Le début d'une obsession
La musique résonnant dans la pièce, je laisse sortir ma frustration en enchaînant les pompes. La sueur dégouline sur mon corps et mes bras me font horriblement mal, mais je continue.
Depuis hier soir je n'arrête pas de penser à elle. Peut-être que je me laisse noyer sous mes instincts primitifs pour éviter de réfléchir au fait que je suis seul dans ce nouveau pays. Après une énième pompe, je me laisse tomber sur le dos essayant de retrouver un rythme cardiaque normal. Je me débarrasse de mon débardeur, mouillé de transpiration, et reste quelques minutes, allongé sur le sol de ma salle de sport. Je vais revoir Jade aujourd'hui, et je crois que ça égaye ma journée qui s'annonçait bien morose. J'étire chacune de mes articulations avant d'entrer sous la douche.
J'aime passer du temps devant mon dressing pour choisir méticuleusement mon costume. Mes yeux sont attirés par un noir près du corps, d'une marque italienne, il me ressemble plus que les autres. Je l'enfile rapidement et jette un coup d'œil au reflet que me renvoie le miroir. Parfait. Le noir du costume s'accorde avec la couleur de mes yeux ainsi que celle des mèches de jais de ma chevelure. Je parais plus fort, plus terrifiant, je sais que ça aidera à me faire respecter. Et je n'oublie pas, j'ai un défi à relever. J'ai deux yeux de diamants à faire baisser devant les miens.
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En arrivant au bureau, je salue Yasmine et monte directement dans mon bureau au dernier étage. J'apprends à me débrouiller dans ce nouveau travail et reste donc concentré toute la matinée. Après ma pause déjeuner, je retrouve mon assistant qui m'informe que Jade va passer dans quelques minutes. Un sourire se dessine sur mes lèvres lorsque j'entends cette nouvelle et de la dopamine se dissémine dans tout mon corps me rendant presque fébrile. Je ressemble à un gosse ayant son premier crush, c'est embarrassant. Mais je ne peux faire sortir de mon esprit la couleur si singulière de ses iris, ou la courbure de son corps. Je tourne en rond dans mon bureau attendant patiemment sa venue.
Lorsque de petits coups se font entendre sur la porte, j'accours vers celle-ci et l'ouvre sur la jeune femme éblouissante. J'espérais secrètement qu'en la revoyant je me rendrais compte qu'elle n'était pas différente des autres afin de pouvoir la sortir de ma tête, mais non, bien au contraire, elle est resplendissante. Quelque chose dans son aura m'obsède, mais je n'arrive pas à mettre le doigt dessus.
– Mademoiselle Chevalier, quel plaisir de vous revoir, dis-je en lui tendant la main.
Elle attrape ma main dans la sienne et exerce une légère pression, elle m'observe des pieds à la tête sans aucune gêne. J'aime son audace.
– Le plaisir est partagé, monsieur Wolf.
Si seulement cette phrase n'était pas une simple formule de politesse... Elle retire sa main de la mienne et la passe dans ses cheveux qui lui tombent gracieusement sur les épaules, alors que je l'observe comme si elle était une œuvre d'art dans sa robe près du corps. Je me force à détourner les yeux d'elle. Ce n'est pas de cette façon que je reprendrai ma position dominante. Nous nous installons dans le coin de mon bureau où deux grands fauteuils blancs se font face, une petite table en bois les séparant. Jade s'installe et croise ses jambes de déesse avant de sortir des documents de son sac. Je l'observe d'une façon si intense sans même le faire exprès.
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– Vous voulez développer votre entreprise et, d'après mes recherches, la monnaie que vous avez développée fonctionne très bien au Royaume-Uni. Ce qu'il vous faut à présent, c'est vous faire connaître pour dépasser vos concurrents. Pour cela il faut de la pub, beaucoup de pub. Il faut qu'on entende parler de vous et de votre entreprise.
Ses yeux ne quittent pas les miens. Professionnelle et sérieuse, voilà ce qu'elle est. Et je n'en suis que plus intrigué par elle.
– Tout à fait, vous avez des idées ?
Ce n'est pas vraiment dans les tâches qui lui incombent, mais je
tente ma chance.
– En effet.
Elle sort de sa pochette des photocopies de journaux anglais où je figure en première page. Je plisse les yeux devant ces articles peu flatteurs à mon sujet. Je ne vois pas en quoi cela peut m'aider.
– En Grande-Bretagne vous étiez une personnalité à suivre, les gens s'intéressaient à votre vie pour votre côté « Bad Boy ». Un jeune milliardaire pas trop mal à regarder qui s'attire les foudres des paparazzis, c'est ce qu'il nous faut pour développer votre clientèle.
Pas trop mal à regarder ? Alors maintenant, je suis pas trop mal à regarder. C'est déjà ça je suppose ...
– Vous ne pensez pas que les gens vont s'imaginer que je ne suis pas sérieux et que je ne suis pas capable de diriger une entreprise si je renvoie cette image ? demandé-je intrigué.
