Achille

Von hisruffledfeathers

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Icare brûle, Icare s'enflamme, mais le soleil l'acclame. Icare aime le soleil d'un amour éternel Mehr

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BONUS Spécial Fêtes
Hector 1-
GROSSE ANNONCE- publication d'un livre
ACHILLE GROSSE ANNONCE

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Von hisruffledfeathers

J'suis assis dans le noir, une clope au bec et un verre de vin rouge dégueulasse à la main. Il est assis devant moi. On attend dans le silence, comme si cela allait changer quelque chose. Dans quelques secondes la dernière bataille de Troie va s'enclencher, et un de nous va brûler. S'écraser.

Il tire une longue taffe de sa propre cigarette, expiant la fumée de sa bouche comme il recrache ses péchés devant le prêtre. Je regarde les volutes s'envoler. J'ai l'impression d'y avoir laissé des traces. Pourtant c'est ses poumons qui s'embrasent.

"T'étais où?" il demande, comme si j'avais des amis, comme si j'avais quelque part où aller. Il sait, on sait, nous savons, cela ne sert à rien de dégainer immédiatement les crocs.

" Chez Hector."

" Donc j'te demande en mariage, t'as besoin de réfléchir, et tu vas réfléchir chez ton ex, c'est ça?"

" C'est mon ami, Thomas."

" T'as couché avec lui?"

Je sens le problème. Je sens le vieux lui, celui qui me répugne, qui ressort comme un monstre affamé, un monstre qui vient de se réveiller.

" Non, mon coeur, on a juste discuté, je te tromperais jamais—"

" T'as couché avec. J'espère qu'il t'a bien baisé, au moins, parce que là tu me dégoutes."

" Mais c'est quoi ton problème, là, au juste? J'suis allé chez un pote, il s'est rien passé, pourquoi tu me sautes dessus comme ça? Tout va bien entre nous, Thomas, tout va bien, rien n'a changé."

" Non. Tout a changé. Je sais pas ce qu'il s'est passé, je sais pas ce qu'il t'a dit, mais dès que tu es entré j'ai su. Y'a un truc. Y'a un truc et ça me débecte."

" Thomas s'il te plaît—"

" Je suis désolé. Je suis désolé. Je ne voulais pas— Je suis désolé. Je sais que je réagis de trop. Pardon. Je te crois. Il ne s'est rien passé. D'accord. C'est juste, tu sais, avec lui, enfin, il s'est passé tellement de choses entre vous que j'ai du mal à concevoir une entrevue platonique, tu comprends?"

" Je comprends."

" Pardon. Est-ce-qu'on peut recommencer?"

Je descends mon verre de rouge, je tire sur ma cigarette. Je me sens nauséeux, je crois que la panique me monte à la tête. J'ai chaud, je veux partir, mais je suis chez moi, je n'ai nul part où aller. Je veux prendre l'air, me changer les idées, mais là est l'heure de parler.

" Bien sûr."

Pause. On remet les idées en place, on se remet en face à face.

" Tu trembles." il fait remarquer

" J'suis anxieux."

" T'as un truc à me dire?"

J'ai l'impression qu'il me connait par coeur mais sans réellement me connaitre. Je ne sais pas pourquoi ma vision des gens est aussi malléable. Hier c'était l'homme de ma vie et aujourd'hui il me dégoute.

"Oui."

" Dis le, alors."

" Je pense— enfin— je sais pas comment dire les choses, Tom, donne moi trois secondes— Okay."

" Pas de soucis."

Je me lève, j'écrase ma clope dans le cendrier, j'attrape la bouteille de rouge et je me ressers un verre que je m'empresse d'avaler. Le goût me reste dans la gorge, j'ai envie de le recracher. Je me rassois, sur la chaise, face à lui. Dans la pénombre je ne le vois pas bien. Ses yeux prédateurs, sa bouche, son nez. J'ai envie de le toucher, je n'ai pas envie de parler, j'ai envie qu'il me prenne contre un mur et qu'il me fasse penser à autre chose. Mais je ne peux pas, il faut qu'on parle, il faut que je parle.

" Est-ce-que tu nous vois papis, dans une maison en campagne, en train de roupiller dans le même lit?"

Il sourit, narquois.

" J'me vois même pas demain, Achille. Pourquoi cette question?"

" Est-ce-que t'as pensé aux enfants, à la famille, à la retraite, est-ce-que t'as pensé à un futur avec moi?"

" Depuis quand est-ce-que le dépressif de service se projette?"

" T'aurais pu t'abstenir de dire ça, Tom."

" Pardon, pardon. Non mais sérieux, t'en poses des questions là."

" Si tu te projettes pas dans le futur, pourquoi est-ce-que tu m'as demandé en mariage? Pourquoi est-ce-que t'avais demandé Fred en mariage? Ça veut dire quoi, le mariage, pour toi?"

" Bah.. enfin. Voyons, Achille.."

" Réponds moi, je suis curieux."

" Ça veut dire que tu m'appartiens, quoi, que t'es à moi et que je suis à toi et que—"

" Donc j'suis ta chose?"

" Non non, pas comme ça—"

" Alors comment? Parce que je suis déjà censé être la même chose maintenant."

" Oui sauf que là c'est moins sérieux fin—"

" C'est tout autant sérieux, Tom. Le mariage est une promesse faite devant l'administration, la famille ou Dieu mais fin cette promesse est déjà censée exister avant."

" Je sais pas, j'essaie d'être romantique, Achille. Pourquoi est-ce-que tu commences à douter?"

" Parce que je ne nous vois pas vieux ensemble."

" Mais c'est dans longtemps, pourquoi est-ce-que tu penses à ça?"

" Je nous vois pas parents, ou même adultes, des vrais. On fait que baiser, boire et fumer. C'est pas une vie."

" On peut très bien arrêter."

" Tu crois? Tu crois que tu peux arrêter tous tes vices comme ça, juste parce que je le demande?"

" Non— mais c'est pas comme si tu pouvais, toi—"

" C'est pas une question de ça. C'est une question d'être capable de sacrifices. Est-ce-que tu m'aimes, Tom?"

" Bien sur que je t'aime—"

" Et si je voulais plus jamais que tu me touches, tu m'aimerais encore?"

" Mais le corps est une partie— enfin— c'est important pour moi de te donner mon amour à travers mon corps. Tu déformes tout, mon coeur, tu sors tout de son contexte."

" Je pense que je peux pas accepter ta demande en mariage."

" Je comprends pas. Tu me réclames du sérieux, tu me demandes de te prouver que je ne vais pas partir, que je suis entièrement sûr de ce que je fais, et pourtant tu passes ton temps à douter de moi, à me remettre en question, à ne pas accepter les preuves que je tente, que je tente de toute mon âme de t'offrir. On dirait que tu sais faire que ça, saboter ta propre vie."

" Thomas je n'essaye pas de saboter quoi que se soit. Cela ne veut pas dire que je ne veux pas être avec toi. J'essaye de réfléchir, réfléchir à ce qui est bien pour moi. Et le fait est que si on se marie je serais coincé avec toi alors que je ne suis pas sûr que sur le long terme on est bien ensemble. Tu l'as dit toi même— deux poètes qui se rencontrent forment une explosion."

" Tu dis ça mais ça veut dire que tu attends juste le bon moment pour me quitter. Qu'est ce que ce fils de chien d'Hector t'as dit pour que tu fasses la girouette comme ça?"

" Je ne fais pas la girouette."

" Putain, Achille, réfléchis deux secondes. Il te susurre à l'oreille que je suis pas bien pour toi et tu reviens et tu fais tout péter. Pourquoi est-ce-que t'es allé le voir, même? M'épouser était si horrible que t'avais besoin de lui pour te convaincre de ne pas le faire, d'une manière qui te permettrait de pas te sentir coupable d'avoir niquer la seule relation durable de ta putain de vie? Je croyais que j'étais ton Patrocle, je croyais qu'on s'était dit qu'on était fait l'un pour l'autre, pour le meilleur et pour le pire. Je te comprends vraiment pas— et ça me frustre. Et ça me met en colère. Et j'ai envie de gueuler, mais j'ai changé, je ne veux pas redevenir ça, ce monstre qui te gueule dessus pour un oui ou pour un non. Pour toi j'ai essayé de devenir meilleur. Je ne te suffis pas?"

" Je suis obligé de tout prévoir pour être sur que ça marche. Aller chez la psy, vérifier que tu y es allé, te demander de communiquer, espérer que tu vas être compréhensif quand ça va plus, espérer que mon corps continue de te suffire pour pas que t'ailles baiser la voisine et son mari, j'arrive pas encore entièrement à te faire confiance, j'arrive pas à te croire quand tu me dis que tu m'aimes, et je sais pas si c'est moi, mes soucis de merde, ou si c'est juste parce que c'est toi, toi qui m'as prouvé encore et encore que tes promesses étaient de la merde, que c'était du vent. Je sais que t'as changé, malgré tout je le vois, et j'essaye d'y croire, j'essaye d'y placer de l'espoir. J'essaye de croire que notre amour est suffisant, que cela suffit pour durer, que s'aimer comme ça suffit pour avoir assez. Mais c'est pas assez. Je ne pense pas que c'est assez pour qu'on devienne deux papis heureux. Avec toi j'ai encore peur de l'hiver, et je pense pas pouvoir vivre comme ça, pas éternellement."

Je vois ses yeux à la lueur de la clope qu'il vient d'allumer. Ils brillent d'un gris amer, triste comme l'hiver.

" J'suis vraiment désolé, Achille. J'aimerai tellement être mieux. Je t'ai dit que j'étais un monstre, j'étais honnête quand je te disais ne pas être assez bien pour toi. J'osais espérer que ça changerait avec le temps, que je deviendrais quelqu'un de meilleur, de plus jaune, plus chaud, plus antre. Plus comme lui. Je sais que tu vas partir, je le sens dans ta manière de parler. Je sais que tu vas partir le rejoindre, lui déclarer ta flamme de manière un peu abrupte. Je sais que tu vas te ruer dans ses bras."

" Non, Tom."

" Je t'aime. Je t'en supplie ne pars pas."

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