7. Cérémonies ~ Nathaniel (version éditée)

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Le silence absolu qui règne dans la salle des marbres ainsi que les lueurs des chandelles qui trouent la pénombre ambiante confèrent une atmosphère très particulière à ce moment. Une atmosphère propice à l'introspection. À regarder tous ces noms gravés dans la pierre, je prends encore plus conscience de la voie dans laquelle je m'engage. C'est un chemin qui peut être dangereux et qui peut m'amener à faire le sacrifice ultime pour mon pays : celui de ma vie. Comme tous les hommes dont les noms habillent ces murs ont dû le faire en leur temps. Mais malgré le risque, une seule certitude habite mon cœur : je veux absolument aller au bout de ma formation, je veux devenir pilote de chasse. En cet instant, je n'ai jamais été aussi sûr de moi !

Au bout d'environ une grosse demi-heure, un autre binôme se présente pour nous relever. Léo et moi rentrons nous coucher pour grappiller encore un peu de sommeil avant la cérémonie.

Le grand moment arrive quelques heures plus tard. Nous pénétrons dans la salle des marbres et nous nous positionnons devant les premières marches. Les appliques murales et les plafonniers qui réchauffent la pierre de leur lumière jaune ont pris le relais des chandelles désormais éteintes. Face à nous, une assistance imposante, presque intimidante. Le grand escalier central est occupé par les hauts gradés et quelques personnalités tandis que les officiers de la promo marraine des 20 ans, celle de 1986, ainsi que les anciens des promos en « 6 » se répartissent sur les deux volées qui rejoignent le premier palier de l'escalier. Sur les côtés de la pièce, nos zefs sont rangés en ligne. Le lieu majestueux, la qualité des personnes présentes, leur nombre et leur disposition dans la salle, tout concourt à montrer la solennité de l'instant.

La cérémonie débute avec le discours du commandant de l'École de l'air qui met l'accent sur l'importance des traditions, sur le sacrifice de l'engagement, celui que nos aînés morts pour la patrie ont fait.

Tandis que nous attendons au bas des marches, tous parfaitement alignés, les majors des différents modes de recrutement s'avancent vers le grand escalier. Là, un haut gradé se saisit d'un poignard disposé sur un coussin rouge et le lui remet. Lorsque je vois le major de ma promo revenir et réintégrer sa place à ma gauche, mon rythme cardiaque s'emballe. Je sais que cela va bientôt être mon tour, car je suis sur la première ligne. Malgré les gants blancs, je sens mes mains devenir moites, ma respiration s'accélérer bien malgré moi et un léger vertige m'envahir.

Le claquement sec d'un poignard contre le marbre rompt le silence. À ce signal, en même temps que les autres poussins de ma ligne, je fais un quart de tour sur place, puis nous nous mettons en mouvement ensemble. En marchant au pas, nous nous dirigeons vers le côté droit de la salle, grimpons les cinq marches pour aller nous positionner en une ligne parfaite. Pendant ce temps, nos zefs sortent également des rangs pour prendre nos poignards sur la table. Nos deux lignes se croisent en sens inverse et c'est le cœur battant à tout rompre que je m'arrête face à mon zef. Entre ses deux mains gantées, paumes ouvertes et tendues verticalement, Gautier tient mon poignard, simplement par pression. De la main droite, j'ôte ma casquette et la coince sous mon coude gauche, puis je pose le genou droit à terre. Le dos raide et incliné en arrière, je pose ma main droite sur mon genou gauche tout en gardant mon bras tendu.

Tous ensemble nous levons devant nous nos deux mains, paumes tournées vers le plafond. Nos zefs se penchent, le buste droit, et maintiennent les poignards au-dessus de nos mains pendant plusieurs secondes. À cet instant, je fais abstraction de tout ce qui m'entoure. J'oublie le gars à mes côtés, j'oublie les gradés et les personnalités qui assistent à la cérémonie, j'oublie même les anciens qui nous observent. Aucun sourire n'éclaire mon visage ni celui de Gautier. Nos yeux rivés à ceux de l'autre, nous ne communiquons que par le regard. Nous sommes tous les deux conscients de la solennité de l'instant. Il est sur le point de me remettre l'attribut qui accompagnera toutes les circonstances majeures de ma carrière. C'est un moment unique. Je sens la chair de poule parcourir mon épiderme. Lorsque mon zef dépose le poignard sur mes mains, j'inspire profondément et je prends conscience d'avoir retenu ma respiration jusque-là.

Mach 2 Tempête dans le viseur T2 (Edité chez Amazon)Donde viven las historias. Descúbrelo ahora