La Tour d'Ivoire - Tome 1

By mmancassola

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Il y a plus de deux mille ans, un petit nombre d'hommes et de femmes parmi les plus intelligents, riches et p... More

La Tour d'Ivoire
Le bal des seigneurs, partie 1
Le bal des seigneurs, partie 2
Le feu et la glace
Une braise dans le coeur
Dangereuse attirance
La rose de sang
Le prix de la liberté
La force comme seule reine
La reine des dieux
Les trésors du passé
Trahison
Jeu dangeureux
La jeune fille aux yeux de braise
La fille du passé
Le parfum de l'espoir
Pacte avec le diable
Le palais des promesses perdues, partie 1
Le palais des promesses perdues, partie 2
L'art du faux
Rivale
La fille aux yeux de vérité
Le sceau du prisonnier
Les noces blanches
À la gloire des Créateurs
Sacrifice
Lévana Sildek
Fuite
Le ciel de la liberté
Vert Emeraude
La vérité sous l'ivoire
La Nation d'Émeraude
Mensonges
Le monde perdu
Les yeux de feu
Déchéance
La colère d'un prince
Les guerriers de feu
Passé sanglant
✏️ Fan Art - Era ✏️
Les ennemis éternels
Echos du passé
Frères de sang
Éclat de glace
Conseil de guerre
Le roi sans couronne
La flèche du ciel
La plus grande des Eléazar
Narda
Le Prince déchu, partie 1
Le Prince déchu, partie 2
La Souffleuse de Rêve
✏️ Fan Art 2 - Era ✏️
Douce désillusion
Les retombés d'ivoire
Le Palais d'Emeraude, partie 1
Le Palais d'Emeraude, partie 2
La Tour d'Ivoire - Tome 2
Questions - réponses La Tour d'Ivoire
L'aventure continue !

Nuit étoilée

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By mmancassola

« I found the devil. I found him in a lover. »

La matinée et le début de l'après-midi s'enchainèrent en un tourbillon de tissus et de paillettes, je ne vis pas les heures passées ni les domestiques s'affairer autour de moi en silence. Leur visage souriant à l'idée d'un mariage me donnait la nausée, j'avais envie de leur hurler à la figure la réalité de cette union, il n'y avait rien de romantique entre Ayaan et moi, rien que de deux jeunes adultes qui devaient unir leurs deux familles. C'était tout. Rien de plus.

Bientôt je serai partie, loin d'ici, loin de cette prison, de ces gens aux sourires faux et à la jeunesse quasi éternelle.

Anna s'occupait de mes cheveux, et dans le grand miroir qui me faisait face, j'observais le moindre de ses gestes ; la concentration dans ses yeux rouges, ses mèches noires qui lui tombaient dans les yeux, sa peau trop pâle, presque maladive. Parfois, elle pressait un peu plus fort ses mains sur mon épaule ou me lançait un regard appuyé, j'étais reconnaissante de son soutien, même si je la connaissais à peine, même si bientôt je ne la reverrai plus jamais. Mais rien ne pouvait calmer le bourdonnement incessant dans mon crâne ni les battements effrénés de mon cœur.

Elles dénouèrent mes cheveux, les lavèrent et les brossèrent, ils sentaient délicieusement bon, un mélange fruité et exotique, l'odeur du soleil et d'un fruit sucré, mon corps entier embaumait cette douce odeur. Mes cheveux avaient été ramenés sur mon épaule droite, de sorte que l'on pouvait voir le tatouage des mètres au loin. Sur ma peau pâle, on ne voyait que lui. Je le fixai et son encre noire me brulait la rétine, je finis par détourner les yeux, vaincue.

Anna avait un plan, elle n'avait pas encore pu m'en faire part, mais elle savait quoi faire, je le voyais dans ses yeux, dans sa posture déterminée. Je mis tous mes espoirs en elle, consciente de mon impuissance. Je venais de mettre mon avenir dans les mains d'une gamine de 15 ans.

Pas n'importe laquelle, essayai-je de me convaincre, une Souffleuse de Rêves.

Ma robe, choisie par les bons soins d'Ayaan, était magnifique. Je ne pouvais le nier. Noir et or. Les couleurs de nos deux familles. Des volutes d'or semblaient survoler le tissu d'un noir profond. Mon dos était nu, tandis que la robe remontait jusqu'à mon cou en un fin anneau doré. Sans compter qu'elle était fendue au niveau de ma hanche. Ce n'était pas la robe de la jeune fille dont j'avais dû jouer le rôle jusqu'à maintenant, non, c'était la robe d'une femme. La robe d'une future reine.

Mes paupières avaient été maquillées dans les tons noirs, s'étirant jusqu'à un gris foncé à la limite entre mon arcade sourcilière et mes tempes. De fins diamants avaient été posés sur le coin externe de mes yeux, de même que mes cils avaient été saupoudrés de poudre d'or. Mes lèvres étaient peintes en rouge vif, et une mince touche de blush illuminait mes pommettes.

