27 * Alors c'est ça, la vie ?

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Agathe

Zach a déniché un endroit charmant, non loin d'une plage vide. Le bruit des vagues m'apaise. Il sait que l'eau a le don de me calmer instantanément. Bercée par le son de la mer, mes paupières se ferment naturellement. L'odeur saline vient chatouiller mes narines tandis que l'effluve du repas s'en mêle peu à peu. Zachary chantonne aux fourneaux pendant que je profite du coucher du soleil. Les couleurs pastels se reflètent dans l'immensité bleue. Et cela me donne envie de le rejoindre.

Emmitouflée dans un pull lui appartenant, je le trouve devant le petit évier, observant le panorama par la fenêtre. Notre escapade va toucher à sa fin ce soir, il sera déjà l'heure de retourner dans notre quotidien. Mais je m'en fiche, parce que je sais que nous pouvons partir avec le van n'importe où, à n'importe quelle heure.

Des yeux azur se posent sur mon visage, faisant chauffer mes joues.

— Tu ne te baignes pas ? s'amuse-t-il.

— Il fait trop froid, bougonné-je, m'asseyant sur la table d'appoint.

Il sourit simplement. Lorsque je l'ai entendu dire adieu à son frère, j'ai eu peur. J'ai conscience qu'il a une forte tendance à s'oublier lui-même pour les autres, surtout s'il les aime. Seulement, je ne voulais pas qu'il fasse un tel choix à cause de moi. Alors, quand j'ai compris qu'il s'agissait d'une décision mûrement réfléchie, qu'il cherchait uniquement à se permettre d'avancer, j'ai ressenti une bouffée de fierté. À présent, il s'autorise à être lui-même et j'adore le voir agir. Il n'hésite plus avant de proposer quelque chose. Même s'il a encore ses petites sorties nocturnes, cela m'est égal. Je sais que ce sont des manies qu'il conservera. Cela joue en son charme indéniable.

S'approchant de moi, sa main se pose sur ma peau nue. Celle qui restera brûlée à tout jamais. Je tressaille, n'ayant pas l'habitude qu'on me touche à cet endroit-là. Ça me fait un bien fou. Grisée par cette sensation encore nouvelle, mon front trouve sa place sur son épaule.

Quand j'ai vu cet homme dans le hall de l'immeuble, je n'aurais pas pu deviner qu'il s'agissait de son frère. Au-delà de l'apparence physique, il paraissait imbu de lui-même, arrogant, hautain. Tout le contraire de mon Zachary. Et dire qu'il est celui à l'origine de tous nos maux.

Arthur et Alexis demeurent silencieux. Mon père tente réellement de comprendre, il remet tout en perspective. Cela prendra du temps. Et Margot me soutient indéfectiblement, comme toujours. Que dire d'Achille et Auguste ? Ils sont encore perturbés par la réaction de leurs aînés. Achille m'appelle tous les jours, pour être sûr que je me porte bien. Je suis retournée sur la tombe de Maman. Il fallait que je lui explique la situation avec mes mots, même si elle n'est pas acceptée par tout le monde. Il faut vraiment que j'ai une discussion avec mes deux frères.

La paume de Zach se glisse sous mes cheveux, flattant ma nuque. Mon nez remonte le long de son cou, jusqu'à ce que mes lèvres rencontre sa peau. Il frissonne sous mes doigts, ne prononçant pas un mot. Humant son odeur, j'emmêle sa chevelure brune tandis qu'il s'approche, prenant place entre mes jambes ballantes dans le vide. Je suis si petite à côté de lui...

Ses prunelles pétillent d'un éclat jusqu'alors inconnu. Et son air amusé me rend toute chose. Son sourire forme des fossettes adorables au coin de ses lèvres. Je me souviens de lui, au lycée, avec ses cheveux trop longs, ses joues maladroitement rasées, son regard intense, son style passe-partout. Nouant mes chevilles dans son dos, je prends le temps de scruter le moindre de ses traits. Visiblement mal à l'aise, ses sourcils se froncent.

— Arrête de me regarder comme ça, ronchonne-t-il, se cachant dans le creux de mon cou.

Un sourire étire naturellement mon visage.

Fille de pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant