Mauvais Rêves

De LesCrisVains

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Lorsqu'un vieux romancier croise un soir une jeune inconnue en pleurs, il ne lui en faut pas plus pour lui in... Mai multe

Premier Passage
Chapitre 1
Chapitre 2
Deuxième Passage
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Troisième Passage
Chapitre 9
Chapitre 10
Quatrième Passage
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Cinquième Passage
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Sixième Passage
Chapitre 23
Septième Passage
Chapitre 25
Chapitre 26
Chapitre 27
Chapitre 28
Chapitre 29
Chapitre 30
Chapitre 31
Huitième Passage
Chapitre 32
Chapitre 33
Chapitre 34
Chapitre 35
Chapitre 36
Chapitre 37
Chapitre 38
Chapitre 39
Chapitre 40
Chapitre 41

Chapitre 24

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De LesCrisVains

« Comment est-ce que tu peux, Ikare..?

— Comment est-ce que je peux quoi ?

— Comment est-ce que tu peux lui obéir ? »

Oriane et Ikare ont été ramenés chez eux par les deux mêmes gardes du corps qu'à l'aller, et à présent qu'ils se retrouvent dans leur appartement seuls l'un face à l'autre, les langues se délient enfin.

Les paroles de Cthul font l'effet d'un incendie chez la jeune femme. L'humiliation subie, sans oublier ses provocants sous-entendus sur une relation passée entre lui et Ikare, ont blessé son ego et diffusé en son sein un étrange poison. Un poison plus douloureux encore que ceux de l'Organisation. Un poison terrible, car purement humain.

Oriane ne pensait pas qu'elle connaîtrait ce poison un jour, pas aussi intensément du moins. Il l'envahit chacune de ses veines à présent, pourtant.

« Oriane...

Le blond ne parvient qu'à souffler ce nom, désarmé – chose plutôt rare chez lui.

— Ah ouais, "Oriane". Ça c'est de l'argument !

Elle fait les cent pas dans leur immense salon, d'habitude immaculé comme une chambre d'hôpital. Mais pour l'instant, l'aube écarlate l'orne au contraire d'ombres rougeâtres, filles du soleil et du sang de Laffiera.

— Tu... Tu peux pas comprendre.

En quête de mots, ses yeux se dirigent vers le plafond tandis qu'il écarte les bras, poursuivant en un soupir :

— G... Grâce à lui, je suis une... une légende, t'entends ? Ouais... Une putain de légende dans cette putain de ville !.. Comment tu pourrais comprendre, toi ? Je lui dois tout ! Il m'a transformé en l'Angelot !

Ce à quoi Oriane répond d'une voix pleine de reproches :

— Il t'a transformé en esclave !

— Et alors ? Ça vaut quoi, d'être l'esclave d'un seul type, si tous les autres te craignent ? C'est le prix à payer !

— Il t'a mis dans ses magouilles, tu vois pas ? C'est à cause de lui que tu es totalement malade.

Un sourire inquiétant vient animer le visage du jeune homme, tandis que son regard descend vers son interlocutrice pour répondre doucement – trop doucement :

— Mais non mon amour. C'est à cause de toi. »

N'importe qui d'autre l'aurait trouvé effrayant. Mais pas Oriane.

Cette folie qu'il affiche éveille la sienne, elle lui ôte un instant son amertume. Pire, la jeune femme se surprend à lui trouver des airs de seigneur. Superbe seigneur sans autre suzerain que Belzébuth... Elle l'aime, bon sang, et, l'espace d'une seconde, tous ses reproches pour lui s'évaporent. Pour le garder à ses côtés, elle serait prête à tout, même à suivre son immonde chemin. La voie du sang. La voie des ténèbres. La voie d'un ange qui ne l'a jamais été.

Demain elle torturera quelqu'un. Et alors ? Si elle le fait pour lui...

Sous l'effet de cette ardeur, le poison étend davantage son règne, rendant la douleur presque lancinante. Elle en hurlerait presque, cependant elle crache à la place :

« Tu as couché avec lui ?

Il la dévisage, joue à l'ignorant, alors elle articule froidement, le venin dans le coeur et dans la voix :

— Je te demande si tu as couché avec Cthul.

— Qu'est-ce qui te fait dire des trucs pareils ?

— Ne nie pas s'il te plait. Il l'a dit devant nous deux.

La mâchoire du jeune homme se crispe, son regard se détourne, plus éloquent qu'un "oui" clamé à tue-tête dans tout l'appartement. Il articule sans dissimuler sa gêne :

— Mais c'était avant toi, Oriane... On se connaissait pas et puis, tout ça c'est...

Soupir.

— J'étais jeune et con, Oriane.

— Tu l'es toujours, » réplique-t-elle, furibonde.

En réalité, la jeune femme ne sait pas contre qui elle est en colère. Contre Ikare ? Contre Cthul ? Contre le couple ignoble que ces deux-là formaient ? Ou alors contre elle-même et sa possessivité absurde ? Il y a quelque chose dans son sang qui est arrivé ce matin, et cette chose s'appelle la jalousie.

