La Tour d'Ivoire - Tome 1

By mmancassola

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Il y a plus de deux mille ans, un petit nombre d'hommes et de femmes parmi les plus intelligents, riches et p... More

La Tour d'Ivoire
Le bal des seigneurs, partie 1
Le bal des seigneurs, partie 2
Le feu et la glace
Une braise dans le coeur
Dangereuse attirance
La rose de sang
Le prix de la liberté
La force comme seule reine
La reine des dieux
Trahison
Jeu dangeureux
La jeune fille aux yeux de braise
La fille du passé
Le parfum de l'espoir
Pacte avec le diable
Le palais des promesses perdues, partie 1
Le palais des promesses perdues, partie 2
L'art du faux
Rivale
La fille aux yeux de vérité
Le sceau du prisonnier
Nuit étoilée
Les noces blanches
À la gloire des Créateurs
Sacrifice
Lévana Sildek
Fuite
Le ciel de la liberté
Vert Emeraude
La vérité sous l'ivoire
La Nation d'Émeraude
Mensonges
Le monde perdu
Les yeux de feu
Déchéance
La colère d'un prince
Les guerriers de feu
Passé sanglant
✏️ Fan Art - Era ✏️
Les ennemis éternels
Echos du passé
Frères de sang
Éclat de glace
Conseil de guerre
Le roi sans couronne
La flèche du ciel
La plus grande des Eléazar
Narda
Le Prince déchu, partie 1
Le Prince déchu, partie 2
La Souffleuse de Rêve
✏️ Fan Art 2 - Era ✏️
Douce désillusion
Les retombés d'ivoire
Le Palais d'Emeraude, partie 1
Le Palais d'Emeraude, partie 2
La Tour d'Ivoire - Tome 2
Questions - réponses La Tour d'Ivoire
L'aventure continue !

Les trésors du passé

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By mmancassola

« You're a rose in the field where wolves walk. »

    Le reste du discours fut flou pour moi, je ne me souvenais de rien. Juste de la vague sensation d'avoir marché et la lumière artificielle de notre soleil me réchauffant la peau.    
Maintenant, j'étais debout, au beau milieu de notre salon, ma mère assise dans un fauteuil bleu clair, mon frère, debout derrière elle, l'air préoccupé. Nous ne nous étions pas adressé le moindre mot depuis, depuis... le discours et l'annonce de mon mariage avec Ayaan. Ils ne me regardaient même pas, l'ambiance était pesante.

    -Pourquoi ? demandai-je simplement, je ... j'ai toujours cru que je devrais épouser Sofian, jamais je n'aurai pensé que....

    Ma mère garda les yeux fixement baissés sur le tapis et tira une longue bouffée de sa cigarette. Ma mère fumait tout le temps, de sorte que tout l'appartement empestait le tabac.

-Tu mérites plus que ça, ma fille. Sofian Razane n'est qu'un ridicule gamin comparé à Ayaan Malkam. Ce n'est pas notre faute si tu n'as aucune ambition et que nous sommes toujours obligés de décider nous-même ce qui est le meilleur pour toi....

-Le meilleur pour moi ? sifflai-je, hors de moi. Le meilleur pour vous, plutôt !

-Tu l'épouseras, un point c'est tout. Cesse donc de faire l'enfant, Era et comporte-toi en femme pour une fois !

-Pourquoi m'avez-vous fait ça... lâchai-je dans un gémissement minable.

Je ne montrais jamais mes sentiments devant les autres, mais là, c'en était trop, j'avais envie de hurler, de pleurer jusqu'à ce que mes larmes ne suffisent plus à repousser cette angoisse qui m'oppressait le cœur.

Galaad, surpris par mon ton plein de désespoir, releva subitement les yeux et planta son regard doré dans le mien. Il avait l'air tourmenté pour la première fois de sa vie. Son air sombre faisait échos au mien. Lui qui se réjouissait tout le temps de mon malheur, je pensais que cette nouvelle le comblerait de joie, c'était d'ailleurs ce qu'il m'avait d'abord fait comprendre.

Ma mère, quant à elle, ne laissa rien paraitre d'un quelconque trouble, seul un tic nerveux vint agiter le coin de ses lèvres, signe qu'elle était nerveuse. Ses cheveux blonds étaient soigneusement attachés, mais elle semblait fatiguée.

La porte s'ouvrit alors, nous nous crispâmes tous trois. Azel Eléazar entra, son costume noir impeccable, plus aucune trace de sang visible, je l'avais pourtant vu en être éclaboussé.

Je le dévisageai sans vergogne. Son air était froid, mais adouci par des traits harmonieux, contrairement à ceux de Melech qui étaient plus tranchés, plus durs, mais qui n'engageait en rien sa beauté mortelle. Ces deux hommes se complétaient, tels le yin et le yang, tels la lune et le soleil. Melech lumineux, charismatique, souriant et possédant un génie tactique effrayant. Mon père, distant, taciturne, diaboliquement intelligent, œuvrant dans l'ombre. L'un ne pouvait triompher sans l'autre.

    Je repensai à grand-mère. Comment ce même homme qui venait de prendre part à des assassinats pouvait-il être le sang, la chair, le fils de l'âme la plus belle et la lumineuse que le monde n'avait jamais portée ?

-Comment as-tu pu faire ça, murmurai-je... comment as-tu pu prendre part à ... à ça !

Mon père ne se laissa pas démonter et se contenta de me regarder, l'air passablement ennuyé.

-Ne parle pas comme ça à ton père, Era, siffla ma mère.

Elle se leva et se posta au côté de mon père, j'étais seule contre tous.

Je jetai un coup d'œil à Galaad, qu'attendais-je de lui ? Il ne m'avait jamais défendu, pourquoi le ferait-il aujourd'hui ?

-Era...

Contre toute attente, il s'approcha de moi et me toucha l'épaule, je fis un bond et le fusillai du regard.

-Ne me touche pas !

La douleur passa dans ses yeux d'or, il me fixa longuement, puis la cruauté habituelle qui l'habitait revint et il tourna les talons, sans un regard en arrière.

-Très bien. Débrouille-toi.

Je tentai de contenir la colère qui bouillonnait dans mes veines, mais c'était peine perdue. Toutes ces années à me taire, à subir...

Je me relevai fièrement, et me plantai devant mon père. sous ses épais cils blonds, ce dernier m'observa calmement,

-Tu me dégoutes. Heureusement que grand-mère n'est plus là pour voir quel monstre tu es devenu.

Ses pupilles se dilatèrent et un sentiment que je ne réussis pas à interpréter sembla soudain illuminer ses yeux. Je ne pus le regarder plus longtemps.

    Ma mère me gifla violemment, à tel point que je chancelai et dus me rattraper à un des fauteuils pour ne pas m'écrouler. La douleur explosa dans ma joue, ma vision se brouilla momentanément.

    Les joues en feu, je me précipitai dans ma chambre, j'entendis ma mère se lancer à ma poursuite, mais mon père l'en empêcha en la retenant pas le bras.

    J'entendis encore leurs voix à mesure que je m'enfonçais dans le dédale de notre appartement.

    -Azel, qu'est-ce que tu fais ?

    -Laisse-là.

    -Mais pourquoi ?

    - Laisse-lui ces derniers instants de solitude. Tu peux au moins lui octroyer ça.

    -Mais je dois lui parler. Elle doit savoir qu'elles seront ses devoirs d'épouse !

    -Elle sait déjà tout ça, Magdalena. Tu l'as bien élevée.

    -Oui... j'ai fait ce que j'ai pu. Mais elle doit y arriver, c'est vital.

    -Je sais, je le sais aussi bien que toi...

    Arrivée dans ma chambre, je fermai ma porte à clé, retirai rageusement cette maudite robe et me jetai sur mon lit, avec mes sous-vêtements comme seuls habits. Ma mère serait folle si elle me voyait. Au diable ma mère, mon père, les quatre Familles et leurs maudites règles ! Au diable la famille Malkam !

    Je pleurai pendant ce qui me semblait être des heures. Pleurer était si étrange, aussi loin que je m'en souvienne, je n'avais jamais pleuré, pas la moindre larme. Nous devions être forts, sans peur, sans aucune faiblesse.

