Alyah
Ça fait bien plus de trois minutes que Jones est sorti du lit, alors que récupérer des colis ne devrait pas prendre plus de dix secondes. C'est quand je me motivais à aller voir qu'il m'appelle.
-Alyah ?
Super, je sens la complication avec ma commande, dès neuf heures du matin. Déjà quel livreur accepte de bosser le vingt-cinq décembre, s'il vous plait ?
J'attrape le premier truc qui me passe sous la main, qui n'est rien d'autre que la chemise de Lewy qui descend parfaitement sur mes cuisses. J'attache mes cheveux qui me collent au visage et sort de ma chambre, très remontée.
Je déteste qu'on me tire du lit.
-Quoi ? je demande.
-Marraine !!!!
Je m'arrête net, figée, et regarde Elyass courir sur moi et s'accrocher à mes jambes.
-Tu m'as trop manqué, dit-il en espagnol bien sûr.
Je fixe sa petite tête remplie de boucles et cligne plusieurs fois des yeux, me demandant si je ne suis pas en train de rêver.
Merde, non pas du tout.
Mon bébé est bien là, en train de me serrer de toutes ses faibles forces, sautillant comme un petit fou. Je me reprends enfin, ravalant mes larmes, et m'agenouille alors devant lui pour le prendre dans mes bras à mon tour.
-Oh, mon trésor.
Je respire son odeur d'enfant, et je retrouve ce qu'il me manquait. Mon rayon de soleil, et le retrouver m'éclaire encore plus.
Puis je lève enfin la tête, et je me rends compte à quel point je manquais d'air quand toute mon oxygène me revient. Costia me sourit, Kai aussi, et Yael lui... est entrain de foudroyer Lewy du regard. Oh merde.
-Dolce !
Ma belle-sœur me serre dans ses bras, je lui rends son étreinte encore plus forte, mais ce n'est rien à ce que je réserve à mon frère. Quand Kai m'entoure de ses bras tatoués, que je sens de nouveau son parfum, les larmes coulent sur ma joue.
Ils sont là.
Ils sont venus me voir.
Je n'aurais pas mieux rêvé comme cadeau de Noel.
C'est le plus beau qu'on ne m'ait jamais fait.
-Dolce, joyeux noël.
-Kai...
Je retrouve enfin les parties de moi qui me manquaient, celles qui m'aidaient à tout surmonter.
Quand il me lâche une bonne longue minute après, il embrasse mes joues de toutes ses forces avant de caresser mes cheveux.
-Tu m'as vraiment manqué.
-Toi aussi. Je n'en reviens pas que vous soyez là.
Je les regarde un par un, et je trouve directement les yeux de Yael, juste derrière nous. Dios mio, ses yeux brillent d'émotion, et son regard est si doux.
Je n'ai pas vu ça depuis tellement longtemps. C'est là que je comprends à quel point moi aussi, je leur ai manqué.
-Lyah, joyeux noël.
Il n'est pas du genre à montrer son amour, il fait plus cela maladroitement. Il est comme moi, pas vraiment doué pour assumer ce qu'il ressent. Mais aujourd'hui, il me prend dans ses bras de toutes ses forces, et embrasse mon front à plusieurs reprises.
-Putain que tu m'as manqué Lyah.
Lyah.
Yael est le seul du Mexique à ne pas m'appeler Dolce, car petit déjà il voulait avoir son surnom à lui tout seul. Alors il m'appelait comme ma maman, et aujourd'hui encore ça n'a pas changé.
Je me fonds dans ses bras, si longtemps que Elyass se met entre nous et pousse son oncle.
-Ca va oui, il n'y a pas que toi.
Il me tend les bras pour que je l'attrape. Ce que je fais avec plaisir, et il pose tout de suite sa tête sur mon épaule en jouant avec mes mèches de cheveux.
-C'est ma marraine.
-C'est ma sœur, petit merdeux.
Il lui tire la langue, et je rigole en séchant mes larmes qui ne cessent de couler. Je ne pleure pas souvent devant mes frères, je pense que la dernière fois remonte à la naissance de Ely.
C'est maintenant que les complications arrivent. Forcément, Yael regarde ma chemise, qui n'est pas la mienne. Puis regarde Lewy derrière, qui reste droit comme un piquet, sans rien dire depuis tout à l'heure.
Yael me regarde encore une fois, puis Kai, puis moi. Je réponds donc à toutes leur interrogation, et espère que ça passera.
Dios mio, faites que ça ne soit pas ridicule.
-Euh, je vous présente Lewy. Un ami.
-Un ami ? répète Yael en le fixant.
Lewy lui sourit et hoche la tête.
-Un ami, confirme-t-il.
-Un ami, répète encore une fois Yael. Un ami qui dort chez toi ? Et dans ton lit ? Et tu portes sa chemise ? Drôle d'amitié, non ? demande-t-il d'un ton que je connais trop bien, en fronçant les sourcils.
-Oh tu sais les Américains ils sont comme ça, ce sont des dévergondés sans gêne !
J'entends Costia rigoler derrière moi, et Kai soupirer. Ce dernier passe entre Yael et moi en soupirant, pour tendre sa main à Lewy, et je le remercie intérieurement d'être celui qui sauve toujours les situations gênantes ou problématiques.
Kai a toujours été le détenteur de paix dans notre fratrie.
-Enchanté Lewy, Kaiys. Appel moi Kai.
-Enchanté, répond-il assez sûr de lui.
Alors que face à Yael, c'est à peine s'il le regarde.
Je comprends, Kai a l'air d'un gros nounours comparé à lui, alors que c'est le plus petit des deux, autant en âge qu'en taille.
-Ma femme, Costia, et notre fils Elyass.
-C'est moi qui vais me marier avec elle, pas toi, renchérit ce dernier en me serrant encore plus fort.
Elyass est encore petit, et ne maitrise pas l'anglais autant que l'espagnol, malgré que nous lui apprenions depuis toujours, mais bizarrement, réussit à sortir ces mots sans aucun soucis, avec un petit regard de travers pour notre cher Jones, qui lui sourit en levant les mains au ciel.
-Je n'oserais pas me mettre entre vous, ne t'inquiètes pas.
Je souris à Lewy, espérant qu'il ne se sente pas trop mal, même si j'en doute. Rencontrer tout ce monde alors que nous n'avons même pas mis de mot sur nous ne doit pas être la meilleure chose au monde.
-Yael, dis mon autre frère en lui tendant la main. Tu sais, celui qui te tuera si tu la regarde trop longtemps en ma présence, dit-il de son ton le plus neutre et plus sérieux.
Ce qui ne rassure pas du tout, notre gentil petit américain tout mignon.
-Nous ne sommes que des amis, je lui rappelle en rigolant nerveusement.
Mais il ne m'écoute pas, et je vois d'ici la violence de sa poigné de main. La tête de Lewy m'aide aussi à le savoir.
Santa Maria.
Pour les distraire, je les invite à entrer et à s'installer comme chez eux. Puis je pose mon bébé d'amour et embrasse son front.
-Je vais me changer, je reviens.
J'attrape au passage la main de Lewy pour l'amener avec moi dans la chambre, sous le regard meurtrier de Yael, et les moqueries de Kai et Costia.
Heureusement qu'ils sont là pour rigoler, car je serais déjà morte d'une syncope.
Je ferme la porte, et Lewy s'assoit sur mon lit en me fixant avec des yeux que je n'avais jamais vu aussi ouverts.
-Je vais sauter de ta fenêtre, dit-il.
J'explose de rire en me calant contre la porte.
-Je suis désolée, dis-je simplement, comme tu te doutes je n'en avais aucune idée.
-Ouais, sourit-il. Je suis content qu'ils soient là. C'est un super cadeau.
Je lui rends son sourire, vraiment aux anges, et commence à retirer sa chemise, mais il me foudroie du regard.
-Ça ne va pas ? Il va savoir que tu t'es changé devant moi !
Là c'est trop, je rigole encore plus.
-Mon frère te fait flipper ? je demande alors que je sais très bien que oui.
Même s'il n'est pas très imposant physiquement, Yael possède le regard des hommes qu'on craint.
-Ils me font tous flipper. Même le gamin, tu as vu ce regard ? Wow, je ne savais pas que tu étais une propriété privée Perez.
-N'importe quoi, dis-je en retirant quand même sa chemise sous ses yeux qui parcourent maintenant mon corps.
-Moi qui voulait te faire l'amour toute la journée, dit-il en se mordant la lèvre du bas.
-Elyass pourrait écouter à la porte, j'espère que tu pourras assumer ça.
Il me fait les gros yeux, et mon rire ne peut plus s'arrêter. C'est hilarant.
-Je rigole Jones, enfin, j'espère.
Nerveux, il s'allonge sur le lit en soupirant, les yeux toujours rivés sur moi qui cherche quoi me mettre dans mon dressing.
-Des « amis ». Ils ne sont pas idiots tu sais. En plus si tu sors changée de cette chambre, ils le sauront encore plus.
Je le sais très bien ça, et je suis surement encore plus nerveuse que lui. Mais, d'un côté, j'ai envie de montrer à Yael que oui, je fréquente un garçon, et que non ce n'est pas la fin du monde.
J'ai envie qu'il voie que tous les hommes ne sont pas des monstres, et que Lewy est un ange.
Dans ce contexte-là, je pense que ça pourrait mieux passer.
-Après, nous ne sommes pas des amis ? je demande en enfilant un short de sport et un débardeur.
-Des amis ne couchent pas ensemble.
Je m'assoie à côté de lui et ses doigts caressent mes cuisses tendrement. Il en embrasse une furtivement, pendant que je tresse mes cheveux en vitesse.
-Alors qu'est-ce que nous sommes ? je reprends en me rapprochant un peu de ses lèvres.
-A toi de me le dire Perez, chuchote-il doucement contre ma bouche.
Je me tais un instant, car je n'ai pas de réponse à cette question.
Je lui ai tout donné. Mon corps, mon cœur, mon âme. Je lui ai tout offert sur un plateau d'argent. Pourtant, je n'ose toujours pas prononcer les mots qu'il faut. Alors j'embrasse ses lèvres, et il me rend mon baiser fiévreux.
-Je vais rentrer, dit-il.
-Tu peux rester si tu veux. Tu n'es pas obligé de rentrer.
-Je vous laisse en famille Alyah. Ne t'inquiète pas pour moi.
-Très bien.
Il rassemble ses affaires, puis nous sortons de ma chambre. Toutes les têtes se retournent sur nous, je vois Kai soupirer alors que Costia pouffe de rire. Yael lui fixe ma tenue avec des yeux tellement grands, que je crains qu'ils explosent.
-Je vais arracher les yeux de ce mec, Lyah, dit-il en espagnol cette fois pour que Lewy ne comprenne pas.
Mais vu son ton, il sait que ce n'est pas très gentil.
-Bon, je vais rentrer chez moi, dit-il. Joyeux Noel à vous et amusez-vous bien.
-Ah bon ? renchérit Yael en le fixant à son tour.
Lewy ne dit rien et se contente de le regarder, en attendant les fins mots de sa pensée. Moi, je les vois déjà arriver, et je me retiens de ne pas lui sauter dessus pour éviter qu'il fasse fuir le seul homme qui veut bien de moi, sérieux !
-Tu sais ce qu'on déteste le plus ici ? Les hommes qui fuient, qui n'assument pas. Alors tu vas gentiment rester ici, et assumer que tu te tapes ma petite sœur. A moins que tu ne veuilles pas ? Et dans ce cas malheureusement tu serais une merde et je serais obligé de te le faire payer. Tu es une merde Lewy ?
A la fois, j'ai envie de rire, mais en même temps je me sens mal pour Lewy.
Dire ça à un Mexicain, au Mexique, à Tepic, en tant que chef du Brahman ? Rien de plus normal, mais ici, ça peut paraitre spécial.
Yael n'est jamais sortis du Mexique, si ce n'est de Tepic, et je pense que lui donner deux trois leçons de vie, ne lui aurait pas fait de mal.
Je lui fais les gros yeux, et fixe Kai pour qu'il intervienne comme toujours quand son petit frère pete son câble, mais ce dernier est concentré sur Lewy, et attend sa réponse, très sérieusement.
Merde, lui aussi il est d'accord ?
Dieu Merci Costia intervient.
-Yael, mec, détend toi un peu. Lewy, c'était une manière de t'inviter à rester avec nous. Excuses son... franc parler.
-On est plus sûr de l'agression verbale la, mais pas de problème, dit-il en allant reposer son sac dans ma chambre.
Oh, Lewy va donc rester.
Oh...
Je ne sais pas si je dois rire ou pleurer. Ou tomber encore plus sous son charme.
-Yael. Sois plus gentil s'il te plait, je lui demande en Espagnol.
-Je ne l'aime pas.
Je soupire et Lewy revient, la tête haute malgré les menaces de Yael. Kai lui, sourit légèrement.
-Bon, ma marraine d'amour, dit Elyass en se levant sur sa chaise. Nous avons une petite surprise pour toi.
Il se tait deux petites secondes, avant de crier ;
-Tadam !!
Il ouvre ses petits bras vers la porte, sans que je comprenne, mais c'est alors qu'elle s'ouvre d'un seul coup très violement, claquant contre le mur dans un grand bruit.
-Boom. Une entrée fracassante, comme moi.
Je hurle sans me retenir, car c'est son effet, et cours sauter dans les bras de Swann qui vient surement de faire un trou dans mon mur, mais je m'en fiche. Son sourire est éclatant quand il me voit, et il a tout de suite ouvert les bras pour m'accueillir.
Les jambes autours de lui il me fait tourner avant de se cogner contre le mur. Les bras en l'air, il fait des doigts d'honneur à mes frères.
-Je vous ai dit que j'étais son préféré.
-Swann, pas devant Elyass ! l'engueule Costia.
Il transforme sa vulgarité en pouce, puis me repose au sol et embrasse mon front, puis me serre encore très fort.
-Putain Dolce tu m'as trop manqué, regardes moi, dit-il en prenant mon visage dans ses mains. Waw tu es encore plus belle. Tu as fait quoi ? Je ne te reconnais presque plus. Je sens d'ici que tu es devenue une putain d'Américaine. Traitre, tu as renié tes racines ?
-Tu es malade ou quoi ? dis-je en tapant son torse et en séchant mes larmes qui ont réapparues sans que je m'en rende compte.
Puis son regard se pose derrière moi, et il fronce les sourcils.
-C'est qui lui ?
Je me retourne, mais pas besoin de se poser la question, je sais de qui il parle.
-Swann euh, je te présente Lewy.
Il s'avance vers lui et le toise de haut en bas, avant de me regarder.
Punaise, ils font tous pareil, ils sont tous les mêmes.
-Lewy. Lewy ?
Lui, en revanche, il le connait. Trop bien, même.
-Lewy.
-Celui dont tu me parlais pendant des heures en l'insultant lui et toute sa descendance ?
Je vois le concerné sourire en coin.
-Euh, ouais.
-Celui que tu voulais voir sous les roues d'un bus ?
Son sourire s'agrandit.
-Ouais.
-Qu'est-ce qu'il fout là à neuf heure trente du matin ?
-Et bien, c'est mon ami qui a passé Noel avec moi. La haine rapproche, que veux-tu ?
-Spécial. Bon. Enchanté man, dit-il en lui tendant la main tout sourire. Swann aka sa personne préférée sur terre, désolé les lopettes.
-Langage, le reprend Kai.
-Pardon père, pardonne-moi de mon outrance à l'enfance de ton fils. Lewy, tu mériterais que je te colle un point dans la figure tellement tu m'as niqué des heures de sommeil pour que je l'écoute se plaindre de toi.
-Swann ! Langage.
-Pardon Costia. Excuses mon trouble de la mémoire immédiate.
Ils lèvent les yeux au ciel en même temps, alors que Lewy lui sourit.
-Je n'imagine pas les horreurs qu'elle a dû dire.
-Oh non, mec, tu ne peux pas imaginer. Oh ça fait un bien fou de te voir Dolce, sérieux j'ai l'impression ça fait dix ans ? Tu n'aurais pas enfin grandi ma petite ?
-Vas te..
-Langage !!
Costia nous foudroie du regard, et nous explosons de rire.
Elyass lui soupire sur les genoux de sa mère.
-De toute façon, ils n'arrêtent pas quand vous n'êtes pas là vous savez.
-Je ne doute pas bébé.
-Vous restez combien de temps ? je demande en m'asseyant à table, face à Kai et Costia.
J'invite Lewy à mes côtés, tout timide, et Swann se jette dans mon canapé en jurant qu'il doit être plus cher que sa maison (il a raison). Yael lui, est accoudé sur mon bar.
-Nous partons le trente, répond Kai.
-Et moi le deux, crie Swann. Je vais à New York deux semaines, et je reviens pour ton exposition. Ensuite je rentre.
-Tu vas à New York ?
-Ouais. Pour le boulot.
