Lorsque la forêt chante

By delavieencouleurs

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« Vous pourriez tuer un homme, demoiselle Foreas. » Cela sonne plus comme une affirmation qu'une question. Né... More

1 | Un grand loup gris en guise d'ombre
2 | Jugement trop hâtif
3 | Aussi fourbe que manipulateur
5 | L'autel de la paix
6 | Un secret jalousement gardé
7 | En attendant le chant
8 | Une réalité qui ne changera pas
9 | Balance politique
10 | Douleur lancinante.
11 | Le sens de la nuance.
12 | Innocente surprise.
13 | Des secondes ressemblant à de trop longues heures.
14 | Vibrante de ressentiment plus que de crainte.
15 | La magie de cet instant
16 | À son paroxysme.
17 | Jusqu'à ce que le problème s'en aille.
18 | Mauvaise idée.
19 | Improbable conversation.
20 | Un millier d'éclats
21 | Air menaçant.
22 | Affaire urgente.
23 | Un regard lourd de sens.
24 | Ce simple geste.
25 | Nous avons un problème.
26 | Pas de temps à perdre en mauvaise foi.
27 | D'une main possessive.
28 | Dis-le.
29 | Rictus narquois.
30 | Qu'avec toi.
31 | Un être totalement innocent
32 | Nouvelle réalité.
33 | Nulle part ailleurs.
34 | Comme une promesse.
35 | Chaque chose en son temps.
36 | Lecture étrange.
37 | Respect mutuel.
38 | Une voix froide et détachée.
39 | Éloge funèbre.
40 | À ton image.
41 | Un air grave.
42 | Moment suspendu.
43 | Regard nostalgique.
44 | Puisque plus rien ne te retient.
45 | Le seul son que j'ai besoin d'entendre.
46 | Derrière tout cela.
47 | Implorer la forêt.
48 | La proposition que j'attendais.
49 | Marche.
50 | Des doigts sur ma peau.
51 | Tu comprendras un jour.
52 | Nous dire au revoir

4 | Le tour de vos griefs

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By delavieencouleurs

Passant ma jambe par-dessus l'encolure de Nerad, mes pieds nus rejoignent le sol à quelques centimètres de l'indésirable – séduisant – prince n'ayant cessé de me scruter.

J'ai de la terre sur le visage ou quoi ? Je sais... Ça m'arrive tout le temps ! Il n'empêche que c'est impoli de fixer les gens avec tant d'insistance !

— Parlez-vous toujours du cheval ?

Pas du tout !

— Quoi d'autre ?

Me plaçant face à l'équidé, je sors une carotte de la poche de ma robe, la croquant avec désinvolture avant de lui donner le reste. Ensuite, je me dirige vers mon père – qui déborde d'inquiétude – déposant un baiser sur sa joue avec toute mon affection.

— Cesse de t'inquiéter, tout ira bien, chuchoté-je à son oreille.

Cela fait dix-huit ans que nous y parvenons, après tout. Il n'y a aucune raison pour que cela change. En guise de réponse il m'enlace en soupirant, essayant d'avoir l'air naturel. Franchement ? Il a tellement mieux fait d'opter pour une carrière de conseiller plutôt que d'acteur !

— Allons faire cette promenade, suggère-t-il.

Mauvaise idée finalement, papa ! Je te l'avais proposée lorsque je pensais que nous n'étions que tous les deux !

— Il me paraît plus judicieux d'aller dîner, contré-je vivement. Je voudrais éviter de retenir le prince trop longtemps.

Plus vite il mange, plus tôt il part ! C'est d'une logique implacable ! Non ?

— J'ai tout mon temps, réplique le concerné.

Ah. Quelle chance !

— Et moi, j'ai faim, grogné-je, levant impulsivement les yeux au ciel.

Prenant une longue inspiration pour rassembler les vestiges de mon calme, je commence à m'éloigner, choisissant d'ignorer à quel point ma réaction semble l'amuser.

— Je vais raccompagner Nerad à l'écurie, je vous rejoins à la maison.

L'attirant avec un autre légume, je me fige lorsque je réalise que quelqu'un emboîte notre foulée. Oui. Je dis « quelqu'un » parce que je préfère rester dans le déni, voyez-vous.

— Que faites-vous ? grondé-je.

— Je vous accompagne, déclare-t-il en souriant, à nouveau terriblement arrogant.

Je ne suis guère idiote, je le vois bien !

— Pour quelle raison ? demandé-je fébrilement, les yeux plissés par la contrariété.

— Ainsi votre père peut informer votre mère de ma présence, explique-t-il, accompagnant son propos d'un haussement d'épaules des plus nonchalants. Ce sera plus correct que de la prendre par surprise.

Ah. Cela ne t'as nullement dérangé en ce qui me concerne, pourtant !

— Nous vous rejoignons dans quelques minutes, décide-t-il, épinglant mon père avec sérieux.

Évidemment, papa n'a d'autre choix que de céder – vous vous en doutez – alors il opine puis se détourne, clairement à contrecœur. Bien entendu, ce n'est pas qu'il s'inquiète de laisser sa fille seule avec un homme, puisqu'il s'agit là d'un grand mot en présence de Loaf, silencieux mais attentif, comme toujours. Non. Il a plutôt peur que mon caractère ne m'attire des ennuis et que je me retrouve demain dans la forêt en direction de problèmes encore plus gros. Nerad entamant sa troisième carotte avec appétit – sans que je n'ai bougé – le prince-je-te-crée-des-soucis s'approche, provoquant un froncement instinctif de mes sourcils.

J'étais bien, là, pourquoi a-t-il fallu que tu viennes gâcher ma soirée ? Qui n'en est qu'à son début ! Et que je dois passer avec toi ! Oh, misère... ça promet !

— Suivez-moi si vous y tenez, marmonné-je.

En dépit de la sécheresse de mon ton, il affiche un air ravi menaçant de me faire sortir de mes gonds. Je décide donc de marcher le plus rapidement possible, car si je me dépêche ce tête-à-tête durera moins longtemps.

— N'avez-vous aucune crainte de vous faire mal ?

Voilà une question me semblant sortir tout droit de nulle part.

Mais de quoi parles-tu ?!

Je lui lance une œillade incrédule par-dessus mon épaule, le découvrant hilare que je n'ai saisi le sens de son interrogation.

— Aux pieds.

Oh. En quoi est-ce ton problème ?

Prenant le parti de l'ignorer, je continue à me frayer un chemin parmi les herbes hautes, Loaf, Nerad – et lui hélas – sur mes talons. Sans chaussures, en effet. Ni me soucier de me blesser, non. Ok, peut-être puis-je comprendre que la situation paraisse surréaliste à un homme du royaume voisin en tenant compte du fait qu'elle l'est toujours pour les gens me connaissant depuis ma naissance. En tout cas, sachez que la grange ne m'a jamais parue aussi lointaine que ce soir !

— Vous ne voulez pas me parler.

Wahou. Perspicace !

Sincèrement, c'est plus sûr que je reste silencieuse, étant inquiète de mal contrôler les mots pouvant sortir de ma bouche si je n'ai personne pour m'inciter à me contenir. In fine, je pose enfin les doigts sur la porte en bois tant espérée, l'ouvrant avant de m'effacer pour laisser entrer l'équidé. Je lui passe rapidement un coup de brosse, cure ses pieds avec application sous l'attention persistante du prince-incruste-toi, puis lui sers une ration de céréales sur laquelle il se jette, heureux. Ensuite j'attrape un seau, me dirigeant naturellement vers le puit.

— Parlez-moi de votre cheval.

Non merci ! Tu ne peux guère m'obliger à te faire la conversation !

Un soupir m'échappe et avec lui, un semblant de politesse me rattrape.

— Nerad est gris.