J'aurais pu fondre en larme en me découvrant. J'étais... Aucun mot ne pouvait décrire la femme aux yeux violets qui me contemplait avec calme dans le miroir. Inhumaine. Époustouflante. Je clignai des yeux, incapable d'affronter un visage d'une telle beauté.

Mon visage, c'était mon visage...

Les domestiques me contemplèrent avec un mélange de fierté et de dévotion.

-Vous êtes merveilleuse, dame Era, murmura une femme à ma droite.

-Le mot est bien faible, ajouta Anna, bouche bée.

Deux coups frappés à ma porte me firent sursauter, les femmes froncèrent les sourcils, puis une finit par aller ouvrir.

-Bonjour, je suis venue voir ma fiancée, susurra une voix qui me glaça.

Je bondis de mon fauteuil, et me tournai vers Anna, qui écarquilla les yeux de stupeur. Les mariés ne devaient pas se voir avant la cérémonie.

-Je... prince Ayaan, je ne crois pas, balbutia la femme.

-J'ai dit que je voulais voir ma fiancée. Tout le monde dehors, sur le champ, répliqua-t-il d'un ton sans équivoque.

Se confondant en excuses, les domestiques partirent une à une, Anna fut la dernière à sortir, elle me lança un dernier coup d'œil, l'air déchiré, puis elle baissa la tête et sortit, me laissant seule avec la personne dont je redoutais le plus la présence. J'aurais préféré devoir supporter ma mère.

Ayaan franchit la porte. Je dus retenir un cri de surprise. Il était à se damner. Je n'avais jamais vu un homme aussi beau. Il portait un costume entièrement noir avec pour seule touche de couleur, une cravate rouge. Le doré de ma famille n'avait pas besoin d'être représenté sur ses vêtements, ses cheveux blonds suffisaient amplement. Les Malkam avaient volontairement choisi cette couleur de cheveux pour leur fils, en effet, ils savaient qu'un jour ils épouseraient une héritière Eléazar. Tout avait été prévu. Depuis des années.

Ses cheveux blonds étaient soigneusement coiffés vers l'arrière, sa peau pâle brillait de mille feux, comme si une multitude de paillettes argentées constellaient son visage, captant la lumière environnante. Ses lèvres d'une teinte rose sombre, presque rouge, d'habitude étirées en un sourire ironique, étaient légèrement entrouvertes. Muet de surprise, ses magnifiques yeux gris étaient grand ouverts, il me contemplait de haut en bas, avant de s'arrêter sur mes lèvres, puis sur mon visage.

Ses yeux brillants d'une fièvre qui me fit chanceler, se soudèrent aux miens, il ouvrit la bouche pour dire quelque chose, puis se ravisa.

-Tu n'es pas censé être ici, fut la seule chose que je réussis à dire.

Son trouble disparut et il m'offrit un sourire en coin ravageur.

-Et toi, tu es merveilleuse, me répondit-il d'une voix chaude emplie d'une sincérité déconcertante.

-Toi aussi, laissai-je échapper dans un souffle, me maudissant intérieurement pour mon trouble.

Il s'approcha, la grâce de ses gestes encore plus visible dans ses vêtements sur mesure qui épousaient sa musculature fine. Ayaan était encore plus beau que son père. Plus redoutable, plus fascinant, mais était-il aussi cruel ? Voire plus ? Les images du coup d'État de Melech défilèrent dans ma tête, l'assassinat, les cris, le sang, la mort, partout, des mains de celui qui allait me passer l'anneau au doigt.

Le souffle me manqua, Ayaan du le voir, car la seconde suivante, il fut à mes côtés, une main dans le bas de mon dos dénudé, l'autre sur ma joue. Ses mains étaient froides, douces. Des mains de prince, pas celles d'un tueur.

Ses prunelles grises cherchèrent les miennes, le trouble devait se lire clairement sur mon visage, d'habitude si fermé et maitrisé. J'aurais dû cacher mes émotions, c'était vital, mais je n'y arrivais pas, je n'y arrivais plus. Et là, avec Ayaan à mes côtés, avec sa tendresse, sa compassion, je laissai tomber le masque de froideur que je revêtais depuis ma plus tendre enfance, et laissai entrevoir la petite fille brisée par la perte de sa grand-mère, apeurée par l'avenir, révoltée par ce régime, et seule, terriblement seule.

Ayaan vit tout ça, comment, ça je ne me l'expliquais pas, mais il me vit, moi, Era Eléazar, telle que j'étais réellement.

Il pâlit, tandis qu'une gravité dont je ne le croyais pas capable emplit ses yeux. Je soutins son regard, je voulais qu'il sache qui il allait épouser ; une jeune femme morcelée, révoltée, perdue, déchirée entre sa loyauté envers les siens et son amour sans limites pour la liberté, chose qu'elle n'avait jamais connue. Une femme qui n'avait même pas eu un aperçu du gout subtil de cet enivrant désir.

Ayaan pinça les lèvres, et, la main tremblante, caressa ma joue puis mes cheveux, je fermai les yeux, au bord de l'implosion.

-Oh Era... je suis désolé.... tellement désolé...

