TRY NOT TO LIE

CHAPITRE 1

- Raelen. Et c'est une longue histoire, rien de palpitant.

- Ne t'en fais pas, j'ai tout mon temps. Et c'est Luke, au fait. Luke Benson. »

L'adolescente raconte dans les grandes lignes la raison de sa présence ici.

« - Waouh, s'exclame Luke, enthousiaste. Donc des gens en veulent pour ta vie ? C'est tout sauf ennuyeux. C'est même... trop cool !

- Ça n'a rien de réjouissant non plus, tempère-t-elle

- Désolé, c'est l'habitude avec les films d'action. Ma vie se résume à accompagner mon père à son travail, lui chercher du café, nettoyer, ranger les câbles... Je donnerais tout pour un peu d'action. »

La jeune fille n'en revient pas : qu'y a-t-il de pire que d'être la fille d'un procureur ? Elle a pratiquement grandi entre les tribunaux, les cours d'assise et les galas de charité. Son père la punissait en lui faisant lire le code pénal ; elle a bientôt seize ans, mais n'a fêté son anniversaire que sept fois. Tous ses amis s'éclatent à l'étranger pendant qu'elle est coincée ici.

« - Tu plaisantes, tu dois avoir accès à un tas de trucs ! Des films en avant-première, le festival de Cannes, rencontrer des acteurs, réaliser des montages... Je donnerais tout pour être dans ta peau. »

Luke rit comme si elle avait fait la blague de l'année. Elle aime beaucoup son rire - désinvolte, enfantin. Non seulement il est mignon, mais en plus il est drôle. L'adolescente ne se souvient pas avoir jamais autant ri. Il finit par lui raconter des anecdotes du collège, tellement folles qu'elle le soupçonne d'en inventer quelques unes.

« - Quand j'avais onze ans, j'ai décidé de vendre tous les trophées de mon père aux enchères en ligne. Un type a proposé plusieurs milliers d'euros, tu imagines ? J'étais excité comme une puce. L'acheteur m'a donné rendez-vous dans un parc près de chez moi, et j'ai foncé sans réfléchir... Mais quand je suis arrivé, il n'y avait que mon père, furieux comme il l'a rarement été. C'est depuis ce jour-là que j'ai les oreilles décollées. »

L'adolescente se reconnaît dans cette histoire : exactement le genre de leçon de morale dont son père est capable.

« - Tu dois avoir plein d'amis connus, dit-elle subitement. Tu dois être invité à plein de soirées ?

- Ça a ses avantages, concède-t-il, comme pouvoir entrer dans tous les clubs de la ville. Mais les gens te côtoient uniquement par intérêt, histoire d'avoir quelqu'un à afficher dans leur story Instagram. Je n'ai jamais réussi à me faire de vrais amis. »

En disant cela, il effleure sa main en attrapant le broc, et elle se demande s'il s'agit d'un accident. Elle aurait aimé continuer à parler pendant des heures, mais son portable vibre soudain. Luke soupire en lisant le message.

« - Le devoir m'appelle, dit-il en se levant. Ou plutôt mon père. À la prochaine. »

Elle le regarde s'éloigner, dépitée. Puis elle réalise qu'elle secoue la main comme une idiote alors qu'il est déjà parti.

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Cinq.

Quatre.

Trois.

Deux.

Un.

Raelen sort la tête de l'eau pour inspirer de l'air avant de replonger. Elle atteint le mur du fond, se propulse à l'aide de ses jambes et repart comme une torpille dans la direction opposée. La nageuse émerge de l'eau et stoppe son chronomètre : elle a encore battu son record. Satisfaite, elle pose les lunettes sur son front et se lance un nouveau défi : garder le menton hors de l'eau le plus longtemps possible. Quand ses muscles deviennent trop fatigués, elle fait la planche, se laissant porter par les remous. Elle observe le plafond de verre, cette immense verrière qui recouvre toute la piscine de l'hôtel. Elle a la chance de l'avoir pour elle seule aujourd'hui : entre les mannequins qui font des lives Instagram et les amoureux du plongeoir, ce n'est pas toujours simple.

Il fait nuit lorsqu'elle se décide enfin à sortir de l'eau. Le hall d'entrée est vide. Son entraînement a duré plus longtemps que prévu : elle a été distraite par Luke et ses cheveux soyeux. Elle est trop épuisée pour se changer et redescendre à la cafeteria : le room service lui apportera son repas dans sa chambre.

Elle partage l'ascenseur avec un petit homme en costume ; avec ses cheveux gominés et son air placide, il ressemble à n'importe quel employé de banque. Rien dans son apparence ne peut présager ce qui va se produire. Le personnage descend un étage avant Raelen. Celle-ci remarque que sa mallette fait un bruit étrange à chacun de ses pas, comme une chaîne cliquetant contre du métal. Seulement, ce détail ne l'interpelle pas plus : elle l'a déjà oublié en entrant dans sa suite.

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