaire m'offrait son flanc, qu'une profonde prise d'air entaillait harmonieusement. Elle était noire elle aussi, d'un noir brillant qui offrait à la lumière une multitude de tremplins où rebondir.

-- Une Bugatti Veyron, lâchai-je dans un souffle.

Lolly hocha la tête, un sourire satisfait sur les lèvres. L'incident qui s'était produit quelques minutes plutôt me sembla brutalement à des années de là. Comme si en ouvrant la porte du garage, elle nous avait fait changer de dimension.

- C'est la Super Sport. W-16, 4 turbos. Mille deux-cent chevaux, lâcha-t-elle en savourant le plaisir qu'elle lisait sur mon visage.

J'avais presque du mal à respirer, tant le moment me semblait intense. J'avais une voiture unique sous les yeux, dont une trentaine d'exemplaires à peine devaient exister à travers le monde. Je tutoyais les grands princes saoudiens et les pontes Chinois. A présent, je comprenais un peu mieux pourquoi Lolly avait pris autant de risques sur l'autoroute. Si ses compétences comprenaient la maîtrise d'une telle voiture, alors elle conduisait - pilotait - mille fois mieux que moi.

- Avant que vous ne me ressortiez votre couplet sur Badgad, commença-t-elle en contournant la voiture, je dois vous informer qu'il y a quelques avantages très intéressants à être aussi nanti. Pouvoir conduire des choses comme ça, et apprendre à les piloter, en fait partie.

- Je veux bien vous croire, soufflai-je en passant mes mains dans mes cheveux, toujours hébété.

- Allons-y. Je ne veux pas savoir ce qui se passera dans cette maison pendant les prochaines heures. Je vais juste prendre de quoi laisser un mot à l'intention de Vincent, je le mettrai sur le portail.

Z - Où tout commenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant