ALONE [ en réécriture ]

Par queen_slana

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Chaque jour de son existence était une épreuve. Le quotidien de Lola consistait à se cacher en permanence. En... Plus

Prologue
Chapitre 01: Rencontre
Chapitre 02: La routine
Chapitre 03: Certains cauchemards ne prennent jamais fin
Chapitre 04: Hôpital de merde
Chapitre 05: Tout ça pour une note
Chapitre 06: Parfois il faut savoir se battre
Chapitre 08: Disparais
Chapitre 09: Mais c'est la vie
Chapitre 10: Bien plus qu'une simple sortie
Chapitre 11: Un jeu dangereux
Chapitre 12: Retrouvailles
Chapitre 13: Match mouvementé
Chapitre 14: Super soirée
Chapitre 15: Gueule de bois
Chapitre 16: Élégante nouvelle
Chapitre 17: Ne surtout pas s'attacher
Chapitre 18: Nuit agitée
Chapitre 19: Jeu ou réalité ?
Chapitre 20: Concert terrorisant

Chapitre 07: Où suis-je ?

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Par queen_slana

Je traine mes baskets en tripotant une feuille que j'ai ramassé dans ma main.

La pluie a fait gonfler mes cheveux et je suis trempée jusqu'aux os.

J'adore la météo au Canada...

Je regarde mes pas s'enfoncer dans la boue quand je repense au dernier cours que j'ai eu avec Noa.

J'ai réussi à éviter ses questions débiles en prétextant ayant un contretemps mais je sais qu'il continuera à insister.

Je n'aime pas parler de ma vie.
À chaque fois que je le fais j'ai l'impression que la personne en face de moi a pitié ou n'en a tout simplement rien à faire.

Mes yeux se lèvent en direction du ciel orangé.
C'est magnifique.
C'est des petites choses comme ça, mais ça fait du bien à regarder et ça m'apaise.

Une voiture m'éclabousse d'un grand jet d'eau en prenant un virage.

Je suis maudite.

J'essore le coin de mon tee shirt en reniflant.

Je vais sûrement être malade et tant mieux. Avec un peu de chance je pourrais rester chez moi demain.

Je ne sais même plus où je vais, je me suis complètement perdue.

En empruntant un passage piéton, je suis tellement dans mes pensées que j'en oublie de regarder autour de moi.

Quand je tourne enfin ma tête vers la gauche, une voiture s'approche dangereusement de moi.

Je suis figée, je ne bouge absolument pas.

La mort ne m'effraie pas, elle m'attend.

La voiture est maintenant a un mètre de moi, je ferme les yeux pour enfin me laisser porter de l'autre côté mais je me fais bousculer et tombe à la renverse juste avant.

La voiture passe juste à côté et continue son chemin tandis que je suis à moitié allongée par terre avec un homme qui pensait me sauver.

Il a un casque noir posé sur ses épaules et des cheveux bruns légèrement bouclés.

Oh non...

- Tu me remercies même pas ?
Il passe une main dans ses cheveux trempés et secoue son sweat rempli de feuilles collantes.

Je roule les yeux mais essaye de me relever difficilement à cause de ma jambe douloureuse.

- Je te suis pas redevable ok ? Je t'ai rien demandé à la base.

- Tu pouvais pas juste dire « merci » et te barrer ?

Son air hautain me donne enfin de le frapper au visage mais en réalité il pensait juste bien faire.

- M-merci...Thomas. murmuré-je en regardant mes pieds.

Mes vêtements sont devenus marrons et des morceaux de brindilles se cachent sûrement dans mes boucles.

Je m'apprête à tourner les talons mais je retombe au sol en m'appuyant sur ma jambe gauche.

Elle a subie trop de choses en quelques semaines, et maintenant elle ne peut plus supporter mon poids.

- Qu'est ce que tu fous ? m'interroge-t-il en arquant un sourcil.

Je l'ignore et essaie à nouveau de m'appuyer sur ma jambe.

- Aïe...

Bien évidemment je retombe par terre sous les gloussements de cet enfoiré.

Mes mains sont remplies de blessures.

Il lève les yeux au ciel et me tend une main après m'avoir longuement jugé.

- Bon monte, tu fais pitié.

- Monter où ? je l'interroge en ignorant sa main.

- Tu veux monter où à part sur mon dos bouffonne ?

Je fais la moue, gênée par sa proposition.
Je le connais à peine, je vais pas monter sur lui.

- Ok, bon j'te laisse pourrir ici alors.
Il se retourne et enfonce ses mains dans ses poches.

- Non... attends s'il te plaît.

Ça m'énerve de devoir le supplier mais je veux pas rester à moisir ici.

- Ah, tu as besoin de moi finalement ?

- Tais toi. lui ordonné-je en attrapant sa main.

Je reste perplexe avant de monter.

- Mais... je suis très lourde.

- Putain monte.

- Tu vas jamais réussir à supporter mon poids. prononcé-je en baissant les yeux.

- Je vais à la salle tous les jours.

- C'est impossible que t'y aille chaque jour de la semaine puisque-

- Ta gueule et monte, j'ai pas toute la journée. m'interrompt-t-il en soufflant.

Je soupire et m'appuie sur ses épaules puis m'assoie sur son dos en serrant les dents.

- Tu vois que-

- Tais toi. me crache-t-il sans me laisser finir ma phrase.

J'ai envie de lui arracher chacun de ses cheveux un par un de là où je suis mais je me retiens puisque c'est mon seul moyen de transport.

Il marche lentement jusqu'au bout de la rue dans un silence complet avant d'arriver à un croisement.

- T'habites où ?

- Je sais pas, j'me suis perdue. lui avoué-je en remarquant soudainement que je suis fichue.

- T'es sérieuse là ? Descends, tu vas te démerder.

- Non, s'il te plait je peux vraiment pas marcher. le supplié-je en m'accrochant un peu plus à ses épaules.

- J'en ai rien à foutre. Tu descends.

Je pousse un long soufflement d'agacement et descends avec précautions.

Il me lâche brutalement, heureusement je m'accroche à un poteau.

Il remet son casque sur ses oreilles et s'apprête à partir.

Je me laisse tomber dans la boue et enfonce mes ongles dans mes jambes.

Je sais pas comment je vais rentrer chez moi et j'ai hyper froid.

Je remarque qu'il me fixe toujours.

- Bon casse toi maintenant ! m'exclamé-je, débordée par les événements.

Des larmes d'épuisement dévalent sur mon visage déjà mouillée par la pluie.

- T'es vraiment une gamine à pleurer pour tout et n'importe quoi.

- Laisse.Moi.Tranquille. grincé-je entre mes dents.

Il marmonne un truc incompréhensible et attrape son téléphone d'un geste rapide en soupirant.

- Ton adresse ?

- 6 rue Garcia.
J'ai répondu beaucoup trop automatiquement alors qu'il pourrait potentiellement me cambrioler.

Il tape quelque chose sur son téléphone avant de m'attraper par le bras pour me remettre debout.

- Aïeee ! m'écrié-je en sentant ma jambe lâcher.

- Mais ferme ta gueule !
Il me fait à nouveau grimper sur son dos.

J'agrippe ses épaules et enfonce mes ongles dans sa nuque.

Il pousse un cri de douleur qui me fait rire.

- Tu sais que je peux te lâcher à n'importe quel moment ?

Sa phrase me fait directement arrêter de rire parce qu'il a raison.

Un appel de « Diane » apparaît sur son téléphone mais il l'ignore.

- T'ignore les filles après avoir eu des aventures avec elles ?

- Tu ferais mieux de la fermer, c'est ma daronne.

Je fronce les sourcils même si je sais qu'il ne peut pas me voir.

