La malle du Diable

By Pat747

2.3K 479 948

Tout s'achète et tout se vend, en ce bas monde. Même les choses les plus extravagantes trouvent preneur, c'es... More

Chapitre 1 - L'étonnante rencontre
Chapitre 2 - Petite visite chez Ludovic
Chapitre 4 - La tentation
Chapitre 5 - Le sacrifice inattendu

Chapitre 3 - La révélation

396 91 203
By Pat747


Axel comprit pourquoi, malgré la lumière diffusée par les torches qui brûlaient, on ne pouvait voir le bas de l'escalier : il faisait un angle vers la gauche.

Ayant franchi l'angle, il vit le fond, tout en bas. Pour y parvenir, il y avait au moins une cinquantaine de marches à descendre, qui semblaient très usées.

L'escalier se terminait par une ouverture avec le dessus arrondi, qui donnait accès à une grande salle ronde dont le plafond était si haut que la lumière des torches accrochées tout autour sur les murs ne pouvait l'éclairer.

En face de lui, assis le dos au mur dans un grand fauteuil qui lui parut être métallique, se tenait un homme à l'allure inquiétante qu'il pouvait distinguer très nettement.

- Bonsoir Axel, je vous attendais, dit l'homme d'une voix grave qui résonnait dans cette pièce vide de tout autre meuble.

- Bonsoir, répondit Axel en essayant de ne pas chercher à comprendre comment il connaissait son prénom.


Il détailla l'homme en un instant : il avait de longs cheveux noirs de jais attachés derrière en katogan et portait un collier de barbe qui finissait taillé en pointe sous son menton.

Mais, surtout, il était singulièrement vêtu d'une veste courte et matelassée, comme une sorte de pourpoint sur lequel alternaient des soufflets en velours rouge foncé et des bandes en cuir noir.

Il portait aussi une culotte bouffante et des bottes d'aspect souple montant au-dessus des genoux.


- Monsieur Ludovic m'a parlé de votre cas, dit l'homme. Il pense que votre situation n'est pas fameuse et que vous mériteriez un coup de main.

- Excusez ma curiosité, mais qui êtes-vous, où sommes-nous et en quoi pourriez-vous m'aider ? lui demanda Axel.


Il fronça ses épais sourcils et, d'un air réprobateur, grogna :

- Je suis chargé de vous transmettre une proposition qui pourrait bien changer votre vie.

- De quel genre ?

- Nous pourrions signer un contrat : en l'échange de... disons... d'une chose qui vous sera un jour inutile, je vous apporterais le confort matériel dont vous manquez aujourd'hui si cruellement, et aussi une santé rayonnante.

- Mais comment pourriez-vous faire cela ? Et que voudriez-vous de ma part ?

- Vous posez toujours plusieurs questions à la fois, Axel. Il ne m'est donc guère facile de vous dire les choses clairement, tonna-t-il. Vous savez, je pourrais être beaucoup moins agréable, si je voulais...


Pendant qu'il disait cela, son apparence était en train de changer. En un court instant, l'homme avait fait place à une monstrueuse créature. Pris de panique, Axel recula et se retourna, cherchant des yeux l'ouverture par laquelle il était entré dans la salle, mais elle avait disparu.

Il dut se résoudre, épouvanté, à regarder la créature. Il lui sembla qu'elle avait trois têtes : une d'homme absolument hideux, une de buffle et une de bêlier. La bête portait de grandes ailes de chauve-souris et ses jambes avaient fait place à des pattes de volatile, comme celles d'une oie. Une horrible queue de serpent battait l'air derrière le fauteuil.

Cela ne dura que quelques secondes et Axel vit, la gorge nouée, la bête reprendre l'aspect humain qui était le sien lorsqu'il était arrivé.


- Je n'aime pas que l'on me contrarie, dit l'homme avec une sorte de mauvais sourire inquiétant.

Il y eut un moment de silence, puis Axel dit, d'une voix blanche :

- Bien, je ne voulais pas vous contrarier. Si vous me permettez, prenons donc les questions une à une.

- Je préfère, oui.

- Pouvez-vous me dire où nous sommes ?

- Chez quelqu'un que vous, les humains, pensez incarner le Mal.


Axel n'avait pas osé comprendre jusqu'ici.

- Vous êtes le Diable ! lui cria-t-il hystériquement.

- Non, non, dit l'homme en souriant, je suis juste l'un de ses... collaborateurs. Mon nom est Asmodée.

- Mais c'est pareil ! lui dit-il. Que me voulez-vous ?


Il soupira, l'air irrité.

- Ne recommencez pas, vous le savez bien : votre âme, une fois bien sûr que vous serez mort. Vous n'en aurez de toutes façons plus besoin car après la mort il n'y a rien, le néant. Dieu n'existe pas. Il s'agit d'une invention de l'humanité stupide !

- Et vous, que voulez-vous en faire, me faire rôtir éternellement en enfer ?

- Mais non. Ca aussi, c'est une pure invention des hommes. On ne fait pas brûler les âmes ici, elles sont trop précieuses aux yeux de mon... supérieur.

- Alors, pourquoi voulez-vous la mienne ?

- Pour la manger.

- Pardon ?

- Oui, le Diable se nourrit ainsi. En mangeant les âmes que j'ai pu acheter pour lui, il apprend tout des pensées des hommes. Plus il mange d'âmes, plus il connaît les travers qui se cachent dans les âmes des hommes. Petit à petit, il devient expert dans la façon dont il faut s'y prendre pour exercer ses tentations sur l'humanité...


La damnation de Faust ! Un pacte avec le Diable !

Dans quelle chausse-trappe l'avait attiré Ludovic ? Il regretta leur rencontre. Mais son besoin d'argent le rendit curieux :

- Et si je vous la vendais, cette âme, vous exauceriez mes vœux ?

- Pas si vite, lui dit-il. Je vais vous expliquer : d'abord vous me vendez votre âme que je ne prendrai que le jour de votre mort...

Axel l'interrompit, au risque de le fâcher de nouveau.

- Mais, quand vais-je mourir, puisque vous me promettez une santé rayonnante, ce sont vos propres termes ?

- Je n'ai pas fini mes explications, gronda-t-il. D'abord vous me vendez votre âme, mais cela ne suffit pas, ce n'est qu'un préalable, et je ne la prendrai qu'à votre mort. Il faut ensuite m'indiquer quelqu'un de votre famille dont je peux avoir l'âme tout de suite. A compter du moment où je dispose de cette âme, j'exauce tous vos vœux matériels et vous assure une santé sans faille pour une durée de 10 ans. Au bout de ces 10 ans, vous me redonnez un nom et je prolonge votre bail pour 10 ans, et ainsi de suite. Tant que vous me donnez des noms, nous continuons. Le jour où vous ne me donnez plus de nom au terme du bail de 10 ans, vous mourez et je prends livraison de votre âme.

- Vous dites « quelqu'un de ma famille ». Et une fois que je vous l'ai indiqué, ce quelqu'un...

- Il meurt, bien sûr, puisque je vous dis que cette âme-là, il me la faut tout de suite.

- Qu'entendez-vous par famille ?

- Ascendants, descendants, oncles, tantes, cousins germains, et le conjoint si l'on est marié. Votre femme ferait l'affaire, dit-il en se passant la langue sur les lèvres.

- Quelle horreur ! lui dit Axel. Ce sont des meurtres, ni plus ni moins ! Et comment meurent-ils, ces gens que l'on vous indique ?

- Ils meurent très soudainement et sans souffrance : dès que vous m'avez désigné la personne, le soir même une tache rouge apparaît derrière son épaule gauche et le lendemain il décède subitement d'un arrêt du coeur. Le médecin conclut toujours à une crise cardiaque.


Une question brûlait les lèvres d'Axel depuis un moment :

- Et le rôle de Ludovic, dans tout ça ?

- Monsieur Ludovic a un statut très particulier : au lieu de me livrer des membres de sa famille, il m'envoie des contractants potentiels, comme vous. Il est, en quelque sorte, l'un de mes pourvoyeurs et à ce titre bénéficie de la fortune et de la santé pour une beaucoup plus longue période.

Axel eut la nette impression qu'il lui mentait.


- Et si je décidais de signer, comment cela se passe-t-il ?

- Le plus simplement du monde, dit Asmodée. Je prépare le contrat, nous signons tous les deux et vous m'indiquez le premier membre de votre famille dont je peux prendre l'âme. Le lendemain il est mort et le bail part pour 10 ans. Vous vous sentez aussitôt en pleine forme et le crédit sur votre compte en banque devient inépuisable. Mais, prenez votre temps, réfléchissez, rien ne presse, je puis patienter.

- Certes, et si je me décide, je vous revois comment ?

- C'est extrêmement simple, dit-il : vous pensez à moi et dites mentalement « Asmodée, la malle du Diable ». La malle apparaît, et ensuite, vous connaissez le chemin.

- Alors, je peux partir, maintenant, demanda Axel ?

- Bien sûr. J'espère vous revoir Axel.


Axel allait franchir l'ouverture menant à l'escalier, qui avait réapparu, lorsque Asmodée lui dit d'un ton perfide :

- Une dernière chose, si vous parliez de notre conversation ou de quoi que ce soit concernant cette affaire à quelqu'un d'autre que Monsieur Ludovic, ma proposition deviendrait caduque et vous auriez un accident mortel. Cela m'ennuierait, non pas que vous me soyez sympathique mais parce que votre âme serait perdue pour tout le monde...

- Oui, oui, s'entendit dire Axel.


Il remonta l'escalier, hébété, incrédule et tremblant encore de peur.

Arrivé au dessus, le couvercle de la malle s'ouvrit et il sortit.

Ludovic l'attendait.


Continue Reading

You'll Also Like

29.7K 865 36
Trois jeunes filles de 17 et 18 ans qui ont toujours été ensemble depuis l'enfance. Le retour d'une de leur amie va tout changer. Entre hypocrisie...
7.9M 334K 82
Kathleen, une jeune fille qui va tenter de se suicider pour avoir perdu son unique amour, Chris. Mais, au dernier moment, un homme mystérieux à son r...
802K 48K 35
Jana Mierzwiak, 17 ans, se réveille sur une plage en compagnie d'autres gens de son âge, sans absolument savoir pourquoi. Cependant, elle va bientôt...