Avada Kedavra

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Le soleil était déjà haut dans le ciel lorsque le garde vint le chercher. Soit Il avait eu une soirée probablement très agréable avec Son harem, soit avec d'autres femmes de l'extérieur. Le sexe était peut-être le seul domaine où Il excellait, du moins depuis ses victoires militaires. Le roi Salmanazar V était un bon roi pour son peuple, du moins au début. Mais depuis quelques années, il délaissait son royaume pour son propre appétit.

La cour avait réussi à dissimuler cela durant de longs mois, mais le peuple n'était pas dupe. Pas complètement. Et même si les sorciers ne constituaient qu'une petite partie de la population, ils étaient suffisamment bien placés dans la communauté pour que les Sans-magie les écoutent. Certains d'entre eux se faisaient passer pour des sorciers afin d'acquérir la même position sociale, mais ils s'agissaient principalement de charlatans.

Sharroukin avait réussi à contenir l'effervescence qui régnait dans les rues de Kalkhu, la capitale, mais il ne pourrait pas tenir plus longtemps. Hier encore, les membres les plus éminents des sorciers étaient venus le retrouver pour lui faire comprendre qu'il devait agir. Il n'était plus possible d'accepter cette décadence ou ce serait la fin d'Assyrie.

Si le père du roi avait permis à Assyrie d'acquérir une puissance sans pareille dans le monde, et si Salmanazar V avait suivi le chemin de son père, l'ivresse du pouvoir l'avait rendu dangereux pour le maintien de l'empire. Il bafouait les traditions, changeant sans arrêts d'assat sarri – les épouses royales – sans aucun respect du protocole. Tant que le roi était resté au sein même du harem, cela n'avait pas de grande importance.

Mais depuis qu'il n'hésitait plus à envoyer des soldats de la garde royale enlever les plus jeunes femmes de la capitale, la populace avait commencé à montrer de sa colère. Et les sorciers ne pouvaient leur en vouloir. Si Assyrie devait continuer à exister, il fallait changer de roi. Sinon, la révolte qui en résulterait enverrait un message de faiblesse aux nouvelles villes conquises et altérerait grandement la puissance l'empire. Malheureusement, le roi n'avait pour le moment pas été capable de donner de descendance, ou du moins pas à une de ses épouses officielles. Par conséquent, il n'y avait aucun héritier au trône.

Sauf si quelqu'un se l'accaparait par la force, ou qui était suffisamment proche du roi pour y prétendre.

Sharroukin.

« Général, le roi vous demande, déclara le garde. Il vous fait savoir qu'il envisage de lancer une nouvelle offensive pour faire tomber le roi Osée.

— Merci. Je saurai trouver le chemin. »

Sharroukin se leva de son bureau et traversa l'immense palais. Plusieurs ailes étaient sujettes à des chantiers d'agrandissement, pour symboliser la puissance récemment acquise par Assyrie, ce qui rallongea le trajet jusqu'à la chambre du trône. Les gardes à l'entrée reconnurent leur général et le laissèrent entrer. Assis sur son fauteuil majestueux, Salmanazar V attendait tranquillement, jonglant avec des pommes couvertes d'asticots. Ce n'est que lorsque Sharroukin s'agenouilla au pied du trône que le roi fit mine de le remarquer.

« Ah, Sargon, vieux frère ! Te voilà enfin !

— Pardonnez-moi de ce retard, sangû, les travaux m'obligent à pratiquer de longs détours.

— Tu n'as pas à t'excuser, frère. Tu es mon plus loyal général, nous partageons le même sang...

— Sauf votre respect, sar, vous savez aussi bien que moi que nous ne partageons pas le même sang. J'ai été recueilli par votre illustre père...

— Et mis tes dons au service d'Assyrie. Nous avons partagé le même sein, je considère que tu es mon sang.

— Seul votre héritier aura votre sang, rappela Sharroukin.

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