You Only Live Once - Tentaculaire

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Il voulait

Rire

Vivre

Être libre.

Laisser le vent ébouriffer ses cheveux trop longtemps domptés.

Crier, les pieds sur la falaise, si près du vide qu'il pourrait se sentir flotter, et s'écouter disparaître dans le tumulte des éléments.

Jalouser les mouettes qui luttent contre le mistral.

Il voulait

Attraper son planeur dès que l'occasion se présentait.

Courir, plonger dans le vide, voler.

Tout oublier, le temps d'un instant, le temps d'une vie.

Il voulait

Surtout

Rire

Boire

Fumer

Vivre

Être libre.

Laisser l'insouciance de la jeunesse habiter chacun de ses pores, chaque cellule de son corps.

Y.O.L.O, répétaient les anglais.

Carpe Diem, répondait John Keating. Seize the day.

On ne vit qu'une fois, s'accordaient-ils tous.

Tous ces mots tentateurs qu'Amédé avait entendu sans trop les comprendre.

Jusqu'au déclic.

Élève modèle, jamais un écart, obéissant, respectueux des règles, du couvre-feu, de l'autorité, il croyait vivre sa meilleure vie.

Il méprisait les « rebelles ».

Jusqu'au déclic.

Au jour où.

Il se baignait, comme à son habitude, et une crampe malvenue avait failli le tuer.

Il avait alors vu sa vie défiler devant ses yeux.

Comme un film.

Pas très bien réalisé.

Sa caméra s'arrêtait sur des détails de sa vie.

Les éclairait d'un jour nouveau.

Il n'avait ni copine ni amis, ne connaissait pas le goût de l'interdit ni celui de l'alcool, ne s'autorisait rien, ne se laissait pas vivre.

Deux bras puissants l'avaient sorti de l'eau, ramené à la vie.

Déclic.

Il aurait pu mourir, sans avoir jamais réellement vécu.

Trois années avaient passé.

Douze saisons depuis le déclic.

Depuis que son existence avait basculé.

Y.O.L.O, répétaient les anglais.

Carpe Diem, répondait John Keating. Seize the day.

On ne vit qu'une fois, s'accordaient-ils tous.

Désormais, ces mots tentateurs, Amédé les comprenait.

Les glorifiait.

S'en était fait une règle de vie.

Plus jamais il ne laisserait les entraves du quotidien enfermer sa liberté.

Lorsque la mort viendrait, pour de bon, le happer, il ne se laisserait pas regretter une seconde de son existence.

Les vingt-six notes  -  Concours d'écritureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant