𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐗𝐗

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     Le lendemain, je fus réveillé aux aurores. À peine avais-je ouvert les yeux, que je sentis Elizabeth bouger à son tour, lâchant un léger soupir, trahissant son mécontentement contre le jour qui apparaissait déjà. Le silence planait dans la chambre et nous pouvions entendre l'agitation au rez-de-chaussée. Nous décidâmes alors de nous préparer, toujours dans le silence. Il était difficile de le justifier, car de toute évidence, nous n'avions tout simplement rien à dire sur la journée qui allait s'écouler. Les minutes et les heures défilaient, tandis que chacune d'elles représentait un pas de plus vers la nouvelle vie que j'allais mener en tant que marraine. Nous nous rendîmes dans le salon afin de prendre notre petit-déjeuner. Cette nouvelle façon de vivre pour Elizabeth était difficile à assimiler et j'en avais parfaitement conscience, comme moi, elle devait se faire à une nouvelle existence.

Tandis que nous mangeâmes dans un silence, non pas pesant, mais presque réconfortant, comme si notre simple présence suffisait à nous rassurer, un homme entra dans la pièce. Il nous salua d'un signe de la tête et prit immédiatement la parole.

"Mademoiselle Tozzi, vous serez attendue dans votre bureau, dès que vous aurez terminé votre petit-déjeuner, déclara-t-il."

     Avec sourire, je le remerciai de m'avoir prévenue. Visiblement, l'impatience se faisait ressentir. Est-ce que comme moi, il s'agissait du fait tout accomplir afin que ce soit le plus rapidement terminé ? Pour ma part, j'espérais que ce ne soit pas une cérémonie qui s'éternise pour ne plus en finir. Une fois que l'homme eut quitté la pièce, je me tournai vers Elizabeth.

"J'espère que tu accepteras de faire acte de présence. Je serais plus rassurée si tu es là."

     Encore surprise par la perspective que je ne le considère plus comme une simple servante, mais comme une amie, Elizabeth prit un temps pour elle avant de me répondre. Posant ses couverts et prenant tout de même le temps de s'essuyer les coins de la bouche, elle m'adressa enfin un sourire.

"J'ignore toujours ce que vous attendez de moi, Mademoiselle, avoua-t-elle. En revanche, si vous tenez à ce que je sois à vos côtés, je tâcherai d'y rester."

     Ses paroles ne pouvaient pas se montrer plus encourageantes. J'avais d'autres projets pour Elizabeth, mais je ne pouvais me permettre de lui en faire part immédiatement, dans la mesure où finalement, elle changerait d'avis et souhaiterait partir afin de mener une vie plus calme. Cependant, bien que dans quelques heures, je serais marraine de la mafia, je ne pourrais me résoudre à la forcer à rester avec moi. Même s'il s'agissait de la seule amie que je possédais, le plus important était ce qu'elle souhaitait pour elle-même. Alors une fois de plus, je me contentais de lui répondre par un sourire.

Nous étions tous réunis dans mon bureau, ou plutôt le bureau de mon père. C'était encore compliqué pour moi de m'y projeter. J'étais assise, avec tout le monde en face de moi. Au fond, je voyais Elizabeth, qui me souriait à chaque fois que nos regards se croisaient. Les représentants des groupes italiens associés à mon père, avaient pris place sur des chaises et heureusement que la pièce était spacieuse. Emilio se trouvait à ma droite et Federico à ma gauche. J'avais l'impression d'être en compagnie de mes gardes du corps, prêt à bondir sur n'importe qui, qui m'approcherait de trop près. Ainsi, j'étais partagée entre un sentiment d'étouffement et de protection. Accorder sa confiance à des personnes dont on se méfiait plus que tout, nous forçait à surveiller nos arrières. Emilio avait directement pris la parole à peine nous étions-nous assis pour cette cérémonie. Je ne l'écoutais que d'une oreille, car je pensais à mon avenir incertain, qui me terrifiait.

"C'est pour cette raison, que j'ai pris la décision de tous nous réunir aujourd'hui. Pour honorer la mémoire de notre parrain, ami et père Benedetto Tozzi. Et d'une autre part, pour faire de sa fille Giuliana, la nouvelle marraine de la mafia napolitaine. Nous allons montrer à ces Anglais, que nous ne restons pas les bras ballants à attendre de rejoindre nos défunts. Que lorsque quelqu'un touche à notre sang et le fait couler, nous ferons couler le leur."

     Tandis que j'entendais certains hommes approuver les paroles d'Emilio, je sentis la main de Federico se poser sur mon épaule, alors qu'il se tenait toujours à ma gauche. Son regard était également rivé sur moi, je pouvais le sentir, mais je n'avais aucune envie de le regarder. Chacun me promettait une certaine allégeance et une protection qui irait jusqu'à provoquer leur propre disparition. Je ne souhaitais pas que ces hommes disparaissent à leur tour, dans cette guerre qui s'annonçait rude, terrible et meurtrière. Les idées arrivaient, disparaissaient et revenaient à nouveau dans ma tête. Aucune d'elle ne me convenait et j'étais à présent persuadée que la seule solution était de me débarrasser des Peaky Blinders.

Je le ferais pour ma mère, mon père, moi et ce qui serait l'avenir. Ce à quoi je léguerais tout ce que je possède, comme l'a fait mon père en m'ayant pour fille. Discrètement, je déposai ma main à l'endroit où allait grandir l'avenir. Le regard se posant sur chaque homme et finalement sur Elizabeth, je trouverais ma détermination et frapperais au moment venu.


Dans les yeux d'un Shelby || Tome I (en réécriture)Where stories live. Discover now