Juste un tout petit semblant, comme vous pouvez le constater. Au lieu de s'offusquer face à mon insolente réponse, il réprime un éclat de rire, s'approchant alors que je suis occupée à remonter de l'eau. Son bras se tendant spontanément en direction de la chaîne que je tire, le regard noir que je lui adresse l'incite à se raviser.

Je n'ai pas besoin de ton aide ! Rentre-toi ça dans ton fichu crâne princier !

Circonspect, il s'appuie sur le muret en pierres, me dévisageant attentivement.

— Sa peur du contact est-elle liée aux cicatrices présentes sur ses flancs ?

Hum. Existe-t-il une possibilité pour que tu t'y intéresses sincèrement ?

J'attrape le récipient, le posant sur le rebord avant de m'arrêter pour le jauger.

Non. Je m'en fous. Tu n'es qu'un connard arrogant dont je dois me débarrasser, je n'ai aucune envie de me confier à ce sujet.

Le détaillant distraitement de bas en haut, je me détourne pour attraper une écuelle posée à proximité, servant à boire au loup. Me laissant ensuite glisser jusqu'au sol pour le câliner, je ne peux retenir un petit rire quand son museau trempé rejoint mon cou.

— C'est froid, protesté-je mollement. Arrête, je vais être toute mouillée !

Le loup se redressant, j'ai tôt fait de comprendre le message qu'il m'adresse.

— Tu as faim, à tout à l'heure.

Je dépose un baiser affectueux entre ses deux oreilles, le contemplant pendant qu'il s'éloigne en direction de la forêt, mon cœur se serrant douloureusement lorsque je remarque l'intérêt que lui porte le prince Angü.

N'y. Pense. Même. Pas.

— Et sois prudent !

Déglutissant difficilement en imaginant quelqu'un lui faire du mal, j'attrape le contenant d'eau, m'éloignant afin de l'apporter à l'écurie.

— Donc, observe-t-il, vous n'êtes pas en permanence avec lui.

— Est-ce une menace ?! craché-je sèchement, mon sang ne faisant qu'un tour.

— Je vois que vous m'en voulez, Elora, sourit-il, secouant légèrement la tête.

Ah oui ?! Sans. Blague ?! Ça t'étonne ?!

— Expliquez-moi, insiste-t-il. Je ne cherche qu'à vous comprendre.

Pourquoi ?! Et puis, as-tu vraiment besoin d'une explication ?! À quel point es-tu stupide finalement ?!

Je pose le seau près de Nerad, lui adressant une dernière caresse avant de prendre la direction de la maison. Sauf que le prince-je-veux-discuter me rejoint en quelques enjambées, attrape mon poignet, me tirant vers lui d'un geste sec pour m'obliger à lui faire face.

Quoi, encore ?!

Ma respiration se bloque.

Es-tu obligé de me toucher ?!

— Dites-moi pourquoi vous m'en voulez.

— Pour quelle raison ? riposté-je pendant que ses lèvres s'étendent, lui conférant un charme évident.

Crétin !

— Je voudrais arranger les choses.

Pour-quoi ?! Nous n'avons nullement besoin de nous entendre que je sache !

— Lâchez-moi !

Tu as du bol que Loaf ne soit plus dans le coin !

— Je le ferai dès que vous m'aurez répondu, tranche-t-il, plongeant ses prunelles sombres dans la colère des miennes.

O-kay ! Très. Bien ! Finissons-en !

— Trois choses, articulé-je lentement, levant le menton avec fierté tandis qu'un éclair de surprise traverse ses traits. Vous avez menacé Loaf. Deux fois !

Il approche son visage du mien et mon pouls accélère.

Merde !

— Mais vous m'avez remis à ma place, m'indiquant que j'étais plus dangereux que lui, souligne-t-il avec une insupportable justesse. J'ai admis que c'était vrai.

Est-il nécessaire que tu sois toujours si proche ?! Espères-tu m'impressionner ?! C'est loin d'être le cas !

— Précisément, rétorqué-je abruptement sans reculer d'un pouce. Donc ne vous attendez pas à ce que je vous fasse confiance !

Ses lèvres se pincent, toutefois il se retient de surenchérir, comme s'il acceptait ma réponse avec toute sa véhémence.

— La deuxième chose ?

— Vous m'avez insultée en me traitant d'hypocrite ! m'exclamé-je, aussi furieuse que vexée.

Cela t'étonnes que je t'en veuille ?!

— Je pense que vous l'êtes, lâche-t-il avec indifférence.

Ah. O-kay. Interessante méthode pour arranger les choses, je prends note parce qu'elle a l'air hyper efficace, j'adore !

— Ensuite ?

— Vous voulez m'obliger à faire quelque chose contre la volonté, exhalé-je. C'est de l'abus d'autorité !

Ses iris vacillent, me donnant l'impression d'avoir heurté un point sensible.

Bien fait !

— Avons-nous fait le tour de vos griefs, demoiselle Foreas ?

Puisque tu en parles...

— J'en ai bien un quatrième qui me vient, raillé-je avec arrogance, agitant mon poignet emprisonné entre ses doigts, un sourcil arqué.

Il se redresse en me lâchant, me permettant de m'éloigner.

— Maintenant, puisque vous êtes là pour dîner, allons-y.

— En réalité j'ai surtout profité de l'occasion pour vous voir, rétorque la voix dans mon dos avec une improbable legerté.

Mais, enfin ?!

— Je veux comprendre pourquoi vous refusez de vous rendre à la chasse, poursuit-il alors que je demeure muette.

Ça. Ne. Te. Regarde. Pas. Néanmoins, peut-être est-ce ma seule chance pour que tu oublies ton idée stupide, alors je vais te le dire.

M'arrêtant pour l'affronter à nouveau, je plonge mon regard irrité dans le sien, constatant qu'il semble sincèrement attentif.

— Je ne tue pas, c'est ainsi.

Ah. Tu es plus sceptique maintenant.

— Mais vous mangez tout de même !

Ok. Je sais que ce n'est guère commun, donc je vais t'expliquer.

— Laissez-moi être claire, prince Angü.

— Estéban, me reprend-t-il encore.

Vraiment ?! C'est bon, tout le monde dans le coin – et même plus – sait qui tu es !

— Ne recommencez pas avec ça ! m'agacé-je.

— Alors appelez-moi par mon prénom, insiste-t-il placidement.

Tu blagues ?!

— Oh, répliqué-je avec défiance. Encore une chose à laquelle vous voulez me contraindre ?

— J'essaye juste d'être aimable, marmonne-t-il, fronçant les sourcils.

Râté !

— Et bien vous êtes nul ! rétorqué-je, lui faisant pousser un long soupir exaspéré.

Nous somme quittes !

– Très bien. Revenons-en au sujet principal. Vous ne tuez pas, cependant vous mangez.

C'est ça, c'est ça. Faisons cela. Tu as tort, nous en sommes là.

— C'est une fausse supposition que vous avez faite avant de me juger de façon arbitraire, contré-je, cynique. J'espère que vous allez avoir le temps de mûrir avant de devenir roi !

Sa mâchoire se crispant, je jubile totalement.

Touché !

— Éclairez-moi, s'impatiente-t-il.

C'est simple. Écoute. Apprends.

— Je ne tue pas d'animaux pour vivre et personne ne fait ce que vous appelez « le sale boulot » à ma place non plus.

Ah. Évidemment que tu paraît étonné. C'est atypique, je le sais.

— Soyez plus précise.

C'est pourtant clair !

— Ni pour manger, ni pour m'habiller, ni pour quoi que ce soit.

Je le laisse digérer l'information – semblant vraiment le surprendre – en prenant la direction de ma maison, étrangement satisfaite par l'expression qu'il arbore.

Et ouais. Tu as été con. Plusieurs fois. Espèce de crétin !

***

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