Il me prit dans ses bras, je posai ma tête contre sa poitrine, incapable de lui rendre son étreinte, il me serra avec force, mais sans me faire mal, comme s'il avait peur que je m'enfuie, que je le fuie, lui.

-N'ait pas peur, mon amour, me souffla-t-il, ses lèvres à quelques centimètres de mes oreilles, je ne te laisserais jamais, et personne ne te fera jamais le moindre mal. Avec moi, tu seras libre, Era, tu vivras. Je te le promets.

Il se détacha de moi et se pencha, ses lèvres effleurèrent à peine les miennes.

-J'ai quelque chose pour toi, la touche finale...

Il me sourit, et chercha quelque chose dans son costume, je le regardai, sourcils froncés.

Lorsque je vis l'objet dans sa main, je restai bouche bée, incapable de prononcer le moindre son. Ayaan rit, et me prit la main.

-Pour toi, Era Eléazar, ma reine.

Je le regardai, l'interrogeant du regard, il hocha la tête, un sourire tendre sur les lèvres.

Je lui pris l'objet des mains, et le retournais dans mes mains. Une couronne. Ayaan m'avait offert une couronne. Évidemment, j'étais princesse, et un jour je serai reine. Tout ceci était si nouveau, avant, les rois et les reines faisaient partie du passé, de l'Histoire lointaine. J'avais trouvé ça ridicule de la part de Melech de rétablir la monarchie, idiot et à la hauteur de son arrogance. Mais maintenant, alors que je tenais ce bijou dans mes mains, je trouvais ça ... Impressionnant, comment ce petit objet pouvait-il être le symbole d'un tel pouvoir ?

Le diadème était un entrelacs de fines branches dorées, parsemées de fleurs violettes en améthystes. Raffiné, discret, éblouissant...

-Elle est à toi, expliqua-t-il, tu es officiellement la Princesse de la Tour d'Ivoire.

Il me la prit doucement des mains et avec délicatesse, la posa sur le sommet de mon crâne. Sa légèreté me surprit, je ne la sentais même pas, comme si elle avait été taillée pour moi.

Ayaan s'inclina, sérieux.

-Era Eléazar, Princesse d'Ivoire.

Je souris malgré moi, galvanisée par ce symbole de puissance sur ma tête. J'avais toujours été la cadette, la moins aimée, celle qui un jour allait devoir épouser un homme et perdre son nom. Rayé de la vie de ma famille. Galaad héritant de tout ce qui avait un jour été ma vie. À présent, j'avais encore plus, je pouvais devenir reine. Le rêve de toutes les femmes de la Tour. Et Ayaan serait mon roi, je l'observai, rayonnant dans ses habits royaux, le symbole de la nouvelle dictature, de sa famille, ma famille, bien visible sur son cou blanc.

Ayaan entrelaça ses doigts aux miens, les yeux brillants de mille feux. Il avait attendu des années, mais au final, il aurait ce qu'il avait toujours voulu : moi.

-Je n'ai jamais été aussi heureux de toute ma vie, et ceci est grâce à vous, ma dame.

Une lueur malicieuse éclaira son regard.

Et pendant une seconde, pendant une longue seconde, j'oubliai ma fuite, ma peur, et entrevis un avenir possible au côté d'Ayaan, pendant quelques instants, je n'eus plus envie de partir.

Mais quelqu'un frappa à la porte, et la magie de l'instant fut rompue, me ramenant à la réalité. Ayaan fit une petite moue déçue, déposa un ultime baiser sur mon front et alla ouvrir la porte.

-Pardonnez-moi, monseigneur Ayaan, mais votre père vous demande....

-Très bien.

Il se retourna et me lança un dernier regard brûlant avant de quitter la pièce. J'expirai lentement, consciente que j'avais retenu mon souffle pendant toute la durée de notre échange de regard.

Les domestiques entrèrent, Anna n'était pas là, mon cœur se serra.

-Nous devons rejoindre la Salle de l'Union, Dame Era, m'informa une femme un peu ronde, votre mariage va bientôt débuter.

Je pris une profonde inspiration, me forgeai mon meilleur masque de fausseté et fis mon plus beau sourire à toutes ces femmes qui m'observaient avec inquiétude.

-Magnifique, allons-y mesdames !

Deux jeunes filles accoururent pour porter le long voilage noir constellé d'or qui venait terminer ma robe. On aurait dit une nuit étoilée, la minutie du travail aurait pu me tirer des larmes si je n'avais autant blindé mes émotions.

Même si je ne voulais pas le reconnaitre, la visite d'Ayaan m'avait redonné confiance en moi, il avait réussi à rallumer cette flamme en moi, il avait ramené cette jeune fille qui avait la rage de vivre, de se battre pour sa liberté. Je ne voulais pas penser à la brulure de ses mains touchant ma peau ni à son regard qui me clouait sur place.

J'avais attendu ce jour toute ma vie. J'allais m'enfuir. Quitter cet enfer.

Je relevai la tête avec arrogance, balayai les visages tournés vers moi et esquissai un sourire mauvais.

-Je ne voudrais pas faire attendre mon fiancé, tout de même...

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