REMÈDE - PIERRE GASLY

By _vagabondage

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Un remède est sensé guérir. Sûrement pas détruire. DISCLAIMER : Les personnes réelles mises en scène et/ou ci... More

Prologue
1. Réalité.
2. Mentir.
3. Petit-déj.
4. Particulier.
5. Direction.
6. Sécurité.
8. Se réveiller.
9. Gagné.
10. Tomber.
11. Sa mission.
12. Volé.
13. Origine.
14. Encaisser.
15. Se trouver.
16. Éternité.
17. Paralyser.
18. Réessayer.
19. Envelopper.
20. Remédier.
21. Victoire.
22. Échapper.
23. Guerrière.
24. Avancer.
25. Asha.
26. Remédier.
27. Choisir.
28. Promis.
29. Décider.
30. Liés.
31. Découvrir.
32. Brisé.
33. Aimer.
34. Avancée.
35. Commencer.
36. Ami.
37. Prochain.
38. Sombrer.
39. Être.
40. Choisit.
41. Jamais.
42. Coché.
43. Éphémère.
44. Hanter.
45. Espoir.
46. Entier.
47. Quitté.
48. Remède.
49. Guérison.
Épilogue.

7. Un été.

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By _vagabondage

8 août 2019.

Le son des remous des vagues est relaxant. L'eau lèche le sable, en le refroidissant à son contact. Les lumières de la jetée et du littoral se distinguent dans le ciel noir. Le disque d'argent parfaitement circulaire est perché tout là-haut. Et son reflet, se déforme sur l'océan. Tout est calme. Seuls les rires joyeux des fêtards parviennent aux oreilles des jeunes adultes échoués sur la plage. Ils sont assis là, laissant leurs regards se perdre à l'horizon alors qu'une brise fraîche vient rendre supportable l'air chaud de l'été.

Cléo attrape la bouteille qui se trouve entre eux deux et porte le goulot à ses lèvres. Elle sent le liquide imprégner sa langue et son palais de sa saveur amer et réchauffer son œsophage pour terminer sa course au creux de son estomac. Elle a froid. Sur un coup de tête, elle a décidé d'aller se baigner à la nuit tombée. Encore un moyen de se sentir vivante, sans vraiment en mesurer les conséquences. Elle ne l'avouera jamais, mais c'était aussi un moyen d'impressionner le châtain qui se tient à ses côtés. Lui montrer, qu'elle non plus ne craint pas le danger. Et qu'elle sait s'amuser.

Mais voilà que la brune a froid désormais. Ses cheveux sont trempés. Et elle ne se rappelle même pas pourquoi elle pense avoir quelque chose à lui prouver. D'autant plus, qu'entre le sable et le mélange d'eau iodée, sa blessure au bras risque de s'infecter. Mais elle a ce besoin en elle. Elle veut juste compter et emporter un peu de son estime avec elle, lorsqu'ils mettront un terme à cette parenthèse.

Un frisson parcourt son échine. Pierre tourne la tête vers elle et la détaille. Ses mèches brunes humides sont emmêlées en un chignon décoiffé. Ses pupilles bleues contrastent avec ses yeux rouges de fatigue qui ont affronté l'eau salée. Ses lèvres sont violacées. La jeune fille a su le faire rire, en enchaînant les bêtises.

Il veut profiter encore un peu de cette soirée. Repousser le sommeil, qui, il sait, ne viendra jamais. Alors, il attrape le bas du large sweat qu'il porte et le passe par-dessus sa tête. D'une main, il arrange sa coiffure et, de l'autre, il tend le vêtement à Cléo.

Ce serait mentir de dire qu'elle n'est pas touchée par ce geste. La brune aime être au centre de ce genre d'attention. Elle s'empresse de se blottir dans le large pull dont la douceur du coton réchauffe immédiatement sa peau. Elle tire finalement la capuche sur sa tête, ce qui lui permet de sentir l'odeur du pilote envelopper son corps. Elle le remercie et laisse à nouveau son esprit divaguer.

Ils sont tous les deux silencieux mais c'est bien loin d'être pesant. Ils tentent de se remettre de leurs émotions. D'évacuer l'adrénaline à laquelle ils ont goûtée aujourd'hui. Sauter dans le vide, la tête la première, et suspendre sa vie à un unique fil. Sentir la peur les envahir alors qu'ils s'approchaient du précipice. Le sang glacé. Les muscles tendus. Une goutte de sueur perlant sur leurs visages. Et puis le décompte. Cette boule au creux de leur ventre qui monte. Leurs esprits menant une bataille au sein même de leurs cerveaux. D'un côté, pour les supplier de revenir à la raison. De l'autre, pour les convaincre que ces émotions sont nécessaires pour éloigner tous leurs problèmes.

