Le blanc. C'est la seule chose que je vois autour de moi. Un homme, blanc aussi. Habillé de blanc. De sa blouse dépassent deux stylos : un bleu, l'autre rouge. Typique. J'essaie de me lever. L'homme vient m'aider. Je m'appuie sur mes bras pour maintenir un équilibre assis. J'esquisse un geste pour me mettre sur mes pieds.
- Doucement, il faut que les muscles se réveillent.
Petit à petit, je pose mes pieds sur le sol froid et carrelé de la petite pièce. Qu'est-ce que je fais ici ? Aucun moyen de m'en souvenir. Dois-je me méfier ? Je ne sais pas, mais cet homme me semble confiant, alors je me fie à mon instinct. Il m'ouvre la porte après avoir vérifié que je tienne sur mes pieds. Je le suis. Nous avançons à une petite vitesse, ce qui me permet d'observer le bâtiment dans lequel je progresse. A notre gauche, il y a une porte ouverte. Peu de bruits en sortes. Je tourne la tête à l'approche de l'ouverture. La salle est pleine de personnes qui travaillent sur des tables individuelles rangées et quadrillées au millimètre. Sur un grand tableau blanc, devant eux, il y a une longue suite de calcules. J'essaie de les calculer, mais l'on avance sans s'arrêter et l'ouverture se referme. Puis nous passons devant une salle de programmeurs informatique. Le programme semble leur poser des problèmes. Je tourne doucement la tête vers l'homme. Comme s'il lisait dans ma tête, il me répond que nous arrivons bientôt.
Effectivement, quelques pas après, nous arrivons devant une autre salle. Comme les autres et le reste du bâtiment, elle est blanche. Elle est peu meublée. Un lit cruciforme à sangles, une table en acier inoxydable sur laquelle repose divers instruments, et une machine permettant de surveillez les fonctions vitales. D'un coup, je me sens mal. Je ne suis pas sûr d'avoir envie de le suivre. Il se penche à mon oreille.
- Va t'allonger, chuchote-t-il entre mes cheveux longs.
Si. J'en ai envie finalement. J'avance vers ce lit étrange disposé en croix. Je m'assieds dessus puis m'allonge. L'homme s'avance vers moi et me sangle. Sur la table, il saisit une seringue qu'il tapote avec l'ongle de son index. Il regarde à ma gauche, légèrement au-dessus de moi. Je tourne la tête pour apercevoir un miroir. C'est surement un miroir sans-teint.
*
L'homme en complet bleu nuit remonte ses lunettes sur son nez.
- Combien avez-vous de... d'individus ?
- De cobayes, vous voulez dire ? C'est la seule. Il n'y a qu'elle qui est survécut à tous les tests.
- Alors commençons, je n'ai pas tout mon temps.
- Très bien, monsieur le ministre.
*
J'entends un grésillement venant des coins de la pièce. Une voix sort des haut-parleurs et ordonne au docteur de commencer. L'homme est donc un docteur. Il saisit mon bras et y injecte la seringue. Je veux fuir, mais le produit fait déjà son chemin, plus vite qu'un cheval au galop. En moins d'une seconde, la mémoire me revient : on m'a fait subir des tests d'aptitudes physique et intellectuel. Le produit est là , aux portes de mon cerveau, mais je ne peux l'empêcher d'entrer. Alors il passe, et c'est le feu d'artifices. J'ai l'impression que mon cerveau explose en plusieurs petites pièces. Je ressens des petites explosions froides. Mes neurones communiquent et d'autres naissent, créant un immense réseau de communication.
- Séraphine, ouvre le portail !
Mais je n'ai plus envie d'obéir. Quel qu'était le produit qui m'avait rendu servile, cette nouvelle injection l'avait supprimée, éradiquée.
Soudain, les angles sautent. Je l'ai voulue et c'est arrivé.
- Séraphine, non !
Tout un monde de possibilités s'ouvre à moi. Je plaque le docteur contre un mur. Une sirène se déclenche, le courant s'éteint et des lumières rouges clignotantes s'allument. J'entends le loquet de la porte qui se verrouille. Il ne me reste plus qu'une sortie : le portail. Mais je ne leur en laisserais pas l'accès. Je me concentre et essaie de trouver une autre dimension, de créer un portail. Devant moi, je sens une vague de chaleur qui irradie la pièce. Un largue cercle aux contour vague se floute. Tout d'un coup, une largue plaque parsemée de cyan et de magenta se prélasse devant moi. Je tends la main dedans et me sens happé par le portail.
*
L'emprise de Séraphine me relâche et je vois son talon entrer à sa suite dans le portail avant qu'il ne disparaisse. Avec lui, je vois s'évaporer toutes mes recherches.