Oui, pour la première fois de son existence, elle est réellement jalouse, elle qui jusque-là ne connaissait que l'amour de Witahé – elle ne devrait même plus se souvenir de ce nom – et la douce assurance qu'Ikare était sien. D'ailleurs, c'est plutôt ce dernier qui est jaloux, d'habitude. Elle, au contraire, n'avait jamais peur d'une quelconque infidélité. Après tout, c'était elle qui avait abandonné un fantôme pour un meurtrier.

Mais maintenant, il y a l'image de Cthul qui s'impose, sa face de requin, ses manières perverses... Il y a l'image de Cthul qui aurait un jour connu, lui aussi, les lèvres d'Ikare.

Oui elle est jalouse, tombée sous l'emprise de celle-ci d'une manière fulgurante et implacable.

Désormais il y a cette fureur, cette chose terrible, inexplicable, toute-puissante, qui a envie de s'exprimer, de hurler, de tout détruire sur son passage. Le sang bourdonne dans ses oreilles, plus rien ne semble réel sinon cette volonté d'anéantissement. Si cela ne tenait qu'à elle, elle briserait tout le mobilier de cette pièce.

L'idée qu'un autre qu'elle ait pu toucher la peau d'Ikare la met hors d'elle. Alors Cthul, en plus ? Cet odieux personnage qui l'a mise à genoux, qui les a tous soumis ?

« C'était qu'une nuit, Oriane...

Ses poings se serrent:

— Une nuit ! Une nuit dans tes bras, c'est déjà trop !

— C'était il y a longtemps ! »

Le blond recule sous les attaques verbales – bientôt physiques – de sa compagne. Il n'ose même plus articuler la moindre justification, car il sait qu'elle n'écoutera plus rien de sa bouche.

Et il a raison. Dans le crâne d'Oriane, il n'y a plus que la jalousie, cette jalousie perfide et maladive, celle qui vous fait voir le monde entier comme un rival et l'amour comme une cage où il faudrait enfermer l'autre.

Ikare est à elle, rien d'autre qu'à elle. Il lui appartient tout entier : son corps, son rire, ses lèvres, ses mots, ses pensées, son coeur, ses sourires... Tout cela lui appartient !

« Il n'avait pas le droit ! hurle-t-elle.

La colère monte dans l'autre camp, soudain comme un petit démon à ressort qui sort de sa boîte. A son tour son compagnon fulmine, la voix qui faillit sous l'effet de la rage :

— Et toi, tu crois que tu ne me fais pas souffrir ? Toi et ton connard de Witahé ! Witahé, Witahé... Je voudrais l'avoir tué moi-même, bordel ! Et tu sais quoi ? J'ai encore l'impression qu'il est partout !

Il gémit et rugit à la fois. Il déraille, à croire qu'il est un automate dysfonctionnel et non un homme :

— Chaque nuit je rêve de lui, bordel ! Je l'ai enterré moi-même, tu le sais, hein ? Tu m'as vu faire ce jour-là, à l'enterrement ? Tout le monde m'a vu l'enterrer ! Je... Je te jure qu'il est mort ! Et pourtant j'ai l'impression qu'il est... qu'il est toujours là !

Il plie les genoux, en larmes, rouant de coups le ventre d'Oriane, mais sans la moindre force dans ses poings, comme un enfant qui frappe par caprice et non par désir de faire mal. Ce ne sont pas ces faibles coups qui font mal au coeur d'Oriane, non. Ce sont ses mots.

— Chaque nuit je rêve que tu m'abandonnes... Et qu'il revient te prendre...

Affaibli par le désespoir, il souffle encore :

— Chaque nuit je me rappelle de ça, je te jure... Le jour où je suis tombé amoureux de toi... Tu l'aimais encore lui. »

Les deux amants s'effondrent l'un et l'autre, anéantis, sans oser s'étreindre. Ils se taisent et se dévisagent. Dans ce silence et ces regards, ils trouvent l'un dans l'autre le reflet de leurs jalousies respectives. Triste ironie que d'être jaloux d'une personne elle-même jalouse... C'est à en pleurer : ils le font, longuement, doucement, dans un instant qui semble éternel. Puis Ikare finit par se relever, toujours sans un mot. Il s'éloigne et, coupable comme le criminel qu'il est, quitte l'appartement. Seul le claquement de la porte brise le silence.

Sa compagne sait ce qu'il va faire : sortir dehors, s'en prendre au premier ivrogne titubant venu, et le frapper à mort, le frapper si fort que ses poings seront couverts d'hématomes, le frapper si fort qu'il le tuera peut-être sur le coup. C'est tellement plus simple d'aller donner sa douleur aux autres, quand on s'appelle Ikare Dussant. On fait mal en croyant que cela permettra d'aller mieux soi-même.

Elle le sait, qu'il déraille. Elle le sait, qu'elle également.

Mais elle ne dit rien, ne tente rien, ne fait rien pour l'arrêter. Au contraire : elle aussi a besoin d'oublier...

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