Chapitre 3 - Colombe innocente

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BELLAMY

Louisiane,

Après être passé chez mes parents, qui sont absents pour quelques semaines, en voyage en Irlande pour un reportage que ma mère doit monter sur l'organisation L'IRA. Mon père refusant de la laisser seule là-bas, l'a accompagnée.

Je m'assure que tout est bien fermé chez eux, même si la maison est déjà sécurisée grâce au matos que Spaz a installé dans chacun des logements des SOD. Mais mon côté paranoïaque a tendance à reprendre le dessus de temps en temps.

Je verrouille le garage, quand la peau sur ma nuque se met à picoter. Quelqu'un m'observe de loin. Gardant mon flegme, je fourre une main dans mes poches, et coince ma clope entre mes lèvres. Du bout des doigts, j'effleure mon flingue en avançant vers ma moto. La rue est calme, il s'agit d'un quartier résidentiel où vivent plusieurs familles sans problème.

En face de la maison de mes parents, il y a un petit parc, boisé avec des petits bancs et des aires de jeux. Mon casque posé sur ma moto, je l'attrape en cherchant du coin de l'œil qui est l'enfoiré qui s'amuse à me stalker.

Mon rythme cardiaque accélère légèrement, l'adrénaline commence à inonder mon sang. Je savoure cette sensation qui me rend plus vivant que jamais.

Mon autre main dans la poche, j'empoigne mon flingue, le regard qui sonde le bois, quand une silhouette apparaît. Je fronce les sourcils, mon cœur ralentit et je secoue la tête en soupirant.

— Salut Bel.

Je repose mon casque, délie les doigts autour de mon flingue et traverse la rue pour rejoindre l'entrée du parc.

— Qu'est-ce que tu fous là Marius ? Demandé-je en jetant mon mégot.

L'homme d'une cinquantaine d'années, au corps athlétique bien que fatigué, hausse les épaules en fourrant ses mains dans les poches de sa veste en coton qui ne le quitte jamais. Ses cheveux noirs grisonnent sur ses tempes, des rides se sont formées aux creux de ses paupières et sur son front. De ma taille, environ un mètre quatre-vingt-cinq, il paraît pourtant plus petit à cause de la courbure de son dos.

— Je me promène, annonce-t-il d'une voix éraillée, son regard brun dans le mien.

Marius est une âme perdue du sanctuaire, il est une constante que j'ai connu quasiment toute ma vie, bien que je ne connaisse rien de son passé. Chez les âmes perdues, personne n'oblige à parler de ce que l'on est ou de ce que l'on a fait. C'est un nouveau départ et Marius l'a bien compris. Cependant, il n'y a pas besoin de mot pour savoir qu'il a eu la vie dure.

Si la cicatrice sur ma joue droite ne laisse aucun doute sur ce qu'il m'est arrivé, c'est également le cas pour lui. Son cou est recouvert de cicatrices, ainsi que ses avant-bras. C'est profond et ancien. La brûlure qui recouvre son œil gauche et une partie de sa pommette déforme son visage qu'il cache sous une capuche.

Ce type a vécu l'enfer.

Discret, mais à l'écoute, je suis l'un des premiers qu'il a approché à son arrivée au sanctuaire six mois après moi.

J'ignore pourquoi, mais le soir, quand la nuit tombait pour laisser les cauchemars m'envahir, il se posait au bord de mon lit et attendait que je m'endorme.

— Tu ne devrais pas t'éloigner du sanctuaire, encore moins seul Marius. Soupiré-je en me frottant les paupières avec mon pouce et mon index.

Techniquement, toutes les âmes perdues sont libres de circuler à l'extérieur. Mais pour certaines d'entre elles, il vaut mieux qu'elles soient accompagnées pour éviter les problèmes avec une infime partie de la population qui voit d'un mauvais œil, les profils atypiques qui logent au sanctuaire.

Ugly ContractWhere stories live. Discover now