Lorsque je n'eus plus aucune larme à verser, je me relevai et mis une des robes-pulls qui avaient appartenu à ma grand-mère, une grise, douce et chaude. Je mis le nez dedans, son odeur était encore là. Un miracle. Cela suffit à me calmer.

Tu me manques tant grand-mère....

Je me mis à arpenter ma grande chambre, je contemplai ses murs blancs et or que j'avais déjà longuement regardés tout en pensant à ce qui allait advenir de ma vie, ce qu'ils allaient bien pouvoir faire de moi.

Mes yeux se posèrent sur tous ces somptueux meubles nacrés, luxueux et aussi vieux que le Tour d'Ivoire elle-même, datant d'un faste lointain. Ma chambre était somptueuse, majestueuse, lumineuse. Mais moins pompeuse que le reste de notre appartement ou bien que la demeure des Malkam, avec ses teintes rouges et noires, qui me faisaient penser à tout le sang versé par les miens.

Je m'approchai du mur du fond qui comportait les portraits de toutes les femmes de la lignée Eléazar qui m'avait précédée, il était dans notre tradition que chaque fille Eléazar possède son portrait. Concernant la chambre, elle avait accueilli des générations de cadets Eléazar, filles et garçons confondus. 

Les femmes mariées à un Eléazar, comme ma mère, n'avaient pas le droit à leur portrait. Seuls les « vrais » Eléazar en avaient le droit. C'était spécifique aux femmes, les hommes Eléazar n'étaient pas inclus dans cette tradition.

Les premiers Eléazar n'avaient jamais dormi dans cette chambre ni dans celle de Galaad, puisque la Tour était encore en construction, ce fut le cas de la fille ainée d'Alexander Eléazar, Arielle.

Arielle Eléazar était née à une époque où la manipulation génétique n'était pas encore devenue si courante qu'aujourd'hui, pourtant, elle avait été d'une beauté époustouflante, son air sûr d'elle et sauvage lui donnait l'allure d'une princesse rebelle. Elle avait de beaux yeux vert foncé, et des cheveux blonds, comme les miens. La légende disait que ce fut en voyant la chevelure dorée de sa fille qu'Alexander Eléazar décida d'en faire le symbole et le signe distinctif de notre famille. Symbole qu'aujourd'hui encore, nous portions tous. Symbole qui était devenu mon fardeau.

Les portraits se succédaient, des visages, des yeux, des expressions tout aussi différents et beaux les uns que les autres, et plus le temps passait plus la perfection venait s'installer dans leur visage. Mais il y avait toujours ces mêmes cheveux blonds. J'arrivais enfin à la femme que j'aimais le plus au monde. De longs cheveux blonds, des yeux marron, doux et vifs, un visage souriant, quoiqu'un peu mélancolique. Maria Eléazar, comme toutes les autres, n'avait que 18 ans lorsque ce portrait d'elle avait été peint.

    Jusqu'à sa mort, jusqu'à mes 9 ans, ce fut elle qui m'éleva. J'aurais dû avoir une nourrice, comme tous les autres enfants des quatre Familles. Elle s'appelait Tina, c'était une femme gentille, mais elles avaient passé un marché avec ma grand-mère, Tina l'avait laissée m'éduquer. Je pense sincèrement que mes parents étaient au courant, mais Maria étant la chef des Eléazar à l'époque, ils ne pouvaient pas vraiment s'opposer à elle.

    Ce n'est qu'après qu'elle soit morte d'une maladie foudroyante à l'âge de 70 ans, alors qu'elle ne paraissait en avoir que 40, que mon père prit sa suite. Normalement, on arrêtait de gouverner sa Famille lorsqu'on atteignait 100 ans, ou alors, et bien, quand on mourrait, évidemment. Lorsqu'un membre des quatre Familles atteignaient 100 ans, bien qu'ils étaient encore jeunes à cet âge, leurs enfants les poussaient toujours vers la porte de sortie, ils voulaient gouverner aux aussi. Mais à mon humble avis, Melech comptait bien gouverner jusqu'à sa mort...

