« Nathanaël. »

By Charlie_renaud

1.9K 134 36

Personnalité à part, Nathanaël mène sa vie loin de toute forme d'affection jusqu'au jour où il fait la rencon... More

Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Annonce : Publication

Chapitre 1

439 20 2
By Charlie_renaud

Lundi 4 septembre 2017

Six heures s'imposèrent à mon réveille-matin. Il sonna et je m'empressai de mettre fin aux ondes produites par la vibration mécanique de celui-ci afin de ne pas éveiller mon foyer encore endormi.

Aujourd'hui était le jour de ma rentrée en classe de Terminale Scientifique. Ce qui annonçait une nouvelle classe, de nouveaux élèves, de nouveaux professeurs, un nouvel emploi du temps...

À la fin de l'année, après avoir atteint les examens finaux, j'espérais obtenir mon baccalauréat avec une mention « Très bien ».

Subséquemment j'envisageais de quitter la ville pour rejoindre mon pays natal, l'Italie. J'aimerais me rendre en Toscane et acquérir un logement là-bas afin de m'y installer. Un rêve ambitieux pour lequel je me donnerais les moyens.

Je me dirigeai vers la salle de bains. Je m'immobilisai devant le miroir toutefois je ne prêtai aucune attention à mon reflet dans celui-ci. Je me vêtis d'un pantalon en jeans et d'un tee-shirt à col tombant dissimulé sous un gilet en laine blanche tirant sur le gris. J'arrangeai mes mèches blond foncé et ajustai une bague à mon pouce gauche. Pendant ce temps, le rez‑de‑chaussée semblait s'animer.

En descendant les marches qui se plaignaient sous mes pas, je caressais la rambarde de ma paume. En arrivant face à l'entrée de la cuisine, je pus constater le toasteur de la marque Tefal laissant s'échapper un effluve de pain grillé, et un arôme de chocolat chaud dansant dans un bol au dessin et au coloris enfantins. Animé par la faim, je rentrai et saluai les visages encore endormis qui discutaient autour de la table.

Je disposai une tranche de pain dans l'appareil encore chaud. J'attendis quelques instants, soutenu par le plan de travail, tout en observant la pièce autour de moi comme s'il s'agissait de la première fois que je la contemplais. La tartine brûlante bondit hors des bobines de fil chauffées. Je la saisis et m'installai à table pour la déguster avec de la confiture et me désaltérer avec un jus maison des derniers abricots de la fin de l'été.

Accroupi sur le tapis d'entrée en fibres naturelles, je lassai mes chaussures imitation converses noires à lacets et caoutchouc blancs puis fermai la porte derrière moi avant de me diriger vers le lycée.

Arrivé face au bâtiment sobre et droit, je franchis la grille et m'assis sur le banc métallique et terne qui donnait accès à une zone d'observation de l'intégralité de la cour. J'aime m'y installer chaque année.

Je regardai les autres élèves se retrouver et se saisir dans les bras les uns les autres. Les codes de la société m'échappent. Je ne conçois pas de fonction à l'amitié, à tous ces liens sociaux. Je m'en désintéresse et ils ne font que faire connaître de la souffrance. Pourtant, je me sens extrêmement seul, en permanence. Peut-être que fuir l'attachement ferait autant souffrir que de le ressentir ?

La sonnerie retentissait. Je commençais la journée par des mathématiques. J'affectionne tout particulièrement cette matière car je sais que si je cherche bien, il existera toujours une solution à l'énigme établie. Au contraire de l'existence. Je me suis penché sur ce sujet durant des nuits entières, je n'ai jamais effleuré de résultat ; simplement de longues soirées d'insomnies.

Le français se trouve également être l'une de mes matières préférées. J'aime le parler convenablement. Peut-être trop à en croire les critiques que j'aie amassées. Je me souviens d'une fois, en primaire, lorsqu'une petite fille est venue et s'est introduite dans ma sphère personnelle afin de me demander si j'avais mangé un dictionnaire à ma naissance, puis s'en est allée moqueuse rejoindre les autres enfants que jamais je n'ai pu, ou bien voulu approcher.

Je rentrai en classe et je me plaçai à une table, seul à côté d'une fenêtre à l'encadrement incolore et quelque peu écaillé afin de pouvoir observer le paysage. Il pleuvait ce jour-là. De mes cavités tympaniques toujours en éveil, j'appréciais le bruit des gouttes d'eau mourant sur les vitres.

