Nantis

By FlorieC

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La jeunesse dorée, tel est le surnom qu'on leur donne. Il existe une rumeur qui sous-entend qu'on ne naît pas... More

[SAGA 1] L'arrogance des gens meilleurs
Chapitre 1 : If it makes you happy
Présentation : Noah Khan
Chapitre 2 : Take me as I am
Présentation : Ellie Lefevre
Chapitre 3 : Don't stop the party
Chapitre 4 : Too late
Chapitre 5 : Losing your memory
Présentation : Ethan Franck
Chapitre 6 : She drives me crazy
Chapitre 7 : Secrets
Chapitre 8 : Highway to hell
Chapitre 9 : How I needed you
Chapitre 10 : Miss misery
Chapitre 11 : Me and the devil
Présentation : Anna Joly
Chapitre 12 : Know your enemy
Chapitre 13 : Little talks
Chapitre 14 : You're not alone
Chapitre 15 : Love the way you lie
Chapitre 16 : Bad romance
Chapitre 17 : Teenage dream
Chapitre 18 : Don't wake me up
Chapitre 19 : My medicine
Chapitre 20 : Shut up and let me go
Chapitre 21 : Wicked Game
Présentation : Gabrielle Gallien
Chapitre 22 : Last Christmas
Chapitre 23 : Winter
Chapitre 24 : Let it be
Chapitre 25 : Happy New Year
[SAGA 2] L'éternité à tes pieds
Chapitre 1 : Bad day
Présentation : Jared Greggs
Chapitre 2 : The last to know
Chapitre 3 : When she believes
Chapitre 4 : Losing my religion
Présentation : Lucas Gallien
Chapitre 5 : Take control
Chapitre 6 : If you leave me know
Chapitre 7 : Stay
Chapitre 8 : Only if you run
Chapitre 9 : Just tonight
Chapitre 10 : Never let me go
Chapitre 11 : Fix you
Chapitre 12 : Damn you
Chapitre 13 : This is war
Présentation : Ruben Greggs
Chapitre 14 : Apologize
Chapitre 15 : Gives you hell
Chapitre 16 : Never say never
Chapitre 17 : Skinny love
Chapitre 18 : Alone
Présentation : Christelle Wertheimer
Chapitre 19 : Don't be a stranger
Chapitre 20 : We are young
Chapitre 21 : One Day
Chapitre 22 : Dark on fire
Présentation : Borja Escobar
Chapitre 23 : Like a virgin
Chapitre 24 : Better Together
Chapitre 25 : Happy Birthday
[SAGA 3] Dans la cour des grands
Chapitre 1 : The funeral
Chapitre 2 : Pursuit of Happiness
Chapitre 3 : Dark Paradise
Chapitre 4 : I want to break free
Chapitre 5 : A drop in the ocean
Chapitre 6 : Enjoy the silence
Chapitre 7 : Help
Chapitre 8 : I don't want to be
Chapitre 9 : Eye of the tiger
Chapitre 10 : Come back home
Chapitre 11 : Mirror
Chapitre 12 : Heartless
Chapitre 13 : Someone like you
Chapitre 14 : If I needed you
Chapitre 15 : You're not sorry
Chapitre 16 : Burn it down
Chapitre 17 : How you remind me
Chapitre 19 : Just give me a reason
Chapitre 20 : Can you feel the love tonight
Présentation : Gautier Lantez
Chapitre 21 : People help the people
Présentation : Yanis Perrin
Chapitre 22 : Yesterday
Chapitre 23 : Hot and cold
Chapitre 24 : Kiss me
Chapitre 25 : Only wanna be with you
[SAGA 4] La réponse des faibles
Chapitre 1 : Collide
Chapitre 2 : The lonely
Chapitre 3 : Another love
Chapitre 4 : Protect me from what I want
Présentation : Ophélie Joly
Chapitre 5 : Big big world
Chapitre 6 : Don't lie
Chapitre 7 : Undisclosed desires
Chapitre 8 : You and I
Chapitre 9 : Another day in paradise
Chapitre 10 : Just can't get enough
Chapitre 11 : Sirens call
Chapitre 12 : Too close
Chapitre 13 : Love me again
Chapitre 14 : Demons
Chapitre 15 : You are the one that I want
Chapitre 16 : Sober
Chapitre 17 : What doesn't kill you
Chapitre 18 : Too many friends
Chapitre 19 : Monster
Chapitre 20 : Broken crown
Chapitre 21 : He is my son
Chapitre 22 : Talk to me
NANTIS EN LIVRES PAPIER !
Chapitre 23 : Try
Chapitre 24 : Everybody's Got To Learn Sometime
Chapitre 25 : Wonderful life
NANTIS en livres ♥

Chapitre 18 : Wrecking ball

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By FlorieC



Anna réajusta son haut de kimono avant d'entrer sur le tatami, resserrant sa ceinture blanche autour de sa taille. Elle ôta ses tongs au bord du tapis. Posant ses pieds nus dessus, elle effectua rapidement le salut habituel, un affaissement du torse vers l'avant en direction du portrait de Jigoro Kano, et elle avança vers le centre des tatamis pour attendre le reste du groupe. La jeune fille était légèrement en avance ce matin et elle voulait donc commencer quelques étirements avant la séance. Elle se baissa vers l'avant pour que ses mains touchent le sol tout en gardant les jambes droites et réalisa qu'elle n'y parvenait toujours pas, malgré ses efforts. Expirant plus fort, elle retenta l'étirement jusqu'à ce qu'une voix murmure soudainement dans son dos :

— C'est que tu es plutôt mignonne habillée tout en blanc comme ça.

Surprise, Anna se releva en un bond pour pouvoir se retourner vers son interlocuteur et son visage se décomposa en deux secondes.

— Ce n'est pas vrai.

— Étonnée de me voir ici ? L'interrogea Noah en rejoignant le bord des tatamis.

— Déçue serait le terme plus exact.

Le garçon esquissa un sourire. Il savait que ce ne serait pas facile de faire accepter sa présence ici. Observant les chaussures de la jeune fille au bord du tatamis, il ôta rapidement ses baskets et monta à son tour sur les tapis. Vêtu d'un jogging noir baggy et d'un vieux tee-shirt beige légèrement troué au niveau du col.

— Qu'est-ce que tu fous là Khan ? Reprit Anna, exaspérée, en se rapprochant de lui.

— J'ai entendu dire qu'on avait le droit à des cours d'essais, j'ai eu envie d'essayer. C'est pour tout débutant, non ?

— Mais qu'est-ce que tu racontes ? Je n'ai jamais parlé de ces cours au lycée, d'ailleurs je n'en ai jamais parlé à personne à part...

Anna s'arrêta au milieu de sa phrase, un soupir de mécontentement venant ponctuer la fin de sa pensée.

— Quel abruti, grinça-t-elle entre ses dents, en songeant déjà à comment elle allait pouvoir tuer son meilleur ami.

Noah se contenta de sourire et la jeune fille ajouta à son attention :

— Je suis sûre que tu ne te souviens même plus de comment il s'appelle.

— Il a un nom bizarre, se remémora le garçon.

— Oh peu importe, souffla-t-elle, exaspérée, Je sais pourquoi tu es là et tu peux partir.

— Tu le sais ?

— Ruben t'a probablement dit que j'avais l'intention de coucher avec Miller pour faire chier mon père.

— Quoi ? S'étrangla-t-il, Mais c'est dégueulasse !

— Noah...

— Oui d'accord, il me l'avait dit, se reprit-il de suite en voyant que sa plaisanterie ne passait pas, Et je viens t'empêcher de faire une grosse connerie.

— J'ai laissé tomber ce plan, l'arrêta Anna, froidement, Donc tu peux repartir et puis, quand bien même, je me passerai de tes services. On n'est plus amis de toute façon, donc ça ne te concerne pas.

— Tu m'as dit que tu me pardonnerais et qu'on pourrait redevenir amis si j'aidais ta mère à gagner le procès pour votre garde et c'est ce que je vais faire donc, si, maintenant ça me concerne.

— J'ai dit si elle le gagnait, nuança la jeune fille, Et malheureusement, c'est très loin d'être le cas donc je doute fortement que ta petite personne pourra y changer quelque chose. Dégage Khan.

— Non.

— Noah casse-toi ! S'exclama Anna, furieuse, Ce cours est le seul moment de la semaine où j'arrive à me défouler et à penser à autre chose, ne m'enlève pas ça.

Le garçon resta silencieux, étonné qu'elle puisse être aussi sèche, et elle ajouta en un murmure :

— S'il-te-plait, part. Tu n'as rien à faire ici, je te jure que j'ai abandonné ce plan tordu avec David, tu n'as pas à me surveiller.

— Pour être sincère, je n'en avais rien à foutre de ce plan, rétorqua Noah, Je n'ai jamais pensé que tu y parviendrais, de toute façon.

— Alors pourquoi t'es là ?

— Je sais qu'Ellie t'a donné ses antidépresseurs, lâcha-t-il.

— Quoi ? Non mais attends, ce n'est même pas pour...

— Tiens ! La coupa soudainement la voix de David Miller au fond de la salle, Tu es en avance Anna !

