Il est bientôt huit heures. Les rayons du soleil traversent la fenêtre de la chambre et touchent le visage de Taehyung alors qu'il dort encore paisiblement. Moi, je suis réveillé depuis longtemps, mais je n'ose pas le sortir du sommeil, car je suis subjugué par la beauté de son visage. Ça fait une heure que je le regarde à son insu, et je ne m'en lasse pas. C'est fou ce qu'il est beau quand il est endormi.
Il est recroquevillé sur lui-même. Son torse se soulève au rythme de sa respiration profonde qui perturbe le silence de la pièce. J'écoute vaguement son souffle, et je contemple son visage presque angélique. Ses mèches de cheveux lui tombent sur les yeux, et ses pommettes sont légèrement rosies. Je le trouve terriblement attirant.
Mon regard s'arrête sur ses lèvres pulpeuses. Elles sont si parfaites, si tentantes. J'ai l'impression qu'elles m'appellent. Elles me font envie, c'est inexplicable. Les mains légèrement tremblantes, je pose délicatement mon index sur ses lèvres. Puis, je les effleure doucement, tendrement. Elles sont chaudes. Ça me brûle. Mon cœur s'affole. Je ne me contrôle plus. Du bout des doigts, je fais le contour de ses lèvres. Puis, d'un geste hésitant, je glisse mon index à l'intérieur de sa bouche. Je l'humidifie légèrement de sa salive, je le ressors immédiatement, et je l'amène à ma propre bouche. Je goûte enfin à sa saveur. Elle est légèrement sucrée, elle a un goût fruité. Elle est vraiment délicieuse.
Je le contemple à nouveau et l'idée de goûter à sa saveur directement sur lui m'effleure l'esprit. Cependant, il se réveille déjà. Il s'étire longuement en baillant la bouche grande ouverte. Puis, il ouvre ses petits yeux clairs, et nos regards se croisent. Il me lance un léger sourire.
-Bonjour, Kookie ! Tu as bien dormi ? me murmure-t-il, d'une voix à peine audible.
« Oui. », je fais, en souriant également.
-Moi aussi. J'ai fait un rêve magnifique.
Je l'interroge du regard pour l'inciter à m'en dire un peu plus, mais il se contente d'afficher un sourire béat, un sourire qui en dit long sur la nature de son rêve. Alors, je me surprends à espérer qu'il a rêvé de moi. Je secoue immédiatement la tête de gauche à droite afin de chasser cette idée dingue de mon esprit.
Dingue. C'est ce que je suis. À cause de lui.
Taehyung jette un œil sur son portable pour avoir l'heure. Lorsqu'il se rend compte que les cours commencent dans une trentaine de minutes à peine, il lâche un cri de panique, et il se lève en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Il se précipite vers la salle de bain, et s'enferme à l'intérieur. Moi, je suis déjà prêt depuis longtemps. Alors, j'attends sagement sur son lit le temps qu'il finisse de se préparer.
Quelques minutes plus tard, la porte de la salle de bain s'ouvre, et Taehyung en sort, torse nu, et simplement vêtu du pantalon de son uniforme. À la vision qui s'offre à moi, ma respiration se stoppe, et mon cœur explose.
C'est fou ce qu'il est atrocement attirant !
Tandis qu'il fouille activement à l'intérieur de son armoire à la recherche d'une chemise propre, je glisse mon regard sur son torse lisse et légèrement musclé. Ou plutôt, je le dévore des yeux. Je le contemple de la tête aux pieds. Il est magnifique, j'ai l'impression d'être ensorcelé. Je suis hypnotisé par son corps terriblement parfait. Oui c'est ça, il est parfait. Si parfait que j'en ai du mal à déglutir. Et, je m'en mords les lèvres.
Je sens une chaleur m'envahir le ventre. Je crois que la température de la pièce a augmenté. Ou alors, c'est moi qui ai trop chaud ? Oui, j'ai chaud ! Je bouillonne, je transpire, j'étouffe ! De l'air ! Il me faut de l'air !
Je délaisse mon lit, et je me jette sur la fenêtre pour l'ouvrir. Aussitôt, une bouffée d'air glacé me fouette le visage et se faufile à travers mes vêtements. C'est désagréable, ça me donne de légers frissons. Mais, ça ne me calme en rien. Bien au contraire. L'idée que Taehyung se trouve à quelques mètres de moi à demi-nu ne fait qu'augmenter la boule de chaleur qui s'est installé dans mon ventre.
