Écris et crie

Immersion

Je n'ai pas peur de tout,
J'ai peur sans cesse

Je n'ai pas peur de marcher dans la rue,
Mais j'ai cette boule dans la poitrine,
Chaque jour qui passe.
Elle ne me quitte pas
Et je la sens au creux de moi
Comme une main qui me tire vers le bas.
Je suis née sans cette angoisse,
Mais elle me suis maintenant.
Partout où je vais elle est présente
Elle me rappelle à chaque seconde
Que quelque chose peut se passer
Sans que je puisse y remédier
Que quelque chose peut me détruire
Et je n'aurais qu'à me taire

Je n'ai pas peur de tout,
J'ai peur sans cesse

Je n'ai pas peur de manger,
Mais cette peur peut rendre infecte
Un plat que je trouvais bon la minute d'avant.
À cause d'elle, je suis perdue.
Elle me déboussole en permanence,
Je ne peux même pas avancer droit.
Je titube, prenant le soleil pour mon ange protecteur,
Tournant presque autant que ma tête.
Elle me rend aussi vulnérable et sensible
Que si j'avais perdu un être cher.
Alors que c'est juste le sens de ma vie
Qui fiche le camp,
Qui prend le large
En me disant tout bas que je suis dans la merde.

Je n'ai pas peur de tout,
J'ai peur sans cesse

Je n'ai pas peur de dormir,
Mais si je ferme les yeux,
Ce sont les cauchemars qui me frappent.
Alors, je me roule en boule et ne sachant que faire,
J'attends que mon corps ne supporte plus le manque de sommeil
Pour être emporté dans un univers
Où les mauvais rêves arrivent malgré tout
Parfois encore à venir me torturer.
Je me couche la boule au ventre,
Je me réveille les larmes aux yeux.
Et parfois les cris de mes cauchemars
Ne sont en fait que la réalité,
Je me maudis à ces instants
D'avoir osé m'endormir.

Je n'ai pas peur de tout,
J'ai peur sans cesse

Je n'ai pas peur du temps qui passe,
Je vis ma peur de crise d'angoisse en insomnie
Et d'insomnie en maux de tête.
Je ne compte pas les jours avant Noël
Car je connais les faux semblants.
Moi, je compte les fêtes qui tournent mal
J'y ai droit tous les ans.
Un sourire à mamie,
Des bisous au enfants.
Cette peur fait danser devant moi
Les bouteilles d'alcool et verres de vin
Comme des remèdes à mes terreurs
Dont l'étiquette mentionnerait juste,
"Pour oublier le temps d'un soir".

Je n'ai pas peur de tout,
J'ai peur sans cesse

La vie ne me fait pas peur,
Il faut juste que j'oublie qui je suis
Et pourquoi elle me salit.
Je fais sourire les bambins dans les poussettes
Et les personnes âgées sur leur banc,
Mais quand je regarde dans le miroir,
Mes joues sont affaissées,
Mon regard inexpressif.
Est-ce que les gens savent qui je suis vraiment ?
Est-ce que je sais qui je suis vraiment ?
Toutes ces questions me taraudent,
Toute cette peur me blesse,
Et parfois, je me pose même la question,
Ai-je encore envie d'être moi ?

Je n'ai pas peur de tout,
J'ai peur sans cesse

J'ai peur de ne pas réussir à empêcher le pire,
Peur justement de devoir empêcher le pire.
J'ai passé ma vie à essayer de me cramponner
Avant de me rendre compte
Que tout tombe avec moi au final,
Et que ce sentiment d'être en sécurité
Dans les bras de sa mère
N'est qu'une illusion puisqu'elle chute aussi.
J'ai envie de rire encore et comme avant,
Faire la fête et rentrer sans me sentir coupable,
Et surtout pouvoir promettre
À mes sœurs que tout va s'arranger.
Redonner un sens au réconfort,
Retrouver le sens de tout.

Je n'ai pas peur de tout,
J'ai peur sans cesse

Je n'ai pas peur de courir,
Mais j'ai peur de tomber
Parce que je sais que personne ne sera là,
Parce que personne ne me relèvera,
Parce que personne ne verra que je ne suis plus debout.
Je n'ai qu'une envie, c'est monter sur la plus haute montagne
Et hurler, hurler au ciel,
Lui demander dans une longue plainte
Si tout ça n'est au final qu'une vaste blague.
Je rêve de dormir pendant des mois
Et de me réveiller et que tout soit fini.
Je rêve de partir loin et d'oublier.
Mais l'ignoble réalité ressurgit,
L'angoisse aussitôt m'accapare.

Je n'ai pas peur de tout,
J'ai peur sans cesse