- T'appelle ta mère par son prénom toi ?

- Tu veux pas te mêler de ta vie ? Tu me fais chier actuellement.

Je me mords la lèvre inférieur de rage et retiens ma main de le frapper dans la nuque.

Il regarde attentivement le GPS et emprunte chacune des rues qu'il lui dit de prendre.

- Pourquoi tu marches aussi lentement ?

- Pourquoi tu la fermes pas ?

Je fais claquer ma langue contre mon palais pour montrer mon agacement envers son attitude.

Je peux voir qu'il reste encore dix minutes de trajet sur son portable.

Ça va être long.

Je m'ennuie, alors je vais le pousser à bout.

Je commence par tripoter ses cheveux mouillés.

- Touche pas, c'est précieux.

- Tes cheveux dégueulasses là ?

Je pouffe en l'entendant souffler.
Je le déteste tout autant qu'il me fait rire.
Il s'énerve pour un rien.

Je continue mon petit jeu et enlève son casque pour le mettre sur mes oreilles.

- T'écoute de la musique de dépressif ou quoi ?

Il m'arrache le casque et le replace sur ses oreilles d'un mouvement brusque.

- La prochaine fois que tu traites PNL de dépressif j'te jette par terre.

- Ok, ok, pas besoin de t'énerver. déclaré-je en souriant.

- T'écoute quoi toi ? Que je puisse te juger un peu.

- Hum-

Je marque une pause pour faire mine de réfléchir.

- J'écoute souvent The Neighbourhood ou Lana Del Rey.

Il éclate de rire.

- Et c'est moi que tu traites de dépressif ?

Je lui donne un coup dans la colonne vertébrale mais il continue de ricaner.

Je commence à reconnaître le quartier, signe que nous arrivons bientôt à destination.

- C'est là. Je pointe du doigt ma maison qu'on peut apercevoir au loin.

Il traverse et s'approche de la maison à grands pas.

- Je suis lourde hein ? l'interrogé-je, préoccupée par mon poids sur son dos.

- Je porte bien plus à la salle.

J'hausse les sourcils en remarquant qu'il se vante dès qu'il en a la possibilité.

Nous sommes enfin arrivés devant chez moi.

La porte s'ouvre sur mon père et je saute rapidement de son dos même si ça me vaut une horrible douleur dans la cuisse.

- C'est qui ? aboie mon père en fronçant les sourcils.

- Euh c'est juste un ami, j'avais mal à la jambe alors il m'a raccompagné.

Mal à la jambe par ta faute d'ailleurs.

- On est pas ami. me chuchote Thomas en gardant le regard rivé sur mon père.

Je lui donne un coup de coude discret en appréhendant la réaction de mon père.

- Ne rentres plus jamais avec un garçon, tu aurais pu nous appeler.

Comme si tu serais venu me chercher.

- Oui, désolée.

J'essaie d'écourter le plus possible la conversation.

- Au revoir monsieur. annonce Thomas avant de me chuchoter à nouveau:

- Ton père il fait badder.

Si tu savais.

Il replace son casque et fait demi-tour.

Je soupire et rentre chez moi sous le regard insistant de mon père.

- C'était qui ?

- Mais un ami j'ai dis.

- Ne le fréquente plus, on dirait un délinquant. conclut-t-il avant de remonter dans sa chambre d'un pas lourd.

Un gars qui porte un casque et qui a un sweet noir c'est un délinquant pour toi ?

Je comptais pas le fréquenter de toute manière.

Je boîte difficilement jusqu'à ma chambre en trainant mon sac par terre.

Ma porte claque et je me laisse tomber par terre.

Tu es tellement lourde.

Il doit te trouver encore plus grosse maintenant.

Les autres filles qu'il fréquente doivent sûrement être bien plus légères.

Je passe mes mains sur mon ventre en le serrant de toutes mes forces.

Maigris.
Maigris.
Maigris.

Je secoue la tête en me tordant sur place.

Je baisse les yeux en direction de mon ventre et mes cuisses.

Une larme au coin de mon oeil, je donne raison aux paroles de mes parents.

Je suis grosse, c'est tout.

Je ferme les yeux un moment en relâchant tous mes muscles.

Même quand j'essaie de ne penser à rien, il y a toujours des pensées parasites qui se promènent dans ma tête.

Je reste par terre un moment en me demandant à quel moment tout a vrillé dans ma vie pour que je me retrouve à chialer sur le sol chaque jour.

Tout allait si bien avant, avant qu'elle s'en aille.

Je frotte mes yeux et me relève en m'appuyant sur ma seule jambe encore fonctionnelle.

Ça ne sert à rien de s'acharner sur son sort.

Je m'appuie sur chacun des meubles de ma chambre pour me déplacer et ranger mes affaires du lendemain.

En regardant mon emploi du temps je pousse un soupir de soulagement en apercevant que je n'ai pas de cours avec Noa demain.

C'est pas que je ne l'apprécie pas, c'est surtout que j'ai envie de rentrer chez moi.

Enfin, non pas vraiment.

Même chez moi je n'ai pas envie de rentrer.

On peut dire que je vais en cours pour fuir ma maison et que je rentre pour fuir les cours.

Mais c'est rien, c'est la vie.

Je prétexte ne pas avoir faim et me couche directement, le ventre vide.

Je suis si fatiguée que pour une fois je ne mets qu'une heure à m'endormir.

*

Je cite les devoirs que j'aurais à faire en rentrant chez moi tandis que le paysage défile sous mes yeux.

Une boule se forme dans mon ventre quand je m'aperçois que j'aurais trois évaluations cette semaine.

Je me vois déjà en train d'angoisser à cause du temps qui me manquera et ma procrastination qui ne fait qu'augmenter de jours en jours.

Je sais même pas pourquoi je me mets dans des états pareils pour des notes.

De toute façon, peu importe le résultat ça ne sera jamais assez pour mon père.

Je ne serais jamais assez pour lui.

Ma soeur lui suffit déjà, je suis de trop, je l'ai compris.

Je suis sur le point de m'assoupir sur mon siège mais une main me tapote soudainement l'épaule.

En me retournant je sursaute en comprenant qui sont elles.

- C'est vraiment toi Lola ?

Je tremble de peur et n'arrive même pas à ouvrir la bouche.

- T'as pas vraiment changé, toujours à faire ta victime pas vrai ? glousse l'une d'entre elles.

- Tu regretteras de nous avoir fait virer de ce collège.

Mon visage est figé et mes yeux se remplissent de larmes.

Je ne sais même pas quelle émotion m'habite en ce moment.

Je ne pensais pas revoir mes anciennes harceleuses un jour.

- Je pensais que tu serais devenue un peu mieux physiquement mais apparemment c'est pas vraiment ça. me crache Claudia, la pire des trois.

Elles éclatent toutes de rire tandis que je profite de leur manque d'inattention pour me précipiter en direction de la porte qui vient de s'ouvrir.

Je descends à l'arrêt les laissant seules dans le bus.

Je place ma main sur mon cœur pour essayer de reprendre mon souffle.

J'ai arrêté de respirer dès l'instant où je les ai vus.

Ça a fait remonter de très mauvais souvenirs que je ne voulais jamais revoir.

Plus jamais.

Je m'assois sur un petit banc avant de réaliser que je suis à environ sept arrêts de chez moi.

L'endroit est paumé et je ne reconnais rien.

Je sais que Toronto est très grand mais je ne pensais pas qu'il y avait des endroits déserts dans ce genre.

En regardant autour de moi, je remarque qu'il n'y a pratiquement aucune habitation et pas une seule personne dans le coin.

Je me suis encore perdue.

Cette fois ma jambe va un peu mieux mais je ne pense pas pouvoir marcher une éternité.

Je tape rapidement mon adresse sur Google Maps avec une lueur d'espoir.

Elle s'efface tout de suite quand j'observe le temps de trajet, une heure.

J'éteins mon téléphone et l'enfonce dans ma poche avec un mouvement de rage.

Le stress et la colère commence à monter en moi.

J'ai laissé mes émotions prendre possession de mes actions.

Je pensais que je m'en étais remise, que j'étais passée à autre chose. Mais apparemment leur présence me fera toujours le même effet.

Je fais les cent pas en réfléchissant à une solution, même si je sais très bien qu'il n'y en a pas.

Mon corps commence à chauffer quand j'entends une voix m'interpeler.

Je tourne sur moi même pour voir s'il y a quelqu'un et je suis surprise quand je tombe sur Noa, son sac de cours sur une épaule.

- Salut. Il se rapproche de moi à grands pas pendant que j'essaie d'analyser la situation.

- Qu'est ce que tu fais dans ce trou paumé ? l'interrogé-je en me laissant tomber sur le banc.

- J'habite ici.

- Ah, merde.

Je regrette ma remarque mais il me sourit comme pour dire qu'il ne m'en veut pas.

- T'inquiète, je sais que c'est pas ouf. Mais la vraie question c'est qu'est ce que toi tu fais ici ?

Je me gratte la tête un peu gênée. Comment je vais lui dire que je me suis enfuie du bus en voyant mes harceleuses du collège ?

- Hum, disons que... j'ai vu... des gens et j'ai paniqué. Du coup je suis sortie du bus précipitamment. admet-je en détournant le regard.

Un léger gloussement s'échappe de ses lèvres.

- J'aurais fais la même chose.

Je relâche mon stress et essaie de détendre mes muscles.
Je pensais qu'il m'aurait jugé.

Il fait demi-tour en me laissant sur le banc avant de revenir sur ses pas pour me scruter avec attention.

- Bah viens.

Je fronce les sourcils.

- J'habite pas loin, viens chez moi en attendant le prochain bus.

Je regarde ma montre et me rends compte que le prochain passe dans quarante-cinq minutes.

Mon corps se décide finalement à se lever mais je reste septique.

Je m'approche de lui en plissant les yeux.

Il a l'air... trop gentil, beaucoup trop.
Les personnes les plus gentilles n'ont pas toujours de bonnes intentions.

Mais au pire qu'est ce qui pourrait m'arriver, me faire kidnapper ?
Mourir ?

Peu importe.

Parfois ça a du bon de ne pas avoir peur de la mort.

Peu importe ce qui arrivera c'est ma destinée et je ne peux rien y changer alors autant y aller.

Je le suis juste derrière en direction d'une petite ruelle vide.

Je commence vaguement à flipper mais je me souviens que c'est toujours mieux que chez moi.

Rapidement, il disparaît derrière des buissons et je commence sérieusement à m'inquiéter.

- Noa ! T'es où ?!

Je l'entends ricaner derrière des arbres.

- Marche plus vite.

Je lève les yeux et le retrouve caché par de grosses feuilles.

Mais il habite dans une forêt ou quoi ?

- Bon c'est où ? m'impatienté-je en croisant les bras.

- Encore quelques mètres, tu peux marcher non ?

Il pouffe en me voyant rouler les yeux mais je l'ignore et passe devant lui comme si je connaissais le chemin.

Il me rattrape rapidement en courant.

Ses cheveux volent au vent.
Il a toujours ce sourire enfantin et peut rire pour tout et n'importe quoi. C'est comme si c'était l'homme le plus heureux au monde, mais ce n'est que ce qu'il laisse paraître.

Je vois bien dans ses yeux que ce qu'il montre n'est qu'une façade, on se ressemble plus que je ne le croyais.

- Grouille !

Sa voix perçante me fait sortir de mes pensées et je me mets aussi à courir jusqu'à apercevoir une petite maison.

Elle est noircie par la saleté et on peut distinguer des traces d'humidité sur les murs en béton beige.

Je suis juste derrière son dos quand il enfonce ses clés dans la serrure.

Son trousseau est rempli de petits portes-clés en forme chat. C'est assez mignon mais aussi un peu flippant.

La porte s'ouvre sur un parquet endommagé et deux petits fauteuils remplis de trous.

Le salon donne sur une cuisine ouverte.
Des boîtes de conserves sont éparpillées sur la table et une odeur de sauce tomate plane dans l'air.

Je me retourne vers lui mais ses yeux sont situés en direction des escaliers, là où deux adultes déambulent.

- Va te faire foutre ! Tu sers à rien dans cette baraque ! s'écrie la femme, ce qui me fait sursauter.

Elle est très chic et bien apprêtée avec des talons exagérément hauts.

L'homme, qui fait très négligé à côté, se contente de ramener une bouteille de bière à sa bouche avant de la balancer par terre.

La femme se masse les tempes en essayant de garder son calme.

Ils ont l'air jeunes, beaucoup trop jeunes.

Elle bouscule Noa d'un geste brusque. Ça avait l'air presque fait exprès.

On entend ses talons claquer contre le sol puis la porte se fermer dans un grand bruit fracassant.

Noa pousse un long soupir et me fait signe de le suivre à l'étage.

Je monte les escaliers en m'éloignant le plus possible de son père qui pue autant l'alcool que le mien.

Une fois dans sa chambre, je me permets enfin de poser toutes les questions qui m'habitent.

- C'est... tes parents ?

-...Ouais, les pires parents de l'univers.

Je penche la tête pour montrer mon interrogation.

- Ils se gueulent dessus à longueur de journée sans se préoccuper de ce que je peux ressentir.

Il marque un temps d'arrêt et reprend:

- Mon père boit comme il respire et ma mère est une garce. Ses talons sont plus hauts que sa dignité et son rouge à lèvres est aussi dégueulasse que sa mentalité.

Il lâche un petit rire nerveux.

- Mais c'est la vie.

J'ai un petit pincement au coeur parce que c'est ma phrase préférée.
La phrase avec laquelle je termine à chaque fois que je raconte ma vie pathétique.

Je ne sais pas pourquoi il me raconte tout ça ni ce que je dois répondre et la situation devient de plus en plus malaisante chaque seconde qui passe.

J'explore sa chambre du regard.

C'est très... sombre.

Tous les murs et les meubles sont noirs et le ciel qui sort de la fenêtre est la seule source de luminosité.

Des tas de feuilles sont éparpillées sur son bureau et il y a des stylos un peu partout sur le sol.

Je m'assois sur son lit étroit en redirigeant mes yeux dans sa direction.

- Mais, ils ont quel âge tes parents ?

- 32 et 33.

Je m'étouffe pratiquement avec ma salive.

Cela veut dire qu'ils avaient notre âge actuel quand ils l'ont eu.

- J'étais un accident. finit-t-il par avouer en remarquant ma stupéfaction.

Ça doit être douloureux de savoir qu'à la base tes parents ne voulaient pas de toi.

Il se tourne en direction de la fenêtre en admirant le soleil qui se couche.

- J'aimerais tellement partir, partir très loin de chez moi et ne jamais revenir.

Je scrute son visage mais il ne laisse paraître aucune émotion.

J'ai enfin trouvé quelqu'un comme moi.
Quelqu'un qui pense de la même manière que moi et qui se cache sous un masque souriant de la même façon que je le fais.

J'aimerais tellement lui dire que je suis comme lui, que j'ai aussi des parents merdiques.

Mais je ne veux pas faire à nouveau la même erreur.

Me confier aux gens.

{ La suite dans le prochain chapitre }

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