C'est sorti naturellement de sa bouche, car ça l'est, puis il se rend compte qu'il a surement oublié de me parler de quelque chose.
Ou non, il a délibérément évité de me parler de ça. Comme tous.
Un silence passe au-dessus de nous, et je fixe Swann en essayant de comprendre. Kai baisse les yeux et Yael me fixe.
Ok. Super.
Je crois qu'ils en ont profité pour me faire des cachoteries en ce qui concerne leur histoire.
Swann ne travaille pas, enfin il tient des stands au marché, c'est tout. Mais je sais que le genre de boulot dont il parle pour New York n'a rien à voir avec ça.
C'est du boulot de gang dont il parle, je le vois à ses yeux. Yeux qu'ils détournent, car il sait que j'ai compris.
Avant que j'ouvre la bouche, quelqu'un toque à ma porte.
-Encore ! dis-je étonnée. Vous avez même amené Farid ou quoi ?
Je me lève pour aller ouvrir, mais c'est encore plus gros que Farid.
Dara est là, droite comme un piquet, et me sourit avec des paquets cadeaux dans les bras. Je lis aussi tout de suite le stress et la peur sur son visage, ou encore la gêne.
Dara est venu voir notre famille, qu'elle n'a pas vu depuis bientôt dix ans.
Waouuh, c'est une journée chargée d'émotion, la. Je ne sais pas si mon cœur tiendra le coup.
-Hola dolce.
-Hola Dara. Courage. Ça va le faire, dis-je tout de suite pour l'encourager.
Car il n'y a pas besoin de parler, je sais ce qu'elle ressent, de revoir la famille qu'elle a abandonné.
Je l'invite à entrer, et l'émotion me prend alors que Costia se lève en courant pour la serrer dans ses bras. Les paquets cadeaux tombent au sol dans un bruit sourd, mais elles s'en fichent.
Je me baisse pour les ramasser et Elyass vient m'aider à les mettre sous mon petit sapin. Quand je me retourne elles sont toujours dans les bras l'une de l'autre.
Avant d'être la chérie de Kai, c'était aussi une grande amie de Dara. Elles ont quasiment le même âge, elle a deux ans de plus que mon frère, et elles ont quasiment grandie toutes les deux.
Les évènements qui ont poussé Dara à s'en aller, a brisé leur relation à elle aussi.
Costia se détache d'elle et attrape son fils.
-Mon amour, je te présente ta tatie Dara.
Il la salut poliment car mon neveu a la plus belle éducation qui soit.
Ce n'est pas étonnant avec les anges qu'il a pour parents.
Puis mes frères et Swann fixent Dara un instant, ils se toisent tous un peu du regard, hésitant, mais Swann fini par se lever le premier et lui sauter dans les bras, suivit de Kai.
-Purée Dara !! Je suis trop content de te voir. Eh, toi tu es une vraie Perez ma jolie, tu n'as pas pris une ride alors que quoi, tu as quel âge maintenant ? demande Swann en attrapant son visage pour l'examiner.
Ma cousine lui pince le ventre et il lâche un crie.
-Un peu de respect, gamin.
Elle embrasse Kai et se font les bla bla de retrouvaille habituelle, en fait, je n'écoute plus. Moi, je fixe Yael.
Yael est une personne incroyable quand on le connait, mais vu comme ça, il ne donne pas vraiment envie de le fréquenter. Il a les pires défauts, comme moi, et la fierté est surement le pire dans notre famille. Au fond de lui, il en veut toujours à Dara d'être partie.
J'espère que dans mes yeux, il lit la supplication. Je le supplie de fournir un effort, pour elle qui en fait un gros. Même si venir voir sa famille ne devrait pas en être un, je me suis fait à l'idée que pour elle, c'est un combat.
Je pense qu'il comprend, car il me sourit en se détachant du bar pour aller lui aussi la prendre dans ses bras. Très crispé, certes, mais c'est déjà ça.
Je peux enfin souffler sur ma chaise.
-C'est émotif dis donc.
Lewy ose poser sa main sur ma cuisse, et je me retourne vers lui pour chuchoter.
-Dara ne les a pas vu depuis neuf ans.
-Neuf ans ? Mais c'est énorme ! Comment ça se fait ?
-Longue histoire, très longue histoire.
-Oh tiens, Jones.
Dara le regarde et lui sourit. Elle, elle le connait bien.
-Tu es la aussi.
-Comme quoi, dit-il, un sourire en coin.
-Oh je n'en reviens pas, on va faire Noel avec Dara, quasiment tous ensemble !
Costia sautille en enroulant ses bras autour du cou de ma cousine.
-Tant qu'on y est, pourquoi ne pas être venu avec Farid ? je demande. Il est tout seul là, non ?
-Il avait des choses à faire là-bas, il le fera avec ma mère Iris et Luna je pense, me répond Swann.
Je souris, en espérant vite pouvoir repasser les fêtes avec tout le monde. Ils auraient dû être là eux aussi.
-Bon, les sexes faibles, aller chercher les valises, on a besoin d'ingrédient pour préparer le repas, crie Costia sur les garçons, en passant dans ma cuisine.
Je savais qu'elle prendrait vite les choses en mains. Personnellement, je n'avais pas prévu grand-chose pour Jones et moi, niveau repas.
-C'est nous les sexes faibles ? me demande Lewy dans l'oreille.
-Oui Jones, c'est vous qu'elle appelle sexe faible.
Au même moment, je sursaute quand les mains de Yael se posent sur ses épaules.
-Toi, tu viens m'aider.
Lewy ne bouge plus et me fait les gros yeux alors que je me retiens de ne pas éclater de rire quand je vois la tête qu'il fait.
-Oh merde, je viens avec vous, pas de meurtre le jour de Noel les mecs. C'est péché multiplié par cent là.
Swann enfile sa casquette et se lève en même temps que Lewy rejoins Yael et Kai, pour descendre. Elyass part en courant derrière eux en criant sur son père de l'attendre.
La porte fermée, Costia fait claquer ses mains contre le bar et pose ses grands yeux marron clair sur moi, le sourire aux lèvres.
-Alyah Perez. Qui est ce garçon ? J'ai loupé des épisodes, non, une série même ! Ton ami ? Est-ce que tu nous crois aussi idiots que ça ? Tu portais sa chemise !! Nous l'avons fait avant toi ça !
-Elle croit pouvoir nous la faire à nous, rajoute Dara. Si elle savait.
-Oh que oui si tu savais ma puce. Ce n'est pas ton ami. Alyah Perez, tu as un copain.
Elle prononce les mots comme si c'était LA nouvelle de l'année, improbable.
-Ce n'est pas mon ami non. Mais ce n'est pas mon copain non plus.
-Hm. Je vois. Vous vous êtes embrassé ?
-Oui.
-Alyah, vous avez couché ensemble ?
-Oui. Cette nuit. Et je comptais bien passer la journée à faire ça.
Elle ouvre grand la bouche et se cache le visage en gigotant.
-Santa Maria, les petits deviennent grands. Bientôt ce sera Elyass et... oh mon dieu non. Pas ça.
-Du calme Tia, je ne suis plus une petite déjà. Et ton fils a à peine cinq ans. Il a le temps.
-Ouais, il y'a plutôt intérêt.
-J'aurais aimé voir la tête de Yael et Kai en voyant Lewy, dis Dara en faisant du thé pour tout le monde.
-Oh c'était incroyable. J'ai cru que Yael allait le tuer, mais ça, est ce que ça t'étonne ? Puis Kai lui était surpris, mais ça reste Kai. Je suis sûr qu'il est content de voir que tu, comment dire. Tu te détache d'eux.
-Sympa.
-Pas dans ce sens, mais dans celui où tu t'ouvres un peu à d'autre homme. C'est chouette. Moi je suis contente. Pour l'instant on ne l'a pas assez vu pour le juger, mais j'espère que c'est un chouette type. Sinon le pauvre... il va mourir.
-C'est clair, poursuis Dara.
Je crois rêver. Ma famille est là, ou du moins la plupart, et Lewy se retrouve avec nous, pour le repas de Noel.
D'un côté, ça me fait plaisir, alors que de l'autre, tout ça est si contradictoire quand je me souviens qu'il ne sait rien de nous. Rien réellement.
Nous allons tous lui mentir, en cœur, tout en le traitant comme un membre de la famille.
Rien de plus normal.
En tout cas, me retrouver ici avec Dara et Costia me ramène à mes années de petite fille, ou je passais ma vie dans leurs pattes. Elles s'occupaient de moi comme des grandes sœurs, et j'étais la plus heureuse d'être leur petite princesse.
-Rassures moi Dolce, reprends Tia d'un ton plus sérieux.
-Non je ne lui ai rien dis. Je n'ai rien ne dis à personne. Je suis Espagnol, mes parents bossent souvent et mes frères sont pompiers.
Elle me sourit tristement, comme si elle percevait dans mon ton que ce mensonge commencé à me peser.
-Je sais que c'est compliqué dolce...
-Ca ne l'est pas. Ne t'inquiète pas pour moi, je savais dans quoi je m'embarquais en venant ici.
-Bien. Bon, mets-nous un peu de musique s'il te plait, qu'on fasse à manger dans l'ambiance.
Je fais ce qu'elle me dit et lance une playlist au hasard sur son téléphone, et au même moment les garçons remontent avec leur valise. Mon premier réflexe est de chercher Lewy pour voir si tout va bien, et ça à l'air car il discute tranquillement avec Kai. Pas de tête de mort, donc c'est bon.
J'installe mes invités, je laisse ma chambre à Kai et Costia bien sûr, et le reste nous dormirons dans mon salon. Heureusement que j'ai assez de place.
Dara Kai et Costia se mettent à cuisiner, c'est surtout eux les grands chefs, et Swann s'occupe de Lewy, ils discutent tous les deux sur le balcon en fumant. J'en profite pour faire le lit de ma chambre et le préparer.
Yael me rejoint vite, et referme la porte derrière lui.
-Son père est chef du F.B.I et sa mère juge dans les affaires de drogue. Alyah, tu as tapé dans le mille, la.
Ah oui, ils ont fait vite pour l'interrogatoire.
-Je sais. Mais ça ira Yael.
-Tu ne lui as rien dit j'espère ?
Je me retourne seulement pour lui lancer un regard mauvais.
-Pour qui tu me prends ? Bien sûr que non. Je ne prendrais aucun risque de vous mettre en danger. Aucun.
J'insiste sur le dernier mot pour être sûr qu'il saisisse le message. Je ne veux pas qu'il se mette à croire que je ne suis plus la même qu'avant.
-Hm. Je ne l'aime pas.
-Pour quelles raisons ? dis-je le sourire aux lèvres en remettant des draps propres, car ce qu'ils ont vécus cette nuit pourrait tuer mes frères.
-Je ne l'aime pas c'est tout.
-Ça ne m'étonne pas. Mais soit cool s'il te plait. C'est un gentil garçon.
-Je ne lui ai toujours pas mis mon poing dans la gueule, je pense que c'est assez.
Je soupire et lui balance un oreiller, qu'il me relance tout de suite. Par chance je l'évite, mais il s'écrase sur ma table de nuit, et me voilà par terre entrain de tout ramasser.
-Yael ? je demande en me relevant.
-Hm ?
-Swann bosse avec vous ?
-Ouais. Nous en parlerons plus tard.
-Il fait quoi ?
-Rien de fou. Livreur.
-De ?
-Arme.
Je lâche l'oreiller que je tenais et bloque face à lui.
-Rien de fou tu me dis ? C'est déjà beaucoup trop.
-Lyah, tout part en couille là-bas. Les Corsica prennent de plus en plus de terrain et nous cherchent de plus en plus. Nous devons nous reprendre.
-En incluant des têtes que vous aviez toujours dit ne jamais inclure. Gin est au courant ?
Son silence est une réponse.
-Tu imagines s'il me faisait bosser derrière ton dos ?
-Je le tuerais.
-Voila.
Je continue de faire le lit dans un rythme beaucoup plus violent, et il doit remarquer ma soudaine colère.
-Lyah, détends-toi. S'il te plait. Je te jure qu'on fait attention à lui, et il ne fait pas de livraison dangereuse.
-Ok. Bref. Changeons de sujet. Je veux profiter de vous tant que vous êtes là. Je n'en reviens pas que nous allons faire Noel avec Dara.
-A qui le dis-tu. Si ça ne tenait qu'à moi elle ne serait pas là. C'est Kai qui l'a prévenu, Costia ne le savait pas.
-Yael. Tu ne peux pas lui en vouloir toute ta vie.
-Neuf ans qu'on ne l'a pas vu. Neuf. Je ne sais pas comment tu peux trouver cela normal.
-Je ne trouve pas ça normal, mais je suis tellement contente de l'avoir retrouvée, je ne veux pas perdre de moment à lui en vouloir. Tu devrais faire de même, je sais qu'elle t'a manqué.
Il s'enfonce dans mon siège et sourit les yeux fermés.
-Quelle sagesse, on dirait Kai.
-Tu as vu ça ? Je prends de la graine.
-Il en faut bien un.
Je m'assoie en face de lui et lui met un coup de pied dans le genou pour qu'il me regarde.
-Tu as l'air crevé.
-C'est pour cela que nous sommes en vacances. Pour te voir, et pour se reposer quelque jour. Te voir m'apaisera surement un petit peu aussi.
Je lui souris, mais il me fait un doigt d'honneur pour être sûr que le moment mignon ne dure pas trop longtemps. Bien sûr, je lui rends.
-Bien. Aller vient, dis-je en me levant. Allons rejoindre les autres.
Dans mon appartement, je retrouve la vie que j'avais avant. Ma maison n'est plus silencieuse, elle n'est plus vide. Le bruit prend place dans mes tympans, et c'est le bruit de l'entourage. Le meilleur que je puisse connaitre.
Mon cœur bat encore plus fort quand je vois Elyass assis à côté de Lewy, lui racontait je ne sais quoi alors que ce dernier l'écoute attentivement. Il doit sentir son regard car une demi seconde ses yeux trouvent les mien. Il me sourit discrètement, je ne peux que lui rendre un encore plus grand.
Je vais aider Swann à mettre la table, et je participe un petit peu en cuisine. Etant très vite un boulet, je rejoins mon filleul qui s'assoit directement sur mes genoux, à coté de Lewy. Swann ne tarde pas à nous rejoindre.
-Bordel, je suis en Amérique putain. J'espère que vous êtes prêt parce que je veux sortir tous les jours. Jones, je compte sur toi pour un guide personnel pour nos vacances.
-Deux gros mots, repère Elyass en levant le doigt.
-Et quoi ? Tu vas le dire à tes parents ?
-Non. Pas du tout. Je ne suis pas une balance.
Je secoue la tête, car je sais qu'il a dû entendre ce mot de la bouche de Swann, c'est certain.
-Si tu veux oui, reprend Lewy, mais je ne sais pas si je suis le bienvenu ?
-Bien sûr que si tu l'es, tu as osé répondre à Yael, crois-moi ça lui plait. Il fait genre, mais il a aimé.
-Tu as répondu à mon frère ? je lui demande. Quoi ? Quand ? Pourquoi ?
-Discussion de mec dolce, ne fouine pas ton nez de femme là-dedans.
Je ne le calcule même pas et fixe Lewy, et j'espère qu'il comprend ce que je veux lui dire. On reprendra cette discussion. Et il me le dira.
-J'ai hâte de me taper des petites américaines.
-D'un, et Iris ? De deux, tu es la une semaine, tu n'auras pas le temps.
-D'un, qu'elle aille se faire bip, de deux, bien sûr que j'aurais le temps, tu oublies peut-être le don juan que je suis ? Qui ne rêverait pas de se taper un tel beau gosse ? répond-il en jouant avec sa casquette.
-Ouais. Si tu le dis, dis-je en rigolant, comme Lewy.
*
Nous finissons par passer à table après une bonne heure et demie d'attente. Je suis comblée de rire et de sourire, d'amour et de tendresse. Le repas est bon, tout le monde aime ses cadeaux, tout le monde passe une bonne journée, et ça ne peut que me rendre heureuse.
Tout est parfait. Idyllique.
Après le repas, nous jouons à des jeux de sociétés. Plus particulièrement le Time's Up, un de nos jeux préférés. Swann a bien évidemment fait exprès de mettre Yael et Lewy ensemble, sans moi, et c'est hilarant de voir mon frère essayer de supporter Jones, de le tacler alors que ce dernier ne se laisse pas du tout faire.
Et il faut croire que ça lui donne encore plus envie de continuer. Yael est comme moi, tiens lui tête et il continuera avec le sourire.
Enfin bon, je les laisse faire et profite de mon petit chéri Elyass, qui est plus à fond que jamais comme toujours. C'est un petit garçon très intelligent et très mature pour son âge, et ça me fascine toujours. Je me demande si c'est l'environnement dans lequel il a grandi qui la rendu comme ça, ou simplement son éducation.
Peut-être les deux.
Il est toujours excité, nous avons longtemps suspecté une hyper activité, mais selon les médecins ce n'est pas le cas. Tant mieux pour lui. Il aime jouer, il aime parler autant que moi et adore chanter. Ce petit bout d'ange est le plus beau que je n'ai jamais vu, il ressemble à sa mère autant qu'a son père, et c'est le plus beau mélange. La peau mate avec des petites taches de rousseurs, des jolies bouclettes et des yeux marron clair.
Mon bébé, c'est le plus beau du monde.
-On a gagné marraine, dit-il en me tendant la main pour que je tape dedans.
-Bien joué loustic.
-Ça, c'est grâce à moi.
Je frappe derrière la casquette à l'envers de Swann pour lui faire tomber, en même temps que son égo surdimensionné.
-Jalouse, dit-il simplement en se levant pour aller fumer.
La fin d'après-midi approche, je prépare mes affaires afin de laisser libre accès à ma chambre après. Je vais déménager un peu dans le salon et avec le plus grand des plaisirs. Je vais dormir sur le canapé avec Elyass quant à Yael et Swann, eux ils dormiront avec nous sur des matelas. A plusieurs dans le salon, exactement comme quand nous étions plus petits. Ça me ravive de beaux souvenirs.
-Toc toc.
Lewy entre dans ma chambre alors que je plie mon linge, et ferme la porte derrière lui.
-Tu passes une bonne journée ? me demande-t-il.
-Super. Vraiment. Je ne pouvais pas rêver mieux. Et toi ?
-Ouais. Ils sont chouette ta famille. Je les trouve, chaleureux. Accueillants.
-Tous ? je demande en rigolant.
-Bon, à l'exception d'un, certes.
-Je l'ai trouvé assez calme personnellement.
-C'est ce que Swann m'a dit, et ce qui fait encore plus peur.
Lewy s'assoit sur le lit juste derrière moi et attrape mes hanches pour m'attirer contre lui. Ses lèvres embrassent ma nuque et me chatouille au passage.
-À tout moment Elyass entre et hurle « Tonton !! ».
-Il ferait vraiment ça ?
-Oh que oui.
Il rigole dans mes cheveux et m'assoit sur le lit. Son visage devient sérieux un instant, et il plonge ses yeux foncés dans les miens. Ils me toisent longuement, et un de ses doigts enroule une de mes mèches.
-Avant de partir, j'ai quelque chose pour toi.
Il sort de ma table de nuit un paquet cadeau que je n'avais même pas vu, et j'écarquille les yeux.
-C'est quoi ? je demande alors que je comprends très bien.
Je ne m'en rends juste pas encore compte.
Le petit paquet dans ma main, je le regarde sans rien faire.
-Tu dois l'ouvrir tu sais.
-Oui. Bien sûr.
C'est ce que je fais.
Et je jurerais que les larmes pourraient me monter aux yeux si je ne puisais pas dans toutes mes forces. Tout simplement car la culpabilité monte en moi, encore et encore, de plus en plus.
Je ne mérite pas ses cadeaux.
Je ne le mérite pas tout court, mais je reste.
Je reste car je n'ai pas envie d'être loin de lui. Alors je reste avec tous mes mensonges, qui ne sont que des bombes à retardement.
-Il te plait ?
Je me rends compte que je ne disais rien depuis une bonne longue minute, entrain de fixer le bracelet dans cette boite.
Quand je relève la tête, je lis la surprise sur son visage. Je sais que mes yeux sont humides, je ne réussis presque pas à les retenir.
Trop d'émotion, aujourd'hui.
-J'espère que tu es émue et non pas dégoutée.
-Il est magnifique Lewy. Mais, tu n'aurais pas dû.
Il hausse les épaules et attrape délicatement mon poignet, puis le bracelet en mini perle, bleu nuit, avec une étoile dorée au milieu.
-J'ai acheté un cadeau à Maria, puis quand j'ai vu ce bracelet, je ne sais pas. J'ai pensé à toi. Je me suis dit qu'il t'irait bien, alors je l'ai pris.
Moi aussi j'aurais pensé à lui en voyant ça. Une étoile, un bleu nuit comme le ciel. C'est Lewy et moi. Quand je regarderais ce bracelet, je regarderais notre histoire.
Je caresse les perles lentement alors que ses doigts sont toujours autours de mon poignet.
-Merci. Ça me fait vraiment plaisir.
-Alors ça me fait plaisir aussi. Joyeux Noel ma Ly.
-J'ai un cadeau moi aussi, dis-je sans être trop convaincu. Mais tu fais vraiment chier, Lewy Jones, je ne pensais pas que tu m'en offrirais et que ça devait être sérieux.
Son sourire timide jusque-là, montre maintenant les dents.
-Je veux voir ça.
-Je ne l'ai même pas emballé.
-Je veux toujours voir ça.
C'est vrai, c'était une idée idiote, sans prise de tête, mais voilà que Monsieur a eu la brillante idée de m'offrir un bijou magnifique qui a du couter un prix exorbitant. Si j'avais su, je lui aurais acheté quelque chose de plus sympa.
Je sors tout de même la boite en carton qui trainait dans mon dressing, et lui pose sur les genoux.
-C'était pour rigoler, pour le fun. Je ne pensais pas que tu serais si sérieux.
-Tais-toi, dis-t-il en soupirant et en ouvrant la boite.
Ce qui est drôle, c'est qu'il a la même réaction que moi, alors que la différence de cadeau est grande. Il ne réagit pas au début, puis le coin de ses lèvres remontent timidement. Il sort d'abord la figurine du grinch, puis le porte clef étoile, lune et télescope que j'ai trouvé sur un site internet vraiment pas mal.
Son sourire s'agrandit petit à petit à chaque découverte. Quand il sort le dictionnaire espagnol, il hoche la tête.