Et puis, on débranche le rationnel. Ce n'est plus le moment de se poser des questions. On se laisse juste tomber. Et on voit le sol se rapprocher à vitesses grand V. Pierre est presque sûr d'avoir fermé les yeux lors du premier plongeon. Grave erreur. Ça a décuplé un peu plus toutes ses sensations. Mais on ne peut pas le blâmer pour cette réaction. Cléo a insisté pour passer en première. Et son cri raisonnant contre les falaises n'a pas rassuré le pilote. Le pire reste qu'après la chute, vient le rebond. Il nous cueille par surprise au moment où on s'y attend le moins. Leurs pensées ont fait le grand huit. Mais plus rien ne les hantait. Ils se sont simplement sentis vivants. Terriblement vivants.

Voilà qu'ils doivent maintenant digérer ce parcours émotionnel qu'ils ont traversé. La jeune femme laisse échapper un bâillement et le châtain se surprend à nouveau à l'observer. Ses genoux sont ramenés contre sa poitrine. Elle frotte frénétiquement ses jambes, sûrement pour les réchauffer. Il attrape la bouteille de liqueur qu'elle tient encore entre ses doigts et il avale doucement plusieurs gorgées. Il grimace, tant le goût est déplaisant. Mais il faut bien ça, pour oublier ses sentiments.

Dans un élan de courage, il casse la courte distance qui les séparait. Leurs épaules sont désormais côte à côté, et il passe un bras dans son dos pour rapprocher un peu plus son corps refroidi de son torse brûlant. Cléo se laisse aller. La deuxième main de Pierre vient se caler derrière son genou qu'il masse délicatement d'un mouvement circulaire.

La brune ne sait plus déchiffrer les informations envoyées par son centre nerveux. Elle a froid. Elle a chaud. Mais pour rien au monde elle ne souhaite qu'il arrête cette douce torture. Elle vient nicher sa tête au creux de son cou pour profiter un peu plus de cet instant.

Le châtain intensifie sa caresse. La pulpe de ses doigts trouve une peau lisse, marquée par des boursoufflures causées par des cicatrices. Il fronce les yeux pour essayer de les distinguer dans la pénombre. Il se demande l'histoire qui se cache derrière chacun de ces stigmates. Lui-même en a plusieurs éparpillés à differents endroits du corps. Et il est en mesure de se rappeler chaque événement qui les a causés.

Bien sûr des accidents. Au karting. Ou en monoplace. Certaines datent de l'époque où il prenait autant de plaisir derrière un volant qu'à taper dans un ballon. D'autres de moments inavouables avec ses frères ou ses amis.

Pierre sourit. Parce que la plupart sont des blessures légères. Superficielles. Il n'a pas pris le temps de les soigner correctement. Mais elles ne sont pas vraiment douloureuses. Elles sont chacune liées à un moment qui l'a marqué et qu'il est heureux de se remémorer quand il pose les yeux sur ses cicatrices. Il les arbore même sur son corps avec fierté.

Pourtant, alors que ses doigts s'aventurent davantage sur la jambe de la jeune fille, il se rend compte que sa peau a bien trop d'entailles refermées pour les compter. Il prend le temps de dessiner les contours de chacune d'entre elles de ses doigts. Comme si cela lui permettait d'en connaître l'origine.

Cléo sent qu'il est perplexe. Intrigué. Alors, à contre-cœur, elle se détache de lui pour lui faire face. Son regard est voilé, influencé par l'alcool qui s'insinue dans ses synapses. Elle attrape la main du pilote, en fixant ses yeux bleus.

« J'ai encore beaucoup de cicatrices à te montrer, si ça semble tant t'intéresser. Ce serait trop long de tout t'expliquer mais commençons par là. »

Il lève la tête vers elle. Elle guide alors son index et son majeur au creux de son poignet qui n'est pas tatoué. Il croit distinguer une petite boule de chair sous sa peau.

« C'est leur endroit préféré pour me piquer quand ils me posent le cathéter lors de mes hospitalisations, explique-t-elle. »

Pierre se pince les lèvres. Il sent qu'elle s'apprête à se livrer. Alors il se contente d'écouter. Elle fait remonter doucement ses doigts sur son bras jusqu'à deux fines entailles. Le résultat d'un saut en parachute mal réceptionné. Un coude cassé La condamnant à plusieurs semaines d'immobilité. Encore un traitement qu'elle n'a jamais vraiment accepté.

Leurs mains continuent leur ascension, guidées par les récits de la jeune femme. C'est une invitation à découvrir son parcours de vie. Ils s'arrêtent un instant sur son épaule gauche. Une luxation de cette articulation aggravée provoquée par une chute lors d'une session de varappe. Elle doit l'avouer, elle s'était montrée un peu trop imprudente.

« Tu aimes la sensation du vide donc ? demande le pilote.

- Je trouve que ce sont les situations qui te procurent le plus d'adrénaline. »

C'est le but de toutes ses actions. Une quête démesurée qui se révèle insatiable une fois qu'on l'a débutée. Parce que le corps est une machine bien huilée. Il s'habitue. Et il faut ensuite sans cesse le challenger.

Elle le force à rompre le contact. Elle pivote pour se retrouver dos à lui. Elle enroule ses doigts autour de son poignet tout en soulevant le sweat qu'il lui a donné. Elle le laisse caresser le bas de son dos jusqu'à trouver cette cicatrice longue de plusieurs centimètres. Pierre glisse son pouce au-dessus, comme s'il pouvait l'effacer d'un simple geste. Cléo frissonne un peu plus. Le contact de ses mains chaudes contraste avec l'air frais qui s'insinue sous son vêtement.

« Un souvenir de quand j'ai voulu m'essayer au skate. Je suis tombée sur le dos et je me suis empalée sur un clou rouillé. Ce n'était pas grand chose. Mais ça a fait paniquer tout le monde. »

Elle se rapproche un peu plus de lui jusqu'à sentir son torse frôler ses omoplates et son souffle chaud dans sa nuque dégagée. Durant quelques secondes, elle a l'impression que sa respiration s'est arrêtée. Et puis, elle laisse à nouveau l'air entrer dans ses poumons. Elle n'a jamais eu peur du danger. Ce n'est pas aujourd'hui que ça va commencer.

La brune replace la paume du pilote sur son genou. Et elle la guide lentement le long de sa cuisse. Elle s'arrange pour que faire durer le contact un peu plus longtemps, retardant au maximum l'arrivée au point de chute. Elle se sent soudainement ridicule. Elle est capable de raconter sa vie au monde entier en se cachant sur les réseaux mais toute once de courage la quitte alors qu'elle doit prononcer ces quelques mots.

Leurs doigts finissent par s'arrêter au creux de son aine et Pierre y sent une petite boursoufflure. Elle semble moins imposante que les précédentes. Invisible à l'œil nu. Et pourtant, il comprend qu'elle est importante, parce qu'elle a décidé de lui en parler.

« C'est la plus petite de toutes, murmure Cléo. Mais c'est la plus essentielle. Celle-ci n'a pas été causée par un accident mais par ma greffe de moelle osseuse. C'est la cicatrice qui m'a sauvé la vie. »

Elle se tourne vers lui, en arborant un sourire sur son visage. Elle relativise, essayant de se convaincre que tout ça est derrière elle et qu'elle n'aura plus jamais à subir ces interventions et protocoles longs et éprouvants. Elle ne veut pas inspirer la pitié. Elle préfère transmettre sa joie de vivre et son désir de liberté. Profiter.

Elle fixe les yeux du pilote et se plonge dans leur couleur bleu océan. Elle ne parvient pas à y lire ses pensées. Elle voudrait parler. Trouver les mots juste pour expliquer ses idées. Mais si la liqueur qui s'insinue dans ses veines l'a aidée à se dévoiler, elle brouille aussi un peu plus son esprit embrumé.

Elle déglutit. Elle a beau avoir invité Pierre à caresser sa peau, elle n'avait alors pas conscience de leur proximité. Elle trouve soudain que cet instant relève bien trop de l'intimité. Les doigts du pilote sont toujours enfoncés dans ses cuisses et elle ne peut s'empêcher de le fixer. Ses pupilles brillent d'intensité. Et elle se sent obligée de baisser le regard parce qu'elle n'est pas certaine d'être en capacité de supporter celui qu'il pose sur elle. Mais dans sa manœuvre, ses iris captent l'image de ses lèvres. Voilà qu'elle a trouvé un nouvel élément à contempler. Et auquel elle a désespérément envie de goûter.

Dans un élan de folie, elle se jette sur le fruit de son désir naissant, surprenant le normand. Il capte le mélange salé et alcoolisé de son baiser. Mais il y met rapidement un terme, désemparé. Il a trouvé ce contact amer. Il ne sait pas ce qu'il veut mais il s'interdit de se forcer. Il est perdu et il ne veut pas l'entraîner dans une histoire qu'il sait déjà condamnée. Pierre n'a aucune envie de s'attacher.

Il affronte les yeux déboussolés de la brune. Sa peine lui fait mal alors il se confond en excuses. Il met ça sur le compte de l'ivresse et s'empêche de fuir face à la détresse qu'exprime la jeune femme qui vient de lui témoigner sa confiance. Il propose de la ramener. Elle doit être fatiguée et a besoin de se reposer.

Le pilote sait que pour lui, sa nuit est déjà terminée. En venant se détendre et s'isoler, il voulait régler ses problèmes. Décompresser. Oublier. Et voilà, que dans sa tête, tout est encore plus compliqué.

Il va la décevoir. Parce que Pierre sait que malgré tout le respect qu'il a pour son histoire, Cléo ne sera jamais la femme qui le fera tomber. Et il n'a pas le droit de se servir de ses sentiments pour juste s'amuser, le temps d'un été.

...

On en apprend un peu plus sur le personnage de Cléo, qui, j'ai cru comprendre, n'est pas très apprécié. Il est juste plus complexe qu'il n'y parait et j'ai hâte de pouvoir le développer.

Mais je suis assez fière de ce chapitre. J'aime bien le style général que j'ai réussi à rendre.

De mon insomnie du milieu de la nuit, je vous souhaite un bon week-end prolongé :)

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