Sunrise

By Seki_ra

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Sunset tome 2 La suite de l'histoire d'Eren et Serys. Synopsis Γ  venir (si j'ai pas la flemme) More

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By Seki_ra



DemonsAlec Benjamin

HomesickNoah Kahan, Sam Fender

It is what it is Jamie Miller





DemonsAlex Benjamin


— Bonjour mon amour.

Un souffle familier agite les petites mèches de cheveux présentes dans ma nuque, m'arrachant à la contemplation du jardin.

— Bonjour, chuchoté-je.

Un baiser est déposé tendrement sur ma joue et deux bras m'enserrent la taille.

— Tu as bien dormi ?
— Oui.

Je me retourne vers celui qui s'enquiert de mon bien être en cette heure matinale.

— Et toi ? Dis-je en croisant mes bras dans sa nuque.

Je me hisse sur la pointe des pieds pour déposer, à mon tour, un baiser sur sa joue. Ses lèvres s'étirent en un sourire discret alors qu'il les déposent, cette fois, chastement sur mes lèvres.

— Pas assez.

En effet, maintenant que j'ai le loisir d'admirer son beau visage, je remarque que ses cernes sont plus marquées que d'habitude et que ses yeux expriment une grande fatigue.

— Tu es rentré tard hier soir ?
— Plus que je ne l'aurais voulu. Tu as bien fait de ne pas m'attendre pour te coucher.
— J'ai lutté, pourtant. Tu devrais songer à rentrer à des heures raisonnables de temps en temps.
— Je sais, je sais, soupire-t-il. Je n'avais qu'une hâte c'était de te retrouver, crois moi.

Je le crois.

Les bras de Liev Kovalyov me quittent tandis qu'il se retourne pour se faire couler un café. J'attrape le mien et pianote sur la céramique de façon distraite.

— C'est la dernière ligne droite, après tu pourras prendre quelques jours de vacances.
— J'en doute, répond mon petit-ami, déjà en train de consulter ses mails. Il reste encore beaucoup à faire.
— Oui, mais la partie la plus fun arrive, souris-tu.
— Tu as raison.

Il me fait un sourire fugace.

Ces dernières semaines, Liev passe plus de temps dans son bureau que chez nous. Entre rendez-vous d'affaires, entretien avec ses équipes et gestion de son entreprise, il n'a que peu de temps pour lui. Et par extension, pour nous.

Mais c'est un sacrifice que nous faisons tous les deux avec joie car StoInc, le studio de jeu vidéo créé par Liev, est sur la pente ascendante. La présentation du trailer aux Games Awards à suscité un énorme engouement. Les Games Awards est l'événement le plus important de l'année dans le monde du jeu vidéo, il récompense les jeux selon différents critères. C'est une cérémonie suivie dans la monde entier. Alors avoir un créneau pour diffuser notre trailer à été une grosse surprise. En l'espace de quelques jours, nous étions passé de studio totalement inconnu, à l'un des plus suivis du moment. Les comptes de StoInc sur les réseaux sociaux ont pris plusieurs dizaines de milliers de followers, les vues du trailer sur YouTube ont dépassé les un million et nous recevons tous les jours des coups de téléphone d'acteurs du secteur voulant investir. Même si Liev refuse systématiquement, il ne peut nier que c'est très flatteur et encourageant.

C'était même inespéré.

Grâce à cet énorme coup de pouce du destin, il à pu doubler ses effectifs. Nous sommes passés d'une petite dizaine d'employés à près de vingt-cinq. Ça reste un chiffre ridicule comparé aux centaines de salariés de gros studios, mais pour nous c'est une vrai évolution. Nous avons dû déménager nos locaux et apprendre à travailler de façon plus structurée.

Liev croûte sous le travail, il ne sait plus où donner de la tête. Mais c'est une belle récompense pour lui qui à travaillé d'arrache pied durant des années et dont la confiance en ses équipes ne s'est jamais tarie.

Il est épuisé, mais heureux. Alors je le suis aussi.

— Quel est ton programme aujourd'hui ? Je demande en sortant une cigarette de mon paquet.
— J'ai une visioconférence dans l'après-midi, il faut que je me penche sur le game design parce que Moira à terminé le village de Helldise. Et j'ai aussi 2-3 trucs à voir avec Alex. Et toi ?
— Faut que je brief Rose sur l'animation de Nyx, je dois terminer de corriger la gestion de la foule dans la cinématique d'intro et Alexeï voulait me parler d'un truc aussi.

Un long soupir m'échappe, j'ai encore une journée interminable qui m'attend. Je suis tiraillée entre l'envie de dormir une journée entière ou celle de passer cette même journée au bureau devant mon écran. Chaque jour qui passe j'aime un peu plus mon métier, mais j'aurais bien laissé à quelqu'un d'autre la charge mentale qui va de pair avec le poste de chef d'équipe.

— Peut-être qu'un jour on pourra se poser tous les deux en même temps à la maison, dis-je en souriant, quelque peu à regret.
— Comme tu l'as dit, c'est pour moi la dernière ligne droite, répond Liev en venant écarter une mèche de cheveux de mon visage. Après ça, on aura tout le luxe de passer la journée au lit.

Il me sourit.

— Au moins une fois dans l'année, ajoute-t-il.

Je ris. Je ne crois pas que cela se produise avant un bon moment, mais c'est la vie que nous  avons choisie tous les deux, et elle nous sied à merveille. Nous sommes heureux, et même si nous nous voyons peu ces derniers temps, nous apprécions le peu de temps que nous passons ensemble.

Je franchis la baie vitrée pour allumer ma cigarette et entends « Une cigarette n'est pas un petit déjeuner tu sais ! » au moment où je la referme.

Homesick — Noah Kahan, Sam Fender


Le reflet que me renvoie le miroir de ma salle de bain n'est pas des plus flatteurs. Moi aussi, je suis épuisée et je ne peux le cacher. Mais je vais tout faire pour. Une fois maquillée, seuls mes yeux quelque peu éteints me trahissent.Je me regarde un instant, appréciant ce petit plus que je n'avais pas encore la semaine dernière. L'âge avançant, mes cheveux étaient devenus presque blancs. Particularité génétique que j'ai hérité de mon père : passé les 20 ans, je perdais peu à peu la pigmentation autrefois blonde cendrée de ma chevelure. Lasse de cette couleur si fade, j'ai décidé de me les teindre. Le changement est subtil : je suis passé de blanc à un gris aux reflets argentés. Et, comme je suis une éternelle insatisfaite, j'ai également coupé mes longueurs pour arborer fièrement un carré plongeant plutôt court.

Je souris à mon reflet. Vieillir me va bien.

Je me sens bien dans ma peau, je suis heureuse au travail comme en amour, je suis une adulte autonome et je suis fière de la femme que je suis devenue. Mes 20 ans ne m'ont jamais paru si loin !

— Tu vas rentrer tard ce soir encore, non ? Je l'interroge en enfilant mon manteau dans l'entrée.

Le silence qui me répond me fait élever la voix en hélant Liev d'un « Chéri ! ». Il me rejoint en enfilant sa chemise immaculée, les lèvres encore humides et un peu de dentifrice en coin. Je répète ma question.

— Oui certainement, soupire-t-il. Je suis désolé.
— C'est pas grave, souris-je. Ça tombe plutôt bien, en fait. C'est la première soirée que Jean et moi avons de libre en commun depuis qu'il est rentré.
— Tu vas chez lui ou il vient ici ?
— Je sais pas encore, chez lui certainement.

Je termine de mettre mes chaussures et attrape mes clefs.

— Ça t'embête pas ?
— Pas du tout.

Liev me sourit tendrement puis baisse les yeux pour boutonner sa chemise. Un bel exemple de l'une des raisons pour lesquelles je l'aime. Non je ne parle pas de son torse pâle et sans défaut, mais plutôt de la confiance qu'il me porte et de l'indépendance qu'il me laisse avoir.

Je m'approche de lui et l'aide à fermer sa chemise.

— Merci, dis-je.

Deux doigts empoignent mon menton et me voila en train de relever la tête au moment où un baiser m'est arraché.

— Tu feras un bisou à Alya de ma part ?

Oh, voila une autre raison.

— Bien sûr.

J'attrape l'un de ses poignets pour fermer ses boutons de manchettes. Il me regarde faire en silence mais je vois du coin de l'œil qu'il ne me lâche pas des yeux. Une fois ma tâche terminée, je me hisse sur la pointe des pieds et donne un petit coup de langue au coin de ses lèvres pour lui retirer le dentifrice que j'avais repéré plus tôt.

Il hausse un sourcil sans se départir de son sourire.

— Dentifrice.

Il rit et ses grandes mains s'emparent de ma taille pour m'emmener à lui. Une tripotée de baisers est déposée sur mes joues et dans mon cou, et c'est ainsi que nous nous dîmes au revoir : entre rires et chamailleries.

Une fois arrivée au travail, je ne perds pas de temps pour m'atteler à tout ce que j'ai à faire aujourd'hui. Mon esprit est en ébullition et j'ai l'impression que mes épaules ne sont pas assez grandes pour tout ce que j'ai à penser.
Je suis devenue chef d'équipe suite au départ du seul animateur 3D plus ancien que moi, il y a un peu plus d'un an. Liev m'a proposé le poste mais j'ai sérieusement pensé à le refuser au vu de la relation que nous entretenions déjà. J'avais peur du regard des autres employés et surtout de ne pas être légitime. Mais mon patron, confiant quant à mes compétences, à su me convaincre. J'ai fini par me lancer. Ce ne fut pas une erreur, je suis faite pour ça. Pas spécialement pour diriger, mais plutôt pour coordonner.

Déjà dingue de mon métier, j'en suis retombé amoureuse comme au premier jour.

And here I am, un samedi matin, à bosser comme une forcenée pour ne pas sortir trop tard ce soir. C'est vraiment le soir où il faut que je parte avant 20 heure.

— Un café ? Demande une voix derrière moi.

J'enlève mes écouteurs dans lesquels joue The Small Print de Muse, et tourne ma chaise sur elle même pour faire face à celui qui a pour rituel de m'apporter un café tous les matins à la même heure.

— Salut Alexeï, dis-je en récupérant mon dû. Ça va ?
— Un merci ça t'écorcherait la gueule ?

Il s'assoit négligemment dans le fauteuil du bureau d'à côté, pour l'instant vide.

— Ouais ça va, dit-il en baillant. Crevé.
— T'es encore sorti hier soir ?
— Non, même pas. Tu fais quoi ?

Il s'affale de moitié sur mon bureau et regarde mon écran de droite le menton posé sur ses avants bras.

— Je bosse sur la cinématique d'intro.
— D'accord.
— Tu comptes finir ta nuit ici ?

Il hoche la tête en silence, les yeux déjà clos. Une envie irrépressible de fumer me prend après ma première gorgée de café.

— On sort ? Proposé-je en sortant mon paquet.

Mon ami acquiesce en baillant à nouveau. Nous déambulons dans les locaux du studio, bien plus grands maintenant, lorsque nous tombons sur Liev au détour d'un couloir. Au téléphone, il nous fait signe d'attendre une minute.

—... Oui. Je dois pouvoir faire ça avant ce soir, en effet. Excusez-moi une minute s'il vous plait, je vous reprends.

Il met son appel en attente d'une pression sur ses AirPods.

— Alex, t'as vu avec Nate pour le passage dont on a parlé hier ?
— On n'est pas tous enfermé ici nuit et jour, répond-il en levant les yeux au ciel. Non, pas encore.

J'observe Liev durant la brève conversation qu'il a avec son frère. Je m'inquiète un peu de le voir si soucieux, cet air préoccupé ne le quitte plus ces derniers jours et j'en connais la cause. Mais je ne peux pas faire grand-chose pour l'aider.
Malgré ses cernes et le pli entre ses sourcils, sa beauté n'est en rien altérée. Je l'ai quitté ce matin vêtu d'une simple chemise blanche, il porte maintenant la veste de costume bleu marine que j'aime tant.

— Tiens moi au courant, d'accord ?

Je reviens sur terre au moment où mes pensées divaguaient vers un Liev endormi dans notre lit ce matin, alors que je caressais ses cheveux noirs étalés en bataille sur l'oreiller.

Il nous quitte sans un regard pour moi mais lorsqu'il me dépasse, ses doigts se glissent discrètement dans ma main pour la serrer dans la sienne.
Notre relation n'est pas secrète, mais plutôt officieuse. Quelques personnes sont au courant, nos collègues dont nous sommes les plus proches pour la plupart. Mais nous ne nous affichons pas au travail. Ça n'est pas un lieu propice aux démonstrations affectueuses et nous sommes tous les deux pudiques sur nos vies privées.

Alexeï et moi franchissons la porte menant à l'extérieur. Je m'enroule encore plus dans ma grande et chaude écharpe lorsqu'une bourrasque glaciale vient me fouetter le visage, emmenant avec elle les premières effluves printanières. L'humidité de la rosée matinale se dépose sur mes joues, mon nez renifle l'odeur de l'herbe fraîchement tondue et je lève les yeux vers le ciel bleu parfaitement dégagé de cette fin de matinée.

Mon ami et moi marchons quelques mètres pour nous libérer de l'ombre du bâtiment et profiter du grand soleil.

— Il va bien ? Demande-t-il en désignant du menton l'endroit d'où nous venons.
— Ça va, il est juste débordé.
— Et toi ça va ?

Je ris.

— Mais ouuiiii, dis-je d'une voix lasse. Tu t'inquiètes ?
— Non non, mais vous avez tous les deux des têtes de déterrés et vous vous calculez pas, alors je voulais être sûr que ça allait.
— On ne s'est jamais vraiment calculé au boulot, souris-je.
— C'est vrai. Si ça va alors...

Un malicieux sourire tord les coins de sa bouche.

— ... Tu m'accompagnes à l'Anthem ce soir ?

Je soupire en levant les yeux au ciel. Cela fait bien un mois et demi que mon beau-frère insiste pour que je sorte avec lui un soir. J'ai toujours refusé mais il ne perd pas espoir et s'entête à me le proposer dès qu'il y va. C'est devenu un rituel pour nombre de nos collègues de se retrouver dans ce bar le soir pour boire un verre tous ensemble et je les ai déjà accompagnés une fois.

— J'ai arrêté de compter le nombre de fois où t'as refusé. C'est Liev qui est jaloux ? Se risque-t-il.
— Mais non, pas du tout. J'ai juste pas trop envie ces derniers temps c'est tout. Toi t'as élu domicile là bas, mais moi c'est pas mon truc de sortir tous les soirs.
— Et...
— N'insiste pas, le coupé-je. Je ne suis pas libre de toute façon ce soir.
— Et qu'est-ce que t'as de mieux à faire ? Passer la soirée toute seule avec ton chat ?
— Alors déjà, c'est un programme qui me tenterait bien plus que d'aller a l'Anthem, mais c'est pas ça. Je vois Jean ce soir.
— Ben ramène le aussi !

Je refuse une nouvelle fois.

Plus tard, je termine de discuter avec ma collègue de l'animation de l'un des personnages principaux, tout en checkant régulièrement ma montre. Si je ne veux pas arriver trop tard chez Jean, il faut que je me dépêche de terminer. Je boucle encore deux-trois petites choses avant d'éteindre mon ordinateur et de filer vers le bureau de mon patron.

Je toque deux fois sur la porte en verre et rentre sans attendre de réponse. Liev regarde intensément son écran, une main sur la souris et l'autre rabattant de façon lasse ses cheveux en arrière. Il est enfoncé dans son fauteuil lorsqu'il décolle ses yeux bleus de son écran et m'aperçoit. Un sourire fend ses lèvres et il se lève pour venir à ma rencontre.

Je lui souris à mon tour en mourant d'envie d'aller l'enlacer, mais je me retiens car son bureau est entièrement vitré. De l'extérieur on ne distingue que des formes floues, mais notre règle est implacable : pas de démonstration affective au travail. C'est comme ça que nous fonctionnons et définitivement la raison pour laquelle nous fonctionnons parfaitement ensemble.

— Tu rentres ? Demande-t-il en prenant appuie sur son bureau, les bras croisés.
— Oui j'ai terminé une bonne partie de tout ce que j'avais à faire.
— D'accord, ma chérie.

Je lui souris tendrement.

— Ça va aller pour rentrer ce soir ? Je demande, soucieuse. Ne prends pas le volant si tu es trop fatigué, d'accord ?
— Ne t'inquiètes pas, opine-t-il.

Il se lève et s'approche à quelques pas de moi. Il tend la main et vient effleurer ma joue du bout des doigts.

— Fais attention ce soir, murmure-t-il.
— On ne bougera pas de son appartement, ne t'inquiètes pas.
— Hum, répond-il, songeur. Tu vas me manquer.

Mon sourire ne quitte pas mes lèvres. J'ai hâte de revoir mon meilleur ami, mais Liev me manque tous les jours en ce moment.

— Je suis sûre que je serais rentrée avant toi.
— Y a des chances oui, rit-il.

Son pouce caresse ma joue et je maudis cette fichue distance que nous nous imposons ici. J'ai envie de l'embrasser et de le serrer dans mes bras.

Paradoxalement, c'est cette distance qui a fait que nous nous sommes rapprochés au début. Liev à toujours su respecter ma vie privée et mon espace, et c'est certainement ce petit détail qui a fait que je suis tombé sous son charme. Il n'a jamais forcé les choses entre nous et a été patient. Très patient. Nous avons commencé à nous fréquenter deux ans après mon entrée à StoInc, les choses se sont faites en douceur, à coup de café portés à l'un ou à l'autre, de petits sourires échangés, puis de longues conversation téléphonique jusque tard dans la nuit.

Quand il compris que son intérêt était réciproque, il m'a invité à dîner en digne gentleman qu'il est. La premier baiser n'est arrivé qu'un mois après ça. J'en mourrais d'envie dès le premier soir, mais je me suis souvenue que la hâte n'avait jamais rien apporté de bon à ma vie sentimentale.  Alors j'ai été patiente, moi aussi. Notre différence d'âge nous rebutait tous les deux, au début. Quand j'ai commencé à le fréquenter, il avait déjà 31 ans. Je n'en avais que 24.

Liev jette un coup d'œil par-dessus mon épaule, probablement pour s'assurer que personne ne nous regarde. Ça ne doit pas être le cas, car il franchit la distance qui nous sépare et encercle ma taille de ses grandes mains. C'est dans ces moments que je me rends compte que 1 mètre 90, c'est très grand. Il se courbe pour se rapprocher de mon oreille.

— Ne t'endors pas avant que je rentre ce soir, murmure-t-il.

Je frémis au sous entendu à peine voilé de son timbre grave. Je m'empare de ses lèvres en souriant, mon baiser étant ma réponse, puis je m'éloigne à regret et je pose ma main sur la poignée de la porte.

— Je t'aime, me dit-il en souriant lorsque je me retourne vers lui.
— Moi aussi.

Je quitte la pièce, la tête pleine de ces yeux bleus brûlant d'amour pour moi.

It is what it is — Jamie Miller


Un taxi me dépose au pied de l'immeuble de Jean Kirschtein, en plein centre de Stohess. Le quartier qu'à choisi mon ami n'a rien de défavorisé, bien au contraire. C'est un coin de la ville que je n'ai presque jamais visité, tant il est huppé. Je suis plutôt habituée aux logements étudiants de l'autre côté de celle-ci. Enfin ça, c'était avant d'emménager chez Liev.

L'ascenseur m'emmène au dernier étage et je me plante devant la porte d'entrée. Je toque rapidement sur la porte en bois ciré et probablement plus cher que ma voiture, et insère le double des clefs qu'il m'a donné en emménageant dans la serrure. Je me faufile à l'intérieur. Un salon silencieux m'accueille. Je fais quelques pas et me déshabille, posant négligemment mon manteau sur l'accoudoir du canapé huit place trônant au milieu de la pièce. Je suis si peu venue dans cet appartement que je ne m'y sens pas chez moi — pas comme dans le pavillon qu'à occupé Jean les quatre dernières années.

Le salon à une vue imprenable sur la ville grâce aux vitres prenant un pan entier de mur. Le soleil se couche, baignant d'une lumière orangée la pièce et le jardin de toit s'étendant devant moi.

— Mais qui voilà !!

La voix familière aux accents chaleureux de ma personne préférée retentit dans la pièce. Je quitte ma position devant les fenêtres pour me diriger vers lui. Il ouvre les bras, dans lesquels je me jette allègrement. Il rit et embrasse mes cheveux.

— C'est nouveau ça ? Dit-il en prenant une mèche de cheveux entre ses doigts.
— Ouais, j'ai coupé aussi. T'aimes bien ?
— Très. Ça te va bien.

Il me relâche et se tourne vers les escaliers en verre qu'il vient juste de descendre.

— Chérie ! Hèle-t-il. Viens voir, y'a une surprise pour toi dans le salon !
— Tu lui as pas dit que je venais ? Chuchoté-je en me cachant derrière lui.

Il secoue la tête sans se départir de son sourire. Des petits pas résonnent et j'entend la petite voix de la fille de Jean.

— Tu m'as enfin acheté mon poney papa ? S'écrit-elle.

Je ne l'entend plus, j'imagine qu'elle s'est arrêtée en haut des escaliers.

— Euh, oui c'est ça, ton poney préféré est là ! Répond Jean en étouffant un rire.

Je lui donne un coup de poing dans le dos et passe ma tête à sa droite pour apercevoir Alya. Cette dernière inspire d'un coup et descend les marches à la hâte avec son père en fond sonore la priant de faire doucement. Elle se jette dans mes bras en criant un « chouuuuuu ! » d'une voix aiguë propre aux enfants. La petite fille à encore les cheveux humides, si bien qu'elle me mouille les joues en me câlinant, et est déjà en pyjama.

— Comment va ma petite fille préférée ?
— Très bien ! Répond-t-elle, enjouée. Et toi ça va, Serys ?

Je hausse les sourcils à l'emploi de mon prénom car c'est la première fois que je l'entends dans sa bouche.

— Non c'est chou son prénom, mon cœur, rectifie Jean.

Je hoche la tête en lui donnant raison.

— Mais c'est toi qui l'appelle comme ça des fois hein.
— Alors je pense que tu te trompes, parce que c'est son papa et sa maman qui l'ont appelé Chou.
— Oui, oui, papa personne ne te croit ici.

Je m'étrangle et me contiens du mieux que je peux pour ne pas exploser de rire.

— Hum, on parle pas comme ça à son papa, Alya, dis-je en reprenant mon sérieux. C'est pas gentil d'être méchant.

La petite fille fait la moue et marmonne un « pardon papa » avant d'agripper ma jambe.

— Ouais, ouais, écoute Chou, dit Jean. Vas mettre ton manteau, mamie va pas tarder.
— C'est toi qu'il faudrait qu'elle écoute, murmuré-je à son oreille. Elle reste pas avec nous ?

Alya traîne des pieds jusqu'à sa chambre pour aller chercher son manteau. La petite fille est le portrait craché de son père. Le même châtain particulier orne ses longs cheveux bouclés, ses yeux sont de la même couleur et la même expression boudeuse est plaquée sur son visage dans des moments comme celui-ci. Du haut de ses 4 ans et demi, je me demande bien quand est-ce qu'Aly commencera à ressembler à sa mère - bien que je ne l'ai jamais vu.

— Non j'ai demandé à ma mère de la prendre pour ce soir. J'avais besoin d'une vraie soirée off.
— Oulah, dis-je en haussant les sourcils. Ça va pas ?
— Oh si, si. Mais elle est difficile en ce moment.

Il soupire et j'aperçois l'espace d'un instant la lassitude de la parentalité sur ses traits.

Jean occupe un poste à responsabilité dans l'une des plus grandes entreprises du pays. Son métier de Responsable Export l'a contraint à partir deux mois à l'étranger pour étudier le marché, dans le but de peut-être ouvrir une filiale là bas. Il a embarqué sa fille avec lui, bien incapable de passer autant de temps sans elle.
Mais mon ami à 28 ans et n'a jamais vécu la vie sans souci de quelqu'un de son âge. Il a été père si tôt que les responsabilités lui sont tombés dessus à un âge où on s'amuse encore à ne pas penser aux conséquences. 

— Ça a été là bas ? Elle n'a pas été trop dépaysée ?
— Non elle s'est éclatée, sourit-il. On est allé tous les jours à la mer, elle était trop contente.
— Tant mieux.

Je fixe son visage fraîchement rasé sans pouvoir m'empêcher de noter comment sa fatigue mentale transparaît sur son visage. Ses cheveux ont poussé, tiens. Ça lui va bien, même s'il ne s'est pas coiffé. Sa chemise rentrée dans son jean n'est pas repassée et est même tachée sur la manche. Je vois bien qu'il a essayé de cacher la tâche de sauce tomate en les remontant sur ses avants bras.

Je passe mon bras dans le creux du sien et l'entraîne vers la cuisine.

— Allez ! On va te changer les idées, et tu verras, demain matin tu regretteras d'avoir autant bu, mais on va se marrer.

J'ouvre un placard à la recherche de verres et d' alcool — n'importe lequel. Jean rit dans mon dos et pose ses avants bras sur le bar, tout en guettant les escaliers dans l'attente de sa fille.

— Va pour une soirée black out.
— Oulah on emploie les grands mots !

Il rit de plus belle, les yeux toujours rivés à sa gauche.

— Aly ! Dépêche, mamie arrive !
— Je trouve pas mon doudou papa !!
— Je reviens, me dit-il.

Je continue de fouiller les placards et je finis par mettre la main sur une bouteille de vin. J'en verse dans deux verres et les mets de côté en attendant qu'Alya s'en aille.

— On se sera pas beaucoup vu ce soir, dis-je à la petite fille déjà chaussée.
— Non, répond-elle, boudeuse.
— Tu as de gros bisous de tonton Liev, mon chat. La semaine prochaine tu voudras venir à la maison ?
— Oh oui oui ! J'ai trop envie !

Elle se frotte les yeux de fatigue et se tourne vers son père qui ferme son manteau.

— Allez on va retrouver ta grand-mère en bas.
— Tu diras à tonton Liev qu'il me tarde, d'accord maman ?

Mon cœur fond.

— Oui chaton, promis. On se voit bientôt.

Je l'embrasse sur la joue en la serrant dans mes bras, et ils disparaissent derrière la porte. Alya ne m'appelle que très rarement « maman ». C'est principalement quand elle est très fatiguée, ou triste et qu'elle quémande réconfort et protection. Elle sait que je ne suis pas réellement sa maman, mais je suis sa seule figure maternelle. Alors parfois, elle flanche.

Jean lâche un grand soupir en refermant la porte derrière lui. Il se relâche enfin. Il n'est plus le papa. Il redevient Jean, l'homme.

— Allez sers moi à boire !

Je lui tends son verre déjà plein, qu'il boit cul sec. J'arque un sourcil, sur le point de lui signifier que c'est du vin et pas un whisky, mais je m'abstiens. Je trempe mes lèvres dans mon verre, le jaugeant discrètement.

— Alors ce séjour ? Tu me racontes ?
— J'ai bossé, bossé, bossé, dit-il en tendant son verre pour que je le serve à nouveau. C'était très cool, même si j'avais le mal du pays.
— Tu m'étonnes... Je pense pas que je pourrais rester aussi longtemps loin de chez moi.
— J'avais pas tellement le choix, et puis j'aime mon boulot. Mais bon c'est vrai que c'est pas le plus simple avec la petite.
— Tu comptes pas repartir de si tôt, j'espère.
— Laisse-moi arriver, rit-il. Ça fait pas une semaine que je suis rentré. Mais...

Il te sourit.

— C'est possible que je parte plus souvent qu'avant. Ça dépendra des résultats de l'étude de marché.

Je fixe mon verre déjà presque vide et marmonne un « d'accord ». Jean rit et vient me rejoindre derrière l'îlot central. Il passe un bras par-dessus mon épaule et cette fois ci c'est lui qui me sert à boire.

— C'est juste une possibilité, fais pas cette tête. Et tu sais bien que, si c'est pour toi, je reviendrais aussi souvent que possible.

Il embrasse ma tempe affectueusement.

— On est une famille maintenant.

J'acquiesce en souriant. Oui, nous le sommes. Nous n'avons jamais été aussi proche même si, paradoxalement, nous ne nous voyons pas aussi souvent qu'il y a quelques années.

— Allez viens, on va fumer dehors, m'enjoint-il.

Je sors une cigarette de mon paquet et lui en tend une. Tandis qu'il nous roule un joint, je fais remarquer :

— On va se cailler.

Il relève la tête et sourit, fier.

— J'ai des lampes chauffantes. Tu sais comme dans les bars, à l'extérieur.
— Monsieur ! Le charrié-je. On fait plus partie du même monde.
— Je dois vraiment te rappeler que tu te tapes ton patron et que, donc, tu profites de son argent ?

Je ris en vidant mon verre et lui jette la seule chose que je trouve à portée : un torchon. Qui retombe mollement sur son épaule.

— Liev n'a pas autant d'argent que ça. Ça fait pas longtemps que StoInc marche bien.

Il mime le fait de jouer du pipeau, mais je n'essaie pas de le convaincre du contraire. Il se fiche royalement de savoir si Liev à de l'argent ou non, tout ce qui lui importe c'est de me savoir bien avec lui.

Jean me missionne pour aller chercher deux gros plaids et quand je le rejoins dehors il est en train de tirer deux transats vers le centre de son jardin (ou de son toit ?). Il les place côte à côte, entourés de lampes chauffantes et dispose la bouteille de vin à leur pieds. Je m'installe dans celui de gauche et regarde le ciel. Il est noir, parsemé d'étoiles. On peut entendre au loin le début de la vie nocturne ; les klaxons, bruits de moteurs ou de musiques.

Mais nous sommes dans notre bulle silencieuse. Au moins pour quelques minutes.

— Bon alors, commence mon ami en tirant la première taffe du joint. Où est-ce que t'en es dans ta vie ?
— Tu parles comme si on s'était pas vu pendant un an, ris-je.
— Tu parles jamais de toi quand on est loin. Ça va avec ton mafieux ?

Je n'arrive pas à retenir mon rire. Jean l'a toujours appelé comme ça sans que je n'en comprenne la raison.

— Il vient d'une famille russe et il se balade toujours en costard. C'est un mafieux.
— Dis pas de mal de lui ou je t'envoie son tueur à gage.

C'est à lui de rire cette fois. Son bras se tend vers moi, le joint entre son index et son majeur.

— Tout se passe bien oui, dis-je en l'acceptant. Il est débordé donc on ne se voit pas beaucoup en ce moment. Mais il est super avec moi.
— Tant mieux, c'est le principal. Je suis heureux que ça se passe bien entre vous.

Je lui jette un regard. Ses bras sont croisés derrière sa tête et il regarde le ciel.

— C'est dommage qu'on soit en ville, on aurait vu plus d'étoiles sans toutes ces lumières.

J'expire la fumée dans l'air humide.

— Et toi, t'en es où dans ta vie sentimentale ?
— Nul part.

Il expire en riant.

— J'ai pas le temps pour ça. Ma priorité c'est Aly.
— Certes. Mais il faut aussi que tu vives pour toi. Tu te mets entre parenthèses depuis trop longtemps.
— Je sais, je sais. Mais pour l'instant j'ai pas besoin de plus que vous deux. Ça me convient très bien.
— La semaine prochaine je prends Alya pour une journée et une nuit, et toi t'en profites pour sortir avec tes potes, ok ?
— Ou sinon je peux m'incruster pour la soirée pyjama.
— Ça fait longtemps qu'on en a pas fait une, oui, ris-je. Mais cette soirée là, tu me feras le plaisir de la passer dans un bar et de ramener une meuf ici.

Jean éclate de rire et s'assoit sur son transat, tourné vers moi. Ses cheveux, d'habitude maintenus en arrière par de la cire, lui tombent devant les yeux.

— Ça fait tellement longtemps que j'ai plus vu personne... Je suis rouillé maintenant, dit-il avec un faible sourire.

J'ai l'impression que son célibat dure depuis trop longtemps, il en a perdu sa confiance en lui.

— Mais non chou. C'est juste que tu te dédie totalement à Alya, ce qui est normal, mais il ne faut pas que tu t'oublies non plus. C'est important.
— Tu as raison, soupire-t-il.

Il nous sers un autre verre et récupère le joint.

— Bon sinon ? Poursuit-il. T'as rien à me raconter d'autre ?

Aïe. Bon. Je n'avais pas particulièrement envie d'aborder le sujet si rapidement.

— Oh, euh, ben en fait, y avait bien un truc que j'avais envie de te raconter, si.

Je n'en ai parlé encore à personne. Ce n'est pas comme si j'avais beaucoup d'amis, et encore moins des amis susceptibles d'écouter cette anecdote là. Je n'ai presque pas gardé contact avec mes amis de la fac, à regret d'ailleurs, mais la vie est faite ainsi. Aujourd'hui je n'ai plus que Jean à qui me confier. Et, finalement, il en a toujours été ainsi.

J'ai bien pensé à téléphoner à Liam, mais il a tant d'autres choses à penser en ce moment, que je ne voudrais pas le déranger.

— C'est rien de fou, dis-je en sirotant mon verre de vin. Mais j'avais envie d'en parler. Enfin, à toi.
— Oui ben je suis là, je t'écoute je te signale.
— Y a un mois et demi je suis allé au pot de départ de l'une de mes collègues. C'était dans un bar dans lequel j'étais jamais allé encore. Bref c'était sympa, y a juste un léger détail qui m'a ruiné ma soirée.
— Ruiné ? Rien que ça ?
— Ouais...

Jean est pendu à mes lèvres, dans l'attente de la chute de cette histoire.

— Eren était là.

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