-Ça va, Jungkook ? T'as l'air bizarre ! Qu'est-ce qu'il t'arrive ? me demande-t-il.
Tu me rends dingue ! Voilà ce qu'il m'arrive !
Je lutte difficilement pour ne pas dévier mon regard sur lui, mais cette tâche s'avère bien plus difficile qu'elle n'y paraît. Il faut que je quitte cette pièce. C'est la seule solution. Une solution de survie. Aussitôt, je me rue à l'extérieur de la chambre, sous le regard médusé de Taehyung. En quelques enjambées, je me retrouve au rez-de-chaussée, là où mon organisme retrouve enfin un fonctionnement normal.
Je traverse le salon, et je tombe sur sa mère. Visiblement, elle est sur le point de partir. Elle porte un tailleur en satin blanc et des escarpins assortis. Elle secoue ses cheveux, puis elle les attache en queue de cheval. Elle est absolument resplendissante.
Lorsqu'elle remarque ma présence dans un coin de la pièce, elle me demande, d'un air surpris :
-Ah, Jungkook ! Tu es encore là ? Je pensais que vous étiez déjà partis, Taehyung et toi ! Il s'est encore réveillé en retard, n'est-ce pas ?
« Oui », je fais d'un hochement de tête.
-Ça ne m'étonne pas de lui ! répond-elle, aussitôt.
Elle enfile son manteau et récupère son sac à main sur l'étagère. Enfin, elle se dirige vers la sortie, en me lançant dans un sourire éblouissant :
-Au fait, je ne suis pas fière que Taehyung t'ait forcé à te teindre les cheveux, mais il faut avouer que cette couleur te va vachement bien !
Cela me fait légèrement sourire. Elle disparaît, au moment même où Taehyung dévale les escaliers, enfin vêtu de son uniforme scolaire.
-Viens, Jungkook ! On s'en va ! me lance-t-il.
Je m'exécute. J'enfile mes chaussures. Je récupère mon sac. Puis, je le rejoins dans l'entrée. Une fois qu'on est à l'extérieur de la maison, on se met à courir le plus vite possible jusqu'à l'arrêt de bus. Il est vachement rapide, j'ai du mal à le suivre. Cependant, je parviens quand même à grimper dans le bus, de justesse, en même temps que lui.
Lorsqu'on est à l'intérieur, je m'écroule sur un siège pour reprendre mon souffle. Il fait froid, et pourtant, j'ai chaud, je transpire. Taehyung saisit un mouchoir dans son sac et se rapproche de moi pour essuyer la sueur qui perle sur mon front. Lorsqu'il a terminé, il me dévisage longuement.
-Les cicatrices sur ton visage ont pratiquement disparu.
-...
-Tu sais ce que ça veut dire ?
« Non. », je fais de la tête, même si je sais très bien ce que ça veut dire.
-Ça veut dire qu'il va falloir que tu rentres chez toi...
Quand j'entends ses mots, je ressens un pincement au cœur. L'idée de passer une seule soirée loin de lui m'angoisse déjà terriblement. Je ne pourrais jamais m'en sortir vivant. Je suis dépendant de sa présence. C'est une réalité. Une triste réalité. Comment le lui faire comprendre, alors que moi-même, j'ai du mal à le comprendre ?
-Jungkook, je pense sincèrement que tu devrais rentrer chez toi, ajoute-t-il face à mon regard désemparé. Ta mère est sûrement inquiète. Ça fait plusieurs jours qu'elle n'a pas de nouvelles, et je sais à quel point ça rend malade de ne pas avoir de nouvelles d'une personne qui nous est chère...
Lorsqu'il prononce cette dernière phrase, une lueur sombre apparaît dans le fond de ses pupilles. Il se racle la gorge comme pour retenir ses émotions.
-Je pense qu'il est temps que tu la retrouves. Tu n'as qu'à y aller ce soir, et s'il le faut, je t'accompagnerai. D'accord ?
Il plonge son regard dans le mien. Ce regard intense qui me rend si vulnérable. Celui auquel je ne résiste pas. Je suis beaucoup trop faible face à la profondeur de ce regard. Alors, tel un automate, je hoche la tête bêtement, et j'accepte, même si le cœur n'y est pas.