Tel un automate, Parrish se remit sur ses pieds dès que l'Enjôleuse le libéra des cordes qui entravaient ses poignets. La femme lui tendit, en s'accompagnant d'un clin d'œil coquin, un couteau bien aiguisé.
Trop aiguisé au goût de Dean.
-Je veux que tu le tues lentement, Jordan, tu m'entends ? souffla Corine en se collant contre le torse de l'officier. Je veux savourer sa douleur.
Sans même prendre le temps de répondre, le policier se dirigea d'un pas assuré vers le chasseur, le couteau pointé en direction de la gorge de ce dernier.
Ça y était. C'en était terminé. Il n'avait pas été capable de gagner assez de temps et, à voir la lueur meurtrière qui brillait dans le regard de l'adjoint du shérif, Dean doutait fortement qu'il puisse couper ses liens à temps.
-C'est pas réel, Parrish ! cria-t-il alors que la lame qui déciderait de son sort s'approchait dangereusement de l'un de ses poumons, lui assurant une mort lente et douloureuse, exactement comme le désirait l'Enjôleuse. Tu sais que ce n'est pas réel, hein ? Ou alors c'est que t'es trop idiot pour comprendre ?
Jouer avec la fierté de l'homme qui tenait sa vie entre ses mains n'était peut-être pas l'idée la plus brillante que Dean ait jamais eu. Le chasseur le comprit lorsque la lame du poignard s'enfonça dans son bras, le faisant hurler de douleur.
-Quelques millimètres à droite et j'aurais touché ton nerf, grogna Parrish. Tu n'aurais probablement plus jamais été capable de bouger ton bras. Tu ne veux pas que ça arrive, hein ? Alors ferme-la !
-Qu'est-ce que tu vois, Parrish, quand tu la regardes ? parvint à articuler l'aîné Winchester en fixant ses iris dans ceux de l'officier. L'amour de ta vie ? Un membre de ta famille ? Peu importe qui c'est, il faut que tu te réveilles.
Changement de tactique. Bien que Dean douta être la bonne personne pour résonner le policier, il osa croire qu'il pourrait au moins insérer une minime pointe d'incertitude dans la tête de l'adjoint.
-Tu vois Stiles, là-bas, enchaîné à ce mur ? continua-t-il. On était venu sauver ce gamin, je te rappelle ! Et si tu ne te réveilles pas maintenant, il sera trop tard.
Une étincelle, à peine perceptible, vint quelques instants troubler les prunelles de l'officier, qui tourna la tête en direction de Stiles, comme s'il eut voulu vérifier les dires du chasseur.
-Concentre-toi, Parrish ! cria Corine, rouge de colère, devant l'air perturbé de son nouveau toutou.
Une flamme traversa les iris vert pomme du policier avant que ses traits ne redeviennent aussi froids et imperturbables que ceux d'un robot. Cette fois, il dirigea la lame de son couteau vers l'aine du chasseur, plus précisément vers l'une de ses veines principales. Ce qui signifiait que, si Parrish venait à couper cette dite veine, le jeune Winchester mourrait nécessairement au bout de son sang, sans qu'il ne soit possible d'arrêter les saignements.
-Tu veux savoir ce que j'ai vu, moi, quand elle a fixé ses yeux dans les miens il y a de ça des années ? le questionna Dean, qui risquait désormais le tout pour le tout. Tu me l'as demandé tout à l'heure. C'est ma mère qui m'est apparue. Elle me tendait la main, elle me disait qu'elle m'aimait. Tu veux savoir pourquoi je n'y ai pas cru, même si tout me poussait à lui tomber dans les bras ? Parce que ma mère est morte. Et elle ne reviendra pas.
Parrish se freina net dans son mouvement et le couteau lui glissa des mains. L'adjoint, toujours confus, se passa une main bouleversée dans les cheveux. Il jeta un rapide coup d'œil à l'Enjôleuse, qui frémissait de rage, puis ferma les yeux dans un soupir.
-Ramasse ce couteau et fini le travail, sombre idiot ! hurla-t-elle à l'intention de l'officier, les poings serrés.
Parrish secoua la tête, comme s'il eut voulu reprendre ses esprits, puis se pencha pour empoigner l'arme, comblant par le fait même le désir de la femme. Ses pupilles vertes, plus froides que celles de la mort, rencontrèrent celles de Stiles, qui le suppliait en silence. Puis, ce fut au tour de Dean de se faire transpercer par le regard glacial de son nouveau coéquipier. Ça y était. C'était la fin.
-Oui, bien sûr. Tout de suite.
Alors que le chasseur, la bouche asséchée par la peur, se préparait mentalement à affronter la mort, le policier fit volte-face, enfonçant le poignard jusqu'à la garde dans la poitrine de l'Enjôleuse. Corine, prise au dépourvu, voulut crier pour alerter ses sous-fifres, mais rien d'autre ne sortit de sa bouche à part un soupir étouffé par la douleur. Elle s'effondra au sol, portant la main au manche du couteau qui dépassait désormais de son abdomen, tandis que son agresseur courait vers Dean pour le libérer de ses liens.
-N'aie pas l'air si étonné, sourit le jeune homme en croisant le regard quelque peu perturbé du chasseur. C'est pas cette salope qui va me dire quoi faire, peu importe quel est son visage.
-Mais tu voulais me tuer, balbutia l'aîné Winchester. Je l'ai vu dans tes yeux.
-Ça fait deux jours que j'ai envie de te tuer, espèce d'idiot, mais je fais de mon mieux pour me maîtriser.
Aussitôt libre de ses mouvements, Dean porta la main à son épaule, où la blessure que lui avait provoqué le coup de couteau de Parrish saignait abondamment.
-T'aurais pu me rendre infirme, espèce de fils de pute ! s'exclama-t-il en tuant l'officier du regard.
Ce n'était pas sous le coup de la colère que le jeune homme s'était emporté, mais plutôt sous celui d'un inconditionnel soulagement. Il était vivant, Stiles était vivant, et si l'on oubliait le fait qu'il venait tout juste de se faire sauver la vie par un chien de l'Enfer, leur mission de sauvetage pouvait presque être considérée comme une réussite.
-Tu vas t'en remettre, souffla le policier en levant les yeux au ciel. Quelques points de suture et tu seras comme neuf !
Alors que le chasseur se préparait à répondre au commentaire de Parrish par une quelconque pluie d'insultes ou par une de ses fameuses remarques sarcastiques, on le précéda.
-Hey, les gars ! Je veux pas vous interrompre dans vos démonstrations d'affection, mais j'ai un peu besoin d'aide, là.
Les deux coéquipiers portèrent enfin leur attention sur Stiles, qu'ils avaient négligé dans leur petit démêlé. Parrish en oublia immédiatement Dean et courut jusqu'à l'adolescent qui, la tête adossée contre le mur derrière lui, tremblait de tous ses membres.
-Tout va bien, Stiles ? demanda l'adjoint en tentant de libérer le jeune Stilinski de ses entraves. Ils t'ont fait du mal ?
-Non, rien d'insurmontable.
En prononçant ces mots, le garçon avait fixé son regard dans celui du chasseur, comme s'il eut voulu lui faire comprendre quelque chose. Incapable d'en supporter davantage, l'aîné Winchester détourna les yeux.
-Tu sais pourquoi ils s'en sont pris à toi ? continua Parrish, qui n'avait visiblement pas compris toutes les allusions de l'Enjôleuse. Pourquoi à toi en particulier ?
-J'en sais rien.
Il savait. Oui, Stiles avait deviné. Et, étrangement, cette perspective faisait particulièrement peur à Dean. Il ne pouvait plus fuir la réalité, désormais. Car même si, au fond de lui, le jeune homme était heureux d'enfin connaître ce frère qu'on lui avait si longtemps caché, il redoutait plus que tout d'un jour causer sa mort, comme il avait causé celle de tous ses proches.
-Soyez prudents en montant les escaliers, les avertit-il en faisant taire ses démons. Les petits copains de cette salope peuvent toujours être dans le coin.
-Et toi ? Tu ne viens pas ? demanda Parrish alors qu'il aidait Stiles à se lever.
-Je vous rejoins. Laissez-moi seulement le temps de couper la tête de cette pute.
Parrish et Stiles ne s'attardèrent pas, et Dean se retrouva bientôt seul avec la dépouille de cette femme qui lui en avait tant fait baver. Il s'agenouilla à ses côtés, retira le couteau qui lui transperçait l'estomac et l'appuya contre sa gorge. Il était sur le point de la lui trancher quand, dans un sursaut, l'Enjôleuse s'éveilla.
-Tu pourras bien me tuer, Winchester, mais tu ne sortiras pas vivant de cette histoire, murmura-t-elle faiblement. Si ce n'est pas moi qui vous tue, tes frères et toi, ce sera un autre.
-Ouais, c'est ça. Faites la file !
Si une minime parcelle d'hésitation avait jusqu'alors pu consumer le cœur de Dean, il n'en restait plus rien, dorénavant. On ne pouvait pas menacer la famille de Dean Winchester et s'en sortir indemne. Sur ce, il frappa.
***
Ave ! Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? La relation entre Dean et Parrish ? Les derniers propos de l'Enjôleuse ? Vous attendez-vous à quelque chose pour la suite ?
Mille mercis à vous tous, et plus particulièrement à ceux et celles qui prennent le temps de m'écrire de si beaux commentaires ! Je vous en suis vraiment reconnaissante !
Joe.