Elle sourit légèrement.
– Faites-moi confiance monsieur Wolf, je sais ce qui est bon pour vous, dit-elle simplement.
Je sais ce qui est bon pour vous... Cette phrase, sortie de ses lèvres, me laisse un goût sucré sur la langue, et je ne saurais dire pourquoi. Je ne doute pas de son intelligence, mais je suis tout de même perplexe quant à sa stratégie. Jade s'avance sur son fauteuil afin de réduire l'espace entre nous.
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– Sortez, faites parler de vous mais surtout gardez cet air supérieur que vous avez sur le visage. Vous êtes juste un homme d'affaires brillant qui sait prendre du bon temps. Et croyez-moi, de cette façon, vous allez dépasser tous vos concurrents. Les gens parlent déjà de votre venue en France, ce ne sera pas difficile d'attirer les journalistes.
Je passe mes doigts sur mon menton réfléchissant, Jade me semble sûre d'elle. Il y a pire comme moyen de se faire connaître. Je note qu'elle a remarqué que j'avais un ego certainement aussi important que le sien, de quoi être son digne rival.
– Vous m'avez convaincu ! Mais il reste un petit problème...
Jade fronce ses sourcils bien dessinés en attendant que j'en dise
plus.
– Je viens d'arriver ici, je ne connais personne et je me vois mal sortir seul où que ce soit.
Jade semble réfléchir puis ses yeux retrouvent les miens. Je feins l'innocence, du moins j'essaye.
– Je pourrais vous aider, sortez avec moi ce soir, je vous présenterai quelques personnes, ce sera un bon début.
En plein dans le mille, Chevalier. Un sourire en coin se dessine sur mes lèvres, elle a répondu exactement ce que je voulais.
– Sortir avec vous ? demandé-je en souriant.
Le haut de ses pommettes prend une teinte rosée, enfin une expression sur son visage ! Elle a pris pour habitude de garder un visage impassible et de ne rien laisser paraître. La voir rougir devant ma question est comme une petite victoire personnelle.
– Un rendez-vous professionnel bien sûr, pour le bien de l'entreprise, se défend-elle.
Je ricane devant sa remarque. Professionnel ? On verra bien Jade, on verra bien.
– Bien sûr, réponds-je en me levant de mon siège. Elle fait de même, nous nous approchons de la porte.
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– Je vous attendrai à l'accueil à 21h, ne soyez pas en retard mademoiselle Chevalier.
S'il y a une chose qui m'énerve, c'est le retard. Je suis toujours à l'heure et j'attends la même chose des autres. Sans relever ma remarque, elle répond :
– À ce soir, monsieur Wolf.
Je ne sais pas si elle se rend compte à quel point je la déshabille du regard, ou encore à quel point je suis réceptif à toutes les choses qu'elle me dit. Je ne savais même pas que c'était possible d'être autant déstabilisé par quelqu'un. Ce n'est pas seulement son physique, bien que très avantageux, mais aussi ce qu'elle dégage. C'est difficile à expliquer, je ne suis moi-même pas sûr d'où cela provient. Peut-être que cela vient du fait que je me retrouve en elle, ou alors que j'ai l'impression de la percer à jour en un regard. Ce que je peux affirmer avec certitude, c'est que je ressens une sensation d'adrénaline dès lors que je suis avec elle, et ça, ce n'est pas quelque chose de commun.
21h arrive rapidement, je n'ai même pas pris le temps de retourner chez moi. J'ai gardé le même costume mais j'ai simplement enlevé ma cravate et défait les deux premiers boutons de ma chemise noire laissant apparaître un tatouage recouvrant mes clavicules, une citation en calligraphie. Si je dois jouer le rôle du Bad Boy, comme dit Jade, autant que je le joue au maximum de mes capacités. Je tourne en rond à l'accueil en attendant Jade. À cette heure-ci, il ne reste plus que quelques employés d'entretiens.
21h05, je l'avais pourtant prévenue de ne pas être en retard, je déteste ça. Je décide de sortir du gratte-ciel pour l'attendre à l'extérieur. Pour un mois de septembre il fait encore chaud, la petite brise est très agréable.
21h07, je vais certainement la réprimander à son arrivée. Je déteste... Mes pensées sont coupées par l'arrivée de Jade, dans sa petite robe noire aux manches longues, ses éternels cheveux lisses placés sur son épaule droite et son rouge à lèvres rouge sombre, elle
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est tout simplement irrésistible. Le tissu moule son corps d'une façon si délicate, je peux imaginer chacune de ses formes.
– Vous êtes en retard, mademoiselle Chevalier, grondé-je.
