Je suis éreinté, je ne suis plus que l'ombre de moi même.
Aujourd'hui j'ai tout donné, ça faisait longtemps que je ne m'étais pas autant défoncé. Le foot, la boxe, toute cette adrénaline constitue ma drogue et certains jours, j'en ai plus besoin que d'autres. Aujourd'hui est un de ces jours où il fallait que j'évacue toute cette tension.
Entre le sport et les parties de jambes en l'air avec Jenna, je pensais avoir trouvé un équilibre, mais comme de plus en plus souvent, je ressens encore ce vide en moi. Je ne sais pas comment le remplir, et ça me frustre. Je suis épuisé mais j'ai toujours cette rage en moi, celle qui me donne envie de tout casser. Ce soir, je n'arrive pas à m'apaiser et je ne sais pas comment régler mon putain de problème.
Je me douche rapidement et sors des vestiaires traînant mon sac comme s'il contenait toute la misère du monde. Ma misère, plus précisément.
- Nate, viens par là deux minutes.
Je me retourne vers la voix qui s'est élevée dans la nuit. Mon entraîneur Mr Lewis se tient contre la porte du club house, et me fait signe d'approcher.
- Oui, coach ?
Il prend un air soucieux et se frotte le front, ce qui n'est vraiment pas bon signe. Je passe en revu les derniers matchs et entraînements. Je n'ai fait aucun dérapages, je ne me suis pas battu (ou du moins il ne peut pas être au courant de mes activités extra scolaire), et j'ai plutôt progressé ces dernières semaines. Non, je ne vois pas du tout ce qu'il pourrait me reprocher.
- Ecoute, c'est plutôt délicat. (Il prend sa respiration et pose ses deux mains sur mes épaules.) Ton père a appelé, il ne veut pas que tu joues demain, pour que tu sois en forme pour ton gala ou je ne sais quelle connerie.
Je ne dis rien et accuse le coup. J'attends qu'il poursuive en contenant ma rage de toute mes forces, mais je sens que je vais bientôt devoir exploser.
- Je lui ai répondu que ce choix t'appartenait et qu'il était hors de question que de te mettre sur le banc de touche. Je voulais que tu sois au courant, car il va sûrement s'en prendre à toi. Il était plutôt furieux que je lui ai refusé sa demande, mais je crois que tu devrais poursuivre ton rêve Nate. T'es un bon gamin, tu as un talent immense dont tu te sers noblement, ne laisse personne te dire quoi faire.
Les mots du coach me font du bien, ils me requinquent et me donnent la force d'affronter mon père. Je sais que le coach ne m'encourage pas à entretenir cette relation conflictuelle avec mon paternel, mais je sais aussi qu'il est au courant de la façon dont il m'a toujours traité. Lewis me connaît mieux que je ne me connais moi même. Lui et Mario forment à eux deux, la figure paternelle que je n'ai jamais eue. Je les tiens en haute estime, et si il m'autorise à défier mon père c'est pour de bonnes raisons. Il connaît bien son caractère difficile qui le pousse à prendre les mauvaises décisions concernant son fils.
- Je vais jouer ce match, coach. Il devra faire avec, je vais vivre ma passion jusqu'au bout.
Mon bienfaiteur effectue une légère pression affective sur mes épaules, comme pour me dire qu'il me soutiendra et qu'il sera toujours derrière moi. Certaines fois, je me dis que les liens du sang ne sont pas toujours les plus importants.
Je le salue et me dirige vers ma moto, déterminé à faire de cette soirée un cauchemard pour l'homme qui n'a jamais été autre chose qu'un étranger pour moi mais qui s'octroye le droit de contrôler ma vie.
Lorsque je mets les pieds dans le salon, mon père lève à peine les yeux vers moi. Comme si je n'existais pas, comme si je faisais simplement parti du décor. Un décor qu'il a pour but de façonner à son image.
Je laisse tomber mon sac avec fracas, en espérant attirer son attention. C'est peine perdue.
- C'est quoi ton nouveau délire ? Je crache, en m'avançant vers le fauteuil en cuir où il se trouve. C'est ta nouvelle lubie d'aller me faire chier jusqu'au terrain de foot ?
Il manque de s'étouffer et reprenant contenance, il balance le magazine de santé qu'il était en train de lire sur la table en verre.
- Tu baisses d'un ton avec moi, sale merdeux.
Ses yeux lancent des éclairs mais il ne bougent pas d'un poil.
- Ou sinon quoi ? Tu vas encore essayer de me priver de la seule chose qui me rend encore heureux, c'est ça ? T'en as pas marre de jouer au père quand personne ne te demande de l'ouvrir ?
Mon oreille droite siffle suite à la gifle qu'il m'assène. Mais après la dernière fois, je m'y étais préparé.
- Tu vis ici chez moi, je paie le loyer, ta licence, ta nouriture, je me tue à la tâche pour que tu aies une vie décente et c'est comme ça que tu me remercies ? Me hurle-t-il maintenant debout à quelques centimètres de mon visage.
- Te mêles pas de ma vie, c'est tout ce que je te demande. Est ce que je te reproche de baiser les trois quarts de tes clientes pendant que maman se bat pour garder la tête hors de l'eau ? Non, je ferme ma gueule et je fais bonne figure. On n'est rien l'un pour l'autre, arrête de faire semblant. Ton foutu gala, je t'ai dis que j'y serais mais si tu interviens encore une fois dans ma vie, tu pourras parler de moi au passé.
Cette fois c'est moi qui l'ai giflé, avec la force de mes mots. Et j'en ai rien à foutre, je prends mon sac et monte dans ma chambre. Je me laisse tomber sur le lit, enfin dépossédé de toute énergie.
Je n'ai plus la force d'être triste après toutes ces années. Mon père est une ordure, je fais avec. Si seulement Alex était toujours parmi nous, je n'affronterai pas cette merde tout seul. Putain, qu'est ce qu'il me manque. C'est avec son visage gravé sur mes paupières que je sens le sommeil me gagner peu à peu.
Mon réveil sonne et je n'ai pas dormi de la nuit. Je dois pourtant jouer avec toutes mes capacités aujourd'hui. Je veux prouver à mon père que je vais réussir, que j'en ai les moyens. Lui prouver qu'il a tort. Je me douche, et rejoins mon équipe déjà dans les vestiaires.
- Tu donnes tout ce que t'as dans le ventre, Davis ! M'encourage Ryan.
- T'inquiète mon pote, on va les balader, je le rassure en frappant mon poing contre le sien.
Le match s'avère moins endurant que ce que j'avais imaginé. L'équipe adverse est beaucoup plus fragile et heureusement pour eux, ce match ne joue pas pour la coupe. Nous gagnons 3-0 et cela se fait ressentir dans les vestiaires. Pour une fois, le coach ne gâche pas notre joie avec un disours plombant et moralisateur, je crois que deux victoires d'affilées vaillent que l'on s'attarde un peu.
Sur la pelouse, je rejoins Jenna qui m'offre un câlin de la victoire, comme elle l'appelle. Ce qui équivaut à une démonstration publique d'affection, voire plus. Je ne dis rien et me contente de répondre à son étreinte. En fait, ça fait un moment que je ne dis plus rien, me comportant comme le plus grand des lâches. La solution s'impose pourtant à moi depuis un bout de temps, me séparer de Jenna serait le choix le plus raisonnable. Mais je ne sais pas si je suis prêt à subir les conséquences. Mon père pourrait faire un arrêt cardiaque mais c'est bien la dernière chose dont je me soucis. L'avis de ma mère compte déjà plus à mes yeux, mais malgré sa déception, je sais qu'elle acceptera ma décision, elle ne souhaite que mon bonheur.
Non, le problème vient de moi. Suis-je prêt à renoncer à mes moments privilégiés avec elle, sachant qu'elle sait me faire passer de bon moments ? Et je dois l'admettre, elle est la seule pour qui j'ai changé, j'ai troqué mes nuits de débauches pour une vie de couple emplie de stabilité. Une part de moi est effrayée à l'idée que je puisse regretter mon choix. Pourtant, il faut se rendre à l'évidence, nous n'avons jamais développer une réelle connexion, ni même un semblant de complicité. Si je devais définir notre relation en un mot, je dirais qu'elle était pratique. Mon couple m'assurait une sécurité à tout niveau, mais aujourd'hui cela ne me suffit plus. J'en ai pris conscience lorsque récemment j'ai commencé à vivre des choses intenses qui représentait bien plus qu'une simple attirance physique.
- T'as été parfait, comme toujours, me susurre Jenna à l'oreille.
Des membres de l'équipe passe à côté de nous en sifflant, ma copine sourit car elle adore toute cette attention.
Je la repousse doucement et me dirige vers ma moto.
- C'est pas vrai, je t'ai dis plusieurs fois qu'il ne s'était rien passé avec Chris, mais tu me le reproche sans arrêt ! Peste-t-elle derrière mon dos, tout en essayant de me rattraper juchée sur ses talons hauts.
- T'as raison, je crois que j'arriverai pas à passer outre le fait que t'ai essayé de te taper un mec de mon équipe, je continue de marcher.
- Je t'ai passé l'éponge sur toutes tes erreures et tu as le culot de me dire que ce que j'ai fait est impardonnable ?
Je me retourne brusquement vers elle. Je crois que le moment d'avoir une petite discussion est venue.
- Alors puisque tu m'as pardonné mes écarts à l'époque, tu crois que tu peux te permettre de me tromper devant la moitié de l'école, c'est ça ? Je fulmine littéralement.
Elle regarde autour d'elle et s'efforce de reprendre un semblant de contenance au vu des quelques spectateurs de notre altercation.
- Bébé, tu es jaloux et je peux le comprendre. Mais Chris est juste un ami qui s'avérait être présent quand, toi tu ne l'étais pas. (Elle s'approche de moi et pose une main sur mon torse, l'autre sur ma taille.) Tu vois, ce que ça fait d'être mis de côté pour une personne qui n'en vaut pas la peine ?
Elle m'offre son plus beau sourire d'actrice, pour lequel je lui décernerai un oscar sans hésitation. Mais bordel, elle ne comprend rien et il n'y a rien qui m'exaspère plus que son comportement actuel. Je sais qu'elle fait référence à Ashley et qu'elle essaie de tourner la situation à son avantage, afin que je ne fréquente plus la seule fille qui m'intéresse vraiment. Elle essaie de me manipuler comme elle a si bien su le faire depuis bientôt deux ans, mais je ne suis plus d'humeur à la suivre dans ses jeux mesquins.
- Arrête tes conneries, t'as jamais été pote avec Chris, n'oublie pas que tu l'as littéralement descendu devant mes yeux quand il a commencé à te faire des avances. Tu ne supportes pas ce mec, mais t'as toujours voulu que le monde tourne autour de toi et tu te sers de lui pour que je ne regarde que toi.
Ses mains retombent lourdement. Son regard s'assombrit mais je sais qu'elle n'est pas réellement triste.
- C'est ce que tu penses alors ? Mais qui te dit que je me sers de lui, que je n'éprouve pas de réels sentiments à son égard ? Me défit-elle.
- Tu sais quoi ? Fais ce que tu as à faire, j'en ai plus rien à foutre. On est dans l'impasse depuis bien trop longtemps, Jen. Toi et moi on sait que même avec la plus grande volonté du monde on y survivrait pas. Cette semaine a été un fiasco, on ne s'est parlé que dans une chambre, ou plus précisément dans ton lit. Tu mérites mieux qu'une relation basée sur le sexe et moi aussi.
Elle ne répond pas et recule, me dévisageant comme si j'étais un étranger ou que le quelqu'un avait pris possession de mon corps.
- Je t'accompagnerai au bal comme je te l'ai promis. Après ça, toi et moi, je crois qu'on a plus rien à faire ensemble.
Elle remonte son sac hors de prix sur ses épaules, me jette un regard méprisant et laisse échapper un ricannement.
- T'inquiète pas pour moi, faut croire que Chris avait prévu le coup en me proposant ton remplacement la semaine dernière. Je te souhaite beaucoup de bonheur avec ton ami racaille et ta nouvelle copine misérable.
Et elle s'en va, rejetant ses cheveux derrière ses épaules, à croire que j'étais le perdant dans toute cette histoire. Peut être le suis-je, mais étrangement je ne me suis jamais senti aussi soulagé qu'à ce moment précis.
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Voila un nouveau chapitre les amours ❤️
Je m'excuse du retard, avec la grippe, mon séjour en Espagne, j'ai pas tellement eu le temps !
N'hésitez pas comme d'habitude à me dire ce que vous en avez pensé ! Et si vous avez des questions (à propos de ma fiction ou de tout autre sujet) soyez sûr que je prendrai le temps de vous répondre !
Enfin bref, merci de votre soutien, c'est la meilleure des choses qui me soit arrivée !
Muuuch love pour les meilleurs lecteurs ❤️