Les deux jeunes se retournèrent vers leur professeur qui venait de pénétrer dans le gymnase. Se dirigeant vers les tatamis, David posa son sac de sport sur un côté et pénétra à son tour sur les tapis après avoir effectué le salut à Jigoro Kano. Le haut de son kimono étant encore ouvert et Anna jeta un coup d'œil discret au torse musclé du jeune professeur, puis elle détourna rapidement les yeux lorsqu'elle aperçut le regard blasé de Noah qui avait très bien remarqué ce qu'elle observait avec autant d'insistance. David Miller s'approcha d'eux en accrochant finalement son kimono avec sa ceinture noire.

— Tu vas bien ? Interrogea-t-il à l'attention d'Anna.

— Oui, ça va.

Puis David se retourna vers le garçon qui se trouvait à côté d'elle, fronçant des sourcils, il tenta de se remémorer d'où lui venait ce visage familier.

— Noah Khan, précisa le garçon.

— Lycée Saint-Richard ? En conclut rapidement le professeur.

Même s'il n'avait jamais eu Noah dans sa classe, David Miller avait assez entendu parler de cet élève arrogant et suffisant.

— Sans vouloir être impoli, je peux savoir ce que vous faites là ?

— Anna m'a parlé des cours d'essais de ju-jitsu et ça m'a donné envie d'essayer, mentit-il tout sourire, Je peux assister à la séance ? Enfin, je veux dire, vous n'allez pas faire de préférence pour Anna simplement parce qu'elle est votre élève ?

La jeune fille leva les yeux au ciel, exaspérée, et le professeur répondit après un instant de silence :

— Euh... Non, bien sûr, tu peux avoir une séance gratuite.

— Super, murmura-t-il en lançant un coup d'œil à Anna qui l'incendia du regard aussitôt.

Noah esquissa un sourire à son attention pour lui montrer qu'il ne changerait pas d'avis et Anna se retourna vers le fond de la salle pour essayer de se calmer. Ce mec avait gâché sa vie en racontant à son petit-ami qu'elle l'avait trompé et il revenait comme une fleur sous prétexte qu'il s'inquiétait pour elle. C'était si peu sincère qu'elle avait envie d'en pleurer. Cependant elle se retint, car deux personnes de son groupe firent irruption dans la salle de sport, un couple d'une trentaine d'années. Elle esquissa un sourire poli à leur attention, tout en les maudissant intérieurement d'étaler leur amour. Marie et Vincent ne perdaient jamais une occasion de s'embrasser devant tout le monde. Bras dessus, bras dessous, ils montèrent d'ailleurs sur les tatamis pour la rejoindre.

— Salut tout le monde, déclara Marie d'une voix à exaspérer la terre entière, Comment ça va, ce matin ?

— Et bien je vois que tu es motivée, lui répondit David en souriant.

Bien qu'Anna fût persuadée qu'il pensait exactement comme elle. Le bonheur qui émanait de cette personne était à vomir.

— Super, comme toujours, commenta-t-elle alors que son petit-ami l'embrassa sur la tempe.

— Nouvelle recrue ? Interrogea d'ailleurs celui-ci à l'attention de Noah.

Anna ne put s'empêcher d'esquisser un sourire. Vincent réagissait exactement comme tous les mecs qui voyaient Noah, comme si c'était écrit sur son front qu'il était une menace potentielle. Et oui, en effet, cela était écrit sur son front, réalisa Anna lorsque le concerné esquissa un sourire à l'attention de Marie qui semblait fondre sur place, sous le regard glacial de son petit-ami. Noah avait réellement un problème avec le fait de s'intégrer dans un groupe.

Décidant de l'ignorer, Anna continua ses étirements dans un coin plus reculé de la salle et le reste du groupe suivit, alimenté par les « ça va ? » exaspérants de Marie qui ne cherchait simplement qu'à répondre que « oui, elle, tout allait bien », comme s'ils ne le savaient pas tous déjà.

— On va commencer, déclara David Miller, J'ai l'impression que tout le monde est arrivé. Pour ceux qui n'ont pas été présenté, Noah est un élève de mon lycée qui va participer à la séance pour aujourd'hui donc... Faites-lui mal, tous les professeurs de Saint-Richard le détestent, donc ce ne sera pas une grosse perte.

Un rire s'échappa du groupe car ils ignoraient qu'il était sincère et seul Anna esquissa un sourire de satisfaction face au regard outré du garçon.

— Je plaisante, ajouta David à demi-mots en se retournant vers Noah, Allez, c'est parti pour trois tours de tatamis dans un sens, puis dans l'autre !

L'ensemble du groupe exécuta la consigne et Anna fit exprès de prendre de la distance vis à vis de Noah. Ce n'était pas parce qu'il avait décidé de rester à l'entrainement, malgré son interdiction, qu'elle allait faire comme si sa présence la dérangeait. L'ignorance était bien entendu la meilleure des réponses. L'échauffement terminé, le groupe commença à exécuter quelques gestuelles de bases pour automatiser certains mouvements.

David Miller reprit la parole après une petite quinzaine de minutes :

— Pour la séance d'aujourd'hui on va retravailler les balayages avec le pied, donc mettez-vous par deux et je vais passer entre les groupes pour vous dire ce qu'il faut corriger.

Soudainement, Marie se précipita sur Noah pour effectuer le mouvement avec lui et son petit-ami resta sans voix en arrière-plan. Anna en profita pour le rejoindre. Vincent et Marie se mettaient toujours ensemble d'habitude pour les exercices donc elle savait qu'il était désormais tout seul et cela l'arrangeait un peu. La jeune fille commençait à en avoir marre de s'entrainer avec Monique, une professeure d'histoire à la retraite âgée d'une soixantaine d'années et qui devait bien faire le double de son poids.

— On se met ensemble ?

— Pourquoi pas, grommela Vincent en lançant un regard dédaigneux à Marie qui commençait à montrer à Noah comment il fallait faire un balayage avec les pieds.

Détournant le regard, Vincent plaça ses deux mains sur le col de kimono d'Anna et ils commencèrent à effectuer le mouvement en silence, chacun leur tour, jusqu'à ce que le garçon lâche, exaspéré :

— Mais, putain, c'est qui ce type ?

— Qui ? Noah ? L'interrogea Anna en se retournant pour voir ce qu'il observait avec autant d'insistance, C'est juste un élève du lycée, détends-toi.

— Que je me détende ? Mais t'as vu comment il la regarde !

— Il regarde toutes les filles comme ça, tenta de l'apaiser la jeune fille, Et puis de quoi tu t'inquiètes ? Ils ont presque dix ans de différence d'âge ! Je sais que Noah aime les femmes mûres, mais je ne pense pas qu'il ait déjà dépassé la trentaine.

— Marie à vingt-neuf ans, nuança Vincent.

— Et elle est en couple avec toi depuis genre... Toujours, pourquoi tu t'inquiètes encore ?

— La jalousie ne s'explique pas vraiment Anna. Quand tu aimeras quelqu'un, tu comprendras.

La jeune fille lança un rapide coup d'œil derrière elle, observant Noah rire aux blagues de sa partenaire. Si, elle avait bien peur de l'avoir déjà compris.

— Bref, enchaina-t-elle en se retournant vers Vincent, On continue ? C'était à qui de le faire ?

— S'il-te-plait Anna, on peut échanger de partenaires ?

— Pardon ?

— Je t'en prie, ça me rend fou là, s'il-te-plait.

— Tu veux que je me mette avec Noah ? Non, hors de question.

— Mais c'est toi qui le connait, c'est à cause de toi qu'il est ici !

— Vincent détends-toi putain ! Il ne va rien lui faire.

— Je t'en prie, insista le garçon, Échange.

Face à son regard larmoyant, Anna ne put s'empêcher d'acquiescer de la tête à contrecœur après un soupir de frustration.

— Marie ! S'écria Vincent à l'attention de sa petite-amie, Anna veut échanger de partenaire, rejoins-moi !

— Quoi ?! S'exclama la jeune fille, T'es obligé de me mettre ça sur le dos, crétin ?

— C'est plus crédible, lui chuchota-t-il tandis que Marie commençait à le rejoindre et que Noah souriait à l'autre bout de la salle.

Exaspérée, Anna ne voulut même pas relever la remarque et elle traversa les tatamis rapidement pour rejoindre son nouveau partenaire. Se plantant devant lui, elle lâcha alors que le sourire de Noah ne cessait de s'agrandir sur son visage :

— Arrête ça, c'est Vincent qui voulait récupérer sa copine, je n'ai pas demandé à changer.

— Mais tu as accepté.

La jeune fille ne lui répondit même pas, se contentant de regarder autour d'elle pour s'assurer que l'exercice était toujours le même, puis elle se retourna vers lui et s'arrêta l'espace d'un instant.

— C'est ridicule, souffla-t-elle, Tu ne portes même pas de kimono, on ne peut rien faire.

— Tu peux me toucher, ce n'est pas interdit.

— Et vomir tu m'autorises ? Ironisa la jeune fille.

Noah leva les yeux au ciel tel un incompris puis il se rapprocha d'un pas et répondit :

— Il n'y a pas besoin de kimono, Marie me tenait au niveau des bras.

— Mais il y a besoin du kimono pour que je puisse te retenir quand tu tomberas.

— Au moins, tu comptes me rattraper, je prends ça pour un compliment.

Furieuse et décidant de ne pas répondre à la provocation, Anna posa ses deux mains sur ses biceps en tentant de ne pas être troublée par ce premier contact depuis des semaines. Elle avala sa salive avant de faire glisser son pied sur sa cheville pour le faire tomber. Déstabilisé, Noah se pencha sur le côté et Anna le rattrapa de justesse en l'aidant à se redresser. D'instinct, le garçon posa sa main sur l'épaule de la jeune fille pour se stabiliser tandis qu'elle baissa les yeux, mal à l'aise, avant d'ajouter :

— C'est ça, le geste à faire, mais, normalement, comme tu tiens le kimono, ça retient le partenaire donc la chute est moins violente.

— Alors je dois te faire tomber ? L'interrogea-t-il, Je ne sais pas si je vais réussir à bien te retenir.

— Si c'est facile, refais comme je viens de te faire.

Noah glissa sa main qui était toujours posée sur son épaule vers le col de son kimono tandis que l'autre attrapa sa manche.

— Mes jambes doivent partir du côté où ta main tient ma manche et tu me retiens au niveau du col.

— Ça ne va pas te faire mal ?

Anna se retourna vers lui et elle rétorqua, sèchement :

— Ma souffrance ne te préoccupait pas autant lorsque tu as dit à Ethan qu'on s'était déjà embrassés.

— Sauf que je ne l'ai pas fait.

— Arrête, tu étais le seul à être au courant. Enfin toi et Ruben, mais ce n'est certainement pas Ruben qui lui a dit.

— Anna, ce n'est pas moi, répéta Noah plus fermement, Je te jure que...

— Ça va par ici ? Les coupa soudainement David Miller, Vous avez compris le mouvement ?

— Oui ça devrait aller, lui répondit le garçon, furieux d'avoir été interrompu.

Le professeur s'éloigna pour les laisser s'entrainer et Noah voulut continuer sa conversation, mais il fut coupé par Anna qui reprit la parole en premier :

— Les antidépresseurs que j'ai demandés à Ellie n'étaient pas pour moi, mais pour ma mère.

— Hein ? Pourquoi ? L'interrogea le garçon, surpris.

— C'est à cause du procès, ça nous arrangeait de faire comme ça.

— Alors tu ne prends pas de ces merdes ?

— Non, bien sûr que non, comme si ça allait changer ma situation, de toute façon.

— Ta situation ? Répéta Noah, excédé, Anna je sais que tu vis des choses difficiles, mais arrête d'exagérer sans cesse. On dirait presque que tu finis par aimer ton rôle de martyr.

— Pardon ? S'étrangla-t-elle, Mais, putain, c'est quoi ton problème ? De quel droit tu te permets de juger les gens comme ça ? Je ne t'ai pas demandé de me venir en aide ! Va te faire foutre !

— Oh ralentis Anna, grinça Noah en resserrant sa poigne autour de son col de kimono et de sa manche, Je ne veux pas te blesser, mais juste t'aider à ouvrir les yeux. Il faut que tu apprennes à relativiser.

— Relativiser ? Répéta-t-elle, outrée, Mon père a largué ma mère pour une jeune de vingt-trois ans dont il attend un enfant, ma mère est une chômeuse dépressive et accro aux médicaments, mon copain m'a largué, je me suis ridiculisée devant tout le lycée, je n'arrive même plus à suivre les cours à cause de ce boulot de merde qui me prend tout mon temps libre, Et... Et en plus je suis GROSSE !

— Mais non Anna, tu n'es pas grosse.

— BOUBOULE ! S'emporta-t-elle brusquement en tentant de s'éloigner, mais Noah garda son empoigne sur son kimono ce qui l'obligea à se rapprocher davantage du garçon, Tu m'as appelé BOUBOULE ! Enchaina-t-elle en plongeant son regard noir dans ses yeux tout aussi sombres.

— Je ne le pensais pas, tu le sais très bien, tenta-t-il de se défendre, Et puis ça remonte à longtemps !

— Et tu trouves que j'ai maigri depuis Ducon ?

Leurs cris avaient fini par alarmer l'ensemble du groupe et Noah regarda tout autour de lui, mal à l'aise. Voulant détourner la situation, il balaya la cheville d'Anna pour la faire tomber, mais il fut pris dans le mouvement et s'écroula avec elle tandis que la jeune fille poussa un cri de douleur.

— Merde Anna, s'emballa Noah en se relevant précipitamment, Je t'ai fait mal ? Je suis désolé, je ne l'ai vraiment pas fait exprès ! Je t'ai fait mal ? Où ça ?

— Oh putain, grinça la jeune fille en tentant de retenir ses larmes.

— Où est ce que tu as mal ? S'inquiéta-t-il.

— Pousse-toi, lui ordonna sèchement David Miller en débarquant à côté d'eux.

D'un geste de la main, il repoussa Noah puis releva le visage d'Anna qui se tenait la cheville, des larmes perlant sur ses joues rebondies.

— Anna, murmura David doucement, Anna regarde-moi. Où est ce que tu as mal ?

— Cheville.

— Oh putain, je suis désolé, entendit-elle la voix de Noah en fond sonore, Je ne voulais pas te blesser.

— Encore heureux, commenta le professeur en ôtant les mains de la jeune fille de sa cheville pour pouvoir observer les dégâts.

Cependant, celle-ci ne paraissait pas gonflée et David reporta son regard vers Anna qui pleurait désormais toutes les larmes de son corps. Et, étrangement, sa cheville ne semblait rien à voir avec ça.

— Est-ce que tu as vraiment mal ? Lui chuchota-t-il.

— Quoi ?

— Est-ce que tu as vraiment mal à la cheville ?

— Je ne sais pas, répondit Anna entre deux sanglots, J'ai...

— Non, tu es juste en train de craquer, réalisa son professeur, Ce n'est pas grave, ça peut arriver.

David Miller se retourna ensuite vers le reste de son groupe et il déclara :

— Ne vous inquiétez pas, je gère, recommencez l'exercice en attendant.

Les duos s'éparpillèrent de nouveau sur les tatamis, à l'exception de Noah qui se rapprocha d'Anna et David pour entendre la suite de leur conversation :

— Tu vas aller m'attendre dans les vestiaires, enchaina le professeur, On va discuter un petit peu de tout ça d'accord ?

La jeune fille acquiesça de la tête et il ajouta :

— Je lance un autre exercice pour les autres et je te rejoins tout de suite.

— Je l'accompagne, déclara de suite Noah lorsque David Miller aida la jeune fille à se relever.

— Pas la peine, commenta-t-il, Elle arrive à marcher.

— Mais je...

— Reste-là Noah, l'interrompit-il, Je vais m'occuper d'Anna, toi, tu fais l'exercice avec les autres.

Le garçon resta ainsi planté sur les tatamis, observant Anna sortir du gymnase et il se retourna vers David Miller pour écouter l'explication du prochain mouvement. Puis, réalisant qu'il n'en avait absolument rien à foutre de cet foutu exercice – car il n'était pas venu pour ça après tout– Noah sortit des tatamis jusqu'à ce qu'il entende soudainement dans son dos :

— Laisse Noah, je peux m'en occuper.

— Non, rétorqua le garçon qui n'avait pas l'habitude qu'on lui donne des ordres.

Il sortit du gymnase rapidement, rejoignant les vestiaires d'un pas décidé. Cette histoire avec Anna avait prise des proportions énormes et il était temps qu'il rétablisse la situation. Ainsi, il ouvrit en grand la porte des vestiaires des filles et rejoignit Anna qui se trouvait au milieu de la pièce, encore en larmes. Mais la jeune fille n'eut même pas le temps de s'étonner car Noah l'emprisonna dans l'étau de ses bras.

Il déclara fermement à son oreille :

— Ce n'est pas moi qui l'ai dit à Ethan, je te le jure. Arrête de pleurer. Arrête de me détester. Ce n'est pas moi qui vous ai fait rompre.

— Alors qui ? S'étrangla Anna entre ses sanglots.

— Mon père. C'est mon père qui lui a dit. Il n'a pas fait exprès. Je suis désolé.

— Mais pourquoi tu ne me l'as pas dit tout de suite alors ? L'interrogea-t-elle alors qu'il la serrait encore dans ses bras avec fermeté.

— Parce que quand tu es venue m'en parler devant le lycée, tu étais dans un tel état, je n'ai même pas compris de quoi il s'agissait. Je n'étais pas encore au courant. Quand mon père m'a avoué ce qu'il avait fait, je t'ai appelé tout de suite pour t'expliquer, mais c'est Jared qui a répondu à ta place.

— Jared ? Quand ça ?

— Le jour même où on s'est disputés devant le lycée, murmura Noah en desserrant son étreinte pour pouvoir l'observer dans les yeux.

— Ah oui probable, se remémora-t-elle, Certains choses m'ont échappée cette journée-là.

— Mais qu'est-ce que tu foutais avec ce type, putain ? Explosa Noah en posant ses deux mains sur ses joues encore mouillées par les larmes, Je t'ai déjà dit de ne pas l'approcher. Et je ne dis pas ça par jalousie ou parce que je le déteste. Si je te dis qu'il est mauvais pour Ellie, alors imagine ce qu'il est pour toi... Il y a une raison pour laquelle ils ont rompu, tu sais.

— Toi, murmura Anna en reniflant, C'est toi, la raison.

— Non, je ne suis pas la raison. J'ai obligé Jared à rompre avec Ellie, mais je peux te jurer que je ne suis pas la raison.

— Alors c'est quoi la raison ?

— Peu importe, souffla-t-il, Là n'est pas la question.

— Mais si, putain ! S'énerva la jeune fille en s'éloignant d'un pas, Pourquoi tout le monde veut absolument cacher cette histoire après tout ? Je traine avec Jared, j'ai le droit de savoir ce qu'il a fait à Ellie pour mériter tant de haine.

— Demande-lui, cingla Noah, sèchement, Et tu verras si vous êtes aussi bons amis que tu le penses.

— Ah, tu peux parler, ironisa-t-elle en levant les yeux au ciel.

— Anna, je sais que j'ai merdé à partir du moment où je suis sorti avec Ellie mais...

Noah s'arrêta au milieu de sa phrase, observant les yeux encore rouges de la jeune fille devant lui, puis il reprit, gêné :

— Je ne t'ai jamais dit qu'on pourrait sortir ensemble. Tu sais bien que je ne suis pas capable d'avoir une vraie copine, je veux dire, officiellement. Tu me connais, tu m'as dit que tu m'acceptais comme ça, qu'on était amis, alors pourquoi est-ce que tu m'en veux autant aujourd'hui ?

— C'est stupide, souffla Anna en se reculant de quelques pas afin de s'assoir sur le banc derrière elle, Tu vas te foutre de moi.

— Non, dis-moi, insista Noah en restant à sa place.

C'est-à-dire, planté debout en plein milieu des vestiaires.

— C'est bête à dire, soupira Anna en essuyant ses joues, Mais... J'avais l'impression que tu m'aimais.

Noah avala sa salive, mal à l'aise, et la jeune fille continua, les yeux rivés vers le sol, car elle était incapable de le regarder dans les yeux :

— Oui je sais, c'est n'importe quoi d'avoir pensé ça, mais bêtement, moi j'y croyais. Je sais que je sortais avec Ethan, mais il y avait une part de moi - et je ne pensais pas qu'elle était aussi grande - qui était persuadée qu'un jour, on serait ensemble. Alors je suis tombée de haut quand j'ai su que tu étais avec Ellie, et encore plus que tu m'as proposé cette sorte de liaison secrète.

Le garçon esquissa une grimace tout en se maudissant intérieurement. Il ignorait encore ce qui lui avait pris ce soir-là. Il n'y avait même pas réfléchi, la proposition était sortie tout seule de ses lèvres, sans que son cerveau ne lui en donne l'autorisation... Comme dans beaucoup de situation par ailleurs.

— En réalité, reprit Anna sans même remarquer son malaise, Je ne t'en veux pas particulièrement à toi. Je sais que tu te comportes comme ça avec toutes les filles et que tu ne m'as jamais vraiment laissé fait croire qu'il y aurait pu avoir quelque chose entre nous, c'est moi qui me suis fait des films. C'est à moi que j'en veux d'avoir osé penser qu'avec toi, je méritais mieux que ça.

— Tu mérites mieux Anna, lui assura-t-il en reprenant enfin la parole, Mais moi, je ne peux pas t'offrir mieux.

— Tu ne veux pas m'offrir mieux, rectifia-t-elle en relevant ses yeux vers lui, Et en fait, si... C'est pour ça que je t'en veux.

— Je suis désolé, murmura-t-il.

Noah se rapprocha, s'asseyant sur le banc juste à côté d'elle, pour reprendre :

— Je sais que ce n'est pas ce que tu demandes, mais je peux t'offrir mon amitié. Et vu le peu d'amis que j'aie, je peux t'assurer que ce n'est pas rien.

— Vu ce que tu as déjà fait à ce « peu d'amis », permets-moi d'en douter.

Le garçon ne releva pas, car au fond, il l'avait bien mérité.

— Je veux bien essayer Anna, pour toi, mais laisse-moi une chance.

— Je t'en ai donné des milliers de chances, qu'est-ce que ça changera cette fois ?

— Laisse-moi essayer et tu verras.

— Voir quoi ?

— Que je peux y arriver, répondit Noah en se retournant vers elle, Que je peux être un ami pour toi. Que je veux être un ami pour toi, un vrai ami.

—... C'est ta dernière chance Khan, murmura-t-elle, Ne la gâche pas.

***

Sa tête lui tournait horriblement au moment où Ellie Lefevre ouvrit les yeux à demi. Elle avait froid et la pièce sombre dans laquelle elle se trouvait ne lui inspira pas confiance. Une odeur de poussière et de renfermée l'oppressait entre les murs de béton. Faisant glisser sa main le long de son corps, Ellie réalisa soudainement qu'elle était allongée à même le sol, ce qui expliquait ses frissons. Elle se releva, faisant glisser un vêtement par terre. Elle attrapa la veste avec curiosité, ne la reconnaissant pas. Il s'agissait d'une veste d'homme, réalisa la jeune fille en constatant qu'elle en avait été recouverte pendant son sommeil. Elle la laissa tomber sur le sol et se retourna de droite à gauche. Des bouteilles de vins vides étaient éparpillées sur le sol et le corps de Maxime Deleterre était allongé à quelques centimètres d'elle. Observant son torse nu, Ellie bifurqua de suite son regard vers son corps et constata qu'elle était en sous-vêtement.

— Oh non, grinça-t-elle entre ses dents, Pas encore.

En poussant un soupir, Ellie laissa sa tête tomber entre ses deux mains. Malgré son mal de crâne, elle se frappa le front sur ses genoux qu'elle avait remontés.

— Putain de merde.

— Sympa le réveil, commenta Maxime en se retournant vers elle.

— Tu pourrais avoir l'air moins heureux ?

— Tu pourrais avoir l'air moins dégouté ? L'interrogea-t-il en retour.

— Ne me dis pas qu'on a couché ensemble, murmura la jeune fille en attrapant son tee-shirt qu'elle enfila rapidement pour que ce sale pervers arrête de la reluquer comme il était en train de le faire à cet instant précis.

— Non bien sûr, ironisa Maxime, On s'est désapés pour le plaisir.

— Abruti.

Elle se releva, malgré son mal de tête insoutenable et une envie de vomir pressante, bien qu'Ellie ne fut pas certaine que ce soit réellement l'alcool qui lui ait retourné l'estomac.

— Tu as mis un préservatif, j'espère ?

— Pourquoi ? Lâcha le garçon, amusé, Tu ne veux pas porter mon enfant ? Je te répugne à ce point ?

— Avec ta gueule c'est plutôt le gosse qui sera répugné.

— Hum méchante, j'adore ça.

Face au regard blasé de la jeune fille, Maxime ajouta de suite :

— Bien sûr que j'ai mis un préservatif, je ne suis pas idiot.

— Tant mieux... Et pour être franche avec toi...

— Pour être franche ? L'interrompit le garçon, halluciné, Parce que tu ne l'étais pas avant peut-être ?

— Si, songea-t-elle après un instant, Donc disons... Pour être plus précise, je ne craignais pas pour un futur gosse, mais pour les putains de sales maladies que tu dois porter dans ton sang.

— C'est à toi de dire ça ? Cingla Maxime, sèchement, Tu as la même réputation que moi.

— Max, l'arrêta la jeune fille, Tu n'as pas de réputation.

Sur ce, elle enfila rapidement ses collants qui étaient désormais troués et sa jupe. Elle enfonça ses pieds dans ses converses sans faire les lacets, puis se retourna vers le garçon pour l'interroger :

— Ton appart est encore ouvert ? Je dois récupérer mes affaires.

— Oui, je suppose qu'il l'est, marmonna le garçon en se laissant retomber contre le béton pour fermer les yeux.

Ellie sortit en trombe de la cave et rejoignit l'ascenseur. Elle actionna le bouton du troisième étage, des images de la soirée de la veille lui revinrent en mémoire. La jeune fille frissonna au moment où elle songea aux lèvres de Maxime Deleterre se poser sur les siennes, ses mains caressant son ventre et ses fesses et la suite... La suite, elle préférait ne plus y penser. Chassant cette image sordide de son esprit, elle se retourna vers le miroir du petit habitacle de fer pour se recoiffer. Priant pour que personne ne soit encore dans l'appartement et ne la voit dans cet état.

Ellie pénétra dans l'appartement et constata qu'il était dans un sale état. Enfin, c'était loin d'être son problème, réalisa-t-elle en apercevant son manteau sur le dossier du canapé. Elle l'enfila rapidement pour se couvrir car elle était toujours gelée et glissa ses mains dans les poches pour vérifier que son portable et son portefeuille y étaient toujours, ce qui fut le cas. Les gens avaient été tellement ivres hier soir qu'ils n'avaient même pas dû penser à la voler... Ou alors ils n'en avaient pas eu besoin, après tout, ils étaient tous blindés de thune, par ici.

Ellie sortit de l'appartement puis de l'immeuble avec ses affaires. Arrivée dans la rue, elle jeta un rapide coup d'œil autour d'elle. A la vue du soleil qui était haut dans le ciel, elle réalisa que la journée était déjà bien commencée pour tout le monde.

Un coup de vent frais la réveilla soudainement de ses pensées et elle se retourna vers l'immeuble voisin. Il s'agissait de celui des Gallien. Esquissant un sourire, elle traversa la route rapidement et s'engouffra à l'intérieur du bâtiment, rejoignant sans réfléchir l'appartement de Gabrielle.

Elle frappa deux coups secs à la porte, se demandant s'il était réellement poli de débarquer chez les gens le dimanche, puis réalisant qu'elle se fichait de la réponse, elle effectua de nouveau son geste. Elle ignorait si Gabrielle avait l'esprit plus clair pour lui expliquer ce qu'il s'était passé hier soir, mais, dans tous les cas, elle avait besoin de se confier à sa meilleure amie.

Face à l'absence de réponse derrière la porte, la jeune fille frappa de nouveau et celle-ci s'ouvrit soudainement sur le visage exaspéré de Rachel.

— Hey c'est bon je...

La jeune blonde s'arrêta au milieu de sa phrase et elle s'étrangla de stupeur :

— Ellie ?! Qu'est-ce que tu fais là ?

— Tiens Rachel ? S'amusa la belle brune, C'était une super soirée hier soir. Dommage que tu n'aies pas pu venir.

— Quelle soirée ? Interrogea la jeune fille, hébétée.

— Oh, murmura-t-elle, surprise, Et bien, tu règleras ce problème avec Yanis, enchaina-t-elle en pénétrant dans l'appartement, ravie de constater qu'elle arrivait toujours à foutre la merde dans n'importe quelle relation, sans même le faire exprès.

Ellie s'arrêta dans le salon lorsqu'elle entendit une voix en provenance de la cuisine :

— Déjà levée ?

— Plutôt pas couchée, rétorqua-t-elle en se retournant vers Lucas qui était en train de prendre son petit déjeuner, Il est quelle heure ?

— Midi, marmonna le garçon en enfournant une autre bouchée de corn-flakes, Tu en veux ?

— Sauf si tu veux réellement que je vomisse partout, ironisa-t-elle.

— Pourquoi ça ne m'étonne pas ? C'est quoi le but dans ta vie ? Te rendre misérable à chaque soirée ?

— Profiter de chaque soirée, rectifia-t-elle.

Même si elle se garda bien de préciser comment elle l'avait terminée.

— Gabi est là ?

— Je crois qu'elle dort encore, lui répondit Lucas, la bouche pleine de céréales, Je l'ai entendu rentrer ce matin à six heures. Elle était tellement pétée qu'elle a fait tomber le porte manteau dans le hall. Ses parents ont tout entendu et elle s'est fait descendre, pas sûr qu'elle puisse ressortir avant longtemps.

— Sympa, commenta Ellie en songeant à quel point elle avait de la chance d'avoir des parents qui ne se préoccupaient absolument pas de comment, ni d'où elle passait ses soirées.

Bien qu'ils ne se préoccupassent pas d'elle tout court, d'ailleurs.

— Et toi, pourquoi tu n'es pas venu en fait ?

— Moi ? S'étrangla Lucas, Qu'est-ce que je pourrais bien aller faire là-bas ?

— Oui c'est vrai, j'avais oublié que la joie t'était étrangère.

— Je ne suis pas d'humeur là.

— Oh Lucas, soupira Ellie, Je pourrais te demander ce qui ne va pas, mais tu es toujours de mauvaise humeur. Donc cette question est inutile puisque je suppose que tu as simplement eu une matinée normale, comme toutes les matinées que tu passes depuis dix-sept années de ta longue et misérable existence. Pauvre petit.

Blasé, le garçon lui lança un regard exaspéré avant de se replonger vers son bol de céréales sans prendre la peine de la contredire, peut-être parce que la contradiction n'était pas forcément évidente.

— Très bien, souffla-t-elle, déçue, face à son absence de répartie, Je vais aller la réveiller.

Ellie quitta la cuisine pour se rendre dans la chambre de Gabrielle. Sans frapper à la porte, elle pénétra dans la pièce et se rua directement vers la fenêtre pour ouvrir les volets. Sous la couette, elle entendit un grommèlement de rage, mais continua, profitant du vent frais qui venait fouetter son visage.

— Connasse, commenta Gabrielle lorsqu'elle ouvrit les yeux pour voir qui avait osé venir la réveiller ainsi, Qu'est-ce que tu fous là El' ?

— Je sors tout juste de l'immeuble de Maxime.

— Ah ouais ? S'étonna la belle blonde après un rapide coup d'œil à son réveil posé sur la table de nuit, Pourtant, je ne t'ai pas vu de la soirée, je pensais que tu étais partie avec Noah.

— J'ai couché avec Max, lâcha la jeune fille en venant rejoindre sa meilleure amie sur son lit.

— C'est censé m'étonner ? L'interrogea Gabrielle lorsqu'elle vit la jolie brune se glisser avec elle sous sa couverture.

— Parce que ce n'est pas le cas ?

— Non.

— Génial, commenta Ellie en levant les yeux au ciel, Je suis une véritable trainée.

— Non, tu es... Toi.

— Arrête, pouffa sa meilleure amie, Avec le ton que tu viens de prendre, on dirait que c'est pire que d'être une trainée.

— Bah...

Ellie se retourna vers Gabrielle, outrée, mais les deux jeunes filles avaient une gueule de bois si terribles qu'elles n'arrivèrent même pas à s'offusquer davantage, décidant donc d'abandonner la conversation à ce stade.

Fermant les yeux, Ellie s'allongea encore un peu plus dans le lit, posant sa tête sur l'un des oreillers de sa meilleure amie. La position était agréable pour quelqu'un qui avait passé les six dernières heures allongée dans une cave à même le sol.

— Comment était ta soirée ? Interrogea la jeune fille.

— Pas mal, répondit Gabrielle, Mais je t'avoue que j'ai quelques trous de mémoires sur la fin. Je crois qu'Esther s'est fait un mec. Et toi alors ? Tu m'as l'air de t'être bien amusée.

— Arrête, grimaça Ellie, Il est dégueu ce type.

Pour simple réponse, sa meilleure amie explosa de rire et Ellie se retourna vers elle, ajoutant :

— Enfin moi, au moins, j'ai une vie sexuelle, je peux savoir depuis quand tu n'as pas couché avec un garçon ?

— Ça ne te regarde pas.

— Oh allez ! Je viens de t'avouer que j'avais couché avec le pire mec du lycée, tu peux bien me le dire !

— Noah, murmura-t-elle.

— Quoi ?

— C'est Noah, le dernier mec avec qui j'ai couché, précisa Gabrielle, Au nouvel An au Palace.

— Ah oui, ça commence à dater, pouffa Ellie en tournant son visage vers la jeune fille, D'ailleurs, tu ne m'as jamais dit... C'était comment ?

Gabrielle s'arrêta l'espace d'une seconde, hésitant à se retourner vers sa meilleure amie.

Prenant son courage à deux mains, elle lui répondit en se retournant vers elle à son tour :

— C'est étrange.

— Étrange ? Répéta Ellie, sans comprendre, D'accord, je ne m'en souviens pas, mais je doute qu'il soit si mauvais que ça au pieu, vu comment Esther en redemande.

— Non Ellie, l'arrêta Gabrielle, gênée, Ce n'est pas lui qui est étrange... C'est toi.

— Moi ?

— Quand Ethan a su pour moi et Noah, reprit la jeune fille, Il nous a détesté si fort, et c'était légitime, mais toi, tu n'as rien dit.

— Parce que je le savais déjà, c'est moi qui lui ai dit, je te rappelle.

— Oui je sais, rétorqua Gabrielle, Mais quand tu l'as su, ça ne t'a pas fait mal ?

— Non, pourquoi ça ?

— Tu l'aimes.

— Pas tant que ça.

— Ellie, souffla sa meilleure amie, blasée.

— Il ne m'appartient pas, rétorqua celle-ci plus fermement, Je n'ai pas de droit sur lui, du moins pas de la manière dont Ethan en avait sur toi, Noah n'est pas à moi.

— Mais je suis ta meilleure amie, tu avais le droit de dire quelque chose.

— Dire quoi ?

— Que je n'avais pas le droit de te faire ça, répondit Gabrielle, Pas comme ça, pas avec lui. Que je n'aurais pas dû craquer.

— Tu le savais déjà, pourquoi aurais-je dû le préciser ? La questionna-t-elle en retour, Je connais Noah. Je sais qu'il t'a probablement manipulé.

Gabrielle bifurqua son visage vers le plafond, se concentrant l'espace d'une seconde sur son estomac qui revisitait la seconde guerre mondiale, puis elle enchaina en continuant à fixer le vide au-dessus d'elle.

— A lui aussi, tu as le droit de dire quelque chose. Tu peux lui en vouloir.

— Ne t'inquiète pas pour ça, je lui en veux déjà pour pas mal de choses.

— Non pas vraiment, murmura Gabrielle, Du moins, pas pour ce qui est réellement important.

— Qu'est-ce que tu essaies de me dire au juste ?

— Tu ne lui en veux jamais Ellie, reprit sa meilleure amie en se retournant vers elle, Tu ne lui en veux pas d'avoir couché avec moi, d'avoir trahi son meilleur ami qui est aussi un de tes amis proches, tu ne lui en veux pas de se servir d'Esther depuis bientôt trois ans, tu ne lui en veux pas d'avoir été absent après la mort de Betty, tu ne lui en veux pas de t'avoir fait rompre avec Jared, puis avec Lucas. Tu t'es même excusée pour avoir osé lui reprocher d'avoir couché avec Christelle pendant que vous étiez ensemble... Votre relation ne marche que dans un sens El', réfléchis-y.

La jeune fille évita le regard pesant de sa meilleure amie et bifurqua son visage vers le plafond. Non, Ellie n'avait pas envie d'y réfléchir. La relation qu'elle avait avec Noah était spéciale, unique, incompréhensible aux yeux des autres. Parce que cette relation les étonnait, les effrayait, ils avaient besoin d'y trouver un sens, une explication rationnelle. Sinon, pourquoi auraient-ils autant besoin de les juger ? De leur dire ce qui était bien ou mal ? Personne ne pouvait comprendre leur relation. Mais le problème était, qu'eux non plus, avaient bien souvent du mal à la comprendre.

***

Dehors, la pluie tombait abondamment sur les trottoirs parisiens et Noah fit glisser sa capuche de manteau sur sa tête tout en observant Anna remettre son bonnet sur la sienne. Après leur discussion dans les vestiaires, David Miller était passé les voir pour s'assurer que tout allait bien, puis il avait dit à la jeune fille de rentrer chez elle pour se reposer. Noah avait donc suivi le mouvement, proposant sa voiture, ce qui avait exaspéré le professeur qui était reparti illico.

— Prête ? L'interrogea Noah en observant le ciel grisâtre, Je suis garé un peu loin donc on va être trempés.

— Pas grave, murmura-t-elle, Mais tu es sûr que ça ne te dérange pas ? Je peux prendre le bus.

— Non, pas de problème.

— Il faut d'abord qu'on passe chez Ruben, je dois récupérer des affaires, l'informa-t-elle.

— Comment ça ?

— Je me suis installée chez lui cette semaine, s'expliqua Anna, Comme ses parents étaient en Belgique.

— Avec Jared ? Grinça Noah.

Anna ne voulut pas répondre à ça et elle sortit de l'abri dans lequel elle se trouvait pour inciter Noah à la suivre, ce qu'il ne tarda pas à faire.

Ils rejoignirent sa voiture en courant et pénétrèrent à l'intérieur pour se réchauffer. Une fois installés, Noah tourna le bouton du chauffage au maximum et grinça entre ses dents :

— Je déteste ce pays. Au Pakistan, au moins, on a chaud toute l'année.

— Au Pakistan, l'homosexualité est interdite.

— Et alors ? Je ne suis pas homo.

— Oh tais-toi et démarre, souffla la jeune fille en pouffant de rire.

Noah fit tourner les clefs dans le contact et le moteur démarra. Le garçon effectua rapidement une manœuvre pour se remettre sur la route et il prit la direction du seizième arrondissement pour rejoindre la maison des Gregg.

— Tu connais déjà le chemin ? S'étonna Anna.

— Je suis déjà venu te chercher là-bas, lui rappela-t-il en se retournant vers elle, Après ma soirée d'anniversaire que tu as lâchement abandonnée.

— Oui, je m'en souviens, ironisa la jeune fille, Juste après que tu aies pratiquement fait l'amour à Esther sur la piste de danse.

— Tu exagères tout ! Ça ne s'est pas passé comme ça ! Et puis ce n'est pas mieux que d'aller fricoter dans un bar gay, je te signale... Tu serais exécutée pour moins que ça au Pakistan.

Ils pouffèrent de rire tous les deux, bien que ce ne soit pas réellement amusant, puis Noah alluma la radio tandis qu'Anna ôta ses gants et son bonnet qu'elle balança vers l'arrière de la voiture.

— En fait, reprit-elle en se retournant vers le garçon, Comment ton père a-t-il pu être au courant pour nous deux ?

— Parce que je lui ai dit.

— Sérieux ? Pourquoi ?

— J'étais un peu troublé, rétorqua Noah sans quitter son regard de la route devant lui, J'avais besoin d'en parler à quelqu'un... Et étrangement Ethan ne faisait pas l'affaire, ironisa-t-il ensuite.

— Troublé ? Répéta Anna, surprise, Comment ça ?

— Je n'aurais jamais pensé te dire ça un jour Anna, mais tu embrasses plutôt bien. J'ai été surpris.

— Arrête, souffla-t-elle, blasée, Je suis sûre que tu dis ça à toutes les filles que tu chopes.

— Vrai... Ce à quoi elles répondent que « non, c'est moi qui embrasse comme un Dieu », commenta-t-il en lui lançant un regard amusé.

— Je ne te dirai jamais ça, l'arrêta-t-elle de suite.

— Tu le penses, c'est le principal.

— Mais ta gueule.

— Réponse des faibles, chuchota-t-il en un demi-sourire.

Anna resta alors silencieuse à l'observer pendant un instant puis elle lâcha :

— En fait, tu n'as vraiment aucune idée de comment te comporter comme un ami.

— Non aucune, lui confirma-t-il, Mais c'est chiant en même temps, vous vous vexez pour tout et n'importe quoi.

— Le terme « vexer » me semble un peu faible pour quelqu'un qui a piqué la petite-amie de son meilleur pote.

— Tu parles par rapport à toi ou à Gabi ?

— Gabrielle, rétorqua-t-elle de suite, On n'a pas couché ensemble, nous.

— Oui, je m'en souviendrais.

La voiture s'arrêta devant la maison des Greggs et Anna sortit du véhicule avant d'ajouter :

— Ruben mange avec Gautier ce midi donc il n'y a personne dans la maison, je vais aller vite, ne t'inquiète pas.

— Et Jared ?

— Oh mais je ne sais pas où est Jared ! Souffla-t-elle, exaspérée, en refermant la portière de la voiture, lasse qu'il évoque ce prénom toutes les trente secondes.

Noah laissa sa tête retomber contre le siège de la voiture et il augmenta le volume de la radio pour passer le temps. Fermant les yeux pendant un instant, il repensa soudainement à la soirée de la veille et s'interrogea sur l'état de sa meilleure amie. Il s'en voulait un peu d'être parti sans elle, car il n'aimait pas la savoir ivre et seule à une soirée. Chez Ellie Lefevre, ces deux termes n'allaient jamais bien ensemble. Et pour cause, la soirée de la veille en était l'exemple parfait, même s'il ne le savait pas encore.

Au bout d'une dizaine de minutes, Anna réapparut devant la maison avec un sac de randonnée sur le dos et le garçon s'extirpa de la voiture pour l'aider à le mettre dans le coffre. Ils se réinstallèrent ensuite à leur place et le véhicule redémarra pour rejoindre la périphérie.

— Noah, murmura Anna en baissant le volume de la radio, En une semaine, tu as eu plusieurs occasions pour me dire que ce n'était pas toi qui l'avait dit à Ethan pour le baiser. Pourquoi tu ne l'as pas fait ?

Ne comprenant pas réellement le sens de la question, le garçon se retourna vers elle pour l'interroger du regard et Anna compléta :

— Je pense que, au fond, ça t'arrangeait bien que je te croie coupable, non ?

— Et toi, pourquoi tu as pensé de suite que je l'étais ? La questionna-t-il en retour, Pourquoi as-tu pensé que je te ferais un coup aussi bas ? Je t'ai laissé à Ethan, pourquoi je serais revenu sur ma décision ?

— Tu ne m'as pas laissé ! S'offusqua la jeune fille, Je l'ai choisi.

— Non, tu ne l'as pas fait. Tu étais prête à rompre avec lui pour être avec moi... Jusqu'à ce que tu comprennes que ça n'était pas possible. Et là, tu es resté avec lui. Je suis désolé de la manière dont cela s'est passé, mais, à mon avis, ça fait longtemps que vous auriez dû rompre tous les deux.

— Je me passerai de ton avis Khan, cingla sèchement la jeune fille.

Le reste du trajet se déroula dans un silence absolu, Noah se concentrant sur la route et Anna observant la pluie à travers la fenêtre. Arrivant finalement devant la maison de la jeune fille, la voiture freina au niveau de la boite au lettre et Anna détacha sa ceinture. Elle se leva de son siège pour récupérer ses affaires à l'arrière de la voiture tandis que Noah sortit du véhicule pour prendre son sac à dos dans le coffre. Sortant à son tour, Anna rejoignit le garçon rapidement pour qu'il n'attende pas trop longtemps sous la pluie et récupéra son sac qu'elle posa sur son épaule.

— Merci pour le trajet, murmura-t-elle en dégageant ses mèches de cheveux mouillés qui collaient à son visage, Je ne te fais pas attendre plus longtemps, on se voit demain au lycée.

— Anna, attends ! S'exclama-t-il alors que la jeune fille commençait à s'éloigner, Je... Je dois te...

— Noah, le coupa-t-elle, Il pleut. On n'a pas cent ans là.

— Je ne sors plus avec Ellie.

— Oh.

— Je voulais juste que tu le saches... En tant qu'ami, précisa-t-il.

— Oui, murmura Anna en esquissant un sourire gêné, Et ça va ? Tu vas bien ?

Noah ne répondit pas tout de suite et elle en profita donc pour ajouter :

— Je prends des nouvelles, c'est normal... En tant qu'amie.

— Je vais bien, merci.

— De rien.

— Alors, bon après-midi.

— Oui merci toi aussi.

