Nantis

By FlorieC

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La jeunesse dorée, tel est le surnom qu'on leur donne. Il existe une rumeur qui sous-entend qu'on ne naît pas... More

[SAGA 1] L'arrogance des gens meilleurs
Chapitre 1 : If it makes you happy
Présentation : Noah Khan
Chapitre 2 : Take me as I am
Présentation : Ellie Lefevre
Chapitre 3 : Don't stop the party
Chapitre 4 : Too late
Chapitre 5 : Losing your memory
Présentation : Ethan Franck
Chapitre 6 : She drives me crazy
Chapitre 7 : Secrets
Chapitre 8 : Highway to hell
Chapitre 9 : How I needed you
Chapitre 10 : Miss misery
Chapitre 11 : Me and the devil
Présentation : Anna Joly
Chapitre 12 : Know your enemy
Chapitre 13 : Little talks
Chapitre 14 : You're not alone
Chapitre 15 : Love the way you lie
Chapitre 16 : Bad romance
Chapitre 17 : Teenage dream
Chapitre 18 : Don't wake me up
Chapitre 19 : My medicine
Chapitre 20 : Shut up and let me go
Chapitre 21 : Wicked Game
Présentation : Gabrielle Gallien
Chapitre 22 : Last Christmas
Chapitre 23 : Winter
Chapitre 24 : Let it be
Chapitre 25 : Happy New Year
[SAGA 2] L'éternité à tes pieds
Chapitre 1 : Bad day
Présentation : Jared Greggs
Chapitre 2 : The last to know
Chapitre 3 : When she believes
Chapitre 4 : Losing my religion
Présentation : Lucas Gallien
Chapitre 5 : Take control
Chapitre 6 : If you leave me know
Chapitre 7 : Stay
Chapitre 8 : Only if you run
Chapitre 9 : Just tonight
Chapitre 10 : Never let me go
Chapitre 11 : Fix you
Chapitre 12 : Damn you
Chapitre 13 : This is war
Présentation : Ruben Greggs
Chapitre 14 : Apologize
Chapitre 15 : Gives you hell
Chapitre 16 : Never say never
Chapitre 17 : Skinny love
Chapitre 18 : Alone
Présentation : Christelle Wertheimer
Chapitre 19 : Don't be a stranger
Chapitre 20 : We are young
Chapitre 21 : One Day
Chapitre 22 : Dark on fire
Présentation : Borja Escobar
Chapitre 23 : Like a virgin
Chapitre 24 : Better Together
Chapitre 25 : Happy Birthday
[SAGA 3] Dans la cour des grands
Chapitre 1 : The funeral
Chapitre 2 : Pursuit of Happiness
Chapitre 3 : Dark Paradise
Chapitre 4 : I want to break free
Chapitre 5 : A drop in the ocean
Chapitre 6 : Enjoy the silence
Chapitre 7 : Help
Chapitre 8 : I don't want to be
Chapitre 9 : Eye of the tiger
Chapitre 10 : Come back home
Chapitre 11 : Mirror
Chapitre 12 : Heartless
Chapitre 13 : Someone like you
Chapitre 14 : If I needed you
Chapitre 15 : You're not sorry
Chapitre 16 : Burn it down
Chapitre 17 : How you remind me
Chapitre 18 : Wrecking ball
Chapitre 19 : Just give me a reason
Chapitre 20 : Can you feel the love tonight
Présentation : Gautier Lantez
Chapitre 21 : People help the people
Présentation : Yanis Perrin
Chapitre 22 : Yesterday
Chapitre 24 : Kiss me
Chapitre 25 : Only wanna be with you
[SAGA 4] La réponse des faibles
Chapitre 1 : Collide
Chapitre 2 : The lonely
Chapitre 3 : Another love
Chapitre 4 : Protect me from what I want
Présentation : Ophélie Joly
Chapitre 5 : Big big world
Chapitre 6 : Don't lie
Chapitre 7 : Undisclosed desires
Chapitre 8 : You and I
Chapitre 9 : Another day in paradise
Chapitre 10 : Just can't get enough
Chapitre 11 : Sirens call
Chapitre 12 : Too close
Chapitre 13 : Love me again
Chapitre 14 : Demons
Chapitre 15 : You are the one that I want
Chapitre 16 : Sober
Chapitre 17 : What doesn't kill you
Chapitre 18 : Too many friends
Chapitre 19 : Monster
Chapitre 20 : Broken crown
Chapitre 21 : He is my son
Chapitre 22 : Talk to me
NANTIS EN LIVRES PAPIER !
Chapitre 23 : Try
Chapitre 24 : Everybody's Got To Learn Sometime
Chapitre 25 : Wonderful life
NANTIS en livres ♥

Chapitre 23 : Hot and cold

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By FlorieC



— Gabrielle, souffla monsieur Miller en se laissant tomber contre le mur derrière lui, Est-ce qu'on pourrait avoir moins l'impression que tu vas tuer quelqu'un ? Mets-toi dans la tête de ton personnage, bon sang !

— Sandy est une cruche intello, cracha la jeune fille, Je déteste faire la niaise amoureuse.

— Pourtant, ça ne devrait pas être si compliqué, commenta Ethan qui lui faisait face.

Furieuse, la belle blonde se retourna vers le garçon, lui intimant de se taire, rien qu'avec la noirceur de son regard. Même s'ils s'étaient plus au moins réconciliés depuis l'anniversaire d'Ethan, le garçon ne loupait jamais une occasion de la remettre à sa place. D'ailleurs, il ne loupait jamais une occasion de remettre tout le monde à sa place. Il était devenu légèrement cynique ces derniers jours.

— Bref, enchaina leur professeur en se relevant du mur contre lequel il était adossé avec le script de la pièce entre les mains, On arrête pour cette scène. Pour terminer la séance, on pourrait peut-être écouter ce que vous avez prévu ?

Tout en disant cela, David Miller se retourna vers Anna, Lucas et Raphaël qui se tenaient dans un coin de la pièce. Lucas se releva de la chaise sur laquelle il avait colmaté durant toute la séance, appréciant le fait que ce foutu professeur lui consacre enfin cinq minutes de son temps, histoire qu'il n'est pas complètement perdu le sien... Quoi que le garçon en doutât sérieusement. Lucas ignorait pourquoi il avait accepté de chanter dans cette stupide comédie musicale.

— Vous avez eu de nouvelles idées ? Enchaina le professeur sans même remarquer son regard dédaigneux.

Un regard qui ne le quittait jamais vraiment et c'était bien la raison pour laquelle plus personne ne le percevait désormais.

— On pensait chanter Let her go de Passenger, répondit Anna en rejoignant la scène de théâtre, suivie de ses deux amis.

— Ouais, à quel moment ?

— Quand Danny rejette Sandy devant ses potes parce qu'il refuse de reconnaître qu'ils sont sortis ensemble... On pensait faire Sandy qui quitte la scène lentement, la tête baissée, se retenant de pleurer, et Danny qui la regarde en regrettant déjà ce qu'il a fait. Vu que la chanson parle de réaliser ses erreurs une fois qu'elles sont déjà faites, continua d'expliquer Anna.

— Bonjour la cruche, commenta Gabrielle en levant les yeux au ciel.

— Au contraire, je vais me faire un plaisir de te larguer, ajouta Ethan, un sourire ironique sur les lèvres.

— Dommage que dans la réalité, c'est moi qui ai eu le courage de le faire.

Le sourire d'Ethan disparut à l'instant de son visage tandis que celui de Gabrielle se devina discrètement au bout de ses lèvres. Bien sûr, la jeune fille désirait se réconcilier avec son ex-petit-ami et elle ne supportait plus cette guerre ridicule entre eux deux. Cependant, Ethan avait tendance à dépasser les bornes avec elle et Gabrielle n'aimait pas se faire rabaisser en public. Donc, elle ne regrettait absolument pas ce qu'elle venait de lui balancer, alors que, précisément, la jeune fille n'avait jamais eu le courage de le quitter puisqu'elle s'était contentée de le tromper avec Raphaël. Mais sachant que le garçon en question était aussi dans la pièce, Ethan ne voulut pas relever l'outrage qu'elle venait de lui faire et il détourna son regard, espérant que quelqu'un reprenne la conversation.

— Bref, enchaina monsieur Miller en se demandant comment chacune de ses séances aboutissait à des règlements de compte, Pour revenir au sujet, je suis d'accord pour la chanson et le moment à laquelle vous voulez la faire. D'autres idées ?

— Pour l'instant, on cherche aussi des chansons en français, lui répondit Raphaël, On trouve ça bien de pouvoir mélanger un peu les genres, mais Lucas n'est pas d'accord.

Étonné, David Miller se retourna vers le garçon pour comprendre son refus et celui-ci marmonna vaguement :

— Toutes les chansons françaises sont niaises.

— En anglais aussi, lui fit remarquer le professeur, C'est juste que tu ne comprends pas les paroles.

Lucas leva les yeux au ciel avec exaspération, constatant avec toujours plus de force à quel point il haïssait ce genre de professeur dédaigneux qui pensait tout savoir.

— Il y a des consonances plus belles dans la langue anglaise, argumenta-t-il à nouveau, Mais ce n'est que mon avis personnel.

— Oui chacun le sien, et puis c'est toi le musicien après tout, ajouta David, ce qui exaspéra encore un peu plus le garçon.

— On vous fait la démonstration maintenant ? Les coupa Anna pour éviter que cette conversation ne parte trop loin et que Lucas se mette à péter un plomb, au risque de les laisser tomber à seulement quelques semaines de la représentation.

— Oui allez-y, souffla Gabrielle en jetant un coup d'œil rapide à sa montre, J'aimerais bien rentrer chez moi !

Son cousin lui lança un regard dédaigneux et la belle blonde enchaina, perplexe :

— Quoi ? J'ai une vie.

— Que tu t'acharnes à détruire, précisa Ethan.

— Bon les amants maudits, souffla David Miller, blasé de leurs commentaires à la con.

Commentaires qui avaient, d'ailleurs, assez peu de cohérences dans leur ensemble.

— Vous passez en mode veilleuse pendant cinq minutes où cela serait trop vous demander ?

Gabrielle et Ethan se turent tous les deux tandis qu'Anna attrapa sa guitare qu'elle avait laissé dans un coin de la pièce. Elle s'installa sur le bord de la scène, faisant passer son instrument devant elle et commença à jouer quelques notes pour vérifier qu'elle était bien accordée. Raphaël, quant à lui, sortit les paroles de la chanson de son sac de cours car il n'avait toujours pas pris le temps de les apprendre puis il rejoignit ses deux amis sur la scène. Lucas avait emmené lui aussi sa guitare, une acoustique en bois sur laquelle il avait collé des autocollants de ses groupes de musiques préférés. Cliché.

— Quand vous voulez, les encouragea David Miller en s'adossant contre son mur habituel.

Anna lança un rapide coup d'œil à Lucas qui commençait à battre des mesures en tapant son pied sur le sol et elle reçut son signe de la tête comme point de départ. De ses doigts, elle caressa les cordes de sa guitare et la mélodie de l'instrument commença à envahir la pièce, un son doux qui s'harmonisait parfaitement avec les coups de mains que Lucas donnait contre le bois sa guitare qui faisait résonance.

Well you only need the light when it's burning low, commença Anna d'une voix suave et timide à la fois, Only miss the sun when it starts to snow. Only know you love her when you let her go.

La jeune fille se retourna vers Lucas et le garçon commença à son tour à gratter les cordes de sa guitare, rendant la musique plus puissante.

Il continua de sa voix grave, légèrement cassée :

Only know you've been high when you're feeling low.

Only hate the road when you're missing home, reprit Anna en forçant un peu plus sur sa voix pour essayer d'arriver à la même tonalité.

Only know you love her when you let her go, continua Lucas avant de s'arrêter.

La musique se stoppa, les deux amis cessant de jouer de leur instrument, et ils laissèrent un silence de quelques secondes avant que Lucas n'ajoute à demi-mots :

And you let her go.

Les guitares repartirent de plus belle à l'unisson puis ce fut Raphaël qui enchaina :

Staring at the bottom of your glass. Hoping one day you'll make a dream last. But dreams come slow and they go so fast.

La voix de Raphaël Lesage n'était pas aussi impressionnante que celle de ses amis, car moins originale dans sa tonalité, mais cela n'empêchait pas qu'il chantait juste et c'était tout aussi agréable à entendre. Spécialement que la douceur de sa voix était celle qui s'harmonisait le mieux à cette chanson d'amour.

You see her when you close your eyes. Maybe one day you'll understand why everything we touch surely dies.

Leur public écouta d'une oreille attentive, y compris Ethan et Gabrielle qui, pour une fois, n'avaient aucun commentaire à faire, et les trois amis reprirent ensemble le refrain de la chanson.

Lorsque la musique s'arrêta, quelques élèves de la troupe se levèrent pour les applaudir et Anna esquissa un sourire, sentant le poids qui l'avait accablé depuis le début de la journée se retirer. Elle détestait jouer en public et rien ne la stressait plus que cela. Elle ne donnait donc pas cher de son état mental le jour de la représentation qui serait probablement vu par l'intégralité du lycée, et donc possiblement, Noah Khan.

— Super, souffla David Miller, impressionné, en les rejoignant, C'était vraiment bon. Si vous arrivez à nous faire un travail aussi pro pour chacune de vos chansons, on va cartonner !

— D'ailleurs, enchaina Anna à l'attention des autres élèves du théâtre, Si certains d'entre vous souhaitent se joindre à nous pour d'autres chansons, il n'y a pas de problème.

— Personnellement, je m'en passerai, lui répondit Gabrielle en se relevant de sa chaise pour prendre ses affaires, Désolée, mais je dois y aller.

— Oui c'est bon, vous pouvez partir de toute façon, enchaina son professeur après un regard à sa montre, La séance est finie.

Les élèves commencèrent à sortir un par un du théâtre et Anna se dirigea vers sa housse de guitare pour ranger son instrument.

— Je dois filer, j'ai un match de basket, entendit-elle la voix de Lucas dans son dos, On se revoit la semaine prochaine pour les répétitions ?

— Oui pas de problème, lui répondit la jeune fille sans prendre la peine de se retourner vers lui, A plus tard.

— Ouais moi aussi je file Anna, enchaina Raphaël en suivant son meilleur ami.

— Bye !

La jeune fille referma la housse de protection de sa guitare avant de réaliser, qu'une fois de plus, elle était la dernière à sortir de la salle.

— C'était vraiment super ce que vous avez fait tous les trois, déclara David Miller en se rapprochant de son élève, Et tu as une voix magnifique.

— Merci c'est gentil, mais Lucas chante et joue dix fois mieux que moi.

— C'est vrai qu'il a un timbre très particulier lui aussi, ajouta-t-il, Mais je ne compare jamais les élèves et je trouve que tu chantes tout aussi bien que lui.

— Est-ce que je peux laisser ma guitare ici ? Changea-t-elle soudainement de conversation, Ce n'est pas très pratique dans les transports et on fait nos répétitions ici de toute manière.

— Oui bien sûr, je ferme à clefs la costumerie si tu veux.

Anna acquiesça d'un signe de la tête avant de se diriger vers la pièce en question pour y poser sa guitare, suivie par David Miller. La jeune fille rangea son instrument dans un coin et sortit de la costumerie pour laisser le professeur la fermer.

En tournant les clefs dans la serrure, il ajouta :

— Comment ça se passe avec ton père en ce moment ? Il parle toujours du procès ?

— Je crois qu'il est au courant que ma mère a retrouvé un travail donc non, il n'en parle pas, j'espère qu'il a changé d'avis et que ce n'était qu'une menace pour qu'elle retourne travailler.

— Ta mère n'est plus au chômage alors ?

— Si, enfin non, s'embrouilla la jeune fille, Enfin, elle s'est fait virer il y a quelques jours, puis Noah a réussi à convaincre son père de lui donner une seconde chance. Elle recommence à travailler la semaine prochaine dans sa compagnie, mais elle a bien moins de responsabilités. Je crois qu'il a embauché deux personnes pour le même poste du coup, pour rattraper ses conneries au cas où.

— Noah ? Répéta David Miller qui semblait s'être arrêté sur cette seule information, Noah Khan ?

— Oui.

Le professeur poussa un soupir à peine perceptible et il enfonça les mains dans les poches de son jean avant d'ajouter, mal à l'aise :

— Écoute Anna, ce n'est pas à moi de te dire ça, et tu vas sûrement penser que je me mêle de ce qui ne me regarde pas, mais... J'ai entendu pas mal de choses sur Noah Khan dans la salle des professeurs et ce garçon ne semble pas être... Comment dire ça ?

— Bien ? Ironisa la jeune fille, Je sais.

— Je veux juste m'assurer qu'il ne soit pas en train de profiter de... Enfin de...

Anna l'observa en biais, réalisant que cette conversation devenait de plus en plus bizarre et de moins en moins appropriée.

— Enfin, reprit le professeur qui ne savait visiblement plus où se mettre, Tu es assez grande pour te faire ton propre avis.

C'était surtout que le sien n'avait pas vraiment lieu d'être.

— Je dois y aller, marmonna la jeune fille en rejoignant les portes du théâtre pour sortir de la pièce.

— Oui bien sûr, je ne te retiens pas plus longtemps, à la semaine prochaine.

***

Anna Joly poussa brutalement les grandes portes du théâtre de Saint-Richard, soulagée de quitter cette conversation absurde avec David Miller, et rejoignit le couloir rempli d'élèves pressés de rentrer chez eux en cette fin de journée.

La jeune fille s'arrêta devant la porte des toilettes des filles et y pénétra pour aller boire de l'eau au lavabo. En relevant son regard vers le grand miroir de la pièce, elle poussa un soupir de lassitude. Après la micro nuit qu'elle avait passée, son visage faisait encore plus peur que d'habitude. Elle comprenait maintenant pourquoi Lucas l'avait comparé à un zombie plus tôt dans l'après-midi. De grands cernes grisâtres et creusés pendaient sous ses yeux, d'autant plus que ceux-ci étaient si fermés à cause de la fatigue que la différence entre les deux étaient effrayantes, quasi surnaturelle.

Anna passa ses mains sous l'eau froide du lavabo puis les porta à son visage pour se réveiller. Mais le froid lui extirpa seulement une grimace de douleur et elle décida de laisser tomber. De toute façon, elle allait rentrer chez elle et se mettre au lit tout de suite. Anna attrapa son sac sur le parquet des toilettes puis sortit de la pièce en baillant. Mettant sa main devant sa bouche, elle rejoignit la sortie du lycée. Arrivée dehors, le vent frais vint lui bruler les yeux encore plus et elle cligna des paupières en grimaçant.

— Hey, déclara Noah en débarquant à côté d'elle, Tu vas bien ? On ne s'est pas vus aujourd'hui.

— Non j'avais cours toute la journée, répondit-elle en enfilant ses gants en laine.

Elle se retourna vers lui, observant sans jamais s'en lasser la perfection de son visage, et l'interrogea après avoir vu le sac de sport qu'il tenait sur son épaule :

— Tu vas au rugby ?

— Oui.

— Vous êtes fous, il fait trop froid.

— J'ai le sang chaud, rétorqua le garçon.

Anna ne releva pas puis commença à s'éloigner de la cour du lycée pour rejoindre le trottoir, Noah sur ses pas.

Elle le questionna, curieuse :

— T'as vraiment envie de faire du sport après la nuit qu'on a passée ?

— C'est un moyen comme un autre de se réveiller, argumenta le garçon.

— Je te conseillerai plutôt d'aller dormir, ça marche mieux, ironisa la jeune fille.

— C'est clair que toi, tu en aurais bien besoin, insinua-t-il en l'observant plus longuement, Je suis résistant.

— Ah, ah.

Noah sortit de la poche de son manteau son tabac à rouler et il enchaina en reprenant son sérieux :

— En fait, tu n'as pas répondu à mon SMS de cette nuit.

— Le « bonne nuit » ? S'exclama la jeune fille, perplexe, Je t'avoue que je n'ai rien compris. C'était quoi ce message ?

— Une manière de te faire comprendre que tes SMS du soir commencent à me manquer.

— Arrête, souffla-t-elle, blasée, Tu détestes les gens qui font ça !

— Anna, il y a des degrés de sensibilités dans la liste des choses que je déteste et tes SMS étaient à la limite du supportable.

La jeune fille pouffa de rire, préférant ne pas commenter, et Noah termina de rouler sa cigarette avant de la porter à ses lèvres. La conversation de son père de hier soir résonnait encore dans son esprit et il ignorait comment aborder le sujet avec Anna.

— Je crois que je vais la gâcher, lâcha-t-il d'un seul coup.

— De quoi ?

— Ma dernière chance pour être ton ami.

— Hein ? S'exclama la jeune fille en fronçant des sourcils, Non mais qu'est-ce que tu as fait encore ?!

— Ce n'est pas ce que j'ai fait, mais ce que j'ai envie de faire.

— Et qu'est-ce que tu as envie de faire ? L'interrogea Anna, sceptique.

— Sortir avec toi.

Sa réponse laissa la jeune fille complètement abasourdie devant lui, incapable de répondre ni même de cligner des yeux, et Noah profita de son mutisme pour allumer sa cigarette.

— Par... Pardon ? Bégaya-t-elle en le voyant souffler sa fumée dans les airs, comme si la situation n'était pas totalement bizarre.

— Je veux sortir avec toi, répéta Noah en plongeant son regard dans celui de la jeune fille.

Il n'était pas le genre de garçon à tourner autour du pot. D'ailleurs, il n'était pas non plus le genre de garçon patient. Énervé par son mutisme qui se faisait de plus en plus inquiétant, il reprit, légèrement vexé :

— Sinon tu peux me répondre.

— Mais, je, balbutia Anna, encore perplexe, Pourquoi ? Tu m'as dit que tu ne pouvais pas me donner plus que ton amitié.

— Je crois que je t'ai déjà prouvé plusieurs fois que je te donnais plus que mon amitié Anna.

La jeune fille resta de nouveau silencieuse, hésitant à lui faire confiance, ce qui était largement compréhensif. C'était d'ailleurs ce que devait penser Noah car il ajouta en se rapprochant d'elle :

— Je te jure que je suis sincère cette fois, j'ai vraiment envie d'essayer. Tu peux me faire confiance.

— Je sais que tu es sincère, murmura Anna, Je le sens.

Esquissant un sourire, Noah tendit sa main vers elle pour attraper sa hanche, mais la jeune fille se recula d'un pas. Perplexe, il s'exclama :

— Mais qu'est-ce qu'il y a ?

— Tu es peut-être sincère, mais jusqu'à quand ?

— Pardon ?

— Je sais que tu es sincère, répéta Anna, Parce que tu fais toujours ce qui te passe par la tête. Aujourd'hui, tu as envie d'être avec moi, mais demain ? Dans deux semaines ?

— Je ne comprends pas.

— Noah, tu es toujours sincère jusqu'à ce que tu changes d'avis, l'arrêta Anna, Tu voudras bien être avec moi jusqu'à ce que tu te découvres soudainement une culpabilité envers Ethan, ou jusqu'à ce que Christelle réapparaisse, ou alors jusqu'à ce qu'Ellie ait encore besoin de ton aide. Je ne veux pas être avec toi si c'est pour redouter tous ces moments là.

— Ça n'arrivera pas.

— Ça arrive tout le temps !

— Non mais tu me fais quoi là ? Commença-t-il à s'emporter, réalisant qu'elle était réellement en train de lui dire non, Il y a quelques jours on s'envoyait des SMS où tu me demandais de ne pas me louper la prochaine fois que je t'embrasserai et tu vas me faire croire, maintenant, que tu as toujours pensé à nous comme des amis ?! C'est quoi ce retournement de situation débile ?!

Anna leva les yeux au ciel, repensant à cette soirée, et elle lâcha :

— Justement, j'avais espéré Noah.

— Quoi ?

— Dès le lendemain matin de ton stupide message, j'avais espéré que tu viennes au lycée et que tu m'embrasses. J'ai espéré comme ça pendant trois jours et tu n'en as jamais reparlé une seule fois. Et là, j'ai réalisé encore une fois que je m'étais fait des films sur quelque chose qui t'avait juste amusé le temps d'une soirée. J'en ai marre d'espérer des choses qui n'arriveront jamais. Vraiment Noah, je suis fatiguée de tout ça.

— Tu, tu, bégaya-t-il à son tour, Attends... Tu te rends comptes que tu es la première personne à refuser de sortir avec moi ?

— Et je suis quasi sûre d'être la seule à laquelle tu as déjà demandé, ironisa-t-elle.

— Mais justement ! S'exclama-t-il, outré, Pour une fois que je fais un effort, tu casses tout Anna ! J'espère que tu t'en veux !

— Non ça va, je vais m'en remettre, pouffa la jeune fille.

Ahuri, il l'observa en silence, prenant conscience peu à peu de l'humiliation qu'il venait de subir. Noah avait refusé catégoriquement de s'engager avec Anna pendant des mois, décevant la jeune fille à chaque fois, et aujourd'hui, c'était elle qui le rejetait sans aucune gêne ou remord.

— Très bien, souffla-t-il, Je sens que tu es troublée. Je vais te laisser du temps pour y réfléchir.

— Je n'ai pas besoin de temps Noah, je veux juste qu'on reste...

— Jusqu'à la fin de la semaine, la coupa-t-il, Je te laisse jusqu'à la soirée d'Esther et tu me redonneras ta réponse.

— Ce sera la même ! S'exclama-t-elle, excédée qu'il n'écoute même pas ce qu'elle était en train de lui dire.

— Non, ce ne sera pas la même, rétorqua-t-il d'un air confiant, Je le sais.

— Noah, tu es insupportable quand tu es comme ça.

— Mais je suis toujours comme ça, commenta-t-il, surpris.

Anna l'observa, blasée, espérant lui faire comprendre par son regard, que oui, en effet, il était toujours insupportable.

— Bref, il faut que je file, enchaina Noah en tirant une dernière taffe sur sa cigarette.

Il voulut la laisser tomber sur le béton avant de s'arrêter net. Rapidement, il lança un rapide coup d'œil autour de lui et aperçut une poubelle un peu plus loin sur le trottoir. Le garçon fit un signe d'au revoir à Anna et il se dirigea vers le conteneur sous le regard de la jeune fille. Il lâcha sa cigarette qui tomba dans le fond de la poubelle et se retourna vers elle, un large sourire dessiné sur son visage.

— Réfléchis bien, lui murmura-t-il du bout des lèvres avant de s'éclipser.

Hallucinée, Anna leva les yeux au ciel en poussant un soupir de frustration. Noah détestait qu'on lui dise non et elle ne donnait pas cher de leur amitié si elle continuait sur sa lancée. Pourtant, elle n'avait pas envie de s'engager dans une relation qui allait la faire souffrir. Anna avait fini par apprécier ce qu'ils avaient tous les deux, cette amitié un peu ambiguë, cette relation particulière qui leur appartenait. C'était flou, compliqué, tordu, mais Anna savait que c'était cela qui retenait Noah.

La jeune fille fut tirée brutalement de ses pensées par la sonnerie de son téléphone au fond de sa poche de jean. Elle sortit son portable et décrocha illico en lisant le nom du contact affiché à l'écran :

— Ouais Ruben ? Ça va ?

— Bof, je me suis engueulé avec Gautier hier soir, cracha le garçon.

— Encore ? Hallucina sa meilleure amie, Putain, ça ne va vraiment pas vous deux en ce moment !

— On s'est réconciliés après, relativisa Ruben, Mais tout de même, ça devient chiant. Enfin bref, toi ça va ?

— Tu ne devineras jamais ce qu'il vient de m'arriver.

— Un rapport avec Noah ?

— Oui, répondit-elle, déçue d'être si évidente, Mais je préfère t'en parler de vive voix.

— Justement je t'appelais pour t'inviter à manger ce soir à la maison. J'ai réussi à convaincre Jared de bouger son cul pour nous rejoindre. Nos parents ne sont pas là ce soir.

— Ouais, accepta de suite la jeune fille, réalisant que même si elle se plaignait tout le temps, elle arrivait toujours à trouver autre chose à faire que de dormir, Mais tu as cours là ou pas ?

— Non, j'ai fini.

— On y va maintenant alors ?

— Ouais, tu me rejoins devant mon lycée ?

— Ok... Et aussi, enchaina Anna, Vous faites un truc samedi prochain avec Gautier ?

— Je ne sais pas, sûrement un cinéma.

— J'ai une soirée d'anniversaire chez une fille de ma classe, vous pouvez venir si vous voulez. Ça vous fera peut-être du bien de faire des sorties autres que tous les deux.

— Ouais, tu as raison, bonne idée.

— Cool ! S'exclama-t-elle, ravie, A tout de suite.

***

— Comment allez-vous aujourd'hui Ellie ? Interrogea Monsieur Kerman en remontant sa paire de lunette sur son nez.

Le vieux psychologue reporta son attention sur sa patiente, assise dans le fauteuil devant lui, et qui venait juste de s'y installer pour leur séance hebdomadaire du jeudi après-midi.

— Rien de spécial à raconter, marmonna la jeune fille, blasée d'avance par la demi-heure qui l'attendait.

— Cela va faire bientôt un mois que votre grand-mère est décédée, est-ce que vous avez envie d'en parler ?

— Non toujours pas, lui assura-t-elle, Que ça fasse un mois, trois ans ou une décennie, je n'aurais jamais envie d'en parler.

— Et vos parents alors ? Changea-t-il de suite de sujet.

Jean Kerman l'avait assez interrogé sur la question pour savoir qu'elle ne changerait pas d'avis comme ça. Cette gamine était aussi têtue qu'insupportable.

— Quoi mes parents ?

— Comment ça se passe avec eux depuis leur retour ?

— Ça se passe.

— Ce n'est pas vraiment une réponse, lui fit-il remarquer en relevant son regard vers elle.

— Alors votre question n'en était pas vraiment une non plus, le nargua la jeune fille, Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise ?

— La vérité, c'est toujours mieux.

— Et bien, marmonna Ellie en remontant ses jambes sur le fauteuil en cuir pour se mettre en tailleur, On vit tous les trois dans le même appartement, mais on ne se parle pas, comme si on était des colocataires quelconques. Mes parents ont des horaires de travail très différents donc on ne mange jamais ensemble, et en réalité, c'est à peine si on se croise pendant les week-ends.

— Et comment vous ressentez cette situation ?

— C'était déjà comme ça avant qu'ils partent, ça ne change rien.

— Peut-être que... Murmura-t-il en commençant à se gratter la barbe.

Ellie avait suffisamment appris à le connaître pour savoir que cela amenait peu souvent une bonne idée.

— Je me disais, enchaina-t-il, Il y a un blocage depuis très longtemps dans la relation qui vous lie à vos parents et je pense que ce blocage s'explique par le fait que votre grand-mère était présente à leur place. Vous avez porté de nombreux espoirs en Betty et son décès brutal vous a fait réaliser le manque de liens qui vous unissent à vos parents, car ils existent même si vous ne les voyez pas encore.

— Je n'ai toujours pas compris le fond de votre pensée, commenta Ellie, sceptique.

— Vos parents sont revenus précisément le jour de son enterrement, répondant ainsi à la logique selon laquelle – puisque Betty n'était plus là – ils devaient revenir pour s'occuper de vous.

— Jusque-là, ce n'est pas un scoop.

— Et ils n'y sont pas parvenus.

— Ça non plus, ce n'en est pas un.

— D'où mon raisonnement, reprit Jean Kerman en continuant son geste machinal avec sa barbe, Je pense que vous ne pourrez pas renouer avec vos parents tant que vous n'aurez pas partagé le décès de cette personne fédératrice.

— Pardon ?

— Betty vous rassemblait, entre vous et vos parents, elle était un point de jonction, la seule personne qui vous rattachait à votre famille, enchaina le psychologue, Depuis qu'elle est partie, vous ne vous assimilez plus à vos parents. Je pense qu'il est important que vous parveniez tous les trois à discuter de ce décès, à comprendre que cette personne qui vous a quittée et qui vous reliait ne doit pas vous séparer maintenant qu'elle est absente.

— Hors de question, l'arrêta Ellie catégorique.

— Dans quelques jours, cela fera un mois que Betty est partie, ce serait l'occasion parfaite pour partager avec vos parents. Pourquoi, par exemple, ne pas aller sur sa tombe pour y déposer des fleurs ?

— Hors de question, répéta-t-elle.

— Avec le retour précipité de vos parents, l'organisation de l'enterrement, la présence de votre famille éloignée, de vos amis, des collègues de vos parents, énuméra Kerman en passant outre ses refus catégoriques, Vous n'avez jamais réellement pu faire un deuil entre vous trois, au calme. Il serait important que vous parveniez à le faire, pour votre bien-être.

— A quoi bon ?

— Si vous ne voulez pas croire vous-même que vous irez mieux Ellie, je ne peux plus faire grand-chose pour vous.

— Ce n'est pas ce que je dis, lâcha-t-elle en laissant ses jambes retomber sur le parquet, C'est vous qui m'avez dit d'arrêter de me focaliser sur le passé. Betty est morte. Point barre. Je ne sais pas quelle foutue cérémonie vous voulez que je fasse avec mes parents, mais ça ne la ramènera pas en tout cas.

— Non, mais ça la laissera partir, rectifia le vieil homme, Ce que vous n'avez jamais fait.

Ellie humidifia sa lèvre inférieure, baissant les yeux vers ses chaussures dont les lacets étaient défaits. Machinalement, elle s'abaissa pour les refaire sous le regard de Jean Kerman. Sa patiente avait fait des progrès impressionnants depuis le début d'année, réalisa-t-il en gardant son mutisme. Il y a quelques mois de cela, le psychologue était persuadé que sa remarque aurait probablement poussé Ellie à écourter sa séance. Aujourd'hui, la jeune fille n'était toujours pas prête à lui accorder raison, mais son absence de contradiction signifiait qu'elle savait qu'il n'avait pas tort et qu'elle était prête à entendre la suite. Ce qui était déjà une victoire en soi.

Se relevant, Ellie reprit sa position en tailleur sur le large fauteuil noir et Jean Kerman tourna une page de son petit calepin noir avant d'ajouter :

— Vous avez envie de me parler de quelque chose de particulier pour cette séance ?

— De... De Betty, c'était bien, en fait.

— D'accord, murmura-t-il en esquissant un sourire discrètement, Je vous écoute.

***

— Il t'a demandé de sortir avec toi ?! S'exclama Ruben, en lâchant sa fourchette dans son assiette.

Les regards, qui avaient été dès lors tournés vers la jeune fille, bifurquèrent brutalement dans la direction du garçon qui venait de l'interrompre dans son récit.

— Sérieux ? Reprit Ruben qui était assis juste en face d'Anna, Noah veut vraiment sortir avec toi ?!

— Oui, c'est ce qu'il vient de me dire aujourd'hui, lui répondit sa meilleure amie, gênée par tous les regards interloqués.

D'accord, elle était loin d'être un canon de beauté, mais tout de même, songea-t-elle tout en faisant tourner ses spaghettis à la bolognaise dans sa fourchette, leur béatitude devenait légèrement vexante.

— J'ai plus faim, grinça Jared, écœuré, en repoussant son assiette au milieu de la table.

— Et du coup tu lui as dit oui ? Enchaina Gautier, curieux.

— Non.

— Ah finalement, commenta Jared en reprenant son assiette de pâtes.

— Non ?! Répéta Ruben, choqué, Tu lui as vraiment dit non ?

— Je ne sais plus quoi faire, soupira la jeune fille en se prenant la tête entre les mains, C'est pour ça que je voulais vous en parler. Vous en pensez quoi ? Il est sincère à votre avis ?

— Non, tu ne peux pas lui faire confiance, rétorqua Jared en enfournant sa fourchette de pâtes, Ché un gros chonnard, enchaina-t-il la bouche pleine.

Anna se retourna vers sa gauche pour l'observer d'un air blasé. Le garçon avait de la sauce tomate partout autour de la bouche ce qui rendait son affirmation précédente assez peu crédible.

