Troisième partie

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Charles proposa une promenade matinale à ses hôtes. Ceux-ci lui firent remarquer qu'ils s'étaient déjà baladés la veille, mais acceptèrent malgré tout. Ils étaient ravis de constater que leur chère Paris attirait autant leur invité.

Le provincial, satisfait, choisit alors minutieusement les rues dans lesquelles il souhaitait passer. Il voulait retrouver cet homme. Il le fallait. Mais il devait cependant espérer qu'il ne soit pas parti entre temps...

Bien moins attentif aux merveilles que pouvait lui offrir la ville, Charles marchait plus vite qu'à son habitude. Ce qui n'échappa pas à ses deux hôtes, tous deux perplexes. Ce ne fut qu'arrivé dans une certaine rue qu'il ralentit enfin le pas. C'était à cet endroit qu'il l'avait vu la veille. Avec un peu de chance, il serait encore là... Attentif au moindre détail, Charles inspecta l'endroit.

« Cette rue semble vous plaire, constata l'un de ses hôtes, ce n'est pourtant pas la plus remarquable. »

Mais le provincial ne répondit pas, trop concentré à chercher celui qu'il souhaitait retrouver. Il regarda avec attention tout ceux qu'il croisait. Cependant, plus il avançait, plus il perdait espoir. Celui qu'il cherchait était très certainement parti...

Ce fut finalement une fois arrivé à la fin de la rue que Charles se senti soulagé. Il se trouvait bien là ! Assis sur le trottoir, le fameux jeune homme à la chevelure noire tenait dans ses bras sa petite fille, aux cheveux similaires.

Il était tout aussi misérable que la veille. Les hôtes du provincial détournèrent même les yeux devant cet homme au visage sombre de poussière et aux vêtements troués. Mais Charles, lui, continuait de l'observer. Il ralentit encore davantage le pas, et quand il parvint à croiser son regard, il fut tout d'abord surpris du manque de vie qu'il s'y reflétait. Il trouva même une certaine former d'hostilité à son égard, comme si Charles était en partie la cause de sa piteuse situation.

Soudain, le bourgeois s'arrêta devant le jeune homme. Ils restèrent tout d'abord ainsi, à se regarder. Les deux hôtes insistèrent devant leur invité pour poursuivre leur promenade, mais Charles restait là. Puis, prenant son courage à deux mains, il dit du ton le plus convainquant qu'il put :

« Cette jolie petite fille, est-ce la vôtre ? »

Le concerné se contenta de hocher la tête. Les hôtes du provincial, quant à eux, semblaient surpris, presque indignés qu'un homme d'un niveau social de Monsieur Marrier s'abaissaient à s'adresser ainsi à ce roturier.

Mais Charles était indifférent à leur réaction. Poursuivant son but, il continua :

« Elle me fait énormément penser à ma propre fille, restée avec ma femme en province, inventa-il. Qu'elle me manque ! Me permettez-vous que je puisse adopter ce si bel enfant ? »

Toute la rue sembla se figer à la suite de cette demande. Le jeune père regarda son locuteur, puis sa fille, sans vraiment comprendre ce qu'il lui arrivait. Il n'entendait plus aucun bruit et ne voyait plus personne autour de lui. Plus rien d'autre de comptais que cet homme mystérieux et sa demande insensée.

« Je peux vous offrir la somme qui vous convient en échange, ajouta Charles sortant une liasse de billets de sa poche. »

Révolté par cette proposition, le jeune père voulut refuser. Son cher enfant était tout pour lui. Jamais il n'accepterait de l'abandonner ! Mais le bourgeois insista encore un peu plus, et le jeune homme se mit à réfléchir. A réfléchir à la vie que cet étrange bourgeois pourrait offrir à sa fille. Une vie bien meilleure qu'il ne pouvait lui donner en tant que père. Alors, serrant son bébé sans ses bras comme pour la protéger, il demanda d'une voix monotone :

« Parlez-moi de vous. »

Le provincial commença donc à l'informer de son nom, son prénom, son travail, sa région d'origine, sa famille, ses hobbies, et tout un tas d'autres choses qui lui semblaient plus ou moins importantes. Le jeune père l'observait tout en l'écoutant.

Charles était un homme pour le moins charmant. Grand blond aux yeux bleus, il semblait déborder de gentillesse. Il est vrai qu'une impression pourrait paraître insuffisante pour confier son enfant, mais le jeune homme comprit qu'il avait là l'unique occasion de sauver sa fille. Un instant, il la regarda. Elle semblait paisible. Elle regardait Monsieur Marrier de son habituel air curieux et admirateur. Alors il lui sourit, se leva, et s'approcha de Charles.

« J'accepte, finit-il par dire d'un ton qui trahit ses tourments. »

Le bourgeois se mit à sourire de soulagement, et avant toutes autres choses, il demanda :

« Quel est votre nom ?

— Georges... Et voici Marie.

— Bien Georges, je vous promets de prendre soin de Marie. »

Sur ces mots, Charles tendit la liasse de billet au jeune père, qui lui confia son enfant. Finalement, Georges dit timidement :

« Merci pour elle. »

Il regarda Charles Marrier, qui après un long face à face silencieux s'était décidé à partir, accablé par les questions et les indignations de ses hôtes. Dans ses bras se trouvait Marie, tendant la main en direction de son père. Elle pleurait.

Georges, quant à lui, se contenta de lui dire au revoir d'un discret signe de main. Adieu Marie, soit heureuse.

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Un grand merci à tous d'avoir lu cette histoire ! N'hésitez pas à me donner votre avis, je suis curieuse de savoir ce que vous en avez pensé ^^
À la prochaine !

Adieu, sois heureuseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant