Cette dernière semaine, j'avais passé énormément de temps avec Paris, plus par obligation que par plaisir au début. Puis nous avions commencé à discuter sur de nombreux sujets. Et étonnamment, j'avais apprécié ces moments au fur et à mesure de la semaine.
Elle avait même réussi à me faire apprécier de simples jeux de société... Et parfois, le silence nous suffisait.
Malheureusement, je devais reconnaître qu'elle avait raison sur un point : j'avais besoin de temps et de recul. Une semaine ne serait jamais totalement suffisante pour oublier la mort d'Abigail, mais c'était déjà mieux que rien.
Et j'avais commencé à reprendre une vie un plus banale les jours qui suivirent, en commençant par me rendre au club informatique. Mon retour surprit Mitt et Dolly, en même temps, j'avais loupé une – ou deux – séance. Je n'en étais même plus vraiment sûr.
— Qu'est-ce qu'il t'est arrivé pour que tu disparaisses ? demanda Dolly, assez inquiète.
— J'avais quelques problèmes... personnels à régler. Mais ça va mieux...
— Ne t'en fais pas, t'as pas loupé grand-chose, tenta de me rassurer Mitt.
— Ce n'est pas ça qui m'inquiète...
Aussi étonnant que ce puisse paraître, le prof ne fit aucune remarque de ma longue absence, et tant mieux. C'était assez rare dans cette école de ne pas se prendre le moindre reproche.
À la fin du cours, Mitt et Dolly me rappelèrent qu'ils se retrouvaient encore dans la bibliothèque pour travailler en semaine. Et j'allais probablement les rejoindre à un moment ou à un autre, au moins pour me changer les idées.
— Et sinon tu viens au bal d'Halloween ? me demanda Mitt.
— J'avais oublié ça, soupirai-je.
— Tu n'es pas obligé de prendre un déguisement... Tu peux te foutre du maquillage noir partout et dire que tu te déguises en gothique.
— Je prends note du conseil... Mais je ne suis pas sûr d'être intéressé par ce genre de fêtes.
En réalité, je redoutais surtout de revivre la même chose que la dernière fois : de perdre quelqu'un. D'être encore responsable de la mort de quelqu'un...
Il arracha un flyer du panneau d'affichage pour me le tendre. Toutes les informations nécessaires étaient inscrites dessus. Il n'y avait pas non plus de thèmes particuliers. Après tout, Halloween suffisait à lui même comme thème.
— C'est organisé par le lycée, ajouta-t-il. Ça reste très gentillet.
— Je verrais, lâchai-je, assez pensif.
Je rangeai le flyer dans ma poche et m'éloignai d'eux pour quitter le lycée.
Tout reprenait son cours et je ne pouvais pas m'empêcher de trouver la situation encore étrange. Et je compris ce qu'il me manquait en apercevant James en train de fumer sur le banc devant le lycée.
Je m'approchai alors de lui, un pincement au cœur. Il m'adressa un faible sourire lorsque je lui fis face.
— James... Je ne pensais pas te voir ici...
— J'ai longtemps hésité... Parce que j'avais peur que tu considères ça comme du harcèlement.
C'était tout lui ça. Il était si attentionné, si craintif de blesser les autres... Et parfois, j'avais envie d'y arriver aussi bien que lui. Jusqu'à maintenant, c'était le genre de choses que je n'arrivais pas vraiment à contrôler.
Je m'assis à ses côtés et sortis instinctivement une clope, le temps de savoir quoi dire exactement.
— Et je devais te laisser du temps aussi, je pense, ajouta-t-il.
— Tu as bien fait... J'en avais besoin.
Je tirai une brève taffe et il se tourna vers moi.
— J'ai discuté avec Paris... Je peux pas m'empêcher de culpabiliser pour Abigail... Peut-être que ça s'en ira avec le temps... Enfin, j'espère. Parce que pour l'instant, j'ai l'impression que rien ne part...
— C'est normal. Il faut toujours du temps pour ce genre de situations... Beaucoup de temps.
Je lui proposai ma clope et il s'en empara pour en tirer une courte bouffée.
— Je suis désolé, lançai-je maladroitement. La dernière fois... Je n'aurais pas dû partir comme ça... Je n'aurais pas dû t'abandonner comme ça...
— Je ne t'en veux pas Cole. J'en aurais probablement fait de même à ta place.
— Vraiment ? m'étonnai-je.
— Enfin... Je suppose. On n'a pas le même vécu.
Il était si compréhensif, comme toujours, et moi, j'agissais comme un con. Parfois, je me disais que je ne méritais pas quelqu'un comme lui. Peut-être qu'un jour, j'arriverais à me changer les idées.
— Mais je m'en veux quand même, soufflai-je en fixant le sol.
— Tu ne devrais pas...
— Bien sûr que si... Je t'ai évité sans te donner de réelles raisons.
— Tu as le droit d'avoir besoin d'un peu de temps pour toi, et t'as pas de comptes à rendre à ce sujet.
— Peut-être bien que tu as raison...
Je jetai ma clope au sol que j'écrasai dans la foulée puis me tournai vers lui. En le voyant sourire, j'en fis de même et ce fut naturel. Je commençais à retrouver ce que nous avions perdu dernièrement, notre complicité.
Puis, je pris sa main, assez maladroitement et avec beaucoup d'hésitation. J'espérais vraiment ne pas être trop brusque et ne pas le gêner, et je n'avais aucun moyen de totalement en être sûr. Est-ce que ce petit sourire qui s'agrandissait sur son visage était un signe qu'il appréciait ça ?
— Ça ne te gêne pas ? demandai-je dans le doute en jetant un bref coup d'œil à sa main.
— Non. Absolument pas.
Soulagé, je lui adressai un simple sourire tandis que le sien ne s'effaçait pas et persistait.
— Mais il va falloir qu'on soit clair sur quelque chose, annonça-t-il. Qu'est-ce qu'il en advient de nous ?
— Je sais pas... J'ai tellement fait n'importe quoi que je comprendrais que tu veuilles me fuir. Après tout, c'est bien ce que j'ai fait...
— Ce n'est pas grave ça. Est-ce que tu as envie de continuer, en omettant juste ça ?
J'avais terriblement peur de devoir lui imposer mes réactions bien trop spontanées, mes impulsivités et par la même occasion, tout mon vécu. J'étais probablement plus qu'un poids qu'autre chose à ses yeux.
Mais il attendait une réponse égoïste de ma part. Juste mes réelles attentes. Et j'avais peur qu'il se décide en fonction de ce que je lui dirais.
— Oui, répondis-je en un court souffle.
— Moi aussi...
Son index se posa sur ma lèvre inférieure qu'il caressa délicatement. Il mourrait d'envie de m'embrasser, mais nous étions bien trop à découvert. Alors, il arrêta aussitôt son geste en espérant que personne ne nous ait remarqués.
— Je suppose que ça serait stupide de te demander de m'accompagner au bal d'Halloween du lycée, balançai-je assez mal à l'aise.
— Non, ce n'est pas stupide... Et on peut s'arranger. On peut se mêler à la foule.
Il me lança un discret clin d'œil et j'étais curieux de ce qu'il allait vraiment me proposer.
Nous reprenions nos petites habitudes, nous reprenions notre petit jeu. Et c'était vraiment ce qu'il manquait.
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Hey !
Juste une petite annonce pour vous dire que le prochain chapitre sera le dernier malheureusement T_T
Je n'en dis pas plus pour ne pas vous spoiler du coup :3