Leur conversation était si formelle que ça en frôlait presque le ridicule. Hésitante, Anna se pencha vers lui pour lui faire la bise bien que leurs joues soient trempées par la pluie et elle ajouta en se reculant :

— Et au passage, je t'interdis de revenir une seule fois au ju-jitsu.

— Mais pourquoi ?! S'exclama-t-il, outré, alors qu'elle s'éloignait, Je suis un excellent partenaire !

— Tu as failli me péter la cheville.

— Pas du tout.

— Et Vincent te tuerait si tu revenais.

— Qui est Vincent ? Interrogea-t-il, perplexe.

— Le copain de la fille que tu as dragué pendant toute la séance.

— J'ai dragué quelqu'un ? S'étonna-t-il.

Le pire, c'était qu'il était parfaitement sincère.

— Oh laisse tomber Khan, pouffa la jeune fille, Ne remets pas les pieds là-bas, c'est tout.

Anna s'engouffra à l'intérieur de sa maison, laissant le garçon sous la pluie en plein milieu du trottoir.

***

— Est-ce que Manon peut venir le week-end prochain à l'appartement ?

La question de Jonas résonna dans le salon et son beau-père se retourna vers lui pour l'interroger :

— Je croyais que c'était toi qui descendait le week-end et qu'elle viendrait aux prochaines vacances ?

— Oui, mais c'est son anniversaire et je voudrais lui offrir le trajet en train.

— Et bien demande à ta mère si cela ne la dérange pas, mais pour moi il n'y a aucun problème, lui répondit Paul en reposant son journal sur la table basse, Ta petite-amie est la bienvenue ici.

— Maman est déjà d'accord, elle m'avait dit de demander ton autorisation.

— Ta mère habite ici désormais, c'est aussi votre appartement Jonas.

— Merci quand même, murmura le garçon avant de se replonger sur son téléphone portable pour annoncer la nouvelle à sa copine, Elle va être trop contente de passer un week-end en amoureux à Paris.

Paul Khan l'observa en souriant, réalisant par la même occasion qu'il ne vivrait jamais ce genre de scènes avec son propre fils, puis il se retourna vers Chloé qui venait de sortir de la cuisine pour le rejoindre. La femme l'embrassa rapidement sur les lèvres puis elle se laissa tomber sur le canapé à côté de son fils, allumant la télévision. Rapidement, elle zappa toutes les chaines tout en constatant qu'il n'y avait vraiment rien à regarder les dimanches après-midi, jusqu'à ce que Jonas l'interrompe :

— Laisse la chaine de musique.

— Non, c'est vraiment ridicule, commenta Chloé en regardant le clip qui défilait à l'écran d'un mauvais œil, On est au 21ème siècle et il y a encore des nanas qui dansent à poil devant des voitures... Comme si c'était ça, la réussite. Ça ne m'étonne pas que vous n'ayez plus les idées claires de nos jours.

— Tu t'en remettras maman, souffla son fils, blasé par ce genre de commentaires de vieux réactionnaires.

Comme si c'était leur génération qui avait tout fait foiré, anéantissant une espèce d'âge d'or qui semblait remonter de plus en plus loin à chaque foutue génération. Les gens ne pouvaient-ils pas accepter que le monde change ? Cette adoration d'un passé idéalisé était risible.

— Non sincèrement je ne peux pas écouter ça, enchaina Chloé en changeant de chaine.

— Mais maman ! S'exclama Jonas, énervé, Moi, j'écoutais.

— Tu étais sur ton portable.

— Je peux faire deux choses en même temps, cingla le garçon.

— Oh mais tu vas te calmer ! S'emporta Chloé tandis que Paul continuait de regarder leur dispute d'un air amusé.

La porte d'entrée s'ouvrit et Noah fit irruption dans le salon à son tour, s'affalant sur le canapé.

— Qu'est-ce que tu fais en tenue de sport ? S'étonna son père, Tu viens de faire un footing ?

— Ju-jitsu.

— C'est dingue, mais tu n'arrives même plus à me surprendre, commenta Paul en reprenant son journal sur la table basse pour lire les pages sport.

— On peut mettre la chaine musique ? Interrogea Noah.

Un soupir d'exaspération s'échappa des lèvres de Chloé qui lança la télécommande à son fils. Jonas changea de suite la chaine et les deux garçons s'affalèrent un peu plus confortablement dans le canapé pour observer l'écran de télévision tandis que Chloé rejoignit Paul sur son fauteuil, s'asseyant sur ses genoux.

— Tu ne veux pas qu'on se fasse un cinéma ce soir ?

— Oh non, je ne suis pas motivé, marmonna Paul en repoussant son journal, J'ai une journée horrible qui m'attend demain.

— Pourquoi ça ?

— Ma secrétaire est en congé maternité et il faut que j'en trouve une autre, répondit-il, blasé, Ah je te jure, ces femmes avec leurs gosses... Je leur ferais bouffer si je pouvais !

— Inutile, elles l'ont déjà dans le bide, commenta Chloé sans même relever l'insinuation profondément sexiste, Mais ne t'inquiète pas, je suis sûre que tu vas trouver.

— Trouver quoi ? Interrogea Noah qui semblait revenir à la conversation.

— Une secrétaire.

— Quoi ? Sérieux ? Tu en cherches une ?

— Euh oui, répondit Paul, sceptique, Puis-je savoir d'où vient cet enthousiasme ?

— Oh mais c'est énorme ! S'exclama Noah encore ahuri, Je connais justement une secrétaire qui a besoin d'un boulot !

— Noah, je ne suis pas là pour financer tes plans culs, l'arrêta son père.

Et ni Chloé, ni Jonas, ne furent surpris par l'étrangeté de leur conversation.

— Hein ? Mais non, je ne couche pas avec elle.

— Alors comment tu connais une secrétaire ? L'interrogea Paul, intrigué.

— Mère d'une amie.

— Tu n'as pas d'amie à part Ellie et pour connaître vaguement Helen Merill je ne suis pas certain qu'elle sache compter en français.

— Ni en anglais d'ailleurs, précisa Noah.

Les deux hommes pouffèrent de rire et c'est à cet instant que Chloé décida de décrocher de la conversation. Elle se leva des genoux de son compagnon et s'éloigna dans la cuisine tandis que Noah continua :

— Bref, je parlais de la mère d'Anna.

Lentement, le visage de Paul se décomposa et il grinça entre ses dents :

— Ah non pas elle Noah. Je déteste cette bonne femme.

— Mais pourquoi tu la détestes autant ? Elle ne t'a rien fait.

— Elle m'a envoyé me faire foutre ! Scanda Paul, outré.

— Anna m'a reporté votre conversation téléphonique et c'est toi qui l'a envoyé se faire foutre, pas elle, rétorqua Noah, blasé.

— Ah bon ? J'aurais pu jurer que c'était l'inverse.

— Papa !

— Ok, ok d'accord, je vais l'appeler et lui proposer qu'on se voie demain, accepta-t-il à contrecœur, Mais je fais vraiment ça parce que j'ai la flemme de passer des entretiens.

— Je m'en fiche de la raison, rétorqua Noah en se relevant de son canapé, Merci pour le coup de main, je ne pensais pas que ça serait aussi facile.

— Euh de rien, s'étonna Paul qui ne comprenait pas vraiment le sens de cette dernière affirmation.

Noah attrapa son téléphone portable dans la poche de son jogging et se rua dans sa chambre.

***

Anna sortit de sa salle de bains, une serviette posée sur ses épaules pour que ses cheveux mouillés ne viennent pas tremper le parquet de sa chambre. Elle s'installa sur sa chaise de bureau en appréciant la sensation encore chaude sur sa peau. La jeune fille alluma son ordinateur tout en s'emparant de sa brosse pour démêler ses cheveux.

Fredonnant une chanson, elle entendit la sonnerie de son téléphone portable dans le fond de sa chambre et se releva pour aller récupérer son mobile qui était resté dans la poche de son jean qu'elle avait balancé par terre.

— Allô ? Décrocha-t-elle en portant le combiné à son oreille.

— Dis-moi que je suis la meilleure personne sur cette terre.

— Ta mégalomanie ne s'arrange pas Noah.

— J'ai trouvé un boulot à ta mère, continua le garçon en préférant ignorer sa remarque, Mon père veut bien essayer de la prendre comme secrétaire. Il vient de virer la sienne.

— Pourquoi ?

— Elle est enceinte.

— Mais il n'a pas le droit de faire ça !

— Ah bon ? S'étonna le garçon, Alors il a dû trouver une autre excuse. En fait, je n'ai pas écouté le début de la conversation.

— Oh peu importe, souffla Anna qui décida de ne pas s'en préoccuper, Ce serait vraiment génial qu'elle puisse bosser au Palace ! T'es vraiment sérieux à propos de ça ?

— Je ne t'ai pas dit que je me comporterais comme un ami désormais ?

— Oh putain merci, murmura Anna en se laissant tomber sur son lit derrière elle, Tu nous sauves Noah. Il fallait vraiment que ma mère reprenne confiance en elle. Je ne sais pas comment te remercier.

— Moi, j'ai ma petite idée...

— On est amis, le coupa-t-elle.

Il y eut un léger blanc au téléphone puis Noah enchaina finalement :

— Oui t'as raison, oublie.

Anna leva les yeux au ciel, esquissant toutefois un sourire, puis elle entendit la porte d'entrée s'ouvrir au rez-de-chaussée et elle ajouta précipitamment :

— Je te laisse, je crois qu'Ophélie vient de rentrer, je vais lui annoncer la bonne nouvelle. Merci encore.

— De rien bouboule, à demain.

— Ne redis plus jamais ça Khan.

— C'est affectif, se défendit le garçon.

— Jamais.

La jeune fille l'entendit soupirer à travers le combiné puis elle raccrocha, balançant son téléphone portable sur son sac à dos qu'elle n'avait pas encore eu la force de déballer malgré toutes ses affaires sales qui s'y étaient accumulées depuis qu'elle avait passé sa semaine chez Ruben.

Anna sortit en trombe de sa chambre, se précipitant sur ses escaliers pour rejoindre le rez-de-chaussée où elle se planta devant Ophélie qui venait de s'affaler devant la télévision.

— J'ai une bonne nouvelle à t'annoncer, maman va...

— Tiens, la coupa-t-elle, sèchement, Tu es rentrée toi ?

Anna reconnut de suite dans son ton que sa petite-sœur lui reprochait quelque chose.

— Qu'est-ce qu'il y a encore ? Souffla-t-elle, exaspérée.

— Tu te le demandes vraiment ? Cingla Ophélie en coupant la télévision, Tu me diras ça ne m'étonne pas tant que ça... Tu es tellement égoïste.

— Pardon ?

— Tu as vraiment de qui tenir, enchaina la jolie brune, Entre papa et maman.

— Tu peux m'expliquer ce qu'il se passe ? L'interrogea Anna, perplexe.

—Tu penses que c'était vraiment le moment de partir ?

Ophélie se releva du canapé pour se planter devant Anna et, face à l'absence de réponse de sa grande-sœur qui venait enfin de percuter le reproche, elle répéta, froidement :

— Tu crois vraiment que c'était le moment de partir ? Me laisser toute seule avec une mère déprimée et un père abruti qui passe son temps à revenir ici pour l'enfoncer encore plus ?

— Ophé, arrête, murmura Anna, mal à l'aise, Je ne suis partie qu'une semaine. Je t'ai dit que j'avais rompu avec Ethan, j'avais besoin d'un peu de temps pour moi, pour digérer tout ça. Et Ruben habite dans le centre, c'était plus facile pour aller travailler cette semaine.

— Mais moi aussi j'aurais bien aimé prendre une semaine de pause, cracha Ophélie, Moi aussi, j'ai des problèmes au collège. Tu n'es pas toute seule. Tu penses toujours qu'à toi, à tes petits problèmes, tu n'as même pas appelé une seule fois pour savoir comment ça se passait avec maman à la maison.

— C'est bon, je savais qu'il ne vous arriverait rien de grave !

— Oh mais putain ! Explosa la jeune fille, Ton égoïsme me rend dingue !

— Mon égoïsme ? Répéta Anna, outrée, Mais t'es aveugle ou quoi ? Tu ne vois pas tout ce que je fais pour vous ?

— Et bien éclaire-moi parce que ce n'était pas flagrant cette semaine !

— Je bosse ! Je bosse tout le temps ! Trois soirs par semaine de dix-huit heures à minuit ! Et presque tous les week-ends ! Je n'ai même plus le temps de faire mes leçons alors que le bac est dans quelques mois ! Comment tu oses dire que je suis égoïste ? Parce que tu veux savoir ce que j'ai fait aussi ? Je me suis mise à genoux devant la fille que je hais le plus au monde pour la supplier de me donner des antidépresseurs pour maman. Je prends des risques ! Tout le temps ! Pour vous deux ! Alors va te faire foutre Ophé si tu n'es pas capable de comprendre ça !

— Mais on ne t'a jamais demandé de faire tout ça ! Explosa Ophélie, les larmes aux yeux, On ne t'a pas demandé de sauver la famille, mais juste... Juste d'être là, putain. On te demande juste de l'attention, ce que tu es incapable de donner parce que tu ne regardes que toi. C'est ça que tu ne comprends pas. T'essaie de sauver un truc que tu ne veux même pas voir exister ! Tu n'en as rien à foutre de maman et moi ! La seule raison pour laquelle t'essaie d'arranger la situation, c'est parce que tu en es responsable ! Tu te sens coupable d'avoir toujours préféré papa, mais, putain, on ne t'en veut pas pour ça Anna. On t'en veut parce qu'au fond de toi, tu es comme lui. Tu joues au héros parce que tu ne peux pas t'empêcher de penser que nous, on est des merdes à côté de toi et qu'on n'est pas capable de se débrouiller toutes seules, tout comme papa l'a fait pendant des années.

— Je ne pense pas ça.

— Si, reprit Ophélie, Si tu le penses, parce qu'à la place d'apprécier le fait qu'on se soit enfin retrouvées toutes les trois, tu le vis comme un fardeau, comme un poids sur ton dos qui t'empêche d'avancer. Maman t'a dit de bosser ton bac plutôt que de travailler, c'est toi qui a décidé de ne pas l'écouter alors ne lui remets pas la faute sur le dos. Tu sais, ce n'est pas parce que t'as une putain de vie géniale que tu dois nous lâcher maintenant.

— Pardon ? S'offusqua Anna, Je crois qu'on n'a pas la même définition d'une vie géniale.

— Oh arrête, souffla sa petite-sœur, exaspérée, Depuis que tu as réalisé que tu plaisais aux mecs, tu es encore plus prétentieuse et insupportable que tu ne l'étais déjà.

— Ophélie j'ai dix-huit ans, la coupa-t-elle, sèchement, C'est normal que je commence à partir de la maison. Et puis comment tu peux me reprocher ça ? Depuis que tu es entrée au collège, tu sors tous les week-ends, tu ramènes tes copains à la maison. Et tu sais quoi ? C'est à partir de cette époque-là qu'on s'est séparées toutes les deux, ça ne date pas d'aujourd'hui, ni du divorce des parents. Comment tu pensais que je le vivais moi ? Enfermée dans ma chambre chaque putain de samedi soir alors que les parents étaient sur mon dos parce qu'ils ne comprenaient pas pourquoi je n'étais pas aussi sociable que toi. Je n'ai pas eu de copains pendant des années alors que tu passais ton temps à parler des tiens !

— Oh ça va, arrête deux minutes, c'est toi qui disait ne pas vouloir de copain.

— Non Ophé, je n'en avais pas. Qu'est-ce que tu voulais que je vous dise d'autres ? Que j'étais un tel laideron intello que personne ne s'intéressait à moi ? Je t'en prie, ne me fais pas croire que tu gobais toutes ces conneries d'indépendances parce qu'au fond de toi, tu savais très bien que je le vivais mal. Ça cachait juste la terrible vérité que personne ne voulait de moi, et je n'avais pas besoin de toi pour me le rappeler à chaque fois.

— Et moi, je n'avais pas besoin de toi pour me rappeler à quel point j'étais moins intelligente, cingla sa sœur, Ça marche dans les deux sens Anna. Toi aussi, tu faisais semblant de croire que je me fichais de l'école, alors tu te pavanais avec tes putains de notes et de félicitations du conseil de classe ! Moi aussi, je cachais la vérité. Tu crois que j'avais envie d'être la bécasse incapable d'arriver à la cheville de sa sœur ?

Soudainement, la porte d'entrée s'ouvrit sur Cécile qui se précipita à l'intérieur, son téléphone portable dans la main.

— Les filles ! Hurla-t-elle en faisait irruption dans le salon, Devinez qui vient de m'appeler pour me proposer un travail !

Encore silencieuses de leur interaction, aucune de ses deux filles ne lui répondit et Cécile enchaina, enthousiaste :

— Paul Khan ! Il a besoin d'une secrétaire pour le Palace ! Allez, ne me cachez rien, c'est vous qui êtes derrière tout ça, n'est-ce pas ?

— Non, murmura Ophélie en plongeant son regard dans celui de sa grande-sœur, C'est Anna qui l'a fait. C'est elle, le véritable héros dans cette famille... J'imagine que c'était ça la bonne nouvelle que tu voulais me dire ?

— Oui, bégaya Anna, encore abasourdie par leur dispute.

— Félicitations alors, souffla Ophélie en s'éloignant.

Cécile et Anna observèrent la jeune fille monter dans sa chambre puis leur mère s'étonna en se retournant vers son ainé :

— Qu'est-ce qu'elle a ?

— Non, rien de grave, murmura Anna, Ça a été votre semaine ?

— Comment ça ? S'étonna Cécile.

— Je n'étais pas là, précisa-t-elle, C'est normal que je prenne des nouvelles. Ça te surprend tant que ça ?

— Oui plutôt, s'amusa sa mère en lui souriant, Tu ne poses jamais la question, chérie.

Anna resta plantée au milieu du salon, le cœur battant douloureusement dans sa poitrine, et Cécile ajouta à son attention :

— Mais qu'est-ce que tu as, toi aussi ? Vous êtes obligés de faire la tête un jour pareil ? Je viens de retrouver un travail ! Souriez bon Dieu !

La jeune fille tenta de tirer sur les muscles de son visage, mais le sourire fut si peu sincère que sa mère souffla, blasée :

— Oh laisse tomber, je vais préparer à manger.


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