Partie 37-38-39

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Je m'approche d'elle, nos regards se croisent. Le mien est rempli de questions, le sien est triste et humide. Elle me regarde et me

fais un beau et grand sourire. Son visage est toujours radieux, comme celui de Zahra.

Je m'assoie à côté d'elle, tout en souriant elle me demande : - Comment vas-tu? Et l'enfant?
Je lui réponds que je vais bien, je remercie Allah. Son regard est toujours aussi triste, je m'y noie et j'ai l'impression d'y lire ma

propre tristesse.
Nous nous regardons, elle savait que je voulais lui demander, elle baisse la tête et je commence à lui parler:

- Je t'en pris ! Om Salam, peut être que tu sais où il peut être, je t'en pris, dis moi... Dis moi où tu penses que Sayfullah est!

- ....

Elle ne dit rien, elle baisse toujours la tête. Je lui répète:

- Pour l'amour d'Allah !

Alors doucement elle relève sa tête et me regarde avec des yeux remplis de larmes. Elle se retenait de pleurer et comme toujours

tentait de sourire.

- S'il te plais Wardah, si tu veux connaître la vérité, il faut être forte et pouvoir la surmonter. Ne t'attriste surtout pas lui, il

est en prison.

PRISON ? MAIS POURQUOI PRISON? IL N'A RIEN FAIT ! IL N'A RIEN FAIT ! PRISON POURQUOI ? POURQUOI ? DITES MOI POURQUOI?

- Parce qu'il est Palestinien.

Om Salam s'approche de moi et me serre dans ses bras. Elle me dit que je dois rester forte, elle me dis que rien n'est éternelle, elle

me parle calmement, elle me dis que la tristesse ne doit as être plus forte que mon espoir en Dieu. Et quand je l'entends parler, ce

n'est plus sa voix que j'entends, c'est la voix de Sayfullah. Je ferme les yeux et j'imagine que je suis dans ses bras, sa voix m'est

revenu, elle m'apaise, je me sens bien.

Puis d'un seul coup je commences à sentir quelque chose bouger dans mon ventre et , ce que je ressentais au fond de moi était

indescriptible. Cet enfant est mon unique lien avec lui, cet enfant est ce qui me rends plus forte. J'ai l'impression qu'à chaque fois

que je me sens triste, il réagi pour moi , comme pour me dire : Ne soit pas triste.

(...)

Il faut que je sois forte...

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Le téléphone sonne, je suis seule à la maison.
Je me lève difficilement, je n'ai pas la force de trop marcher, je vais cependant répondre.

- Allô ?

Je n'entends pas très bien, ça coupe, il y a du bruit derrière. J'ai l'impression d'entendre une voix derrière le téléphone. J'insiste

:

- Allô ? C'est qui ? Allô ?

Je n'entends vraiment pas bien, la voix continue de parler, il y a trop de bruit derrière. ça coupe.

Je pose le téléphone et je vais m’asseoir. Quelque temps après tous le monde est à la maison. Om Salam s'occupe beaucoup de moi, la

grossesse est devenu très fatigante.
En discutant avec elle je me souviens de l'appel que j'ai reçu, je lui en fait part alors elle se dirige vers le téléphone et regarde

le numéro. Il s'était écoulé quelques secondes et elle regardait toujours le téléphone, ensuite j'entends :

- Vous avez un nouveau message. Reçu aujourd'hui à **

<< Ya Allah ! Ya Allah ! Hel tesma3in ? Ana Salma ! Ana Salma ! (...) >> (trad: Ya Allah ! Ya Allah ! Est-ce que tu entends? C'est

Salma! C'est Salma!)

La personne qui parlait paraissez vraiment affolé, ce qui m'a alerté. Om Salam se retourne vers moi, son visage avait changé de

couleur, elle me dis :

- Il... Ils cherchent à nous joindre la bas, ça a l'air urgent!

Tous d'un coup mon coeur commence à battre vraiment trop fort, je me sentais vraiment mal, je m'attendais au pire.

Quelques minutes après, tous le monde était réuni et Om Salam était entrain de téléphoner en Palestine. C'était très long. Enfin,

après plusieurs tentatives, quelqu'un répond enfin.

(Ils se parlaient bien évidement en arabe, mais voilà ce qu'ils se disaient en français):

Om Salam : Assalam 'alaykum, c'est Om Salam a l'appareil, qui est avec moi ?

Salma: Wa 'alaykum assalam wa rahmatollah wa barakatoh ! Om Salam ? Om Salam ?

Elle pleurait en parlant.

Om Salam: Ecoute Salma, calme toi et raconte moi calmement; qu'est ce qui se passe? Ina lilah wa inna ilayhi raji3oon (nous sommes à

Allah et à lui nous retournerons)

Salma : C'est... Depuis... écoute bien ce qui s'est passé, Sayfullah était arrivé, tante Rahma (la mère de Sayfullah) était déjà

revenu à la maison.. Le lendemain, ils sont venu, ils ont embarqué Sayfullah avec eux. On a tous tenté de les empêcher, tu sais... Ils

ont essayé de faire du mal à tante Rahma, Sayfullah a essayé de la défendre... et il les a frappé ! Ils l'ont alors frappé et menotté,

mais il est toujours vivant, il est en prison et ils ne le traitent pas bien du tous ! Tante Rahma se rétablissait mais maintenant

elle est inconsolable ! Durant des jours nous ne pouvions pas vous joindre car ils étaient chez nous, ils ont tous pris, TOUS ! (...)

Tout d'un coup, Om Salam a lâché le téléphone et elle a éclaté en sanglot, elle pleurait tellement fort et disait :

- Que Dieu nous venge ! Que Dieu nous venge ! Que Dieu nous venge ! YA ALLAH ! YA ALLAH !

Ce qui m'a subitement brisé le coeur et je ne pouvais plus contenir mes larmes, je pleurais aussi et tous le monde dans la maison.

Au téléphone Salma continuait à parler :

- Allô ? Om Salam il a un message pour sa femme, transmet lui, il a insisté pour ça.

Om Salam a prit le téléphone et me la tendu, je l'ai pris et j'ai écouté :

- Dans ce message il dit : A ma femme, à la prunelle de mes yeux, qu'elle lises et considère le verset suivant :
200 de la sourate 3, car c'est ainsi que sont les véritable croyants et qu'elle sache que l'au-delà est bien meilleur pour ceux qui

croient et qu'elle ne s'attriste pas et ne penses pas que je suis loin car la vie n'est qu'une prison certes, et l'au delà est bien

meilleur !

J'en ai versé des larmes jusqu'à que mes yeux rougissent et je comprenais maintenant AlHamdulilâh !

(...)

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Un soir alors que je dormais, je fut réveillé par une sublime récitation coranique. Je me suis assise sur mon lit et j'ai commencé à

écouter, la voix était magnifique et je reconnu très vite que c'était Muslim.
Ce soir-là il était encore malade, personne ne savait vraiment ce qui lui arrivait car il parlait très peu et il était un enfant très

timide. Il avait beaucoup de fièvre et Om Salam veillait à ses côté, elle commençais aussi à être malade. De mon côté je n'étais pas

en très grande forme aussi, ma grossesse devenait de plus en plus difficile.
Mais, ce soir-là, cette récitation fit pénétrer en mon coeur une sorte de joie particulière et intense, et je voulais absolument aller

l'écouter de plus prêt. Je me suis alors voilée et je suis déscendu dans l'obscurité. Arrivé au salon je cherchais Muslim des yeux et

c'est ainsi que je l'ai vue assis, la tête baissé. Il ne savais pas que j'étais là, alors il récitait puis s'arrêtais quelque fois

pour pleurer, sa petite voix brisait mon coeur. Après quelques minutes, alors qu'il commençait à réciter sourate Taha, j'ai eu l'envie

subite de lui adresser la parole et de le consoler. Je ne savais pas comment lui faire sentir ma présence sans l'effrayer, mais

finalement j'ai décidé d'allumer la lumière; il s'était subitement arrêté de réciter, et il ne changea pas de position, il était resté

comme glacé, je crois qu'il ne voulait pas se retourner pour ne pas que je vois ses larmes.
Ce qui me fit pleurer c'est le fait qu'il était posé dans la place où Sayfullah venait prier et réciter le Coran avec lui, et sa

manière de réciter ressemblait vraiment à celle de Sayf.
Je voulais lui parler mais les mots restaient coincés, je n'arrivais pas à prononcer quelques choses. Alors sans réfléchir, je

commence à réciter :
- Bismilah Al Rahman al raheem, Taha; wa Ma anzalna 3alayka alquran litashqa (..) "Nous n'avons point fait descendre sur toi le Coran

pour que tu sois malheureux"
Mais il ne disait toujours rien. Soudain, il se met à pleurer et je voyais son dos bouger alors qu'il essayait de se retenir et mes

larmes tombeaient de mes yeux comme des goutes de pluis.
- Merci... Muslim ! Merci d'avoir commencé à lire cette sourate, car tu as égayé mon coeur ! Ne veux-tu pas continuer ?
Après ces mots il s'était un peu calmé et toujours sans se retourner il a continué sa récitation là où il s'était arrêté. Je me suis

assise assez loin de lui et je l'écoutais, je savais à ce moment là que Sayfullah serait fier de son frère, et cette pensée me

réjouissait et effacé toute ma peine.
Ensuite je commençais à réciter avec lui et il osa enfin se retourner vers moi, mais toujours sans me regarder. Sur son visage je

pouvais à la fois voir sa peine et la maladie qui l'afaiblissait. Mon coeur me faisait horriblement mal.
- Pourquoi pleures-tu ya Muslim ?
Il osa enfin me répondre, et il me dit timidement :
- J'ai peur de ne plus revoir ma mère et Sayfullah, je ne veux pas les perdre ! Je ne veux pas qu'il leur arrive comme à mon papa

(...)
Et quand il eu dit ça, c'est comme si ces mots lui avait encore plus mis devant une triste et dur réalité, et il faisait de son mieux

pour ne pas pleurer, ses larmes tombeaient quand même. Et ce petit garçon qui avait perdu son père à l'âge de 4 ans et qui risquait de

perdre sa mère et ... peut être son frère me brisait le coeur.
Je me devait de le consoler et lui dire ce que Sayfullah me disait souvent :

" Qu'importe ? Ne soyons pas comme "eux"! Soit heureux qu'un de tes proches soit tombé pour la cause de Dieu car Il se trouvera auprès

de son seigneur et il sera parmi les rapprochés. La vie n'est pas éternelle et nous devons nous comporter comme des voyageurs ! Si

quelqu'un de proche s'en va, alors se n'est que pour un temps, nous allons bientôt le rejoindre ! "
- Muslim, ton père est auprès de Dieu et si ton frère ou ta mère le rejoignent avant toi, tu ne dois pas être triste mais tu dois

attendre.. patiement , jusqu'à le jour de la rencontre !
Il me regardait désormait et je me rendais enfin compte des paroles que j'avais prononcés et qui étaient si dur à accepter pour moi

même, voilà qu'elles étaient enfin devenu clairs.

Chronique de Sabrina : Cerise sur le ghettoWhere stories live. Discover now