Le départ.

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     Le jour, où plutôt la nuit, de l'évasion est fixé après de nombreuses tergiversations. Ce sera le 20 juin 1791. Pour donner le change, les époux partent séparément. En attendant leur départ en compagnie de Madame de Tourzel, les deux enfants royaux sont confiés en catimini à la soeur du roi. Louis XVI, après s'être mis au lit devant l'habituel parterre, qui assiste à son coucher, se relève, s'habille en bourgeois et rejoint Fersen. Ce dernier l'attend à bord d'une berline quelques rues plus loin, dans une petite artère perdue au milieu d'un lacis de ruelles au centre de Paris. Le fiacre doit les emmener au carrosse qui stationne près de la barrière de la Villette. Dans l'incessant tourbillon des personnes de services qui vont et viennent, la sortie du roi passe inaperçu. Puis vient le tour de Marie-Antoinette, vêtue d'une simple robe, les traits dissimulés sous un large chapeau. Elle quitte les Tuileries par l'arrière..... Mais se perd dans les rues alentour, avant de retrouver enfin son chemin et tout son petit monde. Et fouette cocher, vers le carrosse et la berline destinée au personnel qui accompagne la famille royale dans sa fuite. Mais les deux véhicules ne sont pas au point de rendez-vous ! En fait, ils stationnent un peu plus loin, à l'écart de l'octroi, bruyant et fortement éclairé ce soir là car on y fête une noce. Là s'arrête le rôle du bon Fersen: il retourne vers Paris, tandis que la troupe des fuyards prend la route vers L'Est, en s'enfonçant dans la nuit complice.

       Si le roi semble d'excellente humeur en mettant ces lieus entre lui et la capitale, Marie-Antoinette, elle,reste anxieuse. Apeurés, les enfants ne disent mot. Les villes défilent sans encombre. On fait halte à la Ferté-sous- Jouarre pour changer les bêtes, puis on passe à Montmirail, Châlons-sur-Marne avant d'arriver à un petit relais peu fréquenté à Pont-de-Somme-Vesle, où le duc de Choiseul attend le carrosse royal, avec un détachement de dragons vers une heure de l'après-midi. Mais un accident de parcours va les ralentir. Les chevaux, en dérapant, rompent leur harnais, ce qui provoque près de quatre heures de retard. Choiseul pensant le projet abandonné, se retire avec sa troupe. Si bien que lorsque l'équipage se présente, il ne trouve personne et décide de continuer en direction de Sainte-Menehould.

    Les dragons de Choiseul ont installé leur campement un peu à l'écart de cette ville. Aussi, lorsque le carrosse atteint Sainte-Menehould, personne ne l'attend. Pour s'en convaincre, le roi se penche à la portière, fouillant du regard les alentours. Là, hasard malheureux, son visage n'échappe pas à un certain Drouet: employé de la poste du lieu, il a un temps travailler à Versailles. De plus il connaît le visage du souverain via les pièces de monnaies. Aussi le personnage qu'il aperçoit à cette portière ne lui est pas inconnu. Pour autant, et quoique l'équipage laisse vraiment penser qu'il s'agit bien la d'un individu de haut rang, il doute....

     Toujours suivi de sa berline, le carrosse reprend la route de Varennes, où un autre relais est préparé par un certain Valory. Comble de malchance, arrivés à Varennes, les deux postillons qui conduisent la berline décident de planter la leur monde. La famille royale se retrouve donc, en pleine nuit, dans un village endormi, sans chevaux ni postillons, ni troupes de protection ! Le jour se lève, on décide tout de même de quitter la ville, mais à la sortie, le carrosse est bloqué par des gardes nationaux chargés de surveiller la route. Les passeports sont demandés, examinés et acceptés, lorsqu'une rumeur s'élève. Une foule s'agglutine, excitée par Drouet qui a finalement donné l'alerte. Pour éviter toute tentative de départ de la berline, on fait bloquer le pont sur l'Aire à la sortie de la ville. On dresse même deux canons. Les fugitifs sont forcés de s'arrêter. Louis XVI descent du carrosse et se présente à la foule en arguant que sa fuite n'a d'autre raison que de protéger sa vie et sa famille: "Je ne pouvais rester à Paris sans y mourir ", déclare t-il. En pleine révolution, son aura reste intacte et certains osent même crier "Vive le Roi", tandis qu'il embrasse qui se prosterne devant lui.

    Alertée par le bouche-à-oreille, la foule se précipite depuis les villages voisins, curieuse mais pas agressive. Arrive enfin un personnage qui semble empreint d'autorité, un certain Jean-Baptiste Sauge, épicier, fabricant de bougies, procureur de la commune, averti lui aussi par Drouet. Aussitôt, et en absence du maire de la ville , il prend les choses en main en sa qualité de député à l'Assemblée nationale . Afin de mettre la famille royale à l'abri de la foule, il lui propose d'entrer chez lui. Marie-Antoinette et les enfants monte à l'étage se reposer tandis que le roi dans la salle du bas accepte une collation . Viennent ensuite, et enfin, Choiseul, le comte de Damas et ses hussards qui devaient se charger du roi au relais de Clermont. Parmi ces militaires se trouve le baron Goguelat, secrétaire de Marie-Antoinette. On décide de repartir au petit matin, pour achever le voyage vers Montmédy.

Marie-Antoinette.Where stories live. Discover now