JOUR 2 - Le début de la partie d'échec

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  • Dédié à Chrsitian Jobin Landry
                                    

Il se précipite vers Louanne, mais elle lève la main pour l'arrêter. Ça ne l'arrête pas du tout. Il veut attraper le téléphone, mais elle passe de l'autre côté de la table.

« Louanne, arrête de niaiser. Tu vas le regretter. Donne-le-moi tout de suite. S'il te plaît. »

Elle déplace le doigt sur l'écran et bientôt, la tonalité d'un appel se fait entendre.

« Non! » dit Marc-Alain, effondré.

Une voix arabe brise le silence. L'homme répète sa phrase puis semble parler à quelqu'un à ses côtés. Il y a une pause puis une autre voix, plus grave cette fois-ci, parle en français avec un fort accent étranger :

« Est-ce Marc-Alain? Bien sûr que c'est toi. Tu ne réponds pas. Tu es curieux et nous sommes aussi curieux que toi. Nous aimerions te connaître. Tu devrais venir nous rencontrer. Tu ne dis rien? »

Louanne coupe la communication. Elle ne rit plus. Ses yeux sont écarquillés de terreur. Cet appel a été la réponse qu'elle cherchait.

« Ils sont là! » s'exclame-t-elle en retombant sur la chaise derrière lui. « Ils existent! »

Marc-Alain se rapproche d'elle et cherche à prendre le téléphone, mais elle le tient toujours entre ses doigts glacés.

« Louanne, est-ce que tu sais ce que tu viens de faire? Tu viens de leur donner l'adresse de tes voisins. Je suis certain que ce téléphone est équipé d'une application silencieuse et qu'en l'allumant tu as envoyé le signal qu'ils s'attendaient à entendre depuis hier. »

« Je sais. C'est exactement ça que je voulais. »

« Tu, quoi? » crie-t-il, maintenant rendu impatient par la témérité inconsciente de cette fille. « Louanne, est-ce que tu as une seule petite idée de ce que tout ça signifie? Ces gens-là n'entendent pas à rire et je ne pense pas qu'ils ont une once de désir de passer à la table de négociation pour signer un accord de paix avec toi. Donne-moi le cell. On appelle la police tout de suite. »

« On va partir. »

Il la regarde comme s'il avait devant lui une schizophrène. Elle n'a plus toute sa tête, c'est certain.

« Partir? Où penses-tu pouvoir te cacher? Dans une grotte en Afghanistan? Ça serait ton genre, ça, voisin du grand chef des terroristes. Comme ça tu pourras l'inviter à prendre une tisane tout en discutant de politique étrangère. »

« On va les attirer dans un piège... »

« Non, mais, tu es sur quelle planète, là? Tu es en plein délire, ma chère. »

Il s'approche d'elle et tend la main : « Donne-moi le cellulaire, je ne te le demanderai pas une autre fois. »

Elle ne bouge pas. Il pose sa main gauche sur son poignet et de l'autre, tire sur l'appareil. Elle tente de se défendre, mais elle cède en grimaçant.

« Tu es trop con. Va chier! Et bonne chance avec tes amis, les policiers, si les terroristes ne t'attrapent pas avant. »

Elle le pousse et sort en claquant la porte. Marc-Alain se sent vidé de toute son énergie. Il aurait aimé lui faire entendre raison, mais son esprit est maintenant tout aussi confus que le sien. Il se demande pourquoi il hésite autant après toute cette discussion qui n'en finissait plus de tourner en rond.

Il déplace son doigt sur l'écran pour le réactiver et appuie sur l'icône du téléphone. Il touche ensuite l'icône du pavé numérique. Il marche vers la porte d'entrée et remarque qu'elle est toujours là, assise sur les marches du balcon. Elle pleure. Il soupire.

Le déclencheurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant