"Souvenez-vous, cela fait aujourd'hui deux mois, Andrew Stevenson marquait le but de la victoire pour Tottenham et s'effondrait, foudroyé par une attaque cardiaque fatale, après avoir donné la victoire à son équipe. Aujourd'hui, notre reporter Ella Dennis, est partie retracer le portrait de l'homme exceptionnel qu'était le numéro 9 des Spurs."
-Rien que des conneries pour attraper les gens et faire de l'audience, râla Louis en essuyant une larme qui coulait le long de sa joue.
Liam, qui se tenait dans l'embrasure de la porte avec une pizza dans les mains, soupira et s'approcha de lui, déposant le plat sur la table basse, et les gants à côté. Il s'assit sur le canapé à côté de son meilleur ami et frappa gentiment son épaule.
-Eh, je n'ai pas revêtu ton tablier spécial Minnie rouge à pois blancs pour que tu fasses la tête!
Louis esquissa un maigre sourire, tandis que Liam s'affairait à découper précautionneusement la pizza qu'il avait confectionnée avec amour et bonne volonté pendant un long moment.
-Et voilà une part de pizza maison, annonça-t-il en servant Louis.
-C'est vraiment adorable de ta part d'être venu t'installer ici, je ne saurai jamais comment te remercier.
-Tu pourras me remercier quand tu iras mieux, juste en souriant de nouveau.
-Tu sais- je ne sais pas si je réussirai un jour à l'oublier.
Liam faillit s'étouffer. Il arrêta définitivement la télévision pour capter pleinement l'attention de Louis et le remettre sur le droit chemin.
-Louis, personne ne te demande de l'oublier. D'ailleurs, personne n'y arriverait. Andrew fait partie de nos vies et restera à jamais gravé dans nos cœurs. Mais la question, c'est de redevenir le Louis que tu étais avant.
-Le Louis d'avant, c'était le Louis avec Andrew, pas sans.
-Je sais mieux que tout le monde que tu peux le faire. De toute manière, arrivera forcément un jour où le numéro 9 trouvera preneur.
-Tu dis ça comme si c'était déjà fait.
Liam se cacha derrière son verre-ballon de vin et ne répondit que par un faible raclement de gorge.
-Tu sais quelque chose et tu ne me l'as pas dit.
-Je voulais te protéger. Ça n'est pas à moi de t'en parler.
-Qui?
-Louis, s'il te plaît...
-Qui?!
-Harry Styles.
Louis crut perdre Andrew une deuxième fois en deux mois. Après le choc et la douleur constante qu'il ressentait au quotidien en pensant au vide -et en le ressentant-, qu'avait laissé Andrew dans sa vie, voilà qu'on allait lui imposer un petit con de dix-huit ans à peine sorti du centre de formation d'Arsenal mais déjà considéré comme future star? C'en était beaucoup trop pour lui.
-Qui d'autre est au courant?
-Zayn et Hugo.
-Putain. Aucun de vous trois, qui êtes mes meilleurs amis sur la pelouse comme à la ville, n'a eu les couilles de me le dire avant?
-Il n'y avait rien d'officiel, Lou. Il a vu Doyle cet après-midi et a dû signer son contrat en même temps.
-Et combien d'années?
-À ce que j'ai compris, trois avec renouvellement quasiment certain de six ans. Ou alors une très grosse quantité d'argent en échange de son départ.
-On ne peut pas le remplacer maintenant. C'est trop tôt.
-Tu sais comme moi qu'on ne pourra jamais le remplacer parce qu'il était unique. Tu ne devrais pas prendre Styles en grippe. C'est un gamin qui n'a rien demandé d'autre que d'avoir sa chance en pro.
-Pas de bol. Il a atterri ici."
Liam soupira en contemplant Louis mâcher sa part de pizza d'un air dévasté et en colère. Il savait qu'un conflit inévitable entre lui et son meilleur ami était sur le point de se produire, car si Liam détestait bien une chose, c'était l'injustice. Et il savait parfaitement que Louis ne serait pas juste envers la nouvelle recrue. Il avait d'ailleurs planifié une rencontre au restaurant le soir-même avec Zayn et Hugo. Il n'en avait même pas parlé à Louis, il savait qu'il serait probablement très énervé et il était hors de question qu'il gâche sa première soirée avec ses nouveaux coéquipiers.
-J'en ai assez que tout le monde utilise Andrew pour se faire du fric sur son dos.
Liam se retourna vers Louis, qui était toujours avachi sur son canapé, les jambes allongées sous la table basse et les pieds croisés.
-Harry ne mérite pas que tu t'acharnes contre lui. Il va déjà devoir vivre le passage du footballeur amateur au monde pro, et tu sais à quel point c'est dur.
-Et alors?! Il l'a choisi, on en a tous chié.
-Justement. Je compte sur toi pour ne pas nous faire honte.
-Je vois que vous avez choisi votre camp. Louis soupira. Est-ce que tu sors ce soir?
-Oui.
-Où ça ?
-Ça ne te regarde pas.
-Tu pourrais me déposer au cimetière?
-Oui.
-Tu fais la gueule?
-Oui."
Liam se leva pour aller se servir un verre d'eau. Il savait que Louis souffrait pour le voir verser une larme tous les jours sur le sort de son amour perdu, mais il en avait assez que Louis en veuille à la Terre entière. C'était juste l'heure d'Andrew et Louis ne voulait pas l'admettre. A l'entendre, ils l'avaient tous tué. Son téléphone vibra dans sa poche. C'était un texto de Zayn. "Es-tu toujours avec Lou ou peux-tu passer à la maison cinq minutes?" Liam soupira fortement. En plus de choyer et prendre soin de son meilleur ami, sa vie amoureuse était un désastre. Et la seule personne sur qu'il pouvait se reposer restait Hugo, sûrement par son âge plus avancé et son statut défini. Au fond, Liam aimait beaucoup plus Hugo que ce qu'il voulait bien lui dire, parce qu'ils avaient l'habitude de se charrier. Non, Hugo maternait Liam, Zayn et Louis comme ses propres enfants. Il en avait justement un, une femme, une vie posée et pas du tout un coureur de jupons comme d'autres de l'équipe savaient l'être. Et Liam lui était toujours reconnaissant, à lui et à sa femme, lorsque, bourré ou déprimé un dimanche soir, il débarquait chez lui pour lui raconter sa vie et ses malheurs jusqu'au petit matin.
Il se releva du plan de travail sur lequel il était affalé et répondit à Zayn. "Trouve-toi un autre plan 🍑 pour cet après-midi. Je suis off." Il verrouilla son téléphone et prit une grande inspiration avant de retourner au salon.
-J'aimerais que tu fasses des efforts Louis. Vraiment.
-J'aimerais que personne ne s'extasie sur les prouesses de Styles sous mon nez. S'il vous plaît.
-Harry est un bon joueur. Il a de grandes capacités à exploiter, même si tu ne voudras jamais le reconnaître.
-Il doit bien sucer pour que tu parles comme ça d'un mec que tu ne connais pas.
Liam ouvrit la bouche, choqué de ce que venait de dire Louis. Il avait tout fait pour que son meilleur ami retrouve le sourire et voilà comment il le remerciait? C'en était trop. Il se leva et jeta le tablier sur le dossier du canapé.
-Tu es d'un susceptible, remarqua Louis en soupirant.
Pour lui, il était le centre du monde et de l'attention de Liam et il ne comprenait pas pourquoi ce dernier ne démontrait pas une patience à toute épreuve.
-J'en ai assez, Louis. Appelle-moi quand tu auras fini ta crise de gamin, en attendant ne me parle plus et n'approche pas le nouveau.
-Ça ne risque pas, je ne voudrais pas qu'il me contamine avec sa nullité ambulante.
-Pauvre de toi., siffla Liam en décrochant son manteau.
Louis leva les yeux au ciel et attendit que la porte claque. Même s'il ne voulait pas se l'avouer, il savait qu'il avait été trop loin. Envers Liam, pas Styles. Le jeune con était de toute évidence prêt à faire des prouesses pour qu'on le compare à Andrew dans les tabloïds. Mais lui seul pouvait savoir et être sûr d'une chose: Andrew était mille fois meilleur. Il était mort en mettant un but. S'ils n'en avaient jamais parlé ensemble, Louis était certain qu'il aurait voulu mourir de cette façon, en héros.
Il soupira. Le coach lui avait bien stipulé de ne pas revenir avant une semaine à l'entraînement, mais il voulait épier Styles. Il ne voulait pas le louper. Il se leva difficilement de son canapé et attrapa le téléphone.
"Coach? J'aimerais assister à l'entraînement."
-Tu sais aussi bien que moi que tu n'es pas prêt à revenir sur ce terrain.
-J'en ai besoin. J'en ai marre de me traîner de mon lit, à ma table et à mon canapé. Je ne bouge pas et je vois peu de gens. J'ai envie de venir demain.
-Tu sais que- je suppose que Liam t'a dit.
-Styles, oui, je suis au courant. On va voir ce qu'il vaut vraiment. Si la marche entre l'amateur et le pro n'est pas trop haute pour lui.
-Ne lui dis pas que tu seras là, mets-toi dans les bancs éloignés avec une capuche.
-Pourquoi? Je devrais me faire tout petit pour ce gamin?
-Tu l'intimides, c'est tout. N'oublie pas le ballon d'or Louis. C'est pour bientôt la liste des 30. Ne fais pas l'imbécile.
-Je sais ce que je fais, coach.
-Alors viens si tu veux demain. Mais je t'interdis de parler à Styles. Compris?
-Oui, chef", entonna Louis sur un ton puéril. Il détestait qu'on lui dise ce qu'il avait ou pas à faire. Il raccrocha en se frottant les mains.
Styles n'allait pas avoir droit à l'erreur, sinon il allait risquer de se rendre compte de la présence de Louis.