Édouard approchait la trentaine. Il était né en 2010.
Il était assez laid, porté sur l'alcool et les choses de la vie. Brun, les cheveux longs, il aimait notamment le Ricard. Les yeux d'un vert profond, il aimait aussi le Martini, blanc bien sûr. Il ne rechignait pas non plus à tremper ses lèvres épaisses et brunes (il avait la peau très mate, ce dont il était fier) dans un vieux Whisky.
Sa femme, il la rêvait sexy, à l'image de ces jeunes femmes à la bouche serrée en cul de poule, qui popaient de temps en temps sur son ordinateur (et qui habitaient près de chez lui, où qu'il se trouvât).
Il rêvait surtout d'avoir une femme. Une vraie. Pas une de ces filles rencontrées en discothèque qui disparaissaient aussitôt (il avait un petit sexe). Une belle femme, gentille, qui s'épile au milieu du salon en disant des trucs inintéressants. Une vraie femme.
Bref, Édouard Miron était étrange. "Asocial", avait laissé échapper une de ses connaissances, lors d'une soirée... ou asociable, il n'avait pas entendu à cause de la musique forte. (Il n'avait pas osé faire répéter, la personne semblait suffisamment gênée comme ça.) Il était peu habitué aux soirées, n'avait pas d'ami qui le connaissait vraiment car il ne se confiait jamais.
Pour unique relation stable, il avait son ordinateur. Un vieux Toshiba. Pas pour faire ce que vous croyez, hein ! Pour écrire. Sur des sites internet. Il y en avait beaucoup, son préféré étant Tinder, une ancienne application de rencontre qui s'était reconvertie dans l'écriture pour éviter de faire faillite.
Un soir de janvier 2040 cependant, Édouard "cliqua" (les souris avaient depuis bien longtemps disparu mais on avait gardé le terme) non pas sur une jolie bouche en cul de poule, mais sur une publicité vantant un site d'écriture qu'il ne connaissait pas : Wattpod.