J'essaie de paraître le plus autoritaire possible. Face à ma remarque, Jade attrape sa lèvre inférieure entre ses dents, l'air désolé. Et c'est seulement maintenant que je m'en rends compte, elle sait très bien ce qu'elle fait, elle sait le pouvoir qu'elle a sur moi et sur beaucoup d'autres hommes probablement. Je refuse d'être associé aux autres, je veux être différent, ma fierté m'y oblige. Je veux inverser les rôles, je veux avoir du pouvoir sur elle. Alors, dans un geste rapide, j'attrape son menton entre mes longs doigts pour lui faire lâcher sa lèvre inférieure, plongeant le noir de mes yeux dans ses iris noisette tirants vers l'orange, elle sursaute légèrement ne s'attendant pas à un tel geste de ma part. Je retire mes doigts lentement en caressant sa peau.
– Excusez-moi, dit-elle simplement en me détaillant du regard.
Je souris intérieurement voyant qu'elle n'est pas aussi sûre d'elle qu'elle le laisse paraître. Je sens que cette soirée va être intéressante.
– Où voulez-vous qu'on aille ?
Ses grands yeux me scannent essayant de déterminer mon humeur.
– Je pensais vous emmener au bar lounge où les associés de mon cabinet se rendent souvent, c'est vendredi soir alors je pense que je pourrais vous présenter beaucoup de monde.
Jade parle comme si elle avait retrouvé son aplomb. Et cela ne me donne qu'une seule envie, reprendre le dessus.
– Je vous suis, réponds-je en souriant.
Elle hoche la tête et je crois apercevoir un léger sourire se dessiner sur le coin de sa bouche. Je comprends vite pourquoi lorsqu'elle se tourne dos à moi. Sa robe moule son corps à la perfection laissant apparaître ses longues jambes. Elle sait ce qu'elle fait, elle le sait très bien même. Elle a la capacité de me rappeler chaque seconde la beauté du corps féminin. Il y a une raison pour laquelle la femme est l'un des sujets les plus courants de l'art. Et cette raison se trouve en face de moi. Levant les yeux au ciel pour reprendre mes esprits, je la
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rattrape. Jade enfile le blazer qu'elle tenait entre ses mains. Je la soupçonne de l'avoir enlevé pour me faire tourner la tête.
Nous arrivons très vite au bar, l'ambiance est très calme, tout le monde porte encore sa tenue de travail. Je m'installe à une table alors que Jade va chercher à boire lançant des sourires à ses collègues. Elle revient très vite avec deux verres de rosé.
– Merci, dis-je, distrait par la foule présente.
J'essaie de m'habituer à l'environnement, d'étudier le comportement des Français. J'arrive à comprendre la langue, mais dans une conversation de groupe, j'ai plus de difficultés. L'atmosphère est différente ici, elle est moins chaleureuse.
– Avec plaisir, monsieur Wolf.
Sa réponse me force à concentrer mon regard sur elle. Je la surprends à lorgner le tatouage dépassant de ma chemise, essayantprobablement d'en comprendre le sens.
– Vous êtes très belle ce soir mademoiselle Chevalier.
Ses yeux rencontrent les miens, elle ne semble pas du tout surprise par mon compliment. J'ai l'habitude de flatter facilement. C'est l'avantage de ne pas avoir de problème de confiance en soi, je n'ai pas de mal à booster celle des autres.
– Merci.
Je fronce les sourcils devant sa réponse.
– Vous n'appréciez pas les compliments ? demandé-je intrigué.
Elle laisse échapper un petit rire.
– Si, bien sûr, mais je préfère qu'on me complimente sur mon intelligence plutôt que sur mon physique, c'est tout.
C'est la première fois que j'entends ça. Je me retrouve dans ses mots, j'aime ça.
– Pourquoi ?
Elle boit une gorgée de son vin avant de me répondre.
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– C'est plus important, être intelligent vous apporte bien plus dans la vie qu'être beau.
Je me rapproche d'elle sur la banquette en forme de U, mon genou frôle le sien.
– Vous savez ce que je pense ? Je pense que vous préférez que l'on vous complimente sur votre intelligence car vous savez déjà que vous êtes belle, dis-je en tendant le doigt vers elle.
Jade sourit en baissant les yeux, je saisis son menton dans ma main une nouvelle fois pour qu'elle me regarde dans les yeux. J'adore faire ça, j'ai cette impression de contrôle lorsque mes doigts caressent sa peau.
– Monsieur Wolf, je vous assure que je sais également que je suis intelligente, je préfère juste que l'on me complimente à ce sujet, cela montre que la personne en face cherche vraiment à me connaître.
Je souris légèrement, cette femme est tout simplement extraordinaire. Elle pose sa main sur la mienne toujours accrochée à son menton pour que je la lâche. Mais je glisse la mienne sur sa mâchoire et attrape sa nuque pour rapprocher son visage du mien. Prise au dépourvu, elle laisse tomber sa main le long de son corps et respire fortement.
– Dois-je vous rappeler que nous sommes en rendez-vous professionnel monsieur Wolf ? dit-elle près de mes lèvres.
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