REMÈDE - PIERRE GASLY

By _vagabondage

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Un remède est sensé guérir. Sûrement pas détruire. DISCLAIMER : Les personnes réelles mises en scène et/ou ci... More

Prologue
1. Réalité.
3. Petit-déj.
4. Particulier.
5. Direction.
6. Sécurité.
7. Un été.
8. Se réveiller.
9. Gagné.
10. Tomber.
11. Sa mission.
12. Volé.
13. Origine.
14. Encaisser.
15. Se trouver.
16. Éternité.
17. Paralyser.
18. Réessayer.
19. Envelopper.
20. Remédier.
21. Victoire.
22. Échapper.
23. Guerrière.
24. Avancer.
25. Asha.
26. Remédier.
27. Choisir.
28. Promis.
29. Décider.
30. Liés.
31. Découvrir.
32. Brisé.
33. Aimer.
34. Avancée.
35. Commencer.
36. Ami.
37. Prochain.
38. Sombrer.
39. Être.
40. Choisit.
41. Jamais.
42. Coché.
43. Éphémère.
44. Hanter.
45. Espoir.
46. Entier.
47. Quitté.
48. Remède.
49. Guérison.
Épilogue.

2. Mentir.

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By _vagabondage

6 août 2019.

Il suit la jeune femme qui remonte sur la plage, sa planche sous le bras. Ils longent ensuite le front de mer pendant une dizaine de minutes sans échanger un mot, simplement des sourires. Pierre ne trouve pas ce silence gênant et apprécie même de ne pas avoir le contrôle et de se laisser porter.

Ils tournent finalement dans une impasse alors que Cléo lui annonce qu'ils sont arrivés. Elle pousse la porte d'un large portail et l'invite à la suivre. Le pilote découvre une traditionnelle maison de plein pied à colombages qui trône au milieu d'un large terrain verdoyant. La brune lui prend la main et l'entraîne alors qu'ils contournent la bâtisse.

Le jardin est, lui semble-t-il, un véritable coin de paradis. Tout est calme et rien ne vient troubler cette atmosphère des plus paisibles. Le chant des oiseaux perchés dans la multitude d'arbres qui rafraichit l'air. Le ruisseau en contrebas qui délimite le terrain. Les rayons du soleil qui se reflètent sur l'eau transparente de la piscine. On peut seulement percevoir le bruit des vagues qui s'échouent de l'autre côté de la barrière de végétaux. Pierre se plairait à rester là, coupé du monde.

Mais la jeune femme le sort de sa contemplation lorsqu'il s'aperçoit qu'elle a ôté sa combinaison en néoprène. Il l'imite et elle le tire à l'intérieur par une grande baie vitrée. Le pilote détaille tout son environnement d'un œil curieux, essayant de capter des indices qui lui permettraient de cerner la personnalité de son hôte.

Il ne peut s'empêcher de remarquer le tatouage sur la tranche de son poignet qui représente un poignard dessiné d'un trait très fin. Elle lâche sa main, l'empêchant de le fixer davantage, alors qu'ils pénètrent dans la cuisine.

« Tu aimes quoi pour le petit-déjeuner ? lui demande-t-elle en ouvrant la porte du réfrigérateur sur lequel trônent plusieurs photos et souvenirs. Pierre ne répond pas, trop concentré à observer l'évolution à travers les âges de la tête brune sur les différents clichés. On peut faire réchauffer des gaufres, avec des fruits frais et du sirop d'érable, non ?

- Tu offres des petits déjeuners de roi à toutes les personnes que tu croises sur la plage ? Sourit-il.

- Seulement à celles que je trouve mignonnes. »

Le châtain lâche un petit rire nerveux. Il ne s'attendait pas à une telle réponse et se trouve légèrement déstabilisé mais il essaye de ne pas le montrer bien qu'il apprécie son assurance et son franc-parler. C'est quelque chose dont il a cruellement besoin en ce moment. D'honnêteté.

« Moi qui me croyais privilégié, s'amuse-t-il. »

Il la regarde réchauffer les gâteaux et couper des bananes. Le châtain demande poliment ce qu'il peut faire pour aider et elle lui désigne le frigo et l'invite à leur servir le smoothie qu'il préfère. Cela lui permet de s'approcher davantage des photos qui ont attiré son regard un peu plus tôt. Il contemple les sourires, qui semblent parfois forcés. Mais autre chose retient son attention. Le regard vide que la brune, alors beaucoup plus jeune, arbore. Pourtant, c'est très irrégulier. Elle semble tantôt heureuse, tantôt désemparée malgré son air candide.

Un second élément le frappe. La fillette est seule sur chacun des clichés. Ce constat est bien différent de celui qu'il connaît en pensant au réfrigérateur de la maison familiale à Rouen. Il est rempli de souvenirs où un maximum d'entre eux apparaissent.

« Tu l'es. J'ai des critères plutôt haut placés. N'importe qui n'a pas la chance de partager mes gaufres, explique Cléo en posant une assiette garnie sur le comptoir devant lui.

- Encore un compliment. J'ai bien fait d'aller surfer aujourd'hui. »

Pierre la remercie alors qu'elle s'assoit sur un tabouret pour prendre une photo de son petit-déjeuner avant de commencer à déguster ce qui s'apparente pour lui à un festin. Il n'avale pas grand chose depuis qu'il est arrivé il y a deux jours pour profiter de ses congés.

Il aime le répondant de la jeune femme qui est pétillante et joyeuse. Elle lui permet de mettre de côté pendant quelques instants ces pensées noires qui prennent un malin plaisir à envahir son esprit. Il tente de freiner son naturel curieux qui désire apprendre à la connaitre simplement parce qu'il souhaite éviter qu'elle lui pose des questions sur sa carrière et sur son début de saison.

Cléo place une main devant sa bouche pour masquer un bâillement, provoquant le rire du châtain. Il observe à nouveau l'encre sous sa peau formant un symbole qui l'intrigue.

« Tu as vraiment besoin de dormir, souligne-t-il.

- Je te l'ai dit, je n'ai pas fermé l'œil de la nuit.

- Et qu'est-ce que tu as de mieux à faire que dormir ?

- Profiter. Danser. M'amuser. Rencontrer des gens. Aller surfer au petit matin quand il n'y a encore personne sur les plages. Offrir des petits-déjeuners à des inconnus, énumère-t-elle en lui glissant un clin d'œil.

- Je ne vais pas me plaindre de ce programme, affirme-t-il en croquant dans sa gaufre. C'est délicieux. Tu es une bonne cuisinière.

- Merci, dit-elle après avoir hésité un instant. »

Le regard du pilote essaye de se concentrer sur le visage de la brune. Sur ses iris d'un bleu clair qui créent un contraste saisissant avec ses cheveux d'un noir ténébreux. Il est persuadé ne jamais avoir vu pareille association. Mais ses yeux dévient inlassablement vers la marque sur son poignet.

« Ça t'intrigue, n'est-ce pas ? Lui demande Cléo en massant la zone de sa peau qu'elle doit sentir scrutée depuis qu'ils sont entrés.

- Désolé. »

Il s'empresse de s'excuser maladroitement, honteux d'avoir été percé à jour. Il se pince les lèvres pour éviter de poser cette question les brûle.

« T'es pas le premier, souffle-t-elle. Tout le monde se demande à quoi pensait une jeune fille pour se faire tatouer un poignard à un endroit si visible.

- C'est personnel. Ça ne regarde que toi.

- C'est l'épée de Damoclès, reprend-t-elle en l'ignorant. Tu sais d'où vient la légende ?

- Je... Je connais seulement l'expression. »

Il regrette de ne pas avoir cette culture alors que c'est une métaphore très courante. Tout d'un coup, il a l'impression de ne pas saisir correctement le sens des mots qu'il emploie au quotidien.

« Comme tout le monde, le rassure-t-elle. Damoclès était un courtisan qui réduisait le bonheur d'un grand roi grec à sa richesse et à ses biens matériels. Pour lui faire comprendre à quel point tout cela était futile et ne tenait qu'à un fil, le roi l'invita à un banquet. Damoclès assista à ce repas et dût le savourer avec, au-dessus de sa tête, une épée retenue par un seul crin de cheval.

- Une situation inconfortable qui t'empêche de profiter réellement du moment, simplifie Pierre.

- C'est un peu le résumé de ma vie. Elle soupire. Si je me la suis tatouée, c'est pour me rappeler bien sûr des épreuves que j'ai traversées pour en arriver là, mais aussi que j'ai cette épée qui plane au-dessus de la tête. »

Pierre avale difficilement sa salive, regrettant de l'avoir poussée à évoquer des sujets qui ne semblent pas très heureux pour la jeune femme. Il ne veut pas qu'elle se force à lui déballer des souvenirs douloureux si elle n'en a pas envie. Mais elle continue.

« Et puis, c'est aussi pour que jamais je n'oublie qu'il y a plusieurs manières de voir les choses. Je peux attendre qu'elle me tombe dessus et qu'elle coupe le fil de mon existence. Je peux avoir peur, tout le temps. Mais je peux aussi profiter, savourer encore plus tout ce que j'ai la chance de faire. Et je peux décider d'être maître de mon destin et de me servir de cette lame. Que ce soit pour me battre et me défendre contre les épreuves que la vie me réserve, ou pour choisir de me porter le coup de grâce si ma vie ne finit par ne plus ressembler à ce que je souhaite. »

Il reste bouche bée. Sa maturité le frappe. Son côté frivole à laisser place à une détermination et à un sérieux implacable. Il ne peut qu'imaginer tout ce qu'elle a pu endurer pour en venir à cette réflexion. Il lui semble qu'elle a clairement un mental de championne et qu'elle le surpasserai sans problème dans bien des domaines.

« Je ne voulais pas plomber l'ambiance. Je le vis bien. J'arrive même à en tirer du positif. Et je le partage avec les gens. C'est une leçon de vie. »

Elle lui montre son téléphone pour qu'il regarde son profil Instagram. Elle n'a pas menti. Son nombre d'abonnés frôle le demi-million. Il parcourt les différentes photos qui la représentent souriante ou qui montrent les paysages qu'elle a parcourus. Elle semble avoir une vie bien remplie. Elle semble heureuse.

Pierre ne peut s'empêcher de se demander si les photos qu'elle dévoile à la terre entière sont le véritable reflet de la vérité. Le regard bleu vide qui habite ses pupilles sur les clichés qui habillent la porte du réfrigérateur lui revient en mémoire et lui fait douter de la véracité de ses propos. Est-ce qu'elle lui ressemble finalement plus qu'il n'y parait ? Est-ce qu'elle aussi se ment à elle-même ? Est-ce qu'elle aussi se force à sourire pour faire plaisir ?

Elle baille à nouveau et le pilote juge qu'il est temps de la laisser enfin se reposer. Il se lève et prend l'initiative de débarrasser leur petit-déjeuner. Elle le remercie en se dressant sur la pointe des pieds pour déposer un baiser sur sa joue encore salée.

« Merci pour les gaufres, souffle-t-il. Passe une bonne nuit.

- Je remets ma séance de surf de fin de soirée demain matin. Tu passes me chercher ?

- Avec plaisir. »

Il récupère sa planche et sa combinaison abandonnées sur la terrasse et après un dernier regard vers ses pupilles d'un bleu clair perçant, il quitte la propriété, le sourire aux lèvres. Le coeur un peu plus léger. Pendant quelques instants, Pierre a oublié.

Mais il ne lui faut qu'une seconde pour replonger dans ses idées noires alors qu'il est interrompu par la sonnerie de son téléphone. Pyry. Le pilote soupire. Il se prépare à mentir.

...

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