Ce n'est pas exactement le même espagnol que le Mexique, mais nous avons les mêmes bases, donc ça fera l'affaire. Je ne sais pas pourquoi, mais j'avais envie qu'il se rapproche encore plus de moi. A défaut de connaitre la vérité, je peux l'inclure sans lui dire.
-Je vais l'apprendre dès ce soir, pour être sûr de comprendre ce que ton frère sortira de sa bouche.
-Tu n'as pas envie de tout comprendre.
Il me sourit, puis son regard retrouve le fond de la boite. Ses yeux fixent le dernier cadeau, et je joue nerveusement avec mon ongle au vu de cette non-réaction. Ce sont quelques secondes de blocage après qu'il sort mon petit carnet personnalisé, avec une couverture étoilée, que j'ai nommé « Le dictionnaire des mots et expressions préférées de Perez. ». Il tient le carnet dans ses mains, et le silence se fait au-dessus de nous pendant qu'il le fixe sans le lâcher pendant des secondes qui paraissent interminables.
Il ne dit rien non plus quand il relève la tête vers moi. Sa main attrape ma nuque automatiquement, et il se contente de m'embrasser tendrement.
-Je l'apprendrais dès ce soir aussi, pour être sûr d'être encore plus proche de toi, le plus vite possible, dit-il contre mes lèvres, entre deux baisers. Je veux te connaitre par cœur.
-Ça te plait quand même ? je demande. Tu aurais dû me dire qu'on s'offrait des cadeaux.
-Pourquoi ? Tu y as pensé de toi-même, pas besoin de moi.
-J'aurais fait mieux.
-Il n'y a rien de mieux que ce qui vient du profond du cœur. Merci Ly. Vraiment.
Je me mords la lèvre du bas, et il vient caresser ma joue avant d'embrasser le bout de mon nez.
-Je vais y aller, moi.
-Tu peux rester tu sais. Si tu ne veux pas voir tes parents tu es le bienvenu ici. Il y'a de la place pour tout le monde chez nous.
-Non ne t'inquiètes pas. Je vais rejoindre Maria dans ma maison de campagne pour ce soir. De toute on va vite se revoir je pense, Swann compte sur moi pour ses vacances si j'ai bien compris.
-Ok. Passe le bonsoir à Maria. Et n'hésite pas si besoin.
-Pas de soucis. Bonne soirée Alyah, dit-il en se levant, avec le même sourire tendre qui ne le quitte plus.
Il me fait un clin d'œil et sort de ma chambre, laissant un vide immense derrière lui. Alors que ma famille est là, je me sens déjà un peu plus seule. Juste car il est parti, et que je me suis un peu trop habituée à sa présence.
Mauvaise habitude.
Je fixe le magnifique bracelet à mon poignet et le caresse de mes doigts. Je n'en reviens pas, je n'ai jamais rien vu d'aussi beau, mise à part le collier de ma maman. C'est une lune et un soleil, elle me l'avait offert quand j'étais encore petite. Aujourd'hui, Lewy complète l'équation avec l'étoile.
-Marraine, je peux prendre un bain ?? demande Elyass en ouvrant la porte comme un fou et en courant partout.
-Bien sur mon cœur, tu vas voir, j'ai plein de produit incroyable. Viens avec moi.
Je passe dans le salon ou Dara et Kai lavent la vaisselle pendant que Costia la range. Swann et Yael sont déjà en train de jouer à la Play, le tout la musique toujours à fond.
J'avais presque oublié ce que ça faisait de vivre en communauté, de vivre avec sa famille. Je me noyais dans ma solitude et dans le vide de cette maison, et enfin le voilà comblé par l'atmosphère qui me manquait tant, et qui a comblé toute ma vie.
Ça risque de faire mal quand ils partiront.
Dans la salle de bain, je fais couler l'eau chaude dans la baignoire alors que Elyass touche déjà à tout dans mes affaires, je le laisse faire puis met de la mousse et des produits sent bon dans l'eau.
-Waaaaaaah, ça va faire des bulles !! Mamaaaaaan marraine fait des bulles !!
-C'est cool mon chéri, amuses toi bien, lui répond-t-elle en criant au-dessus de la musique.
-Aller grimpe, lui dis-je en attrapant son petit corps frai.
Il rigole et pousse un petit cri de joie en entrant dans l'eau chaude.
-Oh j'adore, dit-il en appuyant sa tête contre le rebord, mais il se redresse vite pour jouer dans les bulles.
Je me lève pour augmenter le chauffage, mais il attrape la poche de mon short.
-Non ! Restes avec moi.
-Je reste là mon cœur, ne t'inquiètes pas.
-Cool. Parce que tu m'as vraiment manqué, je ne veux pas perdre une seconde de toi c'est compris ? dit-il sur un ton faussement autoritaire, en essayant d'imiter son père.
-C'est compris chef, dis-je en m'asseyant sur le tabouret, juste à côté de la baignoire, pour jouer avec lui.
*
La soirée passe assez vite, on enchaine tous les douches, je prépare maintenant à manger. Kai et Costia ont finalement décidé d'aller manger chez Dara pour ce soir, alors il ne reste plus que les moins compliqués. Je nous fais des pattes et des steaks, rien de mieux pour rassasier le gamin, et les deux accros à Fifa.
Après le repas, nous nous installons tous dans le salon, chacun bien blotti dans son coin, et je lance un dessin animé, surtout pour que Elyass soit content.
Finalement, je pense que je vais tomber de fatigue la première, car je suis exténuée de cette journée. Je regarde mon frère, puis Swann, je caresse les cheveux de Elyass, et me rend vraiment compte qu'ils sont bien là, dans mon appartement.
C'est le plus beau cadeau qu'on ait pu me faire.
Avec ce bracelet, bien entendu, que je tripote jusqu'à endormissement.