    Je serrai avec force le collier que je devais constamment porter sur moi, transmis de génération en génération, celui que je devrais rendre lors de mon mariage, probablement. Un collier avec une aile d'ange doré. Toutes les familles avaient leur emblème. Les Malkam, leurs plumes et leurs épées entrecroisées, les Dolora, deux yeux, un vert et un bleu, les Razane, une goutte en or, en référence à leur peau sublimement dorée. Mais pour les Eléazar, c'était plus compliqué, alors Alexander Eléazar eut l'idée d'une paire d'ailes d'ange, dorées, comme nos cheveux, nos cheveux aussi éclatants et délicats qu'une aile divine.

    Mon portrait succédait à celui de ma grand-mère, je me souvenais encore du jour où il avait été fait, j'avais dû prendre la pause pendant plusieurs heures, j'en avais eu des courbatures atroces. Le peintre avait mis l'accent sur le violet de mes yeux, de sorte que c'était la première chose que l'on voyait. J'avais un air préoccupé, détaché.

    Je souris doucement à cette jeune fille, c'était il y a quelques mois, pourtant j'avais l'impression que c'était il y a des années. Tant de choses avaient changé depuis... Y compris moi. Cette fille aux cheveux blonds semblait si naïve, si faible. Pourrais-je devenir quelqu'un d'autre ? Devenir comme ma grand-mère ? Forte et courageuse et non pas docile et lâche ?

    Je me détournai de tous ces visages, de toutes ces vies et décidai de me plonger à nouveau dans le plus grand trésor qui avait uni tous les cadets qui avaient dormis et vécut dans cette chambre au cours des siècles. Je soulevai une des lattes du plancher et en ressortis une petite boite à bijoux bleutée, assez grande d'ailleurs, et l'ouvris.

    Un livre. Un journal intime. Un bien précieux, puisqu'il était écrit dans une langue oubliée. Les quatre premiers Créateurs avaient créé une toute nouvelle langue, et il était proscrit de pratiquer une autre langue que celle de la Tour d'Ivoire.

    Ainsi, je ne comprenais pas ce qui y était écrit, mais ce n'était pas grave, juste sentir ce carnet contre moi, écrit de la main d'une personne ayant vécu des milliers d'années plus tôt, était un pur miracle. Un espoir.

    Cette merveille s'était transmise de génération en génération sans que personne mis à part les cadets de la famille Eléazar n'en sache quoi que ce soit, et aucun n'en avait dit le moindre mot. C'était notre secret, que tous avaient emporté dans leur tombe, et je comptais bien faire de même et veiller farouchement dessus. C'était notre seule manière de se rebeller face à notre injustice de cadet.

    Le cuir rouge était abîmé par les années, et les pages jaunis commençaient à s'effriter. Si j'en jugeais par le prénom inscrit sur la première page, le journal avait appartenu à une certaine Amara, 20 ans, qui avait vécu dans les années 2750. En revanche, tellement de choses étaient arrivées pendant cette période que je n'avais pas la moindre idée de ce que contenait ce carnet.

    Cela semblait si vieux, si lointain, à présent, nous étions en 4 507, et le monde avait tant changé.... Les Hommes également.

     Un coup frappé à ma porte me fit sursauter, je me hâtai de ranger mon trésor, arrangeais rapidement mes cheveux et collai mon oreille à la porte.

    -Era, chuchota une petite voix, c'est moi, Iris. Ouvre-moi !

    Soulagée, j'ouvris la porte. Elle rentra, suivie d'Adina, sa petite sœur.

    Je lui souris. Elle était adorable dans sa petite robe verte, avec ses grands yeux fixés sur moi et ses cheveux châtains qui tombaient en cascade sur ses épaules nues.

    -J'étais obligée de l'emmener. Père et mère ont une réunion importante avec les Quatre Familles, je n'y ai pas été convié et je dois la garder.

    Je hochai la tête, la gorge nouée.

    Iris me détailla attentivement, puis me pris subitement dans ses bras, je la serrai à mon tour, et me laissai envahir par sa force.

    -Ça ira, Era, ne t'en fais pas. Tout va s'arranger.

    Je me détachai d'elle et baissai les yeux vers Adina, qui nous observait avec curiosité, pas encore consciente que le monde venait de s'écrouler autour d'elle.

    -Viens, chérie, lui dis-je en lui prenant la main, j'ai de magnifiques poupées pour toi.

    -Oh... super ! s'exclama-t-elle en me souriant, ses yeux brillants d'excitation.

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