— Jared, essaie de réfléchir au problème objectivement et laisse de côté ta haine contre Noah.

Le garçon avala sa bouchée, faisant semblant de réfléchir, et il répéta dès qu'il put de nouveau s'exprimer :

— Non, tu ne peux pas lui faire confiance.

— Jared ! S'exclama la jeune fille, Tu ne réfléchis même pas à la question !

— Mais quelle question ? S'emporta-t-il en se retournant vers elle, Je suis sérieux Anna. Je le connais. C'est un manipulateur ce type. En fait, je ne comprends même pas pourquoi tu te poses vraiment la question de sa sincérité.... Regarde comment il manipule Esther depuis trois ans !

— Il n'a jamais demandé à Esther de sortir avec lui, nuança la jeune fille.

— Qu'est-ce que tu en sais ? Tu traines avec lui depuis seulement quelques mois. Elle le connait depuis la seconde. Et moi aussi d'ailleurs.

— Oui c'est vrai, réalisa Anna en se retournant vers son assiette d'un air dépité, Peut-être qu'il a déjà fait le coup à Esther... Mais comment est-ce que je pourrais vérifier ? Je ne peux pas demander à Gabrielle ou Ellie, elles me détestent depuis que j'ai trompé Ethan.

— Non, c'est faux, commenta Jared en coupant un morceau de pain pour essuyer la sauce dans son assiette, Elles te détestent depuis toujours.

Anna ne voulut pas relever, même si elle reconnaissait que le garçon n'avait pas totalement tort. Elle se retourna vers Ruben et Gautier qui étaient restés complètement silencieux pendant leur échange.

— Alors qu'est-ce que je dois faire ? Les interrogea-t-elle en soupirant.

— Est-ce que je ne viens pas de te le dire ? Grinça Jared sèchement en croquant à pleine dent dans son morceau de pain.

— Moi, je ne peux pas trop t'aider, lui répondit Gautier d'un air désolé, J'ai vu ce gars qu'une seule fois... Mais après, de ce que j'en ai vu, il avait l'air de se préoccuper réellement de toi.

Jared voulut le contredire, mais il se remémora à l'instant cette fameuse soirée dont parlait Gautier et à laquelle Noah était venu le défendre contre les trafiquants de drogue. Il jugea donc qu'un commentaire de sa part serait plutôt mal venu. S'autocensurant, il découpa un autre morceau de pain et le mastiqua avec dédain pour montrer qu'il ne partageait toutefois pas ce point de vue.

— Et toi Ruben ? Enchaina Anna en se tournant vers son meilleur ami.

— Moi non plus je n'en sais trop rien, souffla-t-il en passant une main dans sa touffe de cheveux.

Main qu'il déposa ensuite sur la cuisse de Gautier avant de continuer :

— Je pense que Noah n'était pas sincère avec toi au début, mais qu'il a fini par le devenir... Maintenant, c'est à toi de voir si tu es capable de prendre le risque, qu'encore une fois, il faisait semblant.

— Mais comment je pourrais le savoir ?

— En essayant ? Proposa Gautier en caressant tendrement la main de son petit-ami.

— En le rayant de ta vie, argumenta Jared en décidant de revenir finalement dans la conversation, Ce sera la méthode la plus efficace.

— Tu n'aides pas beaucoup Jared, ironisa Gautier en retour.

— Vous plaisantez ? S'offusqua le garçon, Je suis la personne qui donne les conseils les plus raisonnables de cette table !

— Je vous laisse deux minutes, les coupa Ruben dans leur conversation, J'ai la taupe qui pousse au trou.  

— Quoi ? Mais qu'est-ce que ça veut dire ça encore ? Interrogea Jared, blasé, en l'observant sortir de la cuisine.

— Le pire dans tout ça, enchaina Anna pour continuer leur conversation, C'est qu'il m'a donné une date pour rendre ma réponse. Je veux dire, il se prend pour qui ?

— C'est quand la date ? Interrogea Gautier, amusé.

— Non mais attendez, les coupa Jared en fronçant des sourcils d'un air suspicieux, Ruben vient d'entrer aux toilettes là ?

— A la soirée d'anniversaire d'Esther samedi prochain, lui répondit Anna, Vous venez d'ailleurs ?

— Oui on pourra venir.

— Oh mon Dieu, je viens de comprendre son expression, blêmit Jared, car il était manifestement resté focalisé sur son interrogation précédente... Mais il est dégueulasse de nous dire ça !

— Cool, enchaina Anna, imperturbable.

Elle ignorait d'ailleurs de quoi il était question.

— Alors qu'est-ce que je fais ? La soirée est dans deux jours et je suis complètement perdue.

— Ne te mets pas trop de pression, lui conseilla Gautier tandis que Jared était toujours prostré de stupéfaction, Tu sais, en soirée, l'alcool aidant, ça va te paraître tout de suite beaucoup plus naturel. Je suis sûr que tu ne te poseras plus de questions.

Le bruit de la chasse d'eau résonna derrière le mur de la cuisine et Ruben revint s'installer sur sa chaise, sous le regard dédaigneux de son grand-frère.

— Bon caca ? Ironisa celui-ci, sèchement.

— Toute en longueur, lui répondit Ruben fièrement.

Outré, Jared ne sut même pas quoi répondre. Pourtant, ni Anna ni Gautier ne relevèrent le commentaire. Malgré ses expressions de vieillards et ses bonnes manières, Ruben s'était trouvé ces derniers jours un penchant incompréhensif pour la scatophilie, rendant sa personne encore plus paradoxale et indescriptible. Au fond, c'était probablement ce qu'il recherchait.

— Bref, reprit Anna lorsque Ruben fut de nouveau installé autour de la table, On pourrait peut-être revenir au problème.

— Le problème est que Noah va encore te manipuler et que tu passeras encore pour une conne, rétorqua Jared en reprenant son sérieux.

— Pourquoi ? L'interrogea-t-elle, Pourquoi, pour une fois, ça ne pourrait pas être réel ?

— Parce que quoi que tu fasses, il y aura toujours Ellie.

La jeune fille resta sans voix face à lui, ne voulant même pas entendre la suite de sa pensée. Pourtant Jared continua, imperturbable :

— Noah, il a toujours été comme ça. Il apprécie des filles sur le moment, il s'amuse. Ça a été le cas pour Christelle quand il était en première et ça a été probablement le cas pour Esther en seconde. Le truc, c'est que derrière tout ça, il y a Ellie. La fille qu'il n'a jamais vraiment lâchée et qu'il ne lâchera jamais. Il est comme ça Noah, il danse entre deux chaises.

— On dit le cul entre deux chaises, rectifia Ruben, Utilise les bonnes expressions au moins !

Blasé, son grand-frère se retourna vers lui, furieux d'avoir été interrompu pour une broutille.

Il enchaina :

— La décision te revient Anna. Est-ce que tu te sens capable de rivaliser contre Ellie Lefevre ?

— Cette fille est une pauvre folle dépressive, commenta Anna avec dégout, Qu'est-ce qu'elle peut lui apporter ?

Se souvenant qu'il s'agissait aussi de l'ex de Jared Greggs, elle continua sur le même ton :

— Mais qu'est-ce qu'elle a pu t'apporter ?

— Pas grand-chose, murmura-t-il, Je te l'accorde.

Le garçon reposa ensuite sa fourchette dans son assiette avant de se retourner vers Anna et il ajouta, assez sèchement :

— Mais si tu as réellement envie de comprendre ce sentiment alors sors avec ce type et tu verras par toi-même que Noah ne t'apportera jamais rien non plus.

Anna avala sa salive, mal à l'aise, tandis que Gautier tenta de relativiser la situation pour détendre l'atmosphère qui était devenue soudainement pesante :

— Mais ça ne coute rien d'essayer !

— J'ai vingt-deux ans et je suis dealer en banlieue, rétorqua Jared avec ironie, Crois-moi, ça coute cher d'essayer.

— Ne pousse pas mémé dans les orties, l'arrêta Ruben, Tu étais déjà dealer avant de la rencontrer, tu exagères.

— Oui et bien elle ne m'a pas arrangé.

— Pas faux, lui accorda son petit-frère en bifurquant son regard vers son assiette de pâtes à la bolognaise.

— Enfin bref, reprit Jared en lançant un coup d'œil rapide à Anna, Ne sors pas avec ce type.

— Et si je lui dis oui ? L'interrogea la jeune fille, curieuse de connaître sa réaction.

— Alors ne viens pas te plaindre quand il te jettera comme toutes les autres, grinça Jared qui sentait déjà dans le ton qu'elle venait de prendre qu'elle n'était pas bien loin de répondre à l'affirmative à ce sombre crétin.

— Ne t'inquiète pas, rétorqua Ruben après un regard noir pour son grand-frère, Moi, je serai là pour te consoler. Ce ne sera pas la première fois qu'il te décevra.

— Raison de plus pour ne pas lui faire confiance ! Explosa le garçon, excédé.

Après tout, Jared n'avait jamais compris pourquoi on s'acharnait autant avec Noah Khan. Toute la gente féminine de cette ville avait pourtant intériorisé le fait qu'il était un véritable connard indigne de confiance, mais rien n'y faisait. Elles étaient toujours là, à ses pieds, sachant pertinemment que le miracle qu'elles attendaient allait leur éclater à la gueule. Imperturbables, immobiles, elles étaient là. Idiotes et amoureuses, elles attendaient.

Jared lança un dernier coup d'œil à son amie et réalisa que la jeune fille était différente. Anna, elle n'avait pas à attendre longtemps que son miracle lui explose à la figure. Cette fois, il n'avait pas envie d'aller ramasser les morceaux par terre.

***

Sentant les muscles de ses bras se déployer à leur maximum, Lucas lâcha son ballon de basket pour le faire entrer dans le panier et il se laissa tomber sur le sol, soulagé d'avoir réussi son dernier shoot de la journée. Après le match qu'il avait fait avec ses quelques amis du quartier, et « amis » était un terme encore un peu précoce, le garçon avait décidé – comme à son habitude – de continuer à s'entrainer seul pour améliorer son jeu.

Lucas se laissa tomber sur le béton du terrain, tentant de reprendre une respiration normale et moins douloureuse. Puis il passa une main sur son front pour essuyer les gouttes de sueurs qui y coulaient. En ouvrant les yeux, il remarqua seulement à cet instant que la nuit était tombée et il en déduisit qu'il devait être aux à l'entour de vingt heures trente. Les Gallien allaient encore lui tomber dessus pour son retard au diner, mais il s'en fichait éperdument. Il faisait de moins en moins d'effort ces derniers jours. Plus le temps passait, plus les semaines le rapprochaient de son dix-huitième anniversaire qui lui permettrait d'être enfin autonome et de quitter cet appartement et cet arrondissement qu'il haïssait. Bien sûr, il n'avait pas encore répondu à la question de ce qu'il allait pouvoir faire de Rachel, mais, dans tous les cas, la jeune fille était à des années lumières de ces préoccupations depuis qu'elle sortait avec ce crétin de Yanis Perrin.

Lucas se releva de sa position allongée et il rejoignit son sac de sport pour attraper sa serviette et s'essuyer le visage. Il la laissa tomber par terre et son regard s'arrêta sur son sac de cours et sa guitare qui étaient posés sur le sol de béton. Plus que trois mois à tenir, songea-t-il en poussant un soupir de frustration, Trois mois dans ce foutu lycée et puis il partirait, loin, très loin de Paris. Il arrivait presque au bout après un an et demi de supplice, un an et demi à supporter les élèves de Saint-Richard et leur satané bonheur dont il n'avait rien à envier.

— Toujours là ? Murmura soudainement une voix dans son dos.

Lucas esquissa un sourire, ne se donnant même pas la peine de se retourner, et il ajouta :

— Mais comment tu fais pour débarquer toujours de nulle part ?

— Tu exagères, commenta Ellie lorsqu'il se retourna vers elle, J'habite dans ce quartier et je passe toujours devant ce terrain pour rentrer chez moi. Cette remarque me revient.

— J'habite aussi dans ce quartier, l'arrêta Lucas, Et je joue sur ce terrain presque tous les soirs donc, non, cette remarque m'appartient. Et puis tu n'étais pas obligée de t'arrêter.

— Sympa, ironisa la jeune fille en se reculant d'un pas.

— Je plaisante, la retint Lucas en riant, Je sais que tu ne peux pas t'empêcher de t'arrêter ici quand tu me vois courir tout plein de sueur.

Ellie ne voulut même pas relever la prétention, même si elle reconnaissait qu'il n'avait pas vraiment tort car elle adorait l'observer lorsqu'il jouait au basket.

Elle ajouta :

— Pourquoi tu as ta guitare ? Tu as prévu de chanter dans le métro après ça ? Tu vas enfin essayer de t'acheter une vie ?

— Ah, ah, ironisa-t-il en lui lançant un regard moqueur, C'est bien à toi de dire ça... Vu ce que vaut la tienne.

— Outch, commenta Ellie en s'asseyant sur le sol en béton.

— Plus sérieusement, reprit Lucas en prenant place juste en face d'elle, Je chante dans la comédie musicale du lycée. J'avais une répétition, cet après-midi.

— Ce n'est pas vrai ? Toi, tu joues dans une comédie musicale ? Mais où est passé ton amour propre ?

— Je fais ça pour mes amis.

Face à son regard sceptique, il lui confirma de suite :

— Oui, j'ai des amis.

— Raphaël ? Interrogea la jeune fille, Tu as de la chance qu'il ait largué Gabrielle, c'est la seule raison qui rend cette personne un peu digne d'intérêt.

— Et Anna aussi, ajouta Lucas sans même essayer de défendre son meilleur ami.

D'un côté, songea le garçon, il l'avait bien mérité. Après tout, Lucas avait toujours refusé catégoriquement que Raphaël sorte avec sa cousine. Maintenant, il ne pouvait s'en prendre qu'à lui-même s'il était catégorisé comme le mec qui avait détruit le couple mythique d'Ethan et Gabrielle.

— Tiens, commenta Ellie, surprise, J'ignorais qu'elle était encore là celle-là.

— Comment pourrais-tu le savoir ? Tu ne regardes que toi.

— Ce qui est plus agréable que de regarder ce laideron, reconnais-le.

Lucas ne voulut pas répondre, blasé de son arrogance, et il s'allongea sur le sol en béton pour observer le ciel nuageux.

Ellie resta silencieuse pendant un moment, avant de se décider à le rejoindre. Elle s'installa à côté de lui, bifurquant son regard vers le ciel à son tour, et elle entendit à ses côtés :

— Tu vas bien ?

— Je sors de mon rendez-vous chez le psy.

— A cette heure-là ? S'étonna Lucas.

— Non, ça fait plus d'une heure qu'il est terminé, lui répondit la jeune fille, J'avais besoin de marcher.

Lentement, Lucas dirigea sa main vers le corps d'Ellie. Il s'arrêta lorsqu'il effleura son coude puis descendit ses doigts jusqu'à sa main. Il amena le bras vers lui et fit glisser le manteau de la jeune fille pour laisser apparaître la peau nue de son poignet. Il observa en silence les cicatrices encore présentes sur sa peau et les caressa du bout des doigts en tremblant. Incapable de bouger ou même de parler, Ellie resta stoïque, sans même oser le regarder, et elle concentra son regard vers le ciel nuageux.

— Je n'ai jamais voulu croire que tu avais vraiment fait ça, murmura Lucas du bout des lèvres en lui rendant sa main.

— Pourquoi ?

— Je ne savais pas que tu étais aussi mal. Je suis désolé.

— Ne le sois pas, j'ai été insupportable avec toi après la mort de Betty.

— Je l'ai été après la mort de mes parents, lui fit-il remarquer, J'aurais dû être plus compréhensif. J'aurais dû rester avec toi. J'aurais dû...

— Tu as fait ce qu'il fallait Lucas, le coupa-t-elle, Tu n'aurais pas pu faire mieux.

— C'est Noah qui t'a trouvé ?

— Ouais... Enfin, je l'ai appelé.

Un silence gênant s'installa et Lucas avala sa salive douloureusement. Lentement, il bifurqua son visage vers la jeune fille et murmura, la gorge nouée :

— Ce jour-là... Tu m'as appelé aussi, n'est-ce pas ?

— Oui, répondit Ellie sans oser se retourner vers lui, C'est toi le premier que j'ai appelé.

— J'avais vu ton appel, je n'ai pas décroché.

La jeune fille se retourna à son tour dans sa direction, si bien que leur visage n'était plus qu'à quelques centimètres l'un de l'autre. Elle esquissa un sourire timide. Ce qu'elle avait toujours apprécié chez Lucas, c'était sa sincérité.

— Je ne sais pas ce que tu crois, mais il faut que tu saches que je ne t'ai pas trompé avec Jared. Il était là pendant la mort de Betty, mais il ne s'est rien passé entre nous deux. Je ne t'aurais pas fait ça.

Lucas l'observa interdit pendant quelques secondes et Ellie ajouta :

— Je voulais juste que tu le saches.

— Et tu me dis ça maintenant ? Ironisa le garçon, Tu ne pouvais pas me le dire plus tôt ?

— Alors c'est vraiment ce que tu croyais ? Que je t'avais trompé avec Jared ? Tu pensais que j'avais la tête à ça à ce moment-là ?

— Tu ne m'as pas empêché de croire le contraire non plus, nuança-t-il, Tu étais tout le temps avec lui, tu lui tenais la main pendant l'enterrement, qu'est-ce que j'étais censé croire ?

— Moi, répondit-elle, C'est en moi que tu étais censée croire.

Le garçon resta de nouveau sans voix, plongeant simplement son regard dans ses yeux d'un bleu à crever le cœur. Il avança sa main vers elle pour caresser sa joue froide à cause du vent qui soufflait.

— Tu es incompréhensible, déclara-t-il du bout des lèvres, Tu n'en as pas marre de rendre les gens complètement fous ?

— Je ne le fais pas exprès.

Lucas pouffa de rire en retirant sa main puis bifurqua son visage vers le ciel, essayant de deviner les étoiles, mais les lumières de la capitale rendaient impossible toute observation.

Ellie suivit son regard puis elle ajouta pour lancer une nouvelle conversation :

— C'est quoi pour toi la plus belle histoire d'amour ?

— Euh, je ne sais pas, marmonna le garçon, Roméo et Juliette. C'est la première histoire d'amour qui me vient à l'esprit. Et pour toi, c'est quoi ?

— Titanic.

— Ouais, aussi.

— C'est drôle, non ? Enchaina la jeune fille, songeuse, De se dire que les plus belles histoires d'amour ne le sont que parce que l'un des deux n'est plus là.

— Moi, je trouve ça triste, pas drôle.

— Je ne sais pas, marmonna-t-elle, C'est peut-être une façon de nous dire que l'amour est tellement fort entre ces personnes-là qu'elles ne peuvent pas y survivre ensemble.

— T'es trop romantique en vrai comme fille, commenta Lucas moqueur en se retournant vers elle.

— Tu es sortie avec moi, ça te surprend encore ?

— Tu me surprends toujours.

La jeune fille le couva du regard, se demandant inlassablement pourquoi elle avait tout gâché avec lui, bien que la réponse fût si évidente que ça lui crevait encore le cœur.

Ellie se releva de sa position allongée avant d'ajouter :

— Je devrais y aller, il est tard.

— Oui moi aussi, la suivit Lucas en se relevant à son tour, Les Gallien vont me tuer pour être de nouveau en retard au diner.

— Au moins, tu as un diner qui t'attend, commenta Ellie en passant une main rapide sur ses fesses pour faire tomber les petits cailloux qui s'étaient collés à son jean.

— J'ai le diner et toi, tu as les parents, je ne sais pas ce qui est le plus enviable.

Ellie ne commenta pas, ne voyant pas vraiment ce qu'elle pouvait répondre, et elle se dirigea vers la sortie du terrain, Lucas sur ses pas. Le garçon attrapa ses affaires sur le sol, faisant passer son sac de cours et sa housse de guitare sur son dos tandis qu'il passa son sac de sport devant lui. Puis ils rejoignirent tous les deux le trottoir pour rentrer chez eux. En silence, ils avancèrent dans la nuit et Ellie s'arrêta devant son immeuble. Celui de Lucas – ou du moins des Gallien – se trouvait à quelques mètres plus loin dans la rue.

— Bonne nuit Lucas, murmura la jeune fille en se dirigeant vers les veilles portes en bois de son immeuble particulier.

— Bonne nuit, lui répondit-il à son tour.

Ellie commença à s'engouffrer à l'intérieur du bâtiment lorsque Lucas l'arrêta :

— Ellie !

— Oui ? L'interrogea-t-elle en se retournant vers lui, la main toujours sur la porte entrouverte.

— Si jamais tu m'appelles, je te promets que je décrocherais cette fois.

— Je te remercie, mais je n'ai pas prévu de me suicider pour le moment, ironisa la jeune fille tout en s'offusquant elle-même de son commentaire.

— Je ne pensais pas particulièrement à quelque chose d'aussi tragique, nuança Lucas, Juste... Appelle-moi, si tu veux.

Le garçon s'éloigna après lui avoir fait un signe de la main et Ellie resta prostrée devant la porte d'entrée de l'immeuble l'espace d'une seconde.

Un sourire se devina sur ses lèvres lorsqu'elle pénétra dans le hall. Elle se dirigea vers l'ascenseur et appuya sur le bouton d'appel, impatiente et surexcitée. Elle sentait les pulsations de son cœur battre à un rythme plus rapide que d'habitude et une étrange sensation commençait à l'envahir. Une sensation qu'elle n'avait plus connue depuis la mort de Betty. Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent devant elle et la jeune fille s'engouffra dans l'habitacle d'acier. Lucas Gallien, songea-t-elle en silence, elle avait presque failli oublier à quel point ce type la rendait vivante.



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