Il m'arrive de m'imaginer à la place d'une goutte de pluie et de mourir en laissant derrière moi ce son agréable aux tympans. Mes pensées furent interrompues par une voix inconnue à mes oreilles.

« Bonjour, je peux m'asseoir à côté de toi ?

— Oui. »

Cet inconnu prit place à mes côtés, juché sur une chaise aux pieds inégaux qui produisait un bruit insupportable à chaque fois qu'il se mouvait.

« Comment tu t'appelles ? Moi c'est Quentin !

— Je m'appelle Nathanaël.

— C'est joli comme prénom, Nathanaël. »

Sa voix raisonna dans mon cerveau. Je n'avais plus l'habitude que l'on m'adresse la parole en-dehors de chez moi, d'autant plus pour me complimenter.

« Je te remercie. »

Afin de mettre fin à cet échange, je détournai mon regard. Puis j'entendis de nouveau cette même voix et la pompe à sang se trouvant dans ma poitrine manqua un battement, pris par la panique. Je ne savais pour quelle raison. Peut-être que le contact humain avait manqué bien trop longtemps à mon existence ?

« Tu aurais un stylo à me prêter ? Je crois que j'ai oublié ma trousse sur mon bureau ce matin... Je commence bien la rentrée ! » ironisa-t-il.

Je me demandai quel genre d'individu pouvait être capable d'oublier ses affaires dès le premier jour de classe. Sûrement une personne peu penchée sur son avenir pensai-je en premier lieu. Puis, j'envisageai l'hypothèse qu'il s'agissait là d'un prétexte d'approche amicale. Mais après tout, un oubli peut arriver à n'importe qui. Et puis, qui étais-je pour juger sans connaître toutes les données ?

Je lui prêtai mécaniquement mon stylographe à plume préféré, puis fus étonné moi-même de lui confier sans réfléchir une part de ma vie. Il ne s'agit que d'un simple objet et peut-être est-ce démesuré de lui attribuer tant d'importance, mais il s'agissait d'un cadeau qui m'avait été offert par ma maman avant qu'elle ne m'abandonne. Je le détiens depuis mes six ans. Je n'ai pour ainsi dire jamais écrit avec sa plume, de peur de voir l'encre disparaître, tout comme elle.

Lorsqu'elle a quitté la maison, mon père m'a tendu l'objet employé pour l'écriture, m'affirmant que ma maman l'avait posé en évidence sur une pile d'affaires qu'elle avait abandonnées, en même temps que nous.

Elle souhaitait me l'offrir afin que je ne l'oublie jamais. Je trouvais cela tout à fait étrange. Pourquoi m'abandonner en voulant me laisser une partie d'elle ? Je ne pouvais concevoir cette vérité, il existait une autre raison. Mon père me dissimulait sans nul doute la conformité d'une partie de cette l'histoire.

Quentin échangea la cartouche d'encre séchée avec une nouvelle qu'il avait demandée à l'élève se trouvant derrière nous.

Le professeur commença à hausser le ton, il nous fit remarquer que notre classe était dissipée en ce premier jour. Nous étions une classe de quinze élèves composée de sept filles et huit garçons. De coutume, j'essaie de ne pas prêter une grande attention aux individus qui dessinent mon horizon. Mais ce jour était spécial, sans que je ne puisse en expliquer la raison. J'avais la perception certaine au fond de moi que cette date du 4 septembre 2017 allait me conduire vers un tout nouveau destin.

J'observai l'étendue de ma classe et mon regard se concentra sur la physionomie de Quentin. Il l'avait indubitablement remarqué car je pus observer sa lèvre inférieure connaître un léger relèvement. Je me demandai quelle personnalité se cachait à l'intérieur de lui.

À la fin du cours, Quentin me rendit mon stylo. Son revêtement était brûlant, emprisonnant encore la chaleur de sa paume. Peut-être était-ce un détail insignifiant auquel personne d'autre n'aurait prêté attention, je le sais. Mais moi les détails me fascinent et m'agressent à la fois. Je ne peux pas les ignorer. Même lorsque je ne veux pas me préoccuper d'eux, ils s'imposent à moi.

Cette journée avait semblé s'éterniser, toutefois elle s'était achevée et c'était là le plus important. Je me rendis à mon casier pour y déposer les manuels dont je n'avais pas la nécessité et je m'apprêtai à rentrer chez moi sous la pluie.

Je marchai la tête dirigée vers le sol et le visage de Quentin s'imposa à mon esprit lorsque j'entendis sa voix m'apostropher.

« Eh, Nathanaël, attends !

— Que fais-tu ici ? Il n'y a jamais personne qui emprunte ce chemin, dis-je étonné.

— Personne, il marqua une pause, essoufflé de m'avoir couru après, mis à part toi. » termina-t-il dans un souffle.

Je le regardai reprendre son souffle.

« Je crois que je suis déjà passé par ici une fois ou deux pour rentrer chez moi. Pourquoi tu prends ce chemin s'il n'y a jamais personne ?

— Afin d'être seul.

— Tu n'apprécies pas les gens ?

— Il ne s'agit pas d'affection.

— De quoi s'agit-il alors ?

— Laisse-moi, je ne veux pas en discuter.

— S'il te plaît. » dit-il sans détour.

Je compris qu'il ne s'agissait pas d'une supplication.

« Comment cela "s'il te plaît'' ?

— On dit : "S'il te plaît.'' Toi qui semble avoir un si joli parler, tu devrais le savoir, s'amusa-t-il.

— D'accord. Je vois. Laisse-moi, "s'il te plaît.'' »

Je me retournai hâtivement, le visage contrarié et poursuivis ma déambulation sur le chemin rocailleux et sableux entouré d'arbres et de verdure, tandis que Quentin continuait de marcher derrière moi dans le silence le plus total.

À un croisement, je m'apprêtai à emprunter le chemin qui menait à l'intérieur de la forêt lorsque Quentin m'arrêta.

« Tu habites dans la forêt ?

— Tu peux me laisser, à présent, dis-je me tournant vers lui.

— J'aimerais bien rentrer avec toi.

— Je ne suis plus un enfant ! Je n'ai pas besoin d'être surveillé par un baby-sitter.

— Je n'ai pas parlé de baby-sitter.

— Tu ne vas tout de même pas me suivre jusqu'à chez moi ?

— Je suis curieux de voir où mène ce chemin. Je me ferai discret promis ! Et puis je suis sûr qu'au fond de toi tu apprécies de ne pas marcher seul aujourd'hui. » dit-il en se libérant d'un clin d'œil.

Je n'ai pas rétorqué. Je me suis contenté de me retourner et d'avancer, une fois encore.

Nous avons ainsi poursuivi notre chemin ensemble, toujours dans le silence. Je découvris que Quentin n'habitait pas loin de chez moi, dans une maison située à l'orée de la forêt.

Il admirait le paysage qui était bien plus agréable que sur le chemin véhiculé et commercial qu'il s'obstinait à emprunter depuis des années. Il avait le regard émerveillé et le visage infantilisé devant ce spectacle de chlorophylle.

Continue Reading

You'll Also Like

541K 22.2K 56
Tout le monde pensait qu'ils avaient tourné la page. Ils s'étaient reconstruits chacun de leur côté, et vivaient aujourd'hui un nouveau chapitre du l...
159K 17K 51
La guerre est arrivée de nulle part, sans qu'on puisse l'empêcher. Les Elémentaires ont traversé leurs immenses portails luminescents avec un seul ob...
802K 48K 35
Jana Mierzwiak, 17 ans, se réveille sur une plage en compagnie d'autres gens de son âge, sans absolument savoir pourquoi. Cependant, elle va bientôt...
46.1K 1.8K 73
« 𝐐𝐮𝐚𝐧𝐝 𝐥'𝐚𝐦𝐨𝐮𝐫 𝐜𝐞 𝐭𝐫𝐚𝐧𝐬𝐟𝐨𝐫𝐦𝐞 𝐞𝐧 𝐡𝐚𝐢𝐧𝐞 𝐜̧𝐚 𝐯𝐞𝐮𝐭 𝐝𝐢𝐫𝐞 𝐪𝐮'𝐢𝐥 𝐧'𝐲 𝐚 𝐣𝐚𝐦𝐚𝐢𝐬 𝐞𝐮 𝐝'𝐚𝐦𝐨𝐮